Déclaration de Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, sur la politique en matière d'éducation, Paris le 10 janvier 2017.

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  • Najat Vallaud-Belkacem - Ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche

Texte intégral

Mme la présidente. L'ordre du jour appelle les questions sur la politique en matière d'éducation.
Je vous rappelle que la Conférence des présidents a fixé à deux minutes la durée maximale de chaque question et de chaque réponse.
Nous commençons par les questions du groupe Les Républicains.
La parole est à M. Xavier Breton.
M. Xavier Breton. Je souhaite, madame la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, vous interroger sur la politique de recrutement menée par votre ministère et sur les difficultés qu'elle peut rencontrer, d'ordre quantitatif et qualitatif.
S'agissant des difficultés d'ordre quantitatif, nous constatons, année après année, que les concours externes de recrutement des professeurs des écoles ne parviennent malheureusement pas à pourvoir l'ensemble des postes ouverts, le nombre de postes restés vacants ayant ainsi doublé entre 2015 et 2016, passant de 283 à 561.
Les difficultés de recrutement se posent également en termes qualitatifs avec une baisse dans les exigences de recrutement. Selon l'Inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche, « il semble bien que dans certaines académies, des candidats au niveau problématique aient été admis pour ne pas laisser inoccupés trop de postes ». Vous comprendrez, madame la ministre, que nos compatriotes puissent s'inquiéter de l'avenir de leurs enfants.
Je souhaite également évoquer la progression inquiétante des démissions d'enseignants stagiaires. En effet, entre 2012 – début de la législature – et 2016, le taux de démission des enseignants stagiaires a doublé pour les enseignants du second degré et même triplé pour ceux du premier degré. Comment, madame la ministre, expliquez-vous de telles augmentations ? Sont-elles dues au caractère éprouvant de l'année de stage, pendant laquelle les stagiaires doivent assurer un service d'enseignement à mi-temps tout en suivant leur formation et, parallèlement, en menant leur travail de recherche ?
Ces démissions sont aussi inquiétantes dans leurs conséquences puisqu'elles sont compensées par le recrutement sur des listes complémentaires au concours, voire par des enseignants contractuels dont la formation risque d'être succincte.
Vous comprendrez, madame la ministre, que la politique de recrutement que vous menez inquiète fortement les parents d'élèves de notre pays. Il est sans doute un peu tard pour vous pour apporter des réponses…
M. Patrick Hetzel. En effet…
M. Xavier Breton. …mais il est sans doute temps d'analyser les raisons de ces difficultés.
M. Patrick Hetzel. Excellent !
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le député, j'ai compris de votre question que vous vous inquiétiez de notre capacité à recruter des professeurs lorsque nous ouvrons des postes comme cette majorité a assumé de le faire.
M. Xavier Breton. Rassurez-nous.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Je veux vous rassurer sur ce point. Le nombre de candidats inscrits aux concours pour l'année 2017 est de 190 000 pour 30 000 postes ouverts, soit une augmentation par rapport à l'année dernière de 5 %.
Oui, indéniablement, nous avons eu au début du quinquennat, dans les années 2012-2013, une difficulté à pourvoir tous les postes que nous ouvrions. La raison en est simple : comme l'ancienne majorité n'avait cessé de supprimer des postes dans l'éducation nationale (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains), elle ne faisait plus de ce métier d'enseignant un métier d'avenir et n'attirait pas spontanément des étudiants vers ce métier. Lorsque nous sommes revenus au pouvoir, en 2012, il nous a fallu du temps pour faire passer aux étudiants le message inverse, afin qu'ils s'engagent dans des études qui sont, comme vous le savez, des études longues, avant de passer le concours.
Aujourd'hui, nous avons un nombre de candidats intéressant, satisfaisant. Certes, il faut aller encore plus loin pour obtenir un encore meilleur niveau. Cela étant, je vous rappelle que tous les candidats retenus sont jugés par les jurys comme ayant le niveau convenable pour enseigner.
M. Xavier Breton. On peut s'interroger.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Je vous rappelle qu'il arrive aux jurys de ne pas pourvoir l'ensemble des postes ouverts au concours parce qu'ils ont considéré que les candidats n'avaient pas le niveau requis. C'est bien la preuve qu'ils ne reçoivent pas les candidats lorsqu'ils jugent leur niveau insatisfaisant.
Je veux bien, monsieur Breton, que l'on rentre dans les détails, que l'on donne dans la polémique. Mais si l'on veut s'en tenir à l'essentiel, la meilleure façon d'avoir un nombre suffisant d'enseignants dans notre pays est encore d'ouvrir et de créer des postes.
M. Xavier Breton. Toujours la même approche quantitative.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Comment voulez-vous, alors que le candidat que vous soutenez annonce 500 000 postes de fonctionnaires en moins, créer à l'avenir suffisamment de postes de professeurs pour nos élèves ?
M. Xavier Breton. Nous voulons des professeurs de qualité.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. La meilleure façon d'avoir des professeurs de bon niveau, c'est d'avoir des professeurs que l'on forme. Vous avez montré par le passé votre capacité à supprimer la formation initiale. Pour l'avenir, si vous reveniez un jour aux responsabilités, vous assumez d'ores et déjà de la rogner à nouveau puisque vous annoncez des économies très importantes dans l'éducation nationale.
