Texte intégral
Mes chers compatriotes,
Ils pensaient que vous ne viendriez pas.
Ils pensaient peut-être même espéraient-ils que le peuple de France ne serait pas au rendez-vous.
Et le peuple de France est venu puisque vous êtes là !
Le peuple de France est venu de tous les quartiers de Paris.
Il est venu de toute lIle-de-France.
Il est venu de toutes les provinces, de toutes les villes, depuis Lyon jusquà Nantes, depuis Bordeaux jusquà Strasbourg, depuis Rouen jusquà Lille, depuis Marseille jusquà Brest, des Pyrénées jusquaux Vosges, des Alpes jusquaux Monts dAuvergne.
Il est venu même de nos territoires dOutre-mer
Jai donné rendez-vous à la France que lon nentend jamais parce quon ne lui donne jamais la parole, à la France qui affronte les difficultés de la vie sans jamais rien demander parce quelle a trop de fierté, à la France qui souffre sans jamais se plaindre parce quelle a trop de pudeur, à la France qui ne proteste pas, à la France qui ne casse pas, à la France qui en a assez que lon parle en son nom.
Et dans les profondeurs du pays, la France silencieuse a répondu par votre présence.
Sur cette place dont le nom exprime la volonté de toute une Nation de surmonter les épreuves qui lont déchirée et qui ont fait couler tant de sang et de larmes, les curs des dizaines de milliers de Français qui sy trouvent rassemblés battent à lunisson des curs des millions de Français qui, dans toutes les villes et dans tous les villages, sinterrogent avec inquiétude sur lavenir de la France.
Cest Malaparte, litalien, qui a le mieux parlé de ce lieu où commencent et finissent depuis deux siècles toutes nos tragédies nationales : « La place de la Concorde est une idée ; ce nest pas une place, cest une manière de penser. Tout ce qui est vraiment Français se mesure ici ».
La vague immense qui submerge aujourdhui le cur de Paris porte cette idée de France comme une irrésistible espérance.
Cest la France qui est ici.
Cest le même Malaparte qui dit que lItalien considère lhistoire comme un caprice des dieux, lAnglais comme un fait de la nature, le Français comme un fait de la volonté des hommes.
Cest cette volonté française de faire lhistoire pour ne pas la subir qui a conduit aujourdhui jusquici la multitude de ceux qui ne veulent pas que lon décide à leur place au moment de se prononcer pour un choix dont limportance sera historique.
Vous nêtes pas là seulement pour vous-mêmes. Vous êtes les représentants de tous ceux qui nont pas pu venir mais qui ne veulent pas cesser despérer dans la France.
Vous êtes les porte-paroles de ceux qui nont jamais la parole, de ceux qui ne demandent jamais rien, qui ne se plaignent jamais, mais qui sont fiers de la France, fiers de sa culture, fiers de sa langue, fiers de son identité, fiers de ce quelle a accompli dans son Histoire, fiers de ce quelle représente pour tant dhommes dans le monde.
De ceux qui nen peuvent plus du dénigrement de la France, de sa culpabilisation, que lon se permette de la mettre en cause à la moindre occasion.
Vous êtes les témoins,
ceux qui maintiennent vivantes la parole et la pensée quand la parole est confisquée et quand la pensée est interdite ;
ceux qui opposent inlassablement la vérité à la répétition du mensonge jusquà ce que la vérité finisse par triompher du mensonge.
Beaucoup dentre vous ne sont pas engagés, peut-être simaginaient-ils ne jamais le faire ? Ils sont venus parce quils pensent à leur avenir et à celui de leurs enfants, parce quils ont acquis lintime conviction que quelque chose dessentiel est en jeu et parce quune sourde inquiétude les saisit quand ils entendent le tumulte du monde, quand ils voient les épreuves auxquelles sont confrontés tour à tour des pays qui nous sont si proches.
Le 22 avril et le 6 mai, il ne sagira pas de choisir un camp. Il sagira de décider pour lavenir à un moment où lavenir se joue.
Cest pourquoi je veux aussi parler à ces millions de français quune histoire personnelle ou familiale nattache pas à un parti.
Je veux parler à cette majorité silencieuse qui, une fois encore, tient le destin de la France entre ses mains.
Je veux lui dire quau milieu des crises les plus dangereuses que le monde ait connues depuis un demi-siècle, entre un monde ancien qui nen finit pas de mourir et un monde nouveau qui a du mal à naître, une seule chose doit compter : où voulons-nous aller ?
Jamais sans doute depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, les choix politiques que nous avons à faire nont été aussi lourds de conséquences.
Je sais que beaucoup de nos compatriotes qui souffrent ont envie de crier leur souffrance, de crier leur colère en votant pour les extrêmes.
Je comprends la douleur de ceux que la crise a fait souffrir. Je comprends leur colère.
Mais les solutions extrêmes natténueraient pas leur douleur. Elles ne les protégeraient pas. Elles ne leur apporteraient aucune aide. Elles les feraient souffrir davantage encore. Car les solutions extrêmes sont des mensonges et les mensonges font plus de mal que la vérité.
Je comprends lenvie de dire « non » à tout pour ceux qui ont le sentiment si désespérant et si douloureux dêtre dépossédés de tout, davoir perdu le contrôle de leur vie, la maîtrise de leur destin.
Je comprends lamertume et le sentiment dinjustice de celui qui narrive pas à vivre de son travail, qui narrive plus à faire vivre sa famille quand dautres y parviennent mieux sans travailler.
Je comprends ce quil y a dinsupportable pour celui auquel on demande des sacrifices à cause de la crise à voir ceux qui sont responsables de cette crise continuer de prospérer
Je comprends le désarroi dune jeunesse qui regarde avec anxiété le chômage lui barrer la route, la planète sépuiser, la montagne des dettes quelle devra payer grandir chaque jour.
