Texte intégral
Q - La résidence privée du président guinéen, Alpha Condé, a été attaquée le 19 juillet. Est-ce le signe dune fragilité de ce nouveau pouvoir ?
R - Nous condamnons fermement cette attaque. Alpha Condé a été démocratiquement élu et doit être respecté. Des militaires ont été arrêtés... On peut imaginer que la nécessaire réorganisation de larmée suscite des mécontentements.
Q - La «méthode Condé» nest-elle pas en cause ? Certains parlent de pouvoir solitaire...
R - Ce sont en effet des commentaires que lon entend. Si certains considèrent que les méthodes du président guinéen sont un peu vives, et si tel est le cas, cest à lui de prendre les mesures qui simposent. Alpha Condé doit tenir ses engagements : la démocratie, cest le rassemblement du plus grand nombre. Même sil ny a toujours quun seul président de la République, et que chacun exerce le pouvoir selon son tempérament.
Q - Concernant le port de Conakry, dont la concession a été retirée à Necotrans au profit du groupe Bolloré, la méthode na-t-elle pas été expéditive ?
R - Sur le plan pratique, elle a été rapide. Est-elle légale ? La justice tranchera.
Q - Paris na pas de préférence ?
R - Là comme ailleurs, Paris na pas de préférence et nest pas caché derrière le rideau.
Q - En Côte dIvoire, Alassane Ouattara, vainqueur dans les urnes, a été installé au pouvoir par les armes et avec le soutien français. Nest-ce pas un handicap de passer pour lhomme de la France ?
R - Le président Ouattara a été installé au pouvoir par la majorité des électeurs ivoiriens. Il ne faut pas inverser la situation : cest Laurent Gbagbo qui na pas voulu reconnaître les résultats de la présidentielle. La communauté internationale a fait respecter le verdict des urnes.
Q - Avec un sérieux coup de main de larmée française...
R - Licorne avait une double mission : protéger les 14.000 ressortissants français et apporter son concours à des actions engagées par la communauté internationale à la demande expresse du Secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon.
Q - Le président Ouattara nest-il pas redevable ?
R - Non. Il est totalement libre. Le respect du droit nappelle aucun retour.
Q - Pourtant, lors de sa visite, les 14 et 15 juillet à Abidjan, le Premier ministre, François Fillon, était accompagné par beaucoup de patrons...
R - Je ne vois pas pourquoi il ny en aurait pas. À loccasion de son investiture à Yamoussoukro, le président ivoirien a demandé à Nicolas Sarkozy que les entreprises françaises puissent reprendre rapidement leurs activités et que dautres participent à la reconstruction du pays.
Q - En versant à Abidjan 350 millions deuros daide budgétaire directe pour notamment payer les fonctionnaires, la France ne revient-elle pas à des pratiques des années 1960-1970 ?
R - Nous souhaitons aider de manière spécifique les pays qui accèdent à la démocratie : la Côte dIvoire, le Niger et la Guinée. Cest clair, net et précis. Cest une prime à la démocratie.
Q - Où en sont les discussions sur laccord de défense entre la France et la Côte dIvoire ?
R - Lors de sa visite à Abidjan, en juin dernier, le ministre français de la Défense, Gérard Longuet, a remis aux autorités ivoiriennes les documents de travail servant de base à la discussion. Nous attendons quAbidjan fasse connaître sa réponse.
Q - La Côte dIvoire souhaite le maintien de la clause prévoyant une riposte graduée de la France en cas dagression extérieure, Paris nen veut plus...
R - Laccord sera très proche de ce que souhaite la République française. Les temps ont changé.
Q - La révision éventuelle de larticle 37 de la Constitution burkinabé pour permettre à Blaise Compaoré de briguer un nouveau mandat en 2015 suscite une vive controverse. Quelle est votre opinion?
R - Si nous avons un message à adresser, tout en sachant que les autorités du Burkina sont libres, cest de dire que les périodes de tension ne sont pas les plus propices pour procéder à des changements de Constitution.
Q - Blaise Compaoré est au pouvoir depuis 1987, soit 23 ans. Cest suffisant ?
R - Encore une fois, les temps ont changé. Lévolution du monde a un impact sur la durée des mandats, quels quils soient. En France, par exemple, on a bien limité à deux le nombre de mandats présidentiels, soit 10 ans.
Q - Il y a plus dun mois, le chef de lÉtat sénégalais a voulu instaurer un ticket président-vice-président, qui lui aurait permis de lemporter avec 25 % des voix au premier tour de la prochaine élection. Il a dû y renoncer. Cétait une erreur ?