Bien loin de tout cela, le gouvernement auquel j'appartiens a rétabli la formation initiale, a créé 60 000 postes et ne cesse d'investir dans la formation continue ; et nous devons le faire davantage à l'avenir. Cela devrait vous rassurer.
M. Xavier Breton. On voit le résultat !
Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard.
Mme Annie Genevard. Madame la ministre, depuis l'arrivée de votre majorité au pouvoir, le nombre de démissions de professeurs a significativement augmenté – depuis 2012 : le phénomène est daté. Comme l'a dit Xavier Breton, il a doublé dans le secondaire et triplé en primaire, ainsi que l'a révélé un récent rapport sénatorial
À cela vous répondez, madame la ministre, que rapporté au nombre total d'enseignants, ce serait peu. Cet argument mésestime ce qu'on appelle un signal faible, qui est pourtant bien révélateur d'un malaise croissant depuis 2012. Certains avancent que ce serait lié au recrutement massif de 60 000 postes, masse dans laquelle il y aurait une part de perte naturelle, si j'ose dire. Cet argument ne manque pas de saveur quand on songe que ce recrutement massif et peu regardant souvent sur le niveau, contrairement à vos affirmations, madame la ministre, serait la source de problèmes qu'il était censé résoudre !
Le plus sage serait d'écouter ce que disent les enseignants eux-mêmes et qui interpellent directement votre responsabilité. En cause : l'année de stage dont vous nous avez expliqué pendant cinq ans qu'elle allait résoudre tous les problèmes ; des réformes inconséquentes et inutiles, comme les rythmes scolaires ou la réforme du collège, massivement rejetées par les enseignants…
Mme Martine Faure. Ce n'est pas vrai.
Mme Annie Genevard. En cause encore l'abandon de dispositifs qui fonctionnaient bien, qui apportaient à la mixité sociale, comme les classes bilingues ; des matières sacrifiées comme les langues anciennes ; une formation inappropriée, trop théorique disent les enseignants et qui néglige l'essentiel, à savoir l'enseignement des savoirs fondamentaux ; la déconsidération d'un métier que l'on délaisse ; l'absence de soutien hiérarchique ; l'exposition à la violence verbale et même physique ; l'infantilisation par des consignes et des programmes qui ulcèrent – j'en veux pour preuve la formation qui est en ce moment délivrée sur l'apprentissage de la grammaire, qui est un pur scandale.
Ce ne sont pas les quelques dizaines d'euros mensuels consentis en fin de quinquennat qui vont changer les choses. Alors madame la ministre, comptez-vous prendre réellement au sérieux ces démissions de plus en plus nombreuses d'enseignants ?
M. Frédéric Reiss. Très bien.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. De quoi parle-t-on exactement, madame la députée ? Du fait que certains enseignants, après avoir fait leurs premiers pas dans l'enseignement, soient amenés à se rendre compte que ce métier n'est pas fait pour eux. Commençons par les chiffres : 0,15 % de la masse salariale. Nous sommes en train de parler de 0,15 % de la masse salariale ! Chiffre à considérer au regard du million de fonctionnaires dans l'éducation nationale.
M. Xavier Breton. Parlez en termes d'effectifs, pas de masse salariale ! Vous êtes dans la seule logique comptable.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Ce sera sans doute beaucoup moins demain lorsque vous serez passés par là, mais aujourd'hui, il s'agit d'un million de fonctionnaires.
Est-ce un drame que des personnes qui font leurs premiers pas dans l'éducation nationale se rendent compte que finalement l'enseignement n'est pas fait pour eux et décident de se reconvertir ? Est-ce, a contrario, un drame que des personnes, au demeurant de plus en plus nombreuses, qui ont commencé une carrière dans un autre secteur professionnel décident de se reconvertir dans les métiers de l'enseignement ? Je ne vous entends guère commenter ce phénomène, mais il existe !
C'est ainsi, la vie professionnelle a changé. On peut être amené à bouger, c'est ce qu'on appelle la mobilité et cela concerne aussi les professeurs.
Mme Annie Genevard. Écoutez les enseignants !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Il n'y a pas de raison d'en profiter pour, une fois de plus, dérouler votre argumentaire décliniste, défaitiste au sujet de l'école. Non, l'école de la République française ne ressemble pas à ce que vous venez de décrire, madame Genevard. (« Très bien » sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)
L'école de la République française telle que je la connais, mais peut-être n'en vois-je que les bons aspects – et je crois être plus souvent que vous sur le terrain aux côtés des professeurs – cette école donc est faite d'enseignants qui déploraient depuis des années la disparition de la formation initiale et qui sont heureux qu'elle soit revenue.
M. Patrick Hetzel. Elle n'a jamais été supprimée ! C'est un mensonge.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Ce n'est pas parce qu'ils nous demandent de l'améliorer, comme la formation continue, que cela signifie qu'il faut jeter le bébé avec l'eau du bain et y renoncer à nouveau.
M. Xavier Breton. Dans combien de communes êtes-vous allée ? Vous êtes enfermée dans votre ministère.
Mme la présidente. Monsieur Breton…
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Elle est faite d'enseignants qui demandent de la considération. La considération, et j'insiste sur ce point, est en effet salariale. Et c'est notre gouvernement qui a adopté une indemnité de 1 200 euros pour les enseignants du premier degré, ou qui a adopté un protocole Parcours professionnels, carrières et rémunérations de 1 milliard d'euros pour revaloriser les rémunérations. Mais la considération à l'égard des enseignants est également faite des discours que les uns et les autres tiennent à leur sujet. Alors, cessez de les présenter comme vous le faites, cessez de les infantiliser.