Dans la situation où se trouve la France, où se trouve lEurope, où se trouve le monde, nul ne peut espérer dissocier son destin personnel de celui de tous. Nul ne peut espérer sen sortir seul.
Je suis allé à la rencontre des Français. Jai entendu leurs interrogations, leurs doutes.
Que demandent-ils ?
Ils demandent la justice.
Ils demandent la liberté.
Ils demandent lespoir.
La justice qui est dans léquilibre des droits et des devoirs.
La liberté qui permet à chacun décrire sa propre histoire.
Lespoir qui fait reculer la peur de lavenir.
Mais comment répondre si délibérément on tourne le dos à la réalité du monde ?
Comment répondre si délibérément on fait semblant dêtre seuls au monde ?
Comment affronter des crises dont on se refuserait à reconnaître lexistence ?
Comment relever des défis que lon ne voudrait pas regarder en face ?
Cest en affrontant les difficultés que lon peut les surmonter.
Notre époque réclame autre chose que loutrance ou le déni.
Face à la montée des périls qui nous menacent elle exige de la solidité et de la gravité.
La situation de lEurope, létat du monde ne nous laissent aucun droit à lerreur.
Une course contre la montre est désormais engagée avec, la crise économique, la désintégration sociale, le déclin de lhumanisme.
Les crises qui se sont succédé depuis quatre ans sont des avertissements que nous devons entendre.
Ce qui est en jeu, cest la survie dune forme de civilisation, la nôtre, dans un monde où la passion exclusive pour les gains du court terme et les crispations identitaires saffrontent de plus en plus violemment, préparant, si lon ny prend pas garde, les grandes tragédies du futur.
Comme à lorée de la Renaissance, des Lumières ou de la Révolution industrielle, nous navons pas le droit de manquer notre entrée dans lère nouvelle que préparent les bouleversements daujourdhui.
Si nous ne voulons pas prendre le risque de perdre : notre agriculture, nos usines, nos emplois, notre art de vivre, daimer et de penser, notre culture, notre littérature, notre langue, tout ce à quoi nous tenons, tout ce dans quoi nous avons mis tout le génie de la France depuis des siècles. Il faut, sans biaiser, tirer les conséquences de ces crises terribles que le monde vient de connaître.
Nous avons réussi ce miracle que 66 millions dindividus farouchement individualistes forment ensemble une seule et même personne dont le génie singulier na cessé, depuis des siècles, déclairer lHumanité.
Dans le monde entier, la France ce nest pas le nom dun pays, cest le nom dune civilisation.
Quand on entend France, on entend Molière, Voltaire, Chateaubriand.
On entend la prière de Péguy à Notre-Dame de Chartres :
« Deux mille ans de labeur ont fait de cette terre
Un réservoir sans fin pour les âges nouveaux.»
On entend liberté, égalité, fraternité,
on entend le cri de Valmy,
on entend la Grande Révolution disant au monde « le bonheur est une idée neuve »,
on entend la voix de Napoléon dictant le bulletin de victoire au Soleil dAusterlitz,
on entend le « non » du 18 juin et la voix dAimé Césaire jetant Racine, Zola et Hugo à la figure des censeurs de Vichy.
Nous navons pas le droit de laisser dilapider cet héritage.
La facilité, le renoncement, la mollesse ne sont pas dans les gènes de la France.
On pourrait se dire quaprès tout, la France en a tant vu, quelle a survécu à tant dépreuves, quau fond elle ne risque rien.
Mais si la France a survécu, cest parce quà chaque fois quelle sest trouvée confronter à de grandes échéances, elle a su, dans un ultime effort venu des profondeurs du pays, rassembler toutes ses forces pour changer le cours du destin.
La leçon de lHistoire, cest que la France na pesé dans le monde et na été forte dans lépreuve que lorsque, surmontant ses divisions naturelles, elle a réussi à sunir autour dune grande ambition.
La France forte, cest la France de Valmy et celle de la Résistance.
Cest la France que Jean Monnet avait rassemblée au Commissariat du Plan en 1946 pour reconstruire un pays dévasté par la guerre et lui ouvrir les portes dun avenir si prospère quon parlera de lui en disant « les Trente Glorieuses ».
Les voies de lavenir nous les connaissons.
La société de la connaissance. Léconomie du savoir. La révolution numérique. La réponse aux défis de lécologie. Ladaptation de notre appareil productif et de notre organisation sociale à lépuisement des énergies fossiles, à la lente mais inexorable disparition du pétrole et à la non moins inexorable augmentation de son prix.
Cest un immense effort de formation, de recherche, dinnovation, dinvestissement qui attend la France. Cest toute la croissance de demain, cest toute la qualité de la vie de demain qui dépendent de cet effort.
Nous avons la jeunesse, nous avons lintelligence, nous avons les savants, nous avons les entrepreneurs pour inventer ce nouveau modèle de croissance, ce nouveau modèle de société, pour imaginer le modèle français du XXIe siècle.
Ce nouveau modèle français, il répondra au besoin de justice parce quil ne sera plus soumis à la dictature de la finance, à ses profits exorbitants, à sa tyrannie de la rentabilité à court terme, parce que tout le monde sera formé, parce que tout le monde sera qualifié, parce que tout le monde pourra accéder à la promotion sociale par linstruction et par la formation. Alors il pourra y avoir un emploi pour chacun.
Dans ce nouveau modèle français, lécole sera attentive à la fragilité des enfants et plus aucun élève nentrera au collège sans savoir lire, écrire et compter.
Dans ce nouveau modèle français, chaque jeune français qui choisira lalternance trouvera une place dans une entreprise.
Dans ce nouveau modèle français, les chômeurs auront un droit à la formation. Ils auront aussi un devoir : accepter lemploi quon leur proposera.
Dans ce nouveau modèle français, chacun aura droit à la formation tout au long de sa vie.