R - Abdoulaye Wade a dû considérer que le moment était inopportun, puisque le projet a été retiré. Il y a une certaine fébrilité au Sénégal avant la présidentielle. Tous ceux qui approchent le président Wade essaient de discuter avec lui pour ouvrir le jeu.
Q - Abdoulaye Wade aura 86 ans en 2012. Peut-il être candidat pour un 3e mandat?
R - Cest aux Sénégalais de répondre. Je souligne que le président Wade a été élu pour la première fois en 2000 ; ce nest donc pas une question de longévité au pouvoir. Mais au Sénégal comme ailleurs, la France appelle au respect des règles. Une démocratie, ce sont des élections libres, crédibles et transparentes.
Q - Lors des violentes manifestations contre les délestages électriques à Dakar, le 27 juin, est-il vrai que Karim Wade a appelé à laide Robert Bourgi, conseiller Afrique officieux de Nicolas Sarkozy, pour obtenir une intervention de larmée française ?
R - Je nen sais rien. Je nétais pas dans le bureau de Karim Wade, ni dans celui de Robert Bourgi. Mais cela me paraît surréaliste et, par définition, voué à léchec. Vous imaginez, en 2011, la France mener une opération de police dans les rues de Dakar... Si cest vrai, Karim Wade sest trompé dépoque.
Q - Si cette hypothèse suscite autant de commentaires, cest bien parce que Robert Bourgi occupe une place particulière dans la «galaxie françafricaine»...
R - Je pense que lon accorde aux propos de maître Bourgi beaucoup de résonance... En ce qui me concerne, je ne lai vu quune seule fois. Il est venu me rendre visite juste après ma nomination, en novembre 2010.
Q - Au Cameroun, on se dirige vers une nouvelle candidature de Paul Biya à lélection présidentielle prévue en octobre. Il est au pouvoir depuis 1982...
R - Ce sont les électeurs qui choisissent. La France na pas de candidat au Cameroun.
Q - Il va être difficile de tenir ce même discours si Paul Biya effectue un voyage officiel à Paris. Cette visite est-elle prévue ?
R - Le président Biya aura probablement loccasion de rencontrer prochainement Nicolas Sarkozy, à Paris. Mais pensez vous que le fait daller serrer la main du président français puisse être perçu comme un soutien direct et apporter des voix ? Je ny crois pas. Ce temps là est fini.
Q - Lors de sa tournée africaine, outre la Côte dIvoire et le Ghana, le Premier ministre, François Fillon, est passé à Libreville le 16 juillet. Pourquoi cette étape gabonaise ?
R - La France atteint 35 % de part de marché au Gabon. Nous y avons des intérêts économiques à défendre. Il ne faut pas aller chercher plus loin.
Q - En RD Congo, les élections présidentielles et législatives sont toujours prévues le 28 novembre. Pensez-vous que ce calendrier puisse être tenu et dans de bonnes conditions ?
R - Nous navons pas de signaux nous laissant supposer quil y aura un report. Et si lUnion européenne, avec la France, a accepté de participer au financement du processus, cest pour avoir toutes les garanties de transparence.
Q - Le ministre des Affaires étrangères, Alain Juppé, devait se rendre à Kinshasa, début juillet. Finalement, cette étape a été annulée. Pourquoi ?
R - Pour une question dagenda. Jajoute que si on va à Kinshasa avant la présidentielle, on va nous accuser dingérence.
Q - Le 19 juillet, vous avez reçu la ministre rwandaise des Affaires étrangères, Louise Mushikiwabo, pour préparer la prochaine visite du chef de lÉtat rwandais en septembre. Nétait-ce pas à Alain Juppé de le faire ?
R - Je crois que cest à cause de son agenda, extrêmement chargé ces temps-ci, que le ministre dÉtat na pas pu la recevoir. Il ne sagit absolument pas dune volonté explicite de sa part de ne pas la rencontrer.
Q - Les deux pays peuvent-ils normaliser leurs relations avec Alain Juppé aux Affaires étrangères ?
R - Sans méconnaître le passé, il faut naturellement trouver les moyens et les mots nécessaires pour apaiser les blessures et aller au-delà des différends, des deux cotés. Alain Juppé, comme il la indiqué, inscrit son action dans la droite ligne de celle voulue par le président Sarkozy dans le cadre de sa visite à Kigali, en février 2010.
Q - Lintervention militaire en Libye a provoqué une dissémination des armes dans le Sahel, notamment au profit dAl Qaïda au Maghreb islamique. Selon certaines informations, le mouvement islamiste disposerait même de missiles sol-air. Confirmez-vous ?
