Texte intégral
Madame la Présidente,
Monsieur le Président de la Commission des Affaires européennes,
Monsieur le Rapporteur,
Mesdames, Messieurs les Députés,
Il est difficile dêtre en désaccord avec lintitulé de la proposition de résolution. Qui ne souhaite pas relancer léconomie européenne ? Qui ne souhaite pas voir se poursuivre la démocratisation du fonctionnement des institutions européennes ?
Je naurai donc, dans ce début dharmonique, que quelques bémols à apporter. Dabord, cette Europe démocratique, pleinement investie dans la stimulation de la croissance, cest celle que nous construisons. ( )
Enfin, il faut que les propositions aient une cohérence densemble, que les nécessaires équilibres entre la Commission, lintergouvernemental, le Conseil et le Parlement soient respectés.
Je vous remercie, Monsieur Caresche, de conforter la position du gouvernement par vos propositions. La proposition de résolution affirme en effet que «la croissance et lemploi doivent être au cur de nos priorités». Or cest précisément ce qui a inspiré les mesures que nous avons annoncées le 30 janvier. Je me permets de rappeler que, parallèlement aux traités sur le Mécanisme européen de stabilité - MES - et sur la stabilité, la coordination et la gouvernance - SCG -, une déclaration, qui, loin dêtre incantatoire, était extrêmement réaliste, faisait des propositions concrètes. Ainsi, les fonds structurels non utilisés, qui représentent 82 milliards deuros, seront réaffectés à des projets en faveur de lemploi, notamment lemploi des jeunes, en utilisant le Fonds social européen à hauteur de 22 milliards ; nous améliorerons le financement des petites et moyennes entreprises, en allégeant leurs obligations comptables et en encourageant le développement du capital-risque. Je ne doute pas que chacun, dans lhémicycle, partage ces deux objectifs.
Vous proposez dautre part de relancer linvestissement en mettant en place une politique budgétaire et monétaire favorable à la croissance, un budget européen réformé, de nouvelles politiques communes. Cela valide totalement laction du gouvernement et celle de la France au sein de lEurope et les décisions qui y sont prises.
Oui, il faut créer une taxe sur les transactions financières. Vous avez pu constater que cette décision, qui, à linitiative de la France, était à lordre du jour du G20, continue à faire son chemin, à tel point que la France a dit que, si elle ne voulait pas y aller seule, elle était prête à y aller la première et à tout faire pour que la taxe soit efficace.
Oui, il faut soutenir linvestissement. La Commission travaille précisément pour encourager le développement du capital-risque et la mise en place des project bonds, qui permettront de financer des projets concrets et favoriseront le développement économique des régions, en particulier des régions frontalières.
Oui, il faut réformer le budget européen pour lui donner plus defficacité. Cest la position que défend la France au Conseil des Affaires générales européen dans les négociations sur le prochain cadre financier pluriannuel 2014-2020 : nous pensons que nous pouvons dépenser mieux et dépenser moins. Dans ce contexte, nous demandons une évaluation de toutes les politiques budgétaires et des fonds structurels qui sont attribués.
La proposition de résolution veut également «donner plus de poids au Parlement européen et aux Parlements nationaux». À linitiative de la France, et grâce à laction essentielle de Pierre Lequiller, le traité SCG permet au président du Parlement européen de participer à certains sommets de la zone euro. Sur la base dune initiative française, il met également en place une conférence parlementaire, qui réunira les représentants des commissions concernées du Parlement européen et des Parlements nationaux afin de débattre des politiques budgétaires et des projets européens.
Par ailleurs, vous réclamez une plus grande démocratisation du processus décisionnel européen, dont vous critiquez la lenteur. Est-il vraiment illégitime que des chefs dÉtat et de gouvernement, élus démocratiquement par les différents peuples, puissent prendre certaines décisions lorsque lurgence le réclame ? Souvent, la lenteur que nous avons constatée sexpliquait par les délais de la validation, par lensemble des Parlements, des décisions qui avaient été prises. Quon songe à ce qui sest passé pour lextension du Fonds européen de stabilité financière, qui a été demandée par la France, acceptée par nos amis allemands et lensemble des pays européens, et qui a dû être validée ensuite par les vingt-sept Parlements nationaux.
