Déclaration de M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre, sur les grandes orientations de la politique de l'environnement, à Paris le 15 septembre 2012.
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Circonstance : Clôture de la Conférence environnementale au Conseil économique, social et environnemental, au palais d'Iéna, à Paris le 15 septembre 2012
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Mesdames et Messieurs les Ministres, Mesdames, Messieurs,Le Président de la République a ouvert hier cette première conférence environnementale. Il a tracé les orientations ambitieuses de la transition écologique et énergétique. Il a confirmé solennellement les engagements fondamentaux quil avait pris devant le pays. Il me revient donc de conclure vos travaux.
Je sais quils ont été particulièrement denses et riches et les synthèses qui viennent dêtre présentées, le prouvent. Je voudrais remercier à nouveau Monsieur le Président, le Conseil économique et social et environnemental, qui a accueilli à nouveau un événement important de la vie du pays. Je remercie aussi de leur engagement les représentants des syndicats de salariés, des organisations demployeurs, des associations et des ONG mais aussi les élus qui sont pleinement impliqués dans ce débat essentiel pour notre pays. Chacun ici en a bien conscience : la crise profonde que nous traversons, nest pas seulement une crise financière et économique, cest aussi une crise environnementale. Le constat est sans appel : les ressources naturelles sépuisent, la biodiversité recule, les émissions de gaz à effet de serre se concentrent, la qualité de leau et de lair se dégrade. Nous sommes déterminés à affronter cette crise dans sa globalité. Il ny a pas dun côté une logique économique qui serait prioritaire et de lautre, le développement durable qui ne le serait que par éclipse. Ma conception et celle du gouvernement est que lécologie nest pas un frein ou une contrainte mais quelle est un puissant levier de croissance, de compétitivité de nos entreprises et damélioration de notre bien-être collectif.
La conférence environnementale marque une rupture. Nous nous engageons à dessiner ensemble le chemin de la transition écologique, sans tabou, sans nier les contradictions de la société et les difficultés que nous aurons à surmonter et contrairement à ce que chacun a pu observer au cours de la période passée, la volonté politique de faire face aux défis du développement durable ne faiblira pas, je men porte garant devant vous.
Nous voulons ancrer la question écologique dans la durée. Cette première conférence environnementale ne conclut pas le processus, au contraire, elle louvre. Vous vous réunirez à nouveau chaque année et le gouvernement rendra compte devant vous des progrès accomplis. Une feuille de route pour la transition écologique, fruit de vos travaux, sera publiée au début de la semaine prochaine juste le temps de rédiger les choses avec la plus grande précision. Afin de mobiliser tous les ministères, je réunirai un séminaire gouvernemental et jadresserai ensuite à chaque ministre des lettres de cadrage développement durable. Chaque politique publique doit en effet prendre en compte lexigence environnementale. Lurgence environnementale exige une action déterminée.
Notre premier grand chantier il a été évoqué plusieurs fois ces deux jours et cet après-midi cest la transition énergétique, qui repose sur un modèle de développement sobre et efficace. Il faut rompre avec le tout nucléaire pour la production délectricité mais il faut rompre aussi avec le tout pétrole pour les transports car ils sont antinomiques avec cette société de la sobriété que nous voulons promouvoir. Consommer mieux pour consommer moins, tel est bien lobjectif du gouvernement. Le débat sur la transition énergétique va donc souvrir dans les prochaines semaines. Il permettra dexaminer les conditions industrielles, économiques et sociales de la mutation qui sengage. Il sera également loccasion de vérifier la pertinence de la contribution au service public de lélectricité dans sa forme actuelle. Ses conclusions orienteront le projet de loi de programmation sur la transition énergétique qui sera présenté au Parlement avant lété 2013. Sans préjuger de tous les résultats de ce débat, je souhaite vous annoncer dores et déjà des mesures immédiates pour faire face, là aussi comme dans dautres domaines, à des situations durgence et qui elles, nattendent pas. La première, cest de faire reculer la précarité énergétique et de favoriser la maîtrise de la consommation dénergie. Le gouvernement apporte son plein soutien à la proposition de loi de François BROTTES, président de la Commission des affaires économiques de lAssemblée nationale, qui a pour but dinstaurer la tarification progressive de lélectricité et du gaz. Cest une mesure à la fois juste et écologique. Mais en même temps, il faut garantir laccès de tous à lénergie. Cette proposition de loi prévoit aussi lextension du bénéfice du tarif social, ça dépendra dune décision réglementaire, je létendrai à quatre millions de ménages modestes, soit plus de huit millions de personnes alors quaujourdhui ce dispositif ne concerne quun million de ménages. Et par ailleurs, la loi autorisera les collectivités locales qui le souhaitent, à mettre en place une tarification progressive de leau, conformément aux engagements quavait pris le Président de la République avant les élections.
