Texte intégral
Monsieur le Président,
Monsieur le Rapporteur,
Mesdames, Messieurs les Députés,
Depuis 2008, une crise sans précédent frappe le monde industrialisé, crise financière qui sest transformée en crise économique et monétaire, puis en crise sociale avec le haut niveau dendettement. LEurope a été particulièrement touchée. Linquiétude des marchés financiers se fondait sur leur perception dun déficit de gouvernance dans lUnion européenne, et plus précisément au sein de la zone euro. Notre responsabilité était donc de rétablir la confiance. Confiance des investisseurs. Confiance des États européens les uns envers les autres. Confiance de lEurope en elle-même.
La France sest particulièrement mobilisée dans la résolution de la crise. LEurope est un bien précieux quil nous faut sauvegarder au prix, si nécessaire, de quelques sacrifices.
( )
Nous avons refusé la tentation du renoncement. Certains voulaient abandonner lEurope et se résigner au repli sur soi. Cette solution, nous nen voulions pas. Depuis des siècles, la France est un acteur majeur du monde. Notre voix porte parce que nous défendons des valeurs universelles. Comment cette France héritière de la Révolution française et État fondateur de lUnion européenne aurait-elle pu succomber aux sirènes de la «démondialisation» ? Le monde ne «se démondialise» pas. Il faut choisir den faire partie ou de se retirer. Nous avons choisi laction.
( )
Nous avons aussi refusé la facilité. Verser une aide sans contrepartie serait le plus simple à court terme. Pourtant, nous en sortirions tous perdants. Les États aidés ne résoudraient pas leurs difficultés. LEurope dans son ensemble poursuivrait son dangereux endettement.
Nous avons fait le choix de la responsabilité, qui se fonde sur la solidarité et la discipline. Nous avons donc trouvé le juste équilibre, qui est un équilibre juste.
Les deux textes sur lesquels vous êtes appelés à vous prononcer aujourdhui concernent le Mécanisme européen de stabilité, qui constitue le volet «solidarité» de cet accord global : cest le pare-feu de la zone euro face aux attaques des marchés financiers. Plus encore que laide quil permettra de verser, cest le message de confiance et dunité quil porte qui est essentiel. «Ce nest pas tant laide de nos amis qui nous aide que la confiance en cette aide», disait Épicure.
Le premier projet de loi vise à la ratification de la décision du 25 mars 2011 par lequel le Conseil européen est convenu de modifier larticle 136 du traité sur le fonctionnement de lUnion européenne.
Cette modification de larticle 136, réalisée selon la procédure de révision simplifiée des traités, consiste en lajout dun alinéa qui reconnaît la faculté pour les États membres de la zone euro dinstituer entre eux un mécanisme de stabilité. Cette modification contribue à une meilleure sécurité juridique. Elle garantit explicitement la compatibilité du futur Mécanisme européen de stabilité avec la clause de non-renflouement qui figure à larticle 125 du Traité sur le fonctionnement de lUnion européenne.
Le second projet de loi permet dautoriser la ratification du Traité instituant le Mécanisme européen de stabilité - le MES.
Le Mécanisme européen de stabilité est appelé à remplacer les deux instruments dassistance mis en place au printemps 2010 : le Fonds européen de stabilité financière - FESF - et le Mécanisme communautaire de stabilisation financière - MESF. Il sagit dinstitutionnaliser le principe de solidarité au cur de la construction européenne.
Le Traité instituant le Mécanisme européen de stabilité a été signé le 2 février dernier à Bruxelles. Il présente de nombreuses garanties supplémentaires par rapport au Fonds européen de stabilité financière. Le FESF avait été créé pour une durée de trois ans alors que le Mécanisme européen de stabilité sera une structure pérenne ; le FESF se présente comme une société de droit privé tandis que le MES est une organisation financière internationale ; le FESF dispose dune capacité de prêt de 440 milliards deuros alors que le MES disposera dune capacité maximale de prêt de 500 milliards. Il faut noter surtout que la capacité de prêt du FESF repose sur la garantie des États alors que celle du MES sera assise sur un capital de 700 milliards deuros, dont 80 milliards de capital libéré. Notons quil a été convenu que la question du plafond global du fonds et du mécanisme sera réexaminée en mars prochain.
La part de la France au capital du Mécanisme européen de stabilité est denviron 20 % : sa souscription sétablit à 142,7 milliards deuros pour le capital autorisé et à 16,3 milliards pour le capital libéré. Le projet de loi de finances rectificative pour 2012 prévoit le versement initial de deux tranches pour un montant de 6,5 milliards deuros. Nous y voyons la preuve de lengagement sans faille de notre pays en faveur de la solidarité européenne.
Les instruments dintervention du Mécanisme européen de stabilité seront puissants et diversifiés : prêts directs, lignes de crédit à titre de précaution, intervention sur le marché primaire ou secondaire, recapitalisation dinstitutions financières via des prêts aux États, y compris ceux qui ne seraient pas sous programme dassistance.
Il est prévu une procédure de décision en urgence à une majorité qualifiée de 85 %.