Mme Annie Genevard. Vous niez les problèmes.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Cessez d'exagérer leur situation. La réalité, c'est que les enseignants demandent à être regardés pour ce qu'ils sont, ni plus ni moins. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)
Mme la présidente. Manifester un peu de courtoisie mutuelle ne nuirait pas à cette séquence de questions-réponses, mes chers collègues.
La parole est à M. Patrick Hetzel.
M. Patrick Hetzel. Madame la ministre, il y a quelques semaines, cinq chefs d'entreprise ont démissionné du Conseil national éducation-économie, où ils siégeaient en tant que personnalités qualifiées. Les entreprises qu'ils représentaient ne sont pas des moindres, puisqu'il s'agit de Schneider Electric, Vinci, BNP Paribas, Manpower France et de l'Institut de l'entreprise.
Le Conseil national éducation-économie est, vous le savez, une instance qui a pour mission de rapprocher l'école de l'entreprise. Les dirigeants concernés mentionnent deux motifs pour justifier leur décision.
Il y a d'abord une incompréhension face aux allégements des programmes d'économie en classe de seconde. Vous avez en effet décidé, madame la ministre, que les élèves n'étudieraient plus que quatre chapitres obligatoires, au lieu de cinq. Plus précisément, vous avez supprimé celui qui portait sur la façon dont se forment les prix sur un marché, que vous avez considéré comme facultatif. Le Conseil national éducation-économie n'avait pas été consulté sur le sujet. Il y a, là encore, un écart entre ce que vous dites et ce que vous faites. Alors que l'entreprise devrait être au coeur de l'enseignement de l'économie, vous faites tout le contraire.
La deuxième raison de cette démission est la fin de non-recevoir que vous avez opposée à une demande de mise à disposition de moyens pour réaliser un rapport sur l'apprentissage, ce qui est encore plus grave. Pour ces chefs d'entreprise, la relance de l'apprentissage est un enjeu crucial. Or, vous n'avez cessé, depuis cinq ans, de déstabiliser cette voie d'excellence, avec la division par deux du crédit d'impôt apprentissage, la suppression de l'indemnité compensatrice forfaitaire et l'impossibilité pour les jeunes de moins de quinze ans de devenir apprentis, même s'ils sont déjà titulaires du brevet des collèges.
Le fossé ne cesse de se creuser entre les entreprises et l'éducation nationale sur cette question de l'apprentissage. Madame la ministre, quelles mesures comptez-vous donc prendre pour développer et relancer l'apprentissage, dont on sait qu'il permet une excellente insertion des jeunes ? Jusqu'à présent en effet, et cela depuis cinq ans, votre majorité ne l'a hélas pas compris.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Monsieur le député, je vous remercie d'abord de me préciser ce qu'est le Conseil national éducation-économie que nous avons créé - je vous rappelle en effet qu'il n'existait pas auparavant.
M. Patrick Hetzel. Justement ! Il faut voir ce que vous en faites !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Il faut croire que les relations entre l'école et l'entreprise étaient beaucoup plus développées au moment où cela n'existait pas... Mais passons.
Le Conseil national éducation-économie fonctionne vraiment très bien et je me réjouis chaque semaine de ce qu'il est capable de produire et des avancées qu'il nous a permis d'obtenir, par exemple pour faire en sorte que se développent au niveau local des conseils qui rassemblent chefs d'établissements et entreprises du secteur afin de multiplier les possibilités de stage pour nos élèves de troisième ou de lycée professionnel. Mais de cela, bien entendu, vous ne parlez pas.
Le Conseil national éducation-économie nous permet aussi d'avancer sur la question du numérique…
M. Patrick Hetzel. Ce serait bien que vous répondiez à la question !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. …et de la façon dont le numérique innerve aujourd'hui les lycées professionnels, pour préparer les métiers de demain, les métiers d'avenir et, finalement, faire mieux correspondre nos formations avec le marché du travail de demain.
Pour aller plus loin : peut-on aujourd'hui tirer un bilan de ce que nous aurons fait en faveur du rapport entre l'école et l'entreprise ? Oui, et le bilan essentiel est simple : les élèves sont mieux préparés à leur orientation future. Nous avons introduit un « parcours Avenir » qui commence en classe de sixième et fait que les élèves n'ont plus besoin d'attendre la classe de troisième et l'expérience du premier stage pour découvrir le monde professionnel.
M. Patrick Hetzel. Vous ne répondez pas à la question !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Ce parcours Avenir, nous l'avons précisément construit en partenariat étroit avec un certain nombre d'entreprises, que je remercie.
M. Patrick Hetzel. Vous faites un hors sujet ! C'est bien, pour un ministre de l'éducation !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Il permet à chaque élève, de la sixième à la troisième, de faire plusieurs fois l'expérience de visiter des entreprises, d'accueillir des entrepreneurs ou des salariés dans la classe, de voir des mini-entreprises, pour découvrir davantage ce monde avant de s'y plonger et de décider de son orientation en classe de troisième.
Vous aurez noté par ailleurs que, toujours pour améliorer cette orientation, les lycéens qui arrivent en classe de seconde professionnelle sont désormais autorisés, jusqu'aux vacances de la Toussaint, à changer d'orientation si celle qu'ils ont choisie leur déplaît ou ne leur convient pas. Nous luttons donc ainsi contre l'orientation subie.