Ce nouveau modèle français répondra au besoin de tous de reprendre la maîtrise de leur destin, de se sentir libre de choisir son rythme de vie, de se sentir pleinement responsable de soi-même.
Dans ce nouveau modèle français, tout le monde aura droit à une deuxième chance et toute famille de bonne foi, confrontée à un accident de la vie dont la conséquence est le surendettement, pourra, comme une entreprise, bénéficier de la faillite civile telle quelle existe en Alsace afin de pouvoir redémarrer dans la vie.
Dans ce nouveau modèle français, on récompensera leffort, le mérite, le travail. On ne dénoncera pas le talent, la réussite, le succès. La jalousie, lenvie, lamertume ne sont pas des valeurs françaises.
Je ne veux pas dune France nivelée, égalitariste, qui tournerait le dos aux talents parce quelle en aurait peur.
Ce nouveau modèle français rendra lespoir à ceux qui lont perdu, parce que ce sera un modèle de progrès, un modèle de développement où lavenir sera de nouveau une promesse où les enfants pourront espérer vivre mieux que leurs parents.
Ce que je vous propose, cest de réunir les conditions pour que la France organise les « Trente Glorieuses » du XXIe siècle.
Ce que je vous propose, cest de renouveler lexploit quont accompli les hommes de laprès-guerre qui avaient si bien tiré les leçons des grandes fautes du passé et des tragédies quelles avaient engendrées.
Ce que je vous propose, cest de mobiliser à nouveau toutes les forces intellectuelles, morales et sociales de la Nation. Cest de rendre la parole au peuple quand les corporatismes et les conservatismes se liguent pour empêcher le pays davancer. Cest de déconstruire lÉtat bureaucratique pour reconstruire un État entrepreneur qui soit une force dentraînement et un point dappui pour tous ceux qui créent, qui inventent, qui entreprennent.
Ce que je vous propose, cest de remplacer le capitalisme financier par un capitalisme dentrepreneurs. Nous ne voulons plus quune infime minorité dévoye les idées qui sont les nôtres.
Ce que je vous propose, cest un État qui réduit ses dépenses, refuse la drogue de la dépense publique et remet de lordre dans ses finances pour pouvoir investir, pour construire lavenir.
La condition, cest lunité nationale pour pouvoir faire bloc face à toutes les forces de désintégration qui menacent notre société et notre économie. Je parle au peuple de France, pas à la gauche, pas à la droite. Je parle aux citoyens quels quils soient, pas seulement aux militants.
La condition, cest que nous soyons rassemblés autour de nos valeurs pour défendre notre identité et notre mode de vie, parce que cest la condition de notre cohésion et de notre solidarité, parce que cest notre singularité qui fera la valeur de nos produits et de nos services, parce que dans le monde de demain la culture sera lune des richesses les plus précieuses.
A lheure où il nous faut affronter les conséquences de la crise, ce serait folie daffaiblir notre modèle républicain, nous naccepterons jamais le communautarisme ! A lheure où nous avons besoin de la plus grande cohésion, nous ne laisserons pas détruire les institutions qui fondent la république : lécole et la famille.
La France rassemblée, cest la France débarrassée des vieux démons du sectarisme et du communautarisme, cest la France qui peut prétendre renouveler lexploit des Trente Glorieuses parce quelle pourra peser en Europe et peser dans le monde.
Car il ne sagit pas de rassembler les Français pour quils se ferment au monde mais au contraire pour quils soient assez forts pour ne pas avoir peur de louverture au monde. Jamais je ne plaiderai le repliement.
Mais nous avons commis une erreur pendant trente ans en passant la Nation par pertes et profits alors que dans la mondialisation, partout, ce sont les Nations qui tiennent le premier rang parce quelles sont portées par un élan collectif qui leur donne une force irrésistible dans la compétition mondiale.
Nous avons eu tort en Europe de négliger les frontières, tort douvrir nos marchés sans contrepartie, tort de laisser la bureaucratie prendre le pas sur la volonté politique et sur la responsabilité politique, tort de bâtir une Europe de la consommation sans nous soucier de lEurope de la production.
Si les frontières extérieures de lEurope ne sont pas protégées contre une immigration incontrôlée, contre les concurrences déloyales, contre les dumpings, il ny aura pas de nouveau modèle français, et il ny aura plus de civilisation européenne.
Jai dit ma détermination à faire changer lEurope sur la question des frontières. Jirai jusquau bout. Jirai jusquà suspendre sil le faut, les accords de Schengen et à rétablir des contrôles ciblés à nos frontières.
Jirai jusquà appliquer sil le faut à nos marchés publics les règles que sappliquent les Américains en naccordant leurs attributions quaux seules entreprises qui produiront sur le continent européen.
Je revendique pour la France le droit de choisir qui elle accepte sur son territoire.
Je revendique pour la France le droit de se protéger contre la concurrence de ceux qui ne respectent aucune règle.
Je revendique pour la France le droit de mettre en uvre des politiques industrielles, des politiques de la commande publique et de réserver une partie des marchés publics aux PME.
Je revendique pour la France le droit de défendre ses valeurs, sa culture, sa langue, son modèle républicain, son identité. Parce que défendre son identité, défendre sa civilisation, ce nest pas honteux cest légitime.
La défense de ses droits, cest ce que la France attend de lEurope, cest ce que la France demande à lEurope. Mais la France le dit à ses partenaires, elle ne renoncera pas à les défendre elle-même si lEurope ne les défend pas.
Je veux aller plus loin encore.
Après ce que nous avons fait pour sauver lEuro, je veux poser non seulement le problème des frontières mais aussi celui du rôle de la Banque centrale dans le soutien à la croissance. Cest une question que nous ne pourrons pas éluder. Car si lEurope ne veut pas perdre pied dans léconomie mondiale elle doit absolument renouer avec la croissance.