( ) Si la France et lAllemagne ne prenaient pas linitiative, qui le ferait ? Avez-vous vu, pendant la crise, une proposition qui émane de la Commission et qui soit susceptible dentraîner ladhésion de lensemble des pays européens ? Heureusement quil y a une forte entente franco-allemande pour faire avancer ces projets.
Certes, cest un jeu de demander qui, de la France ou de lAllemagne, a gagné. Si un gouvernement économique européen se constitue, si le Fonds européen de stabilité financière sest étendu, si le Mécanisme européen de stabilité a permis de mettre en uvre une solidarité envers lensemble des peuples, ne le doit-on pas à linitiative de la France ? Ne lui doit-on pas aussi le fait que la Banque centrale européenne, agissant en toute indépendance, ait fait en sorte dapporter 200 milliards deuros sur les dettes souveraines et des liquidités à hauteur de 500 milliards deuros ?
Lorsque je vais en Allemagne, les journalistes me demandent volontiers pourquoi la chancelière cède toujours devant le président de la République française. Dès que je reviens en France, on me pose la question inverse : pourquoi la chancelière allemande impose-t-elle toujours ses décisions au président de la République ? La méthode communautaire, cest le compromis. Vingt-sept États sont autour de la table, dix-sept dans la zone euro. Ce nest pas céder que de faire un pas vers lautre, et ce nest pas céder que de construire lEurope ensemble.
Vous avez évoqué les euro-obligations. Vous savez très bien quil ne serait pas acceptable, aujourdhui, vis-à-vis de lopinion publique allemande et française, que les dettes soient mutualisées. Allez expliquer aux Français que la dette grecque doit être mutualisée, sans que la Grèce ne consente aucun effort particulier. Allez expliquer que les 130 milliards qui ont été donnés par lEurope, les 100 milliards de dettes privées qui ont été effacées doivent être totalement mutualisés. Les Français, jen suis sûr, comprennent parfaitement que cette mutualisation de la dette passe dabord par une rigueur budgétaire acceptée par tous.
Je naccepte pas lidée que la Grèce soit sous tutelle, car on ne met pas les peuples sous tutelle. Je naccepte pas davantage que lon dise que lEurope punit la Grèce. LEurope aide la Grèce. À qui fera-t-on croire que, en donnant 230 milliards deuros à un pays en difficulté, on entend le punir ? Si le peuple grec se réforme, ce nest pas contre la rigueur présente, mais contre le laxisme passé.
( )
Cette proposition de résolution, enfin, ne me paraît pas avoir la cohérence nécessaire. Il faut, cest vrai, de la discipline et de la solidarité. Mais on a déjà vu la solidarité sans la discipline : cela sappelait laide à la Grèce. Depuis dix ans, la Grèce a reçu 240 milliards deuros. Si ces fonds avaient été utilisés pour la croissance et lemploi, en particulier pour la formation de la jeunesse, croyez-vous que la Grèce serait dans létat où elle se trouve aujourdhui ? La rigueur budgétaire naurait-elle pas sauvé ce pays, naurait-elle pas évité au peuple grec la situation difficile quil subit ? Oui, il faut la croissance et lemploi, mais soutenus par ces deux piliers que sont la solidarité envers les peuples et la discipline budgétaire.
Enfin, au détour de cette proposition de résolution, vous proposez de séparer activités de dépôt et activités dinvestissement des banques. Je rappellerai à ce propos que Northern Rock, la banque britannique qui était en faillite, était une banque de dépôt, et que Lehman Brothers, qui était en faillite de lautre côté de lAtlantique, était une banque dinvestissement. Une banque nest donc pas protégée de la faillite et des difficultés parce quelle ne soccupe que de dépôts.
En réalité, en dehors de la confortation de laction du gouvernement et des actions qui sont menées au niveau européen, rien dans cette proposition ne me paraît aller dans le sens de ce qui est souhaitable. Nous voulons plus dEurope, nous voulons mieux dEurope. Nous voulons une Europe plus intégrée, dans laquelle il y ait un contrôle démocratique plus fort pour que lEurope populaire ne cède pas devant des nations populistes. Les traités sur le MES et sur le SCG sont équilibrés, ils permettent de reprendre pied au niveau économique mondial et de faire en sorte que la solidarité sexerce en même temps que la discipline.
(Interventions des Parlementaires)
( )
(LAssemblée ayant adopté les conclusions de rejet de la commission, la proposition de résolution est rejetée. Il ny aura donc pas lieu de procéder au vote solennel prévu par la Conférence des présidents).