Vous aurez enfin noté que nous avons créé dans tous les bassins d'emploi de France – cela n'existait pas auparavant – 330 pôles de stages destinés à trouver des stages pour les lycéens professionnels ou les stagiaires de troisième qui n'en trouvent pas par eux-mêmes.
Pour ce qui est des apprentis, les réponses vous ont souvent été apportées. Une partie d'entre elles dépend du ministère de l'emploi mais je puis vous indiquer, pour ce qui me concerne, que le ministère de l'éducation nationale développe de plus en plus l'apprentissage sous statut scolaire. Nous en étions, de mémoire, à 40 000 élèves en 2012 et nous nous sommes fixé l'objectif d'en toucher au moins 10 000 de plus. Nous sommes en train d'atteindre cet objectif et il faudra aller plus loin.
Par ailleurs, nous développons aussi les partenariats entre les lycées professionnels et les centres de formation d'apprentis ( CFA ) qui permettent par exemple de disposer de plateformes communes sur lesquelles lycéens et apprentis se retrouvent pour mener à bien des projets. Ces partenariats permettent aussi aux apprentis, auxquels vous vous intéressez en réalité assez peu (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains),...
Mme Annie Genevard. Quelle agressivité !
M. Patrick Hetzel. C'est incroyable !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. …lorsque l'entreprise qui les employait les lâche pour une raison ou pour une autre ou lorsqu'ils ne trouvent pas d'entreprise d'accueil pour effectuer leur apprentissage, de revenir sous statut scolaire, en tant que lycéens professionnels, car nous avons créé les bonnes passerelles pour cela.
Vous le voyez, nous n'avons guère de leçons à recevoir non plus à ce sujet. (Protestations sur les bancs du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. Madame la ministre, mes chers collègues, je rappelle que la Conférence des présidents a fixé à deux minutes le temps de parole pour les questions comme pour les réponses. Je veux bien faire preuve de souplesse, mais je ne vous laisserai pas non plus doubler vos temps de parole.
La parole est à Mme Virginie Duby-Muller.
Mme Virginie Duby-Muller. Madame le ministre, depuis quelques semaines, plus d'une cinquantaine de lycées sont en grève : il s'agit des lycées d'éducation prioritaire, qui sont les grands oubliés de votre gouvernement.
M. Yves Durand. Alors ça, il faut oser le dire !
Mme Virginie Duby-Muller. Rappelez-vous : votre prédécesseur, Vincent Peillon, avait refusé de traiter cette question en 2014, repoussant à 2017 le règlement d'une situation pourtant urgente et sensible. C'était bien commode, alors que les difficultés scolaires et sociales ne s'arrêtent pas à la fin de la troisième.
Aujourd'hui, en 2017, la situation est au point mort. Les enseignants et les élèves de ces lycées ont dû descendre dans la rue pour déplorer l'inaction du Gouvernement et dénoncer le manque global de moyens. Ils craignent de perdre à terme leur label « éducation prioritaire » et réclament avec réalisme des moyens pérennes, des effectifs de classe réduits, des cours en demi-groupes, des aides aux devoirs, des compensations légitimes pour les personnels et la consolidation des microlycées et des options proposées.
Madame le ministre, il y a dans notre système éducatif trop d'inégalités, que vos réformes ne font qu'aggraver. C'est malheureusement aussi le cas dans l'enseignement des langues étrangères. Vous avez ainsi, dans votre très controversée réforme des collèges, supprimé en partie les classes bilangues au nom d'une prétendue égalité des enseignements. Or, sur nos territoires, l'égalité n'existe plus. Ainsi, en Haute-Savoie, dans un pays pourtant frontalier de la Suisse et où l'apprentissage de l'allemand est un atout, le nombre de classes bilangues a été divisé par deux. Les académies de Poitiers, Grenoble, Rouen et Lyon en perdent respectivement de 70 % à 75 % ; 65 % des sections sont supprimées à Lyon, contre 10 % à Marseille. Pourtant, à Paris, vous maintenez 100 % de ces classes.
Comment peut-on parler d'égalité ? Sur le terrain, je vous l'assure, la promesse d'un renforcement de l'égalité dans le parcours scolaire est loin d'être une évidence. Où est donc, madame le ministre, l'égalité pour les élèves et les professeurs, quand nous constatons les importantes disparités territoriales créées par vos réformes et par des oublis injustifiables ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Madame la présidente, vous m'avez demandé d'être brève et je vais m'efforcer de l'être (Rires sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain) mais il y a quelque chose de si cocasse, madame la députée Duby-Muller, à vous entendre parler des lycées d'éducation prioritaire !
Comment ? Vous n'avez pas compris qu'en réalité, c'est à vous qu'ils s'adressent ? (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.) Mais oui, c'est à vous qu'ils s'adressent, bien sûr ! Lorsqu'ils vont dans la rue pour crier leur inquiétude que la réforme que nous nous sommes engagés à faire – et que nous ferons, bien évidemment – puisse, si les responsabilités venaient à changer, ne pas être faite, à qui, à votre avis, s'adressent-ils ? (Mêmes mouvements.)
Je suis donc très heureuse de vous avoir entendue poser cette question, qui sera consignée : chacun pourra se souvenir que, d'une certaine façon, vous vous êtes engagée à faire cette réforme, puisque vous y accordez tant d'importance.