La croissance, cela ne se décrète pas. Il ne suffit pas décrire le mot « croissance » dans un traité pour lobtenir. Si lon ne fait rien pour la compétitivité. Si lon alourdit le coût du travail, si lon décourage lesprit dentreprise, si lon ninvestit pas, ce nest pas la croissance que lon obtient, cest la stagnation.
Si lon ne change pas lEurope, si lon ne fait pas lEurope de la production, lEurope de linvestissement, nous ne pourrons pas avoir la croissance. Si la Banque centrale ne soutient pas la croissance, nous naurons pas assez de croissance.
La crise nous a montré les limites des règles qui ont été fixées dans le Traité de Maastricht. Je sais les difficultés daborder ce sujet. Je connais les obstacles. Mais nous avons le devoir dy réfléchir.
Parce que cest un problème majeur pour lavenir de lEurope.
Cest un problème stratégique pour lEurope.
LEurope doit apurer ses dettes, elle na pas le choix. Mais entre la déflation et la croissance, elle na pas davantage le choix. Si elle choisit la déflation, elle disparaîtra. Il faut se souvenir des années 30.
Si les Français me renouvellent leur confiance, jouvrirai ce débat et je mettrai la même énergie, la même détermination à faire avancer lEurope de la croissance, lEurope qui investit dans son avenir, que celles que jai mises à combattre la crise financière et à sauver lEuro. Il ne doit pas y avoir de sujets tabous, il ne doit pas y avoir de débats interdits.
On nous avait dit que la Banque centrale ne pourrait pas intervenir pour sauver lEuro. Et la Banque centrale sest donnée la liberté nécessaire pour sauver lEuro en fournissant de la liquidité aux banques.
On nous avait dit que le Gouvernement économique, cétait impossible. Et nous avons obtenu le Gouvernement économique.
On nous avait dit que la question des frontières était taboue. Et nous avons posé la question des frontières.
On nous avait dit que le débat sur la réciprocité était interdit. Et nous avons ouvert le débat sur la réciprocité.
Alors, sur le rôle de la Banque centrale dans le soutien à la croissance, nous allons aussi ouvrir le débat. Et nous allons faire avancer lEurope.
Mes chers compatriotes,
Cest à votre cur et à votre raison que je madresse.
A votre cur, parce que ce qui nous réunit ici, cest lamour de la France.
A votre raison, parce quil faut que le choix soit clair et que ses conséquences soient comprises.
Deux voies sont possibles.
Lune imposera les solutions du passé.
Au mieux, elle ne résoudra rien. Elle restera prisonnière de tous les conservatismes, de tous les corporatismes. Elle continuera à laisser les frontières seffacer et la Nation saffaiblir.
Au pire, elle découragera la réussite et elle ruinera les classes moyennes, sans enrichir les plus pauvres. Elle détruira la confiance des investisseurs. Elle nous mettra à la merci de la spéculation. Et pour sen sortir, elle imposera laustérité la plus dure qui plongera le pays dans la dépression et les plus vulnérables dans la misère.
Lautre voie, cest celle qui sera tournée vers lavenir, qui tirera les leçons des crises, qui inventera les solutions du XXIe siècle.
Je vous propose de construire un nouveau modèle de croissance, une nouvelle économie, une nouvelle ambition sociale. Entre le nationalisme et le laissez-faire, je vous propose pour la Nation la voie raisonnable de lunité et de louverture au monde.
La vocation de la France nest pas de seffacer ou de se taire. La vocation de la France, cest dagir pour ceux qui ne peuvent pas agir. Cest de parler pour ceux qui ne peuvent pas parler.
La vocation de la France, cest dêtre au côté des peuples qui veulent être libres, cest dêtre au côté des Chrétiens dOrient quand ils sont persécutés.
La vocation de la France, cest dorganiser autour de la Méditerranée une communauté de destins. La France a lancé lUnion pour la Méditerranée. La France est intervenue pour protéger le peuple libyen du massacre. La France prendra des initiatives pour que la cause de la paix et de la justice triomphent enfin au Moyen-Orient.
La vocation de la France, cest de porter au G20, qui nexisterait pas sans elle, la régulation de la mondialisation, la moralisation de la finance et la taxation des transactions financières pour dégager les ressources dont les pays pauvres ont besoin pour sortir de la misère.
La vocation de la France, cest dêtre le porte-parole de tous ceux qui dans le monde veulent que lhomme ne soit pas sacrifier au commerce, que le droit du travail, de la santé, de lenvironnement soient mis à égalité avec le droit du commerce.
La vocation de la France, cest dêtre partout la voix de ceux qui réclament la justice, la liberté et le droit despérer dans un avenir meilleur.
Par delà les siècles la grande voix de Victor Hugo nous dicte le programme de lavenir : « une liberté sans usurpations et sans violences, une égalité qui admettra la croissance naturelle de chacun, une fraternité dhommes libres, lapplication du principe qui veut que tout homme commence par le travail et finisse par la propriété, le respect de lhéritage qui nest autre chose que la main du père tendue aux enfants à travers le mur du tombeau, lordre comme loi des citoyens, la paix comme loi des nations ».
Mes chers compatriotes,
Entendez mon appel !
La France de Victor Hugo et du général De Gaulle, la France qui regarde vers lavenir, la France qui choisit le progrès, la France qui veut se mettre au service de toute lhumanité, cette France cest la vôtre.
Prenez votre destin en main !
Levez- vous !
Prenez la parole !
Dîtes ce que vous avez dans le cur.
Dîtes ce que vous voulez pour votre pays.
Dîtes le haut et fort.
Dîtes le maintenant !
Françaises, Français,
Depuis trente ans que je me suis engagé au service de notre pays, jai fait une longue route, celle là même qui ma mené jusquà vous.
Jusquà la dernière minute de cette campagne jirai à votre rencontre pour vous parler de la France.
Peuple de France.
Entend mon appel ! Françaises, Français, aidez-moi !
Vive la France !
Vive la République !