Je veux mobiliser les Français autour de lobjectif de la sobriété énergétique. Je demande donc au ministre de lEducation nationale, de renforcer la sensibilisation des élèves dès lécole primaire et même maternelle, aux enjeux du développement durable cest déjà fait parfois mais il faut le faire de façon méthodique, systématique et le gouvernement lancera dans les prochaines semaines une grande campagne de communication qui mobilisera aussi les acteurs locaux afin dencourager tous les consommateurs à diminuer les gaspillages, à réaliser des économies dénergie et afin de promouvoir à travers cette campagne les bonnes pratiques qui sont déjà engagées, il y en a beaucoup.
La seconde exigence est de développer et de structurer une filière industrielle des énergies renouvelables et de lefficacité énergétique et qui accorde une place très large à linnovation technologique. La France a importé en 2011 pour 60 milliards deuros de pétrole et de gaz, ce qui participe massivement au déficit de notre commerce extérieur. Plus de la moitié du pétrole importé est absorbée par les transports ; il est indispensable dengager des mesures structurelles en faveur de la mobilité durable et dabord bien sûr de renforcer les transports collectifs. Mais je sais que nombre de nos compatriotes nont dautre choix que dutiliser leur propre automobile pour aller au travail. Le plan automobile qui a été adopté fin juillet, soutient la filière de lindustrie automobile par le soutien au développement de véhicules sobres, quils soient électriques ou hybrides.
Mais je voudrais fixer aujourdhui un nouvel objectif ambitieux à nos chercheurs et à nos industriels : dans les dix ans, nous devrons disposer de véhicules consommant deux litres dessence pour mille kilomètres, soit un niveau près de quatre fois plus faible que la consommation moyenne du parc automobile au cent kilomètres, pardon ça ne sarrêtera pas à cent kilomètres, je vous rassure surtout si on veut aller loin ! Et nous avons lambition daller loin. Mais en tout cas vous voyez lambition de lobjectif. Cest ainsi que nous pourrons diminuer notre consommation dhydrocarbure, quon diminuera aussi la charge financière pour les utilisateurs mais que nous en réduirons limpact sur la santé publique et vous voyez bien que je fais allusion à cette question délicate mais quand même quil faut traiter, quest la nocivité des particules fines. Donc cest dans ce vaste plan que nous pourrons avancer dans cette direction essentielle.
Alors nous voulons pour y parvenir, encourager toutes les collaborations industrielles : les pétroliers, les constructeurs et équipementiers qui pourront faire de la France un pays exemplaire mais aussi exportateur de solutions de mobilité durable.
Le bâtiment absorbe quant à lui 40% de notre consommation dénergie et génère environ 20% des émissions de gaz à effet de serre. La rénovation du parc immobilier est donc une priorité absolue à linstar des programmes qui ont été engagés dans dautres pays et particulièrement en Allemagne et conformément à tous les scénarios de transition énergétique. Dautant quelle constitue aussi, mais vous lavez dit, un puissant levier de création demplois industriels durables et non délocalisables. Le Président de la République a rappelé son attachement à la mise en uvre dun programme ambitieux pour porter un million de logements dans le neuf et dans lancien à un niveau de performance thermique. Il a précisé les principales pistes de financement à mettre en uvre et notamment lamélioration des dispositifs daides qui existent déjà pour la rénovation des logements privés et il a également annoncé laugmentation des éco-prêts spécifiques au logement social.
Un guichet unique de la rénovation sera mis en place, chargé de conseiller les ménages qui sont intéressés par cette perspective. Et nous aurons recours pour cela aussi au tiers financement : linvestisseur tiers prendra en charge une partie ou la totalité des travaux de rénovation et il se rémunérera sur les futures économies dénergie. Ce mécanisme sera renforcé par des financements innovants, que ce soit le produit des enchères carbones ou celui des certificats déconomies dénergie.