Je vais maintenant vous dire en quoi consiste cette réforme de l'éducation prioritaire – car sans doute faut-il en effet s'intéresser un peu au sujet avant d'en parler. (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)
La réforme de l'éducation prioritaire que nous avons faite pour les collèges et les écoles, ce n'était pas simplement pour le plaisir de réformer ! Elle s'est faite avec des moyens supplémentaires : 350 millions d'euros. Êtes-vous prête à mettre vous aussi 350 millions d'euros pour réformer les lycées d'éducation prioritaire ? Nous en reparlerons.
Elle s'est faite aussi comme une réforme cartographique, c'est-à-dire qu'il s'est agi de prendre en considération l'évolution des territoires pour mieux concentrer l'aide sur ceux qui en ont le plus besoin, de faire sortir certains collèges du dispositif et d'y faire entrer de nouveaux, paupérisés.
C'est donc bien ce travail qu'il faudra faire avec les lycées de l'éducation prioritaire quand on les réformera, travail qui demande évidemment d'identifier des indicateurs sociaux précis et une réalité territoriale. Ce n'est pas en un claquement de doigt qu'une telle réforme se fait. Le jour où elle se fera, en revanche, il sera bien sûr indispensable de redessiner l'éducation prioritaire des lycées et d'y consacrer plus de moyens : il faut en effet arrêter de saupoudrer, et donner des coups de pouce là où c'est nécessaire. Il faudra aussi, bien sûr, repenser la pédagogie dans ces lycées, raison pour laquelle il faut se donner le temps de bien faire cette réforme.
Voilà la réponse qui a été faite aux lycées d'éducation prioritaire, qui l'ont, je crois, parfaitement entendue et qui s'adressent à vous, je le répète, lorsqu'ils s'inquiètent que cet engagement puisse ne pas être tenu à l'avenir. (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.)
Pour ce qui est des classes bilangues pour finir, vous évoquez un département particulièrement symptomatique : votre département, madame la députée, a en effet vu la création de vingt-deux classes bilangues de continuité à la rentrée 2016, ce qui a porté leur nombre à trente-cinq.
M. Yves Durand. Eh bien voilà !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Il n'a, je le rappelle, jamais été question de détruire les classes bilangues de continuité, mais seulement les classes bilangues de contournement. Je ne sais donc pas de quoi vous me parlez.
M. Yves Durand. Voilà ! C'est scandaleux !
* Rappel au règlement
Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard, pour un rappel au règlement.
Mme Annie Genevard. Ce rappel au règlement se fonde sur l'article 58, alinéa 1 du règlement de l'Assemblée nationale.
Madame la ministre, nos échanges de ce soir se situent dans le cadre d'une série de questions cribles, pour lesquelles nous souhaiterions que vous ayez un comportement plus respectueux à l'égard de l'opposition et de la représentation nationale. (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)
Vous pouffez, vous riez. Quel mépris ! Vous nous trouvez cocasses, vous allez tout nous expliquer parce que nous ne comprenons rien, nous ne savons rien, nous n'allons pas sur le terrain… C'est vraiment pitoyable. Madame la présidente, ce n'est pas ainsi que doit se comporter une ministre de la République. Ce n'est pas ainsi qu'on se comporte devant la représentation nationale. Un peu de respect !
Nous nous situons sur le terrain politique, nous avançons des arguments politiques. Votre comportement, lui, n'est pas de cette nature. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe Les Républicains.)
* Questions sur la politique en matière d'éducation (suite)
Mme la présidente. La parole est à M. Guénhaël Huet.
M. Guénhaël Huet. Madame la ministre, plusieurs rapports et études récents montrent la progression des effectifs de l'enseignement privé depuis de nombreuses années. Ils montrent également que l'enseignement privé coûte sensiblement moins cher que l'enseignement public : près de 35 milliards d'euros de moins, selon une étude réalisée par l'iFRAP - Fondation pour la recherche sur les administrations et les politiques publiques. Ainsi, la dépense par élève de primaire est de 2 079 euros dans le public contre 1 618 euros dans le privé et, dans le secondaire, le coût par élève est de 4 294 euros dans le public contre 3 161 euros dans le privé.
Globalement, l'enseignement public reçoit 12,4 milliards d'euros de plus que le privé de la part des collectivités et, depuis quelque temps, nombre de communes, de départements et de régions ne cessent de diminuer leur contribution à l'enseignement privé, notamment au titre du fonctionnement.
M. Yves Durand. Ils ont raison !
M. Guénhaël Huet. Il est certes parfois fait grief à l'enseignement privé de ne pas respecter la carte scolaire : si l'on souhaite progresser sur ce point précis, je suggère que l'on mette un terme à la règle dite des « 80/20 », qui limite les crédits accordés au privé à 20 % du budget global de l'action éducatrice de l'État.
Madame la ministre, les établissements privés voient leurs effectifs augmenter parce que de plus en plus de familles leur font confiance et que les résultats obtenus par les élèves qui les fréquentent sont bons.
M. Yves Durand. Parce qu'il y a une sélection !
M. Guénhaël Huet. Je vous demande donc de préciser les mesures que vous entendez prendre pour que l'État et, accessoirement - car ce n'est évidemment pas vous qui en décidez - les collectivités locales maintiennent leur soutien financier à un enseignement qui a fait ses preuves et les fait encore. Nous ne sommes plus à la fin du XIXe siècle ni au début du XXe et l'idéologie devrait aujourd'hui faire place à l'intérêt de notre système éducatif, à l'équité et à l'intérêt de nos enfants.