Source http://www.lafranceforte.fr, le 16 avril 2012
Ils pensaient que vous ne viendriez pas.
Ils pensaient peut-être même espéraient-ils que le peuple de France ne serait pas au rendez-vous.
Et le peuple de France est venu puisque vous êtes là !
Le peuple de France est venu de tous les quartiers de Paris.
Il est venu de toute lIle-de-France.
Il est venu de toutes les provinces, de toutes les villes, depuis Lyon jusquà Nantes, depuis Bordeaux jusquà Strasbourg, depuis Rouen jusquà Lille, depuis Marseille jusquà Brest, des Pyrénées jusquaux Vosges, des Alpes jusquaux Monts dAuvergne.
Il est venu même de nos territoires dOutre-mer
Jai donné rendez-vous à la France que lon nentend jamais parce quon ne lui donne jamais la parole, à la France qui affronte les difficultés de la vie sans jamais rien demander parce quelle a trop de fierté, à la France qui souffre sans jamais se plaindre parce quelle a trop de pudeur, à la France qui ne proteste pas, à la France qui ne casse pas, à la France qui en a assez que lon parle en son nom.
Et dans les profondeurs du pays, la France silencieuse a répondu par votre présence.
Sur cette place dont le nom exprime la volonté de toute une Nation de surmonter les épreuves qui lont déchirée et qui ont fait couler tant de sang et de larmes, les curs des dizaines de milliers de Français qui sy trouvent rassemblés battent à lunisson des curs des millions de Français qui, dans toutes les villes et dans tous les villages, sinterrogent avec inquiétude sur lavenir de la France.
Cest Malaparte, litalien, qui a le mieux parlé de ce lieu où commencent et finissent depuis deux siècles toutes nos tragédies nationales : « La place de la Concorde est une idée ; ce nest pas une place, cest une manière de penser. Tout ce qui est vraiment Français se mesure ici ».
La vague immense qui submerge aujourdhui le cur de Paris porte cette idée de France comme une irrésistible espérance.
Cest la France qui est ici.
Cest le même Malaparte qui dit que lItalien considère lhistoire comme un caprice des dieux, lAnglais comme un fait de la nature, le Français comme un fait de la volonté des hommes.
Cest cette volonté française de faire lhistoire pour ne pas la subir qui a conduit aujourdhui jusquici la multitude de ceux qui ne veulent pas que lon décide à leur place au moment de se prononcer pour un choix dont limportance sera historique.
Vous nêtes pas là seulement pour vous-mêmes. Vous êtes les représentants de tous ceux qui nont pas pu venir mais qui ne veulent pas cesser despérer dans la France.
Vous êtes les porte-paroles de ceux qui nont jamais la parole, de ceux qui ne demandent jamais rien, qui ne se plaignent jamais, mais qui sont fiers de la France, fiers de sa culture, fiers de sa langue, fiers de son identité, fiers de ce quelle a accompli dans son Histoire, fiers de ce quelle représente pour tant dhommes dans le monde.
De ceux qui nen peuvent plus du dénigrement de la France, de sa culpabilisation, que lon se permette de la mettre en cause à la moindre occasion.
Vous êtes les témoins,
ceux qui maintiennent vivantes la parole et la pensée quand la parole est confisquée et quand la pensée est interdite ;
ceux qui opposent inlassablement la vérité à la répétition du mensonge jusquà ce que la vérité finisse par triompher du mensonge.
Beaucoup dentre vous ne sont pas engagés, peut-être simaginaient-ils ne jamais le faire ? Ils sont venus parce quils pensent à leur avenir et à celui de leurs enfants, parce quils ont acquis lintime conviction que quelque chose dessentiel est en jeu et parce quune sourde inquiétude les saisit quand ils entendent le tumulte du monde, quand ils voient les épreuves auxquelles sont confrontés tour à tour des pays qui nous sont si proches.
Le 22 avril et le 6 mai, il ne sagira pas de choisir un camp. Il sagira de décider pour lavenir à un moment où lavenir se joue.
Cest pourquoi je veux aussi parler à ces millions de français quune histoire personnelle ou familiale nattache pas à un parti.
Je veux parler à cette majorité silencieuse qui, une fois encore, tient le destin de la France entre ses mains.
Je veux lui dire quau milieu des crises les plus dangereuses que le monde ait connues depuis un demi-siècle, entre un monde ancien qui nen finit pas de mourir et un monde nouveau qui a du mal à naître, une seule chose doit compter : où voulons-nous aller ?
Jamais sans doute depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, les choix politiques que nous avons à faire nont été aussi lourds de conséquences.
Je sais que beaucoup de nos compatriotes qui souffrent ont envie de crier leur souffrance, de crier leur colère en votant pour les extrêmes.
Je comprends la douleur de ceux que la crise a fait souffrir. Je comprends leur colère.
Mais les solutions extrêmes natténueraient pas leur douleur. Elles ne les protégeraient pas. Elles ne leur apporteraient aucune aide. Elles les feraient souffrir davantage encore. Car les solutions extrêmes sont des mensonges et les mensonges font plus de mal que la vérité.
Je comprends lenvie de dire « non » à tout pour ceux qui ont le sentiment si désespérant et si douloureux dêtre dépossédés de tout, davoir perdu le contrôle de leur vie, la maîtrise de leur destin.
Je comprends lamertume et le sentiment dinjustice de celui qui narrive pas à vivre de son travail, qui narrive plus à faire vivre sa famille quand dautres y parviennent mieux sans travailler.
Je comprends ce quil y a dinsupportable pour celui auquel on demande des sacrifices à cause de la crise à voir ceux qui sont responsables de cette crise continuer de prospérer
Je comprends le désarroi dune jeunesse qui regarde avec anxiété le chômage lui barrer la route, la planète sépuiser, la montagne des dettes quelle devra payer grandir chaque jour.