R - Jai eu les mêmes informations que vous, mais nous navons pas encore de preuves tangibles.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 3 août 2011
R - Nous condamnons fermement cette attaque. Alpha Condé a été démocratiquement élu et doit être respecté. Des militaires ont été arrêtés... On peut imaginer que la nécessaire réorganisation de larmée suscite des mécontentements.
Q - La «méthode Condé» nest-elle pas en cause ? Certains parlent de pouvoir solitaire...
R - Ce sont en effet des commentaires que lon entend. Si certains considèrent que les méthodes du président guinéen sont un peu vives, et si tel est le cas, cest à lui de prendre les mesures qui simposent. Alpha Condé doit tenir ses engagements : la démocratie, cest le rassemblement du plus grand nombre. Même sil ny a toujours quun seul président de la République, et que chacun exerce le pouvoir selon son tempérament.
Q - Concernant le port de Conakry, dont la concession a été retirée à Necotrans au profit du groupe Bolloré, la méthode na-t-elle pas été expéditive ?
R - Sur le plan pratique, elle a été rapide. Est-elle légale ? La justice tranchera.
Q - Paris na pas de préférence ?
R - Là comme ailleurs, Paris na pas de préférence et nest pas caché derrière le rideau.
Q - En Côte dIvoire, Alassane Ouattara, vainqueur dans les urnes, a été installé au pouvoir par les armes et avec le soutien français. Nest-ce pas un handicap de passer pour lhomme de la France ?
R - Le président Ouattara a été installé au pouvoir par la majorité des électeurs ivoiriens. Il ne faut pas inverser la situation : cest Laurent Gbagbo qui na pas voulu reconnaître les résultats de la présidentielle. La communauté internationale a fait respecter le verdict des urnes.
Q - Avec un sérieux coup de main de larmée française...
R - Licorne avait une double mission : protéger les 14.000 ressortissants français et apporter son concours à des actions engagées par la communauté internationale à la demande expresse du Secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon.
Q - Le président Ouattara nest-il pas redevable ?
R - Non. Il est totalement libre. Le respect du droit nappelle aucun retour.
Q - Pourtant, lors de sa visite, les 14 et 15 juillet à Abidjan, le Premier ministre, François Fillon, était accompagné par beaucoup de patrons...
R - Je ne vois pas pourquoi il ny en aurait pas. À loccasion de son investiture à Yamoussoukro, le président ivoirien a demandé à Nicolas Sarkozy que les entreprises françaises puissent reprendre rapidement leurs activités et que dautres participent à la reconstruction du pays.
Q - En versant à Abidjan 350 millions deuros daide budgétaire directe pour notamment payer les fonctionnaires, la France ne revient-elle pas à des pratiques des années 1960-1970 ?
R - Nous souhaitons aider de manière spécifique les pays qui accèdent à la démocratie : la Côte dIvoire, le Niger et la Guinée. Cest clair, net et précis. Cest une prime à la démocratie.
Q - Où en sont les discussions sur laccord de défense entre la France et la Côte dIvoire ?
R - Lors de sa visite à Abidjan, en juin dernier, le ministre français de la Défense, Gérard Longuet, a remis aux autorités ivoiriennes les documents de travail servant de base à la discussion. Nous attendons quAbidjan fasse connaître sa réponse.
Q - La Côte dIvoire souhaite le maintien de la clause prévoyant une riposte graduée de la France en cas dagression extérieure, Paris nen veut plus...
R - Laccord sera très proche de ce que souhaite la République française. Les temps ont changé.
Q - La révision éventuelle de larticle 37 de la Constitution burkinabé pour permettre à Blaise Compaoré de briguer un nouveau mandat en 2015 suscite une vive controverse. Quelle est votre opinion?
R - Si nous avons un message à adresser, tout en sachant que les autorités du Burkina sont libres, cest de dire que les périodes de tension ne sont pas les plus propices pour procéder à des changements de Constitution.
Q - Blaise Compaoré est au pouvoir depuis 1987, soit 23 ans. Cest suffisant ?
R - Encore une fois, les temps ont changé. Lévolution du monde a un impact sur la durée des mandats, quels quils soient. En France, par exemple, on a bien limité à deux le nombre de mandats présidentiels, soit 10 ans.
Q - Il y a plus dun mois, le chef de lÉtat sénégalais a voulu instaurer un ticket président-vice-président, qui lui aurait permis de lemporter avec 25 % des voix au premier tour de la prochaine élection. Il a dû y renoncer. Cétait une erreur ?