Je souhaiterais enfin, madame la ministre, que votre réponse puisse être qualifiée de « décontractée », car il s'agit ici d'une séance de questions cribles et non pas de questions au Gouvernement. Nos échanges pourraient donc être placés sous le signe…
M. Yves Durand. De l'oecuménisme !
M. Guénhaël Huet. - de l'objectivité plutôt que sous celui de la subjectivité - voire parfois, effectivement, sous celui du mépris.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Monsieur le député, je vous répondrai, bien entendu, sur le même ton que celui que vous avez employé, et d'abord en vous disant que l'actuel gouvernement accueille et accompagne l'enseignement privé de la même façon que cela s'est fait dans le passé, c'est-à-dire, comme vous l'avez rappelé, avec la règle des 80/20, et même avec un budget en augmentation : étant donné que nous avons augmenté le budget de l'ensemble de l'éducation nationale, l'enseignement privé a bénéficié d'un budget de 7,4 milliards d'euros en 2017, soit une hausse de plus de 200 millions par rapport à 2016, ce qui nous a permis d'augmenter le forfait d'externat et les crédits pédagogiques.
Cela étant rappelé, j'ai trouvé votre question très intéressante. Pour le coup, je vous sais gré d'avoir présenté les choses telles que vous les pensez et, je le crois, telles que votre famille politique les pense. Il n'y a pas de mépris dans ce que je dis : nous avons le droit d'avoir des oppositions…
Les questions précédentes, qui me faisaient le procès de ne pas suffisamment m'occuper de l'éducation prioritaire, étaient une plaisanterie. Vous, vous avez l'honnêteté de dire les choses telles que votre famille politique les pense : il faut moins investir dans le service public de l'éducation nationale, déverrouiller la règle des 80/20 pour permettre à davantage d'établissements privés d'ouvrir en France et, par conséquent, non pas mieux soutenir l'éducation prioritaire – il n'en est pas question ! – mais créer un vaste marché de l'éducation dans lequel, bien entendu, seules les familles les plus favorisées auront les moyens de choisir l'établissement de leurs enfants.
M. Yves Durand. Très bien !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. C'est donc une sélection par l'argent que vous appelez de vos voeux.
M. Yves Durand. Eh oui ! C'est bien là le sujet !
M. Xavier Breton. C'est déjà le cas !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Et pendant ce temps, l'une de vos collègues nous fait le reproche de ne pas avoir suffisamment investi dans l'éducation prioritaire !
M. Xavier Breton. Les inégalités n'ont jamais été aussi importantes qu'aujourd'hui !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. En toute objectivité, nous gagnerions à avoir des débats plus honnêtes. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)
Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Reiss.
M. Frédéric Reiss. Madame la ministre, l'été dernier, le Conseil national d'évaluation du système scolaire - CNESCO - a publié d'intéressantes préconisations pour améliorer l'orientation, les formations et l'insertion des jeunes de l'enseignement professionnel. Tant que la France ne saura pas redonner ses lettres de noblesse au « travail de la main », nous ne pourrons pas offrir de meilleures perspectives d'avenir à notre jeunesse. C'est d'ailleurs un des objectifs que je me suis fixé en participant régulièrement aux travaux du CNESCO.
L'enseignement professionnel est un élément central de notre système éducatif, puisqu'en plus d'être à la croisée de l'éducation, du marché du travail, de l'économie et du social, il accueille un tiers des élèves du second cycle de l'enseignement secondaire. Il en résulte aujourd'hui un enseignement professionnel éclaté entre, d'un côté, quelques réussites ponctuelles associant des formations de qualité et une insertion rapide dans le marché du travail et, de l'autre, de graves dysfonctionnements affectant le destin des jeunes parmi les plus fragiles de notre pays.
Pour faire face aux nombreux défis qui l'attendent ces prochaines années, la responsabilité de l'enseignement professionnel ne doit-elle pas être confiée aux régions ? Cela garantirait une plus grande cohérence entre les lieux de formation et les bassins d'emploi. Les régions, aujourd'hui compétentes en matière d'apprentissage et de formation pour adultes, sont probablement plus qualifiées que les rectorats pour adapter rapidement le système de formation aux débouchés professionnels et mieux préparer les jeunes à s'insérer dans la vie active.
Par ailleurs, la gestion de l'enseignement professionnel par une seule entité permettrait de clarifier les débouchés, d'intensifier la sensibilisation et, au final, de contrer le manque d'attractivité injustifié dont souffrent les filières professionnelles auprès des familles et des élèves.
Madame la ministre, comment développer l'enseignement professionnel et l'apprentissage dans notre pays ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Monsieur le député, au fond, en quoi serait-il équitable, juste et pertinent de traiter l'enseignement professionnel différemment du lycée général ou du lycée technologique ? Vous comprenez très bien, s'agissant du lycée général ou technologique et des diplômes auxquels ils conduisent, c'est-à-dire le baccalauréat, l'importance qu'il existe un diplôme reconnu nationalement, le même pour tous et dont chacun puisse se targuer quel que soit l'endroit où il travaillera ensuite. Pourquoi en irait-il autrement pour l'enseignement professionnel ?