Dans la situation où se trouve la France, où se trouve lEurope, où se trouve le monde, nul ne peut espérer dissocier son destin personnel de celui de tous. Nul ne peut espérer sen sortir seul.
Je suis allé à la rencontre des Français. Jai entendu leurs interrogations, leurs doutes.
Que demandent-ils ?
Ils demandent la justice.
Ils demandent la liberté.
Ils demandent lespoir.
La justice qui est dans léquilibre des droits et des devoirs.
La liberté qui permet à chacun décrire sa propre histoire.
Lespoir qui fait reculer la peur de lavenir.
Mais comment répondre si délibérément on tourne le dos à la réalité du monde ?
Comment répondre si délibérément on fait semblant dêtre seuls au monde ?
Comment affronter des crises dont on se refuserait à reconnaître lexistence ?
Comment relever des défis que lon ne voudrait pas regarder en face ?
Cest en affrontant les difficultés que lon peut les surmonter.
Notre époque réclame autre chose que loutrance ou le déni.
Face à la montée des périls qui nous menacent elle exige de la solidité et de la gravité.
La situation de lEurope, létat du monde ne nous laissent aucun droit à lerreur.
Une course contre la montre est désormais engagée avec, la crise économique, la désintégration sociale, le déclin de lhumanisme.
Les crises qui se sont succédé depuis quatre ans sont des avertissements que nous devons entendre.
Ce qui est en jeu, cest la survie dune forme de civilisation, la nôtre, dans un monde où la passion exclusive pour les gains du court terme et les crispations identitaires saffrontent de plus en plus violemment, préparant, si lon ny prend pas garde, les grandes tragédies du futur.
Comme à lorée de la Renaissance, des Lumières ou de la Révolution industrielle, nous navons pas le droit de manquer notre entrée dans lère nouvelle que préparent les bouleversements daujourdhui.
Si nous ne voulons pas prendre le risque de perdre : notre agriculture, nos usines, nos emplois, notre art de vivre, daimer et de penser, notre culture, notre littérature, notre langue, tout ce à quoi nous tenons, tout ce dans quoi nous avons mis tout le génie de la France depuis des siècles. Il faut, sans biaiser, tirer les conséquences de ces crises terribles que le monde vient de connaître.
Nous avons réussi ce miracle que 66 millions dindividus farouchement individualistes forment ensemble une seule et même personne dont le génie singulier na cessé, depuis des siècles, déclairer lHumanité.
Dans le monde entier, la France ce nest pas le nom dun pays, cest le nom dune civilisation.
Quand on entend France, on entend Molière, Voltaire, Chateaubriand.
On entend la prière de Péguy à Notre-Dame de Chartres :
« Deux mille ans de labeur ont fait de cette terre
Un réservoir sans fin pour les âges nouveaux.»
On entend liberté, égalité, fraternité,
on entend le cri de Valmy,
on entend la Grande Révolution disant au monde « le bonheur est une idée neuve »,
on entend la voix de Napoléon dictant le bulletin de victoire au Soleil dAusterlitz,
on entend le « non » du 18 juin et la voix dAimé Césaire jetant Racine, Zola et Hugo à la figure des censeurs de Vichy.
Nous navons pas le droit de laisser dilapider cet héritage.
La facilité, le renoncement, la mollesse ne sont pas dans les gènes de la France.
On pourrait se dire quaprès tout, la France en a tant vu, quelle a survécu à tant dépreuves, quau fond elle ne risque rien.
Mais si la France a survécu, cest parce quà chaque fois quelle sest trouvée confronter à de grandes échéances, elle a su, dans un ultime effort venu des profondeurs du pays, rassembler toutes ses forces pour changer le cours du destin.
La leçon de lHistoire, cest que la France na pesé dans le monde et na été forte dans lépreuve que lorsque, surmontant ses divisions naturelles, elle a réussi à sunir autour dune grande ambition.
La France forte, cest la France de Valmy et celle de la Résistance.
Cest la France que Jean Monnet avait rassemblée au Commissariat du Plan en 1946 pour reconstruire un pays dévasté par la guerre et lui ouvrir les portes dun avenir si prospère quon parlera de lui en disant « les Trente Glorieuses ».
Les voies de lavenir nous les connaissons.
La société de la connaissance. Léconomie du savoir. La révolution numérique. La réponse aux défis de lécologie. Ladaptation de notre appareil productif et de notre organisation sociale à lépuisement des énergies fossiles, à la lente mais inexorable disparition du pétrole et à la non moins inexorable augmentation de son prix.
Cest un immense effort de formation, de recherche, dinnovation, dinvestissement qui attend la France. Cest toute la croissance de demain, cest toute la qualité de la vie de demain qui dépendent de cet effort.
Nous avons la jeunesse, nous avons lintelligence, nous avons les savants, nous avons les entrepreneurs pour inventer ce nouveau modèle de croissance, ce nouveau modèle de société, pour imaginer le modèle français du XXIe siècle.
Ce nouveau modèle français, il répondra au besoin de justice parce quil ne sera plus soumis à la dictature de la finance, à ses profits exorbitants, à sa tyrannie de la rentabilité à court terme, parce que tout le monde sera formé, parce que tout le monde sera qualifié, parce que tout le monde pourra accéder à la promotion sociale par linstruction et par la formation. Alors il pourra y avoir un emploi pour chacun.
Dans ce nouveau modèle français, lécole sera attentive à la fragilité des enfants et plus aucun élève nentrera au collège sans savoir lire, écrire et compter.
Dans ce nouveau modèle français, chaque jeune français qui choisira lalternance trouvera une place dans une entreprise.
Dans ce nouveau modèle français, les chômeurs auront un droit à la formation. Ils auront aussi un devoir : accepter lemploi quon leur proposera.
Dans ce nouveau modèle français, chacun aura droit à la formation tout au long de sa vie.
Ce nouveau modèle français répondra au besoin de tous de reprendre la maîtrise de leur destin, de se sentir libre de choisir son rythme de vie, de se sentir pleinement responsable de soi-même.