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 21 février 2012
Monsieur le Président de la Commission des Affaires européennes,
Monsieur le Rapporteur,
Mesdames, Messieurs les Députés,
Il est difficile dêtre en désaccord avec lintitulé de la proposition de résolution. Qui ne souhaite pas relancer léconomie européenne ? Qui ne souhaite pas voir se poursuivre la démocratisation du fonctionnement des institutions européennes ?
Je naurai donc, dans ce début dharmonique, que quelques bémols à apporter. Dabord, cette Europe démocratique, pleinement investie dans la stimulation de la croissance, cest celle que nous construisons. ( )
Enfin, il faut que les propositions aient une cohérence densemble, que les nécessaires équilibres entre la Commission, lintergouvernemental, le Conseil et le Parlement soient respectés.
Je vous remercie, Monsieur Caresche, de conforter la position du gouvernement par vos propositions. La proposition de résolution affirme en effet que «la croissance et lemploi doivent être au cur de nos priorités». Or cest précisément ce qui a inspiré les mesures que nous avons annoncées le 30 janvier. Je me permets de rappeler que, parallèlement aux traités sur le Mécanisme européen de stabilité - MES - et sur la stabilité, la coordination et la gouvernance - SCG -, une déclaration, qui, loin dêtre incantatoire, était extrêmement réaliste, faisait des propositions concrètes. Ainsi, les fonds structurels non utilisés, qui représentent 82 milliards deuros, seront réaffectés à des projets en faveur de lemploi, notamment lemploi des jeunes, en utilisant le Fonds social européen à hauteur de 22 milliards ; nous améliorerons le financement des petites et moyennes entreprises, en allégeant leurs obligations comptables et en encourageant le développement du capital-risque. Je ne doute pas que chacun, dans lhémicycle, partage ces deux objectifs.
Vous proposez dautre part de relancer linvestissement en mettant en place une politique budgétaire et monétaire favorable à la croissance, un budget européen réformé, de nouvelles politiques communes. Cela valide totalement laction du gouvernement et celle de la France au sein de lEurope et les décisions qui y sont prises.
Oui, il faut créer une taxe sur les transactions financières. Vous avez pu constater que cette décision, qui, à linitiative de la France, était à lordre du jour du G20, continue à faire son chemin, à tel point que la France a dit que, si elle ne voulait pas y aller seule, elle était prête à y aller la première et à tout faire pour que la taxe soit efficace.
Oui, il faut soutenir linvestissement. La Commission travaille précisément pour encourager le développement du capital-risque et la mise en place des project bonds, qui permettront de financer des projets concrets et favoriseront le développement économique des régions, en particulier des régions frontalières.
Oui, il faut réformer le budget européen pour lui donner plus defficacité. Cest la position que défend la France au Conseil des Affaires générales européen dans les négociations sur le prochain cadre financier pluriannuel 2014-2020 : nous pensons que nous pouvons dépenser mieux et dépenser moins. Dans ce contexte, nous demandons une évaluation de toutes les politiques budgétaires et des fonds structurels qui sont attribués.
La proposition de résolution veut également «donner plus de poids au Parlement européen et aux Parlements nationaux». À linitiative de la France, et grâce à laction essentielle de Pierre Lequiller, le traité SCG permet au président du Parlement européen de participer à certains sommets de la zone euro. Sur la base dune initiative française, il met également en place une conférence parlementaire, qui réunira les représentants des commissions concernées du Parlement européen et des Parlements nationaux afin de débattre des politiques budgétaires et des projets européens.
Par ailleurs, vous réclamez une plus grande démocratisation du processus décisionnel européen, dont vous critiquez la lenteur. Est-il vraiment illégitime que des chefs dÉtat et de gouvernement, élus démocratiquement par les différents peuples, puissent prendre certaines décisions lorsque lurgence le réclame ? Souvent, la lenteur que nous avons constatée sexpliquait par les délais de la validation, par lensemble des Parlements, des décisions qui avaient été prises. Quon songe à ce qui sest passé pour lextension du Fonds européen de stabilité financière, qui a été demandée par la France, acceptée par nos amis allemands et lensemble des pays européens, et qui a dû être validée ensuite par les vingt-sept Parlements nationaux.
( ) Si la France et lAllemagne ne prenaient pas linitiative, qui le ferait ? Avez-vous vu, pendant la crise, une proposition qui émane de la Commission et qui soit susceptible dentraîner ladhésion de lensemble des pays européens ? Heureusement quil y a une forte entente franco-allemande pour faire avancer ces projets.