Les territoires, à travers les régions, à travers les villes, à travers les départements, ne nous ont pas attendus pour agir : de nombreux projets ont vu le jour. Eh bien des appels à projets seront lancés pour les repérer et les soutenir financièrement parce que je peux mappuyer sur cette intelligence locale qui a fait ses preuves et qui est un des acteurs déterminants de la réussite de la transition écologique.
Le Président de la République sest également engagé devant les Français à rééquilibrer notre mix de production délectricité en diminuant la part du nucléaire de 75 à 50% dici 2025. Cest lengagement de la campagne électorale, cest donc la feuille de route du gouvernement. La centrale de Fessenheim sera donc fermée à la fin de lannée 2016. Je désignerai dans les semaines qui viennent, une personnalité chargée dengager la concertation sur la reconversion du site. Il faudra prendre en compte la totalité des conséquences de cette fermeture, lemploi bien sûr, la création de nouvelles activités et la réponse aux besoins en électricité.
Sagissant du gaz de schiste : hier le Président de la République a arrêté une position qui est très claire. Premièrement, il est exclu de recourir à la fracturation hydraulique. Deuxièmement, aucune technique alternative nexiste. Troisièmement, il ny aura aucun permis daccordé.
Alors pour développer les énergies renouvelables, jy reviens, les acteurs de ce secteur ont besoin dun cadre réglementaire stable qui soit en même temps transparent et favorable aux investissements. Nous allons donc simplifier nos procédures administratives tout en maintenant un haut niveau dexigence environnementale. Je réaffirme ici mon soutien à la filière éolienne et au dispositif dobligation dachat. Le gouvernement simplifiera les procédures de planification en supprimant lobligation dappartenir à une zone de développement de léolien ; dici la fin de cette année, un tarif dachat adapté à léolien en outre-mer sera également mis en place pour permettre le développement de capacités adaptées aux contraintes des systèmes électriques non interconnectés. Par ailleurs, un appel doffres sera lancé dici décembre 2012 pour la création dun parc éolien au large du Tréport et de Noirmoutier. Cest un investissement très important mais cest aussi un atout pour le développement dune filière industrielle française.
Quant à la filière solaire, elle a un avenir en France et en Europe à condition que nous misions très précisément sur la qualité car nos entreprises doivent se sentir pleinement soutenues et je pèse mes mots. Un appel doffres sera lancé avant la fin de lannée 2012 pour justement favoriser de grandes installations visant à promouvoir des technologies innovantes ainsi que le développement local. Il faudra privilégier les grands espaces de toits pour éviter la consommation despaces agricoles. Au début de lannée 2013, les volumes cibles de ces projets déclenchant lajustement tarifaire, seront stabilisés en fonction du retour dexpérience sur les projets réalisés depuis 2011. Les réseaux de chaleur, la biomasse ou encore la géothermie, seront également soutenus en prenant appui sur les initiatives locales déjà existantes ou en développement. Sagissant des bioénergies, il faudra évidemment veiller à éviter les conflits dusage entre lalimentation humaine et la production de biocarburant. LADEME lancera début 2013 une initiative pour la construction de démonstrateurs dénergie hydrolienne. Jai demandé à Delphine BATHO et Frédéric CUVILLIER de réaliser dici la fin de lannée une étude sur le potentiel de la filière des énergies marines.
Vous le savez, tout ceci ne pourra se faire, et je le répète, quen travaillant étroitement avec les collectivités territoriales. Elles ont déjà dans beaucoup dendroits développé des plans climat ambitieux. Elles doivent donc poursuivre leurs efforts mais elles doivent savoir quelles ont lappui résolu du gouvernement. Et cest aussi avec nos partenaires européens que nous réussirons la transition énergétique. Comme la dit hier le Président de la République, la Banque publique d'investissement sera la banque de la transition énergétique tournée vers les entreprises. Elle sera alimentée notamment par des fonds dépargne et notamment par le recours à la Banque européenne dinvestissement sous la forme de prêts ou de project bonds.