Dans ce nouveau modèle français, tout le monde aura droit à une deuxième chance et toute famille de bonne foi, confrontée à un accident de la vie dont la conséquence est le surendettement, pourra, comme une entreprise, bénéficier de la faillite civile telle quelle existe en Alsace afin de pouvoir redémarrer dans la vie.
Dans ce nouveau modèle français, on récompensera leffort, le mérite, le travail. On ne dénoncera pas le talent, la réussite, le succès. La jalousie, lenvie, lamertume ne sont pas des valeurs françaises.
Je ne veux pas dune France nivelée, égalitariste, qui tournerait le dos aux talents parce quelle en aurait peur.
Ce nouveau modèle français rendra lespoir à ceux qui lont perdu, parce que ce sera un modèle de progrès, un modèle de développement où lavenir sera de nouveau une promesse où les enfants pourront espérer vivre mieux que leurs parents.
Ce que je vous propose, cest de réunir les conditions pour que la France organise les « Trente Glorieuses » du XXIe siècle.
Ce que je vous propose, cest de renouveler lexploit quont accompli les hommes de laprès-guerre qui avaient si bien tiré les leçons des grandes fautes du passé et des tragédies quelles avaient engendrées.
Ce que je vous propose, cest de mobiliser à nouveau toutes les forces intellectuelles, morales et sociales de la Nation. Cest de rendre la parole au peuple quand les corporatismes et les conservatismes se liguent pour empêcher le pays davancer. Cest de déconstruire lÉtat bureaucratique pour reconstruire un État entrepreneur qui soit une force dentraînement et un point dappui pour tous ceux qui créent, qui inventent, qui entreprennent.
Ce que je vous propose, cest de remplacer le capitalisme financier par un capitalisme dentrepreneurs. Nous ne voulons plus quune infime minorité dévoye les idées qui sont les nôtres.
Ce que je vous propose, cest un État qui réduit ses dépenses, refuse la drogue de la dépense publique et remet de lordre dans ses finances pour pouvoir investir, pour construire lavenir.
La condition, cest lunité nationale pour pouvoir faire bloc face à toutes les forces de désintégration qui menacent notre société et notre économie. Je parle au peuple de France, pas à la gauche, pas à la droite. Je parle aux citoyens quels quils soient, pas seulement aux militants.
La condition, cest que nous soyons rassemblés autour de nos valeurs pour défendre notre identité et notre mode de vie, parce que cest la condition de notre cohésion et de notre solidarité, parce que cest notre singularité qui fera la valeur de nos produits et de nos services, parce que dans le monde de demain la culture sera lune des richesses les plus précieuses.
A lheure où il nous faut affronter les conséquences de la crise, ce serait folie daffaiblir notre modèle républicain, nous naccepterons jamais le communautarisme ! A lheure où nous avons besoin de la plus grande cohésion, nous ne laisserons pas détruire les institutions qui fondent la république : lécole et la famille.
La France rassemblée, cest la France débarrassée des vieux démons du sectarisme et du communautarisme, cest la France qui peut prétendre renouveler lexploit des Trente Glorieuses parce quelle pourra peser en Europe et peser dans le monde.
Car il ne sagit pas de rassembler les Français pour quils se ferment au monde mais au contraire pour quils soient assez forts pour ne pas avoir peur de louverture au monde. Jamais je ne plaiderai le repliement.
Mais nous avons commis une erreur pendant trente ans en passant la Nation par pertes et profits alors que dans la mondialisation, partout, ce sont les Nations qui tiennent le premier rang parce quelles sont portées par un élan collectif qui leur donne une force irrésistible dans la compétition mondiale.
Nous avons eu tort en Europe de négliger les frontières, tort douvrir nos marchés sans contrepartie, tort de laisser la bureaucratie prendre le pas sur la volonté politique et sur la responsabilité politique, tort de bâtir une Europe de la consommation sans nous soucier de lEurope de la production.
Si les frontières extérieures de lEurope ne sont pas protégées contre une immigration incontrôlée, contre les concurrences déloyales, contre les dumpings, il ny aura pas de nouveau modèle français, et il ny aura plus de civilisation européenne.
Jai dit ma détermination à faire changer lEurope sur la question des frontières. Jirai jusquau bout. Jirai jusquà suspendre sil le faut, les accords de Schengen et à rétablir des contrôles ciblés à nos frontières.
Jirai jusquà appliquer sil le faut à nos marchés publics les règles que sappliquent les Américains en naccordant leurs attributions quaux seules entreprises qui produiront sur le continent européen.
Je revendique pour la France le droit de choisir qui elle accepte sur son territoire.
Je revendique pour la France le droit de se protéger contre la concurrence de ceux qui ne respectent aucune règle.
Je revendique pour la France le droit de mettre en uvre des politiques industrielles, des politiques de la commande publique et de réserver une partie des marchés publics aux PME.
Je revendique pour la France le droit de défendre ses valeurs, sa culture, sa langue, son modèle républicain, son identité. Parce que défendre son identité, défendre sa civilisation, ce nest pas honteux cest légitime.
La défense de ses droits, cest ce que la France attend de lEurope, cest ce que la France demande à lEurope. Mais la France le dit à ses partenaires, elle ne renoncera pas à les défendre elle-même si lEurope ne les défend pas.
Je veux aller plus loin encore.
Après ce que nous avons fait pour sauver lEuro, je veux poser non seulement le problème des frontières mais aussi celui du rôle de la Banque centrale dans le soutien à la croissance. Cest une question que nous ne pourrons pas éluder. Car si lEurope ne veut pas perdre pied dans léconomie mondiale elle doit absolument renouer avec la croissance.