R - Abdoulaye Wade a dû considérer que le moment était inopportun, puisque le projet a été retiré. Il y a une certaine fébrilité au Sénégal avant la présidentielle. Tous ceux qui approchent le président Wade essaient de discuter avec lui pour ouvrir le jeu.
Q - Abdoulaye Wade aura 86 ans en 2012. Peut-il être candidat pour un 3e mandat?
R - Cest aux Sénégalais de répondre. Je souligne que le président Wade a été élu pour la première fois en 2000 ; ce nest donc pas une question de longévité au pouvoir. Mais au Sénégal comme ailleurs, la France appelle au respect des règles. Une démocratie, ce sont des élections libres, crédibles et transparentes.
Q - Lors des violentes manifestations contre les délestages électriques à Dakar, le 27 juin, est-il vrai que Karim Wade a appelé à laide Robert Bourgi, conseiller Afrique officieux de Nicolas Sarkozy, pour obtenir une intervention de larmée française ?
R - Je nen sais rien. Je nétais pas dans le bureau de Karim Wade, ni dans celui de Robert Bourgi. Mais cela me paraît surréaliste et, par définition, voué à léchec. Vous imaginez, en 2011, la France mener une opération de police dans les rues de Dakar... Si cest vrai, Karim Wade sest trompé dépoque.
Q - Si cette hypothèse suscite autant de commentaires, cest bien parce que Robert Bourgi occupe une place particulière dans la «galaxie françafricaine»...
R - Je pense que lon accorde aux propos de maître Bourgi beaucoup de résonance... En ce qui me concerne, je ne lai vu quune seule fois. Il est venu me rendre visite juste après ma nomination, en novembre 2010.
Q - Au Cameroun, on se dirige vers une nouvelle candidature de Paul Biya à lélection présidentielle prévue en octobre. Il est au pouvoir depuis 1982...
R - Ce sont les électeurs qui choisissent. La France na pas de candidat au Cameroun.
Q - Il va être difficile de tenir ce même discours si Paul Biya effectue un voyage officiel à Paris. Cette visite est-elle prévue ?
R - Le président Biya aura probablement loccasion de rencontrer prochainement Nicolas Sarkozy, à Paris. Mais pensez vous que le fait daller serrer la main du président français puisse être perçu comme un soutien direct et apporter des voix ? Je ny crois pas. Ce temps là est fini.
Q - Lors de sa tournée africaine, outre la Côte dIvoire et le Ghana, le Premier ministre, François Fillon, est passé à Libreville le 16 juillet. Pourquoi cette étape gabonaise ?
R - La France atteint 35 % de part de marché au Gabon. Nous y avons des intérêts économiques à défendre. Il ne faut pas aller chercher plus loin.
Q - En RD Congo, les élections présidentielles et législatives sont toujours prévues le 28 novembre. Pensez-vous que ce calendrier puisse être tenu et dans de bonnes conditions ?
R - Nous navons pas de signaux nous laissant supposer quil y aura un report. Et si lUnion européenne, avec la France, a accepté de participer au financement du processus, cest pour avoir toutes les garanties de transparence.
Q - Le ministre des Affaires étrangères, Alain Juppé, devait se rendre à Kinshasa, début juillet. Finalement, cette étape a été annulée. Pourquoi ?
R - Pour une question dagenda. Jajoute que si on va à Kinshasa avant la présidentielle, on va nous accuser dingérence.
Q - Le 19 juillet, vous avez reçu la ministre rwandaise des Affaires étrangères, Louise Mushikiwabo, pour préparer la prochaine visite du chef de lÉtat rwandais en septembre. Nétait-ce pas à Alain Juppé de le faire ?
R - Je crois que cest à cause de son agenda, extrêmement chargé ces temps-ci, que le ministre dÉtat na pas pu la recevoir. Il ne sagit absolument pas dune volonté explicite de sa part de ne pas la rencontrer.
Q - Les deux pays peuvent-ils normaliser leurs relations avec Alain Juppé aux Affaires étrangères ?
R - Sans méconnaître le passé, il faut naturellement trouver les moyens et les mots nécessaires pour apaiser les blessures et aller au-delà des différends, des deux cotés. Alain Juppé, comme il la indiqué, inscrit son action dans la droite ligne de celle voulue par le président Sarkozy dans le cadre de sa visite à Kigali, en février 2010.
Q - Lintervention militaire en Libye a provoqué une dissémination des armes dans le Sahel, notamment au profit dAl Qaïda au Maghreb islamique. Selon certaines informations, le mouvement islamiste disposerait même de missiles sol-air. Confirmez-vous ?
R - Jai eu les mêmes informations que vous, mais nous navons pas encore de preuves tangibles.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 3 août 2011