Ce que vous venez de décrire nous conduirait en effet à l'exact inverse : si cela relevait de la responsabilité des régions, les diplômes seraient régionaux. Cela existe en Allemagne : vous pouvez donc comparer et constater les difficultés que cela pose quand un Land décide de ne plus reconnaître le diplôme du Land voisin – c'est arrivé récemment, comme vous le savez sans doute. Pourquoi mettre ainsi en difficulté nos jeunes lycéens professionnels ?
Si leur sort nous intéresse, et je n'en doute pas, il nous faut au contraire veiller à ce que l'enseignement professionnel soit choisi et non plus subi : c'est vraiment la problématique numéro un. Ce n'est pas compliqué, il suffit pour le savoir de discuter avec des jeunes ayant décroché, des jeunes qui sont malheureux aujourd'hui après des études qu'ils estiment avoir ratées, pour lesquelles ils n'avaient aucune vocation. Ces jeunes vous disent : « Le problème, c'est qu'on m'a mis là à la sortie de la troisième alors que ce n'était pas cela que je voulais faire ! » Réglons ce problème de l'orientation subie !
C'est la raison pour laquelle la mesure que j'ai évoquée tout à l'heure, permettant aux secondes professionnelles de revenir sur leur orientation jusqu'aux vacances de la Toussaint, est une formidable avancée. Je sais qu'elle est très peu commentée, comme toutes les bonnes nouvelles, mais pour les jeunes, cela veut dire beaucoup.
Par ailleurs, si nous voulons améliorer et revaloriser l'enseignement professionnel, faisons en sorte de mieux préparer les lycéens professionnels à ce qui leur est demandé de si singulier, et qui n'est pas demandé aux lycéens généraux, à savoir la capacité à s'insérer rapidement dans le monde du travail, dans lequel ils passeront leurs vingt-deux semaines de stage.
Souvent, en effet, ces jeunes lycéens professionnels débarquent dans les entreprises sans rien connaître à ce monde. De ce fait, ils ne s'y épanouissent pas, ils n'y apprennent pas ce qu'ils devraient y apprendre, parce qu'ils n'ont pas les codes. Nous avons changé cela lors de cette rentrée : désormais, avant de partir en stage, il y a systématiquement une semaine de préparation à l'arrivée dans le monde de l'entreprise.
Si nous voulons revaloriser l'enseignement professionnel, veillons à ce qu'il y ait des débouchés à la fin du bac pro ; veillons à proposer aux jeunes désirant continuer dans l'enseignement supérieur, dont nous savons malheureusement que beaucoup échouent en licence, des perspectives d'enseignement supérieur calées sur ce qu'ils ont connu en lycée professionnel, c'est-à-dire l'alternance et notamment les BTS. Or nous avons lancé un plan de création de 10 000 places nouvelles de BTS pour les lycées professionnels. Sachons nous réjouir des bonnes nouvelles qui, au fond, n'ont pas raison de faire clivage entre nous ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)
M. Yves Durand. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Decool, dernier orateur pour le groupe Les Républicains.
M. Jean-Pierre Decool. Les cérémonies de voeux qui se suivent dans les communes sont riches en informations. Ce débat arrive donc à point nommé pour faire le constat des préoccupations récurrentes des maires quant au devenir de l'école en milieu rural.
L'élaboration des schémas de cohérence territoriale passe par les projets d'aménagement et de développement durables. Pour maintenir l'école rurale, il est impératif que l'ambition démographique respecte les ruralités. Les élus locaux sont attachés à leur école. Toutefois, ils sont inquiets face à l'évolution de certaines mesures urbanistiques et attentifs aux dispositions prises par votre ministère.
Madame la ministre, à quelques jours de la présentation de la carte scolaire par les services de l'État, quelles nouvelles modalités de soutien à l'école rurale pouvez-vous annoncer ?
Enfin, en parfaite cohérence avec cette première question, quelles dispositions prenez-vous pour accueillir les enfants de deux à trois ans à l'école, notamment lorsqu'il s'agit de maintenir ou d'ouvrir une classe en milieu rural ? Des mesures incitatives sont-elles envisagées ?
Des études ont montré que les écoliers ayant suivi quatre années de scolarisation en maternelle réussissent mieux leur CP et leur CE1. L'école dès deux ans peut donc constituer un véritable atout, l'accueil devant néanmoins être adapté aux rythmes et aux besoins des enfants.
Dans un contexte de rigueur des finances communales, étant donné le désengagement de l'État, les communes rurales, en particulier, n'ont pas forcément la capacité financière pour créer des jardins d'enfants. N'est-il donc pas temps d'envisager le droit pour tous les enfants d'entrer en maternelle dès l'âge de deux ans ? Les élus locaux et les familles attendent une réponse précise à ces questions.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Merci pour votre question, monsieur le député, qui me permet d'insister sur la rentrée 2017 telle que nous l'avons préparée. En termes de moyens, cette rentrée sera inédite. Pour la première fois depuis le début du quinquennat, le premier degré connaît une baisse démographique, avec 12 000 élèves en moins en France ; or, nous créons 4 300 postes dans le premier degré.
M. Yves Durand. C'est énorme !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Il faut prendre conscience de ce que cela représente, surtout si, d'aventure, cela devait ne pas se reproduire par la suite. Concrètement, cela signifie, pour répondre à votre question, qu'il n'y a pas un seul département de France dans lequel l'évolution des postes sera négative, en dépit des baisses démographiques. Il existe des départements ruraux dans lesquels la baisse démographique est évidente ; pour autant, ces départements ne perdront pas de postes, non seulement parce que nous créons ces 4 300 postes, mais aussi parce que nous avons fait en sorte d'adopter dans quasiment tous les départements ruraux de France – c'est en cours – des conventions de ruralité sur lesquelles je veux insister.