La croissance, cela ne se décrète pas. Il ne suffit pas décrire le mot « croissance » dans un traité pour lobtenir. Si lon ne fait rien pour la compétitivité. Si lon alourdit le coût du travail, si lon décourage lesprit dentreprise, si lon ninvestit pas, ce nest pas la croissance que lon obtient, cest la stagnation.
Si lon ne change pas lEurope, si lon ne fait pas lEurope de la production, lEurope de linvestissement, nous ne pourrons pas avoir la croissance. Si la Banque centrale ne soutient pas la croissance, nous naurons pas assez de croissance.
La crise nous a montré les limites des règles qui ont été fixées dans le Traité de Maastricht. Je sais les difficultés daborder ce sujet. Je connais les obstacles. Mais nous avons le devoir dy réfléchir.
Parce que cest un problème majeur pour lavenir de lEurope.
Cest un problème stratégique pour lEurope.
LEurope doit apurer ses dettes, elle na pas le choix. Mais entre la déflation et la croissance, elle na pas davantage le choix. Si elle choisit la déflation, elle disparaîtra. Il faut se souvenir des années 30.
Si les Français me renouvellent leur confiance, jouvrirai ce débat et je mettrai la même énergie, la même détermination à faire avancer lEurope de la croissance, lEurope qui investit dans son avenir, que celles que jai mises à combattre la crise financière et à sauver lEuro. Il ne doit pas y avoir de sujets tabous, il ne doit pas y avoir de débats interdits.
On nous avait dit que la Banque centrale ne pourrait pas intervenir pour sauver lEuro. Et la Banque centrale sest donnée la liberté nécessaire pour sauver lEuro en fournissant de la liquidité aux banques.
On nous avait dit que le Gouvernement économique, cétait impossible. Et nous avons obtenu le Gouvernement économique.
On nous avait dit que la question des frontières était taboue. Et nous avons posé la question des frontières.
On nous avait dit que le débat sur la réciprocité était interdit. Et nous avons ouvert le débat sur la réciprocité.
Alors, sur le rôle de la Banque centrale dans le soutien à la croissance, nous allons aussi ouvrir le débat. Et nous allons faire avancer lEurope.
Mes chers compatriotes,
Cest à votre cur et à votre raison que je madresse.
A votre cur, parce que ce qui nous réunit ici, cest lamour de la France.
A votre raison, parce quil faut que le choix soit clair et que ses conséquences soient comprises.
Deux voies sont possibles.
Lune imposera les solutions du passé.
Au mieux, elle ne résoudra rien. Elle restera prisonnière de tous les conservatismes, de tous les corporatismes. Elle continuera à laisser les frontières seffacer et la Nation saffaiblir.
Au pire, elle découragera la réussite et elle ruinera les classes moyennes, sans enrichir les plus pauvres. Elle détruira la confiance des investisseurs. Elle nous mettra à la merci de la spéculation. Et pour sen sortir, elle imposera laustérité la plus dure qui plongera le pays dans la dépression et les plus vulnérables dans la misère.
Lautre voie, cest celle qui sera tournée vers lavenir, qui tirera les leçons des crises, qui inventera les solutions du XXIe siècle.
Je vous propose de construire un nouveau modèle de croissance, une nouvelle économie, une nouvelle ambition sociale. Entre le nationalisme et le laissez-faire, je vous propose pour la Nation la voie raisonnable de lunité et de louverture au monde.
La vocation de la France nest pas de seffacer ou de se taire. La vocation de la France, cest dagir pour ceux qui ne peuvent pas agir. Cest de parler pour ceux qui ne peuvent pas parler.
La vocation de la France, cest dêtre au côté des peuples qui veulent être libres, cest dêtre au côté des Chrétiens dOrient quand ils sont persécutés.
La vocation de la France, cest dorganiser autour de la Méditerranée une communauté de destins. La France a lancé lUnion pour la Méditerranée. La France est intervenue pour protéger le peuple libyen du massacre. La France prendra des initiatives pour que la cause de la paix et de la justice triomphent enfin au Moyen-Orient.
La vocation de la France, cest de porter au G20, qui nexisterait pas sans elle, la régulation de la mondialisation, la moralisation de la finance et la taxation des transactions financières pour dégager les ressources dont les pays pauvres ont besoin pour sortir de la misère.
La vocation de la France, cest dêtre le porte-parole de tous ceux qui dans le monde veulent que lhomme ne soit pas sacrifier au commerce, que le droit du travail, de la santé, de lenvironnement soient mis à égalité avec le droit du commerce.
La vocation de la France, cest dêtre partout la voix de ceux qui réclament la justice, la liberté et le droit despérer dans un avenir meilleur.
Par delà les siècles la grande voix de Victor Hugo nous dicte le programme de lavenir : « une liberté sans usurpations et sans violences, une égalité qui admettra la croissance naturelle de chacun, une fraternité dhommes libres, lapplication du principe qui veut que tout homme commence par le travail et finisse par la propriété, le respect de lhéritage qui nest autre chose que la main du père tendue aux enfants à travers le mur du tombeau, lordre comme loi des citoyens, la paix comme loi des nations ».
Mes chers compatriotes,
Entendez mon appel !
La France de Victor Hugo et du général De Gaulle, la France qui regarde vers lavenir, la France qui choisit le progrès, la France qui veut se mettre au service de toute lhumanité, cette France cest la vôtre.
Prenez votre destin en main !
Levez- vous !
Prenez la parole !
Dîtes ce que vous avez dans le cur.
Dîtes ce que vous voulez pour votre pays.
Dîtes le haut et fort.
Dîtes le maintenant !
Françaises, Français,
Depuis trente ans que je me suis engagé au service de notre pays, jai fait une longue route, celle là même qui ma mené jusquà vous.
Jusquà la dernière minute de cette campagne jirai à votre rencontre pour vous parler de la France.
Peuple de France.
Entend mon appel ! Françaises, Français, aidez-moi !
Vive la France !
Vive la République !
Source http://www.lafranceforte.fr, le 16 avril 2012