Enfin, il a été décidé danticiper dun an lentrée en vigueur du Mécanisme européen de stabilité en la fixant à juillet 2012.
Jai entendu des critiques sur le lien qui est établi entre le Mécanisme européen de solidarité et le Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance - traité SCG. Il est pourtant indispensable que la solidarité ne sapparente pas à un chèque en blanc. Les aides fournies seront conditionnées par ladoption dun plan dajustement, sur proposition de la Commission, en lien avec la Banque centrale européenne. Par ailleurs, à partir du 1er mars 2013, lassistance financière du Mécanisme européen de stabilité ne sera de facto plus ouverte quà ceux qui auront ratifié le traité SCG.
Il sagit dune définition saine et de bon sens de la solidarité. Aider sans exiger de contrepartie, ce nest pas rendre service. Nous enfermerions les États aidés dans une dépendance qui nest pas saine. La solidarité doit permettre aux États de retrouver durablement leur autonomie économique et financière, ce qui exige des engagements fermes afin de retrouver léquilibre budgétaire. Ces engagements, tous les États européens les prennent. Pourquoi ceux qui bénéficient dun soutien spécifique devraient-ils sen dispenser ?
Jattire votre attention sur un dernier point : nos concitoyens ne comprendraient pas que la solidarité ne soit pas assortie de discipline. Nous prendrions le risque de rendre lEurope impopulaire, et rendre lEurope impopulaire, cest la livrer aux populismes. À travers ces nouveaux traités, nous poursuivons notre combat contre le populisme et pour la construction européenne.
Nous avons la chance de bénéficier de lhéritage des pères fondateurs de lEurope, héritage de paix et de prospérité au cur dun espace civilisationnel dune incroyable richesse et dune extraordinaire diversité. Cette chance nous impose aussi des devoirs : défendre lEurope envers et contre tout et poursuivre sans cesse sa construction. LEurope est un processus : si elle se fige, elle risque de sécrouler.
Nous avons fait le choix du courage et de la lucidité. Nous avons refusé limmobilisme et le renoncement qui se nourrissent dillusions : illusion que nous pouvons nous passer de lEurope, illusion que nous pouvons continuer de financer notre train de vie en accumulant des dettes qui seront payées par dautres.
Les traités qui vont être soumis à votre vote sont de ceux qui font grandir la France et lEurope.
Si le Parlement le veut bien, la France sera le premier pays à ratifier ces deux textes et à confirmer la détermination dont elle a fait preuve depuis plusieurs mois en faveur de lintégration européenne et de la stabilité financière de lEurope, de la lutte contre les spéculateurs et de la défense de tous les pays en difficulté.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 23 février 2012
Monsieur le Rapporteur,
Mesdames, Messieurs les Députés,
Depuis 2008, une crise sans précédent frappe le monde industrialisé, crise financière qui sest transformée en crise économique et monétaire, puis en crise sociale avec le haut niveau dendettement. LEurope a été particulièrement touchée. Linquiétude des marchés financiers se fondait sur leur perception dun déficit de gouvernance dans lUnion européenne, et plus précisément au sein de la zone euro. Notre responsabilité était donc de rétablir la confiance. Confiance des investisseurs. Confiance des États européens les uns envers les autres. Confiance de lEurope en elle-même.
La France sest particulièrement mobilisée dans la résolution de la crise. LEurope est un bien précieux quil nous faut sauvegarder au prix, si nécessaire, de quelques sacrifices.
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Nous avons refusé la tentation du renoncement. Certains voulaient abandonner lEurope et se résigner au repli sur soi. Cette solution, nous nen voulions pas. Depuis des siècles, la France est un acteur majeur du monde. Notre voix porte parce que nous défendons des valeurs universelles. Comment cette France héritière de la Révolution française et État fondateur de lUnion européenne aurait-elle pu succomber aux sirènes de la «démondialisation» ? Le monde ne «se démondialise» pas. Il faut choisir den faire partie ou de se retirer. Nous avons choisi laction.
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Nous avons aussi refusé la facilité. Verser une aide sans contrepartie serait le plus simple à court terme. Pourtant, nous en sortirions tous perdants. Les États aidés ne résoudraient pas leurs difficultés. LEurope dans son ensemble poursuivrait son dangereux endettement.
Nous avons fait le choix de la responsabilité, qui se fonde sur la solidarité et la discipline. Nous avons donc trouvé le juste équilibre, qui est un équilibre juste.
Les deux textes sur lesquels vous êtes appelés à vous prononcer aujourdhui concernent le Mécanisme européen de stabilité, qui constitue le volet «solidarité» de cet accord global : cest le pare-feu de la zone euro face aux attaques des marchés financiers. Plus encore que laide quil permettra de verser, cest le message de confiance et dunité quil porte qui est essentiel. «Ce nest pas tant laide de nos amis qui nous aide que la confiance en cette aide», disait Épicure.
Le premier projet de loi vise à la ratification de la décision du 25 mars 2011 par lequel le Conseil européen est convenu de modifier larticle 136 du traité sur le fonctionnement de lUnion européenne.