Certes, cest un jeu de demander qui, de la France ou de lAllemagne, a gagné. Si un gouvernement économique européen se constitue, si le Fonds européen de stabilité financière sest étendu, si le Mécanisme européen de stabilité a permis de mettre en uvre une solidarité envers lensemble des peuples, ne le doit-on pas à linitiative de la France ? Ne lui doit-on pas aussi le fait que la Banque centrale européenne, agissant en toute indépendance, ait fait en sorte dapporter 200 milliards deuros sur les dettes souveraines et des liquidités à hauteur de 500 milliards deuros ?
Lorsque je vais en Allemagne, les journalistes me demandent volontiers pourquoi la chancelière cède toujours devant le président de la République française. Dès que je reviens en France, on me pose la question inverse : pourquoi la chancelière allemande impose-t-elle toujours ses décisions au président de la République ? La méthode communautaire, cest le compromis. Vingt-sept États sont autour de la table, dix-sept dans la zone euro. Ce nest pas céder que de faire un pas vers lautre, et ce nest pas céder que de construire lEurope ensemble.
Vous avez évoqué les euro-obligations. Vous savez très bien quil ne serait pas acceptable, aujourdhui, vis-à-vis de lopinion publique allemande et française, que les dettes soient mutualisées. Allez expliquer aux Français que la dette grecque doit être mutualisée, sans que la Grèce ne consente aucun effort particulier. Allez expliquer que les 130 milliards qui ont été donnés par lEurope, les 100 milliards de dettes privées qui ont été effacées doivent être totalement mutualisés. Les Français, jen suis sûr, comprennent parfaitement que cette mutualisation de la dette passe dabord par une rigueur budgétaire acceptée par tous.
Je naccepte pas lidée que la Grèce soit sous tutelle, car on ne met pas les peuples sous tutelle. Je naccepte pas davantage que lon dise que lEurope punit la Grèce. LEurope aide la Grèce. À qui fera-t-on croire que, en donnant 230 milliards deuros à un pays en difficulté, on entend le punir ? Si le peuple grec se réforme, ce nest pas contre la rigueur présente, mais contre le laxisme passé.
( )
Cette proposition de résolution, enfin, ne me paraît pas avoir la cohérence nécessaire. Il faut, cest vrai, de la discipline et de la solidarité. Mais on a déjà vu la solidarité sans la discipline : cela sappelait laide à la Grèce. Depuis dix ans, la Grèce a reçu 240 milliards deuros. Si ces fonds avaient été utilisés pour la croissance et lemploi, en particulier pour la formation de la jeunesse, croyez-vous que la Grèce serait dans létat où elle se trouve aujourdhui ? La rigueur budgétaire naurait-elle pas sauvé ce pays, naurait-elle pas évité au peuple grec la situation difficile quil subit ? Oui, il faut la croissance et lemploi, mais soutenus par ces deux piliers que sont la solidarité envers les peuples et la discipline budgétaire.
Enfin, au détour de cette proposition de résolution, vous proposez de séparer activités de dépôt et activités dinvestissement des banques. Je rappellerai à ce propos que Northern Rock, la banque britannique qui était en faillite, était une banque de dépôt, et que Lehman Brothers, qui était en faillite de lautre côté de lAtlantique, était une banque dinvestissement. Une banque nest donc pas protégée de la faillite et des difficultés parce quelle ne soccupe que de dépôts.
En réalité, en dehors de la confortation de laction du gouvernement et des actions qui sont menées au niveau européen, rien dans cette proposition ne me paraît aller dans le sens de ce qui est souhaitable. Nous voulons plus dEurope, nous voulons mieux dEurope. Nous voulons une Europe plus intégrée, dans laquelle il y ait un contrôle démocratique plus fort pour que lEurope populaire ne cède pas devant des nations populistes. Les traités sur le MES et sur le SCG sont équilibrés, ils permettent de reprendre pied au niveau économique mondial et de faire en sorte que la solidarité sexerce en même temps que la discipline.
(Interventions des Parlementaires)
( )
(LAssemblée ayant adopté les conclusions de rejet de la commission, la proposition de résolution est rejetée. Il ny aura donc pas lieu de procéder au vote solennel prévu par la Conférence des présidents).
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 21 février 2012