Jen viens à notre deuxième chantier que vous avez évoqué dans vos synthèses, cest celui de la biodiversité. La France assumera toute sa responsabilité en la matière tant en métropole quoutre-mer où se concentrent 80% de notre biodiversité. Notre pays possède le deuxième espace maritime mondial et abrite 10% de la surface totale des récifs coralliens. Il occupe la première place en Europe pour le nombre despèces, damphibiens, doiseaux et de mammifères. Nous néchappons pas malheureusement à la dégradation de la biodiversité observée au niveau mondial ; la France occupe le cinquième rang mondial pour le nombre despèces menacées. Et pour faire face aux menaces, nous ne partons pas de rien, cest vrai, la stratégie nationale pour la biodiversité est reconnue par tous les acteurs comme un élément fondamental. Elle sera déclinée dans tous les ministères. Mais la biodiversité ne peut se limiter à la protection de sites exceptionnels ou despèces emblématiques. Il faut aller au-delà dune certaine conception de la nature musée ; la biodiversité existe aussi au quotidien ; elle constitue un capital qui permet le développement de très nombreuses activités économiques. Les ressources que nous procure le monde vivant, représentent un potentiel de recherche et de développements encore sous-exploité, par exemple pour fabriquer de nouveaux médicaments, de nouveaux matériaux, pour développer de nouvelles technologies et pour créer des emplois.
La création dune agence nationale était très attendue. Les ministres Delphine BATHO et St??phane LE FOLL mèneront les travaux nécessaires pour fixer son périmètre et ses moyens mais cette agence sera créée en 2013. La loi cadre biodiversité qui sera également présentée en 2013, reprendra toutes ses décisions et ses orientations ainsi que celles qui naîtront du débat que vous allez poursuivre. Ce texte comportera un volet sur le paysage. Le Conseil national de la Mer et du Littoral dont la création avait été annoncée mais qui na jamais été réuni, sera installé enfin dans les prochaines semaines. Par ailleurs, le parc marin de Picardie Côte dOpale sera créé et je demande également que la procédure de classement en parc naturel du Marais poitevin soit poursuivie.
Pour répondre aux enjeux de la continuité écologique, de la consommation de lespace et de létalement urbain, les textes relatifs aux trames vertes, les trames vertes et bleues, seront publiés début 2013 et le gouvernement souhaite mettre un frein au niveau national à lartificialisation nette des espaces agricoles et naturels. Je sais que cest une attente forte mais je connais aussi les problèmes que larrêt total de lartificialisation peut soulever. Cest dans le cadre de la loi sur le logement, lurbanisme et la ville, que prépare Cécile DUFLOT pour le début de lannée 2013 quun calendrier précis sera fixé. Cette loi sera aussi loccasion de définir le cadre juridique dune ville plus dense, moins consommatrice despaces et dénergie.
Sagissant de lagriculture, je veux vous faire part de quatre décisions. La première, cest que le gouvernement entend maintenir le moratoire sur la mise en culture de semences OGM autorisées au niveau communautaire. La deuxième est le lancement dun nouveau plan en faveur du développement de lagriculture biologique. La troisième est linterdiction de lépandage aérien de produits phytosanitaires, sauf dans des cas despèce en labsence de solutions alternatives. Et dune façon générale, leffort de réduction de lutilisation de ces produits, sera poursuivi. La quatrième concerne les biocarburants : face à la hausse des cours des céréales et des oléagineux sur les marchés mondiaux, le gouvernement a décidé de demander à nos partenaires européens et au niveau international, une pause dans le développement des biocarburants de première génération. Au plan national, nous avons décidé de plafonner le taux dincorporation à 7% et datteindre les objectifs communautaires avec des biocarburants de seconde génération. Les agréments seront renouvelés jusquau 31 décembre 2015 et le soutien public sera mis en extinction à cette date.
Le troisième chantier porte sur la prévention des risques sanitaires environnementaux. Je sais que cest une préoccupation majeure des Français. Préoccupation sanitaire dabord : entre 5 et 10% des cancers seraient liés à la dégradation de notre environnement ; préoccupation financière aussi : la mauvaise qualité de lair aurait un coût pour la collectivité compris entre 10 et 40 milliards deuros par an. Le gouvernement est déterminé à diminuer lexposition des populations à ces risques avérés ou émergents ; cest un enjeu de santé publique. Trois priorités sont dores et déjà identifiées. La première est de soutenir leffort de recherche. Cest la condition indispensable pour traiter avec efficacité et discernement les effets sur la santé des différentes pollutions, quelles soient isolées ou multiples ou encore à faibles doses mais récurrentes. Lindépendance des experts sera plus sûrement garantie et certaines définitions seront approfondies comme celle des perturbateurs endocriniens par exemple et la formation et la recherche en toxicologie fortement encouragées.