Cette modification de larticle 136, réalisée selon la procédure de révision simplifiée des traités, consiste en lajout dun alinéa qui reconnaît la faculté pour les États membres de la zone euro dinstituer entre eux un mécanisme de stabilité. Cette modification contribue à une meilleure sécurité juridique. Elle garantit explicitement la compatibilité du futur Mécanisme européen de stabilité avec la clause de non-renflouement qui figure à larticle 125 du Traité sur le fonctionnement de lUnion européenne.
Le second projet de loi permet dautoriser la ratification du Traité instituant le Mécanisme européen de stabilité - le MES.
Le Mécanisme européen de stabilité est appelé à remplacer les deux instruments dassistance mis en place au printemps 2010 : le Fonds européen de stabilité financière - FESF - et le Mécanisme communautaire de stabilisation financière - MESF. Il sagit dinstitutionnaliser le principe de solidarité au cur de la construction européenne.
Le Traité instituant le Mécanisme européen de stabilité a été signé le 2 février dernier à Bruxelles. Il présente de nombreuses garanties supplémentaires par rapport au Fonds européen de stabilité financière. Le FESF avait été créé pour une durée de trois ans alors que le Mécanisme européen de stabilité sera une structure pérenne ; le FESF se présente comme une société de droit privé tandis que le MES est une organisation financière internationale ; le FESF dispose dune capacité de prêt de 440 milliards deuros alors que le MES disposera dune capacité maximale de prêt de 500 milliards. Il faut noter surtout que la capacité de prêt du FESF repose sur la garantie des États alors que celle du MES sera assise sur un capital de 700 milliards deuros, dont 80 milliards de capital libéré. Notons quil a été convenu que la question du plafond global du fonds et du mécanisme sera réexaminée en mars prochain.
La part de la France au capital du Mécanisme européen de stabilité est denviron 20 % : sa souscription sétablit à 142,7 milliards deuros pour le capital autorisé et à 16,3 milliards pour le capital libéré. Le projet de loi de finances rectificative pour 2012 prévoit le versement initial de deux tranches pour un montant de 6,5 milliards deuros. Nous y voyons la preuve de lengagement sans faille de notre pays en faveur de la solidarité européenne.
Les instruments dintervention du Mécanisme européen de stabilité seront puissants et diversifiés : prêts directs, lignes de crédit à titre de précaution, intervention sur le marché primaire ou secondaire, recapitalisation dinstitutions financières via des prêts aux États, y compris ceux qui ne seraient pas sous programme dassistance.
Il est prévu une procédure de décision en urgence à une majorité qualifiée de 85 %.
Enfin, il a été décidé danticiper dun an lentrée en vigueur du Mécanisme européen de stabilité en la fixant à juillet 2012.
Jai entendu des critiques sur le lien qui est établi entre le Mécanisme européen de solidarité et le Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance - traité SCG. Il est pourtant indispensable que la solidarité ne sapparente pas à un chèque en blanc. Les aides fournies seront conditionnées par ladoption dun plan dajustement, sur proposition de la Commission, en lien avec la Banque centrale européenne. Par ailleurs, à partir du 1er mars 2013, lassistance financière du Mécanisme européen de stabilité ne sera de facto plus ouverte quà ceux qui auront ratifié le traité SCG.
Il sagit dune définition saine et de bon sens de la solidarité. Aider sans exiger de contrepartie, ce nest pas rendre service. Nous enfermerions les États aidés dans une dépendance qui nest pas saine. La solidarité doit permettre aux États de retrouver durablement leur autonomie économique et financière, ce qui exige des engagements fermes afin de retrouver léquilibre budgétaire. Ces engagements, tous les États européens les prennent. Pourquoi ceux qui bénéficient dun soutien spécifique devraient-ils sen dispenser ?
Jattire votre attention sur un dernier point : nos concitoyens ne comprendraient pas que la solidarité ne soit pas assortie de discipline. Nous prendrions le risque de rendre lEurope impopulaire, et rendre lEurope impopulaire, cest la livrer aux populismes. À travers ces nouveaux traités, nous poursuivons notre combat contre le populisme et pour la construction européenne.
Nous avons la chance de bénéficier de lhéritage des pères fondateurs de lEurope, héritage de paix et de prospérité au cur dun espace civilisationnel dune incroyable richesse et dune extraordinaire diversité. Cette chance nous impose aussi des devoirs : défendre lEurope envers et contre tout et poursuivre sans cesse sa construction. LEurope est un processus : si elle se fige, elle risque de sécrouler.
Nous avons fait le choix du courage et de la lucidité. Nous avons refusé limmobilisme et le renoncement qui se nourrissent dillusions : illusion que nous pouvons nous passer de lEurope, illusion que nous pouvons continuer de financer notre train de vie en accumulant des dettes qui seront payées par dautres.
Les traités qui vont être soumis à votre vote sont de ceux qui font grandir la France et lEurope.
Si le Parlement le veut bien, la France sera le premier pays à ratifier ces deux textes et à confirmer la détermination dont elle a fait preuve depuis plusieurs mois en faveur de lintégration européenne et de la stabilité financière de lEurope, de la lutte contre les spéculateurs et de la défense de tous les pays en difficulté.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 23 février 2012