Ces conventions de ruralité, au-delà de la question des moyens, représentent un autre type de partenariat entre le ministère de l'éducation nationale et les collectivités locales, un partenariat intelligent, concerté. La fermeture d'une classe ou d'une école dans une petite commune rurale du fait d'une baisse démographique ne doit plus tomber d'une année sur l'autre, comme un couperet. Cela, c'était le passé. Aujourd'hui, il n'en va plus de même.
Aujourd'hui, nous nous mettons autour d'une table avec les élus locaux des départements ruraux pour réfléchir sur trois ans, en nous donnant le temps. Sur ces trois ans, quelles que soient les baisses démographiques constatées, l'éducation nationale ne retire pas ses enseignements : c'est tout de même énorme ! Cela signifie qu'on ne ferme pas les classes et qu'on se donne trois ans pour réfléchir à la réorganisation dans le territoire, soit par des regroupements pédagogiques intercommunaux, soit par d'autres solutions, pour agir au mieux dans l'intérêt des élèves. Cela permet de développer en parallèle la préscolarisation des enfants ou le numérique à l'école.
Pour la préscolarisation, puisque vous l'avez évoquée, je citerai votre département, qui vous intéresse davantage : 324 communes y ont bénéficié de ces dispositions. Concrètement, 1 524 élèves de moins de trois ans ont été scolarisés grâce aux efforts que nous avons consentis, permettant d'atteindre un taux de 42 % de préscolarisation des moins de trois ans dans les milieux ruraux : c'est important, la moyenne étant plutôt inférieure à 20 %. Avec 42 %, nous avons donc réalisé un effort très important, démontrant que la ruralité nous intéresse aussi, et pas seulement l'éducation prioritaire en ville.
Mme la présidente. Nous en venons aux questions du groupe de l'Union des démocrates et indépendants. La parole est à M. Philippe Gomes, pour deux questions.
M. Philippe Gomes. La semaine dernière, nous commémorions les terribles attentats qui ont frappé la France en janvier 2015. Les heurts qui ont suivi dans certains établissements scolaires ont révélé les fêlures de notre société dans notre capacité à vivre ensemble.
En réponse à ces crispations, le Gouvernement avait alors annoncé la création d'une réserve citoyenne. Unanimement salué, ce projet ambitieux devait ouvrir les portes de l'école et permettre à des hommes et à des femmes de s'engager aux côtés des professeurs pour transmettre à notre jeunesse les valeurs de la République. L'école n'est-elle pas le meilleur lieu pour faire l'apprentissage des valeurs républicaines ? Et ces valeurs ne nous ont-elles pas permis, au fil du temps, grâce à l'école de la République, de construire une nation ?
Chacun était bien conscient que ce dispositif nécessitait du temps pour être mis en place et devait s'articuler avec les priorités, les objectifs et le rythme des enseignants. Néanmoins, deux ans après son lancement, les premiers retours des réservistes sont décevants et apparaissent en décalage avec les attentes affichées.
Aussi, madame la ministre, pourriez-vous nous présenter un bilan actualisé de la mise en oeuvre de cette réserve citoyenne et de la manière dont elle s'est insérée dans notre système éducatif ? Pourriez-vous, dans ce cadre, nous communiquer le nombre d'interventions effectuées dans les classes ?
Enfin, à la suite de l'adoption de la loi égalité et citoyenneté, quelles seront les conséquences de l'intégration de la réserve citoyenne de l'éducation nationale au sein de la réserve civique ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Oui, monsieur le député, cette réserve citoyenne est en effet une très belle initiative – je me permets de le dire parce qu'elle vient, non de nous, mais des citoyens eux-mêmes : l'idée est née au lendemain des attentats de janvier, lorsque les citoyens français eux-mêmes nous ont envoyé des milliers de lettres. Constatant que beaucoup d'enseignants disaient être démunis pour transmettre un certain nombre de valeurs et pour discuter d'un certain nombre de sujets avec leurs élèves, ces citoyens nous ont écrit pour proposer de se rendre utile, de partager leur engagement, leur parcours et de faire entendre leur parole aux enfants à côté de celle des enseignants. C'est ainsi qu'est née l'idée de la réserve citoyenne.
C'est une source de réjouissance quotidienne pour moi parce que le succès de cette réserve ne s'est jamais démenti. Aujourd'hui, près de 7 000 personnes se sont inscrites comme « réserviste citoyen ». En réalité, elles ont été plus nombreuses à s'inscrire, mais après toute une procédure consistant à les recevoir pour vérifier qu'il n'y avait pas de problème particulier à les laisser entrer à l'école - il ne fallait pas faire n'importe quoi non plus ! - 7 000 réservistes ont été retenus. Ils correspondent à des profils très différents : il y a aussi bien des avocats que des médecins, des retraités, des chômeurs, des associatifs - bref, des gens guidés par un engagement, une cause, une façon d'être qui peut être utile aux élèves.
Comment cela se passe-t-il pour eux concrètement ? Chaque académie dispose d'un référent réserve citoyenne qui, sous l'autorité du recteur, a la charge de mettre en contact les établissements scolaires et les réservistes citoyens. Ce référent