La deuxième priorité est de protéger les publics les plus sensibles à ces risques sanitaires je pense bien sûr aux enfants, aux femmes enceintes, aux personnes âgées, aux malades. Je tiens à ce que les actions de prévention mais aussi dinformation du public soient centralisées et accessibles et par ailleurs, le gouvernement soutient la proposition de loi de Gérard BAPT pour linterdiction du bisphénol A. Les produits de substitution devront avoir fait la preuve de leur innocuité.
La troisième priorité est de diminuer les inégalités environnementales. Les personnes les plus fragiles cumulent en général précarité économique et sociale et environnementale. Il y a donc là un enjeu lié aux inégalités sociales mais aussi aux inégalités territoriales. Il existe en effet des zones où les risques sont plus marqués, là où saccumulent différents types de pollution : le bruit, les ondes électromagnétiques, les émissions de CO2 et les pollutions chimiques.
Le plan national santé environnement actuellement en vigueur arrive à échéance fin 2013. Il fera lobjet dune évaluation dont nous tiendrons compte pour construire le nouveau plan et le plan cancer sera renforcé sur son volet environnemental.
Le quatrième chantier porte sur la fiscalité écologique. Je suis déterminé et jai bien entendu les rapports aussi qui ont été présentés, à avancer sur cette question et je voudrais vous exposer les principes qui guident laction du gouvernement. La fiscalité écologique est trop souvent perçue comme une menace pour le pouvoir dachat des ménages et pour la compétitivité des entreprises et donc cest un frein pour faire avancer cette question si on en reste à cette approche. Jai la conviction que nous pouvons construire une fiscalité écologique qui soit juste socialement, qui favorise linnovation et la croissance économique et qui améliore aussi la compétitivité de nos entreprises et qui garantisse le financement de notre protection sociale. Il est clair que pour passer dun système fiscal qui néglige la dimension écologique à un système fiscal qui lintègre pleinement, la transition doit être soigneusement préparée et donc il faut veiller à ce quelle ne se fasse pas ni au détriment des ménages modestes ni des entreprises. Alors cela signifie que nous mettrons en place en tout état de cause les accompagnements nécessaires et ce chantier, il faut lengager sans tarder, dans une approche globale car pour la France, le constat est sévère. Nous étions en 2010 à lavant-dernière place des pays de lUnion européenne, juste devant lEspagne pour ce qui concerne la part de la fiscalité environnementale dans le PIB, soit 1,86% pour une moyenne de lUnion européenne à 2,37%. Alors quand on parle beaucoup dharmonisation fiscale en Europe, voilà un chantier que je veux engager pour que la France sengage pour aller au moins vers la moyenne européenne. Cest une exigence et dès la loi de finance 2013 qui sera présentée dans quinze jours, le gouvernement proposera une augmentation de la DGAP portant sur les polluants atmosphériques et la baisse progressive des taux de défiscalisation des biocarburants, je lai dit, interviendra à compter de 2014 jusquà lextinction au 31 décembre 2015.
Enfin nous augmenterons le niveau de malus automobile dès maintenant donc et en cohérence avec nos engagements européens et nous diminuerons de 5 grammes de CO2 par kilomètre le seuil de ce malus. Mais au-delà de la fiscalité, dautres instruments de politique économique seront mis en uvre notamment pour mobiliser efficacement des capitaux privés vers des activités qui répondent aux exigences du développement durable. Une réflexion a été engagée sur la question des financements innovants ; elle sera versée au débat sur la transition énergétique. Un groupe permanent de concertation constitué des parties prenantes de la conférence environnementale et des acteurs concernés, donnera son avis sur toute mesure de fiscalité écologique et il sera également force de proposition.
Le cinquième chantier, c'est la gouvernance environnementale. La transition écologique doit être pilotée. Le Conseil national du développement durable et du Grenelle de lenvironnement va se transformer en Conseil de la transition écologique. Et ce nest pas quune formule car il se verra confier des missions pérennes et étendues, pas seulement pour le suivi des politiques mises en uvre mais aussi lélaboration de lagenda des conférences environnementales, il intègrera une dimension européenne et internationale. Renforcé dans ses missions mieux articulées avec le Conseil économique et social et environnemental ou encore la Conférence nationale de lindustrie, ce nouveau Conseil de la transition écologique souvrira à la représentation nationale en accueillant un nouveau collège de parlementaires et se déclinera aussi dans les territoires sous légide des collectivités territoriales.
Au-delà de ces questions institutionnelles, deux exigences simposent pour les années à venir : la participation effective des citoyens aux décisions publiques et la simplification de notre droit de lenvironnement. Ce droit fixe un niveau dexigence élevé mais il est complexe car il résulte dempilements successifs. Nous avons le devoir de le simplifier sans lappauvrir ni le dénaturer. Cest ainsi quil gagnera en lisibilité et garantira davantage de sécurité juridique et donc en efficacité.
A lexemple de la Suède dont les réussites sont analysées et commentées dans toute lEurope, la France doit disposer de démonstrateurs de développement durable. Ces démonstrateurs sont des éco-quartiers, voire des éco-villages ou des éco-villes qui atteignent une taille critique, suffisante et qui permettent de valoriser un savoir-faire et des technologies innovantes en matière de développement durable. Lobjectif est dy traiter toutes les problématiques énergétiques pour parvenir à une consommation zéro.
La participation des citoyens que jévoque est dautant plus nécessaire quon sait quil y a du scepticisme sur la capacité à agir et à aller vers ces objectifs. Pourtant, je le disais, beaucoup de bonnes pratiques nous montrent que cest possible et nous savons par expérience et je le sais particulièrement que par le dialogue, par le débat, par la mise en place dateliers citoyens, quon peut progresser parfois très vite, parce que lobjectif, ce nest pas de contraindre, cest de convaincre, même si bien sûr les responsabilités politiques gouvernementales doivent être assumées Monsieur LEBEGUE, vous y avez fait allusion, elles le seront.
La responsabilité sociale et environnementale des entreprises, la fameuse RSE, doit aussi jouer son rôle. Lobligation qui est faite aux entreprises détablir un rapport social et environnemental a été inscrite dans la loi Grenelle 2. Elle na pas vraiment été mise en uvre correctement à ce jour. Le décret dapplication sera modifié pour que la distinction quil instaure entre sociétés cotées et non cotées, soit remplacée par un critère plus pertinent qui serait lié à la taille des entreprises.
Les négociations interprofessionnelles entre partenaires sociaux qui font suite à la conférence sociale qui sest tenue également ici, auront aussi à prendre en compte les questions de santé au travail et de risques environnementaux, en particulier dans le cadre des institutions représentatives du personnel.
Enfin lEtat entend soutenir les associations qui uvrent pour la protection de lenvironnement. Les dispositions fiscales en faveur du mécénat seront modifiées afin de permettre à celles qui ont des activités en dehors de nos frontières, de bénéficier de dons plus importants à linstar de ce qui existe aujourdhui pour les associations à caractère humanitaire. Le ministère de lEcologie, sous la responsabilité de Delphine BATHO, augmentera dau moins 10% ses subventions à lensemble du monde associatif dès lannée prochaine.
Enfin je voudrais lancer un appel à toutes les associations pour quelles prennent toute leur part dans la mise en uvre des emplois davenir. Là il y a une opportunité pour les associations de disposer de personnes qui viendront les accompagner, les aider dans leur action mais aussi de tendre la main à ces jeunes éloignés de lemploi, dautant que lEtat finance et cest aussi une aide à 75% ces emplois davenir.
Mesdames, Messieurs, cest avec beaucoup de conviction mais aussi dhumilité que je me suis exprimé devant vous, conscient du travail qui nous attend dans les mois et les années à venir. Le Président de la République a fixé un cap, celui de la transition écologique et énergétique. Sachez que le gouvernement mettra tout en uvre pour engager sans attendre et réussir dans la durée cette transition. Et cette transition, cest la construction dun nouveau modèle qui correspond à ce que lépoque dans laquelle nous vivons, exige de nous, les responsables politiques, économiques, associatifs, les citoyens, de faire face aux défis qui sont devant nous, en prenant à bras le corps ces questions. Avec lobjectif aussi davancer concrètement, pas à pas, sans faiblesse, pour ainsi créer la confiance. Parce que la confiance, cest la clef de la réussite.
Aujourdhui, après ces deux jours de débat, je considère quun pas important a été fait comme il avait été fait dans la conférence sociale ceux qui pensent quon perd du temps je pense que nous en avons gagné aujourdhui. A nous de démontrer par la suite que nous pouvons réussir. Nous ne réussirons quensemble. Alors je compte sur vous. Vous pouvez compter sur le gouvernement.
Source http://www.gouvernement.fr, le 17 septembre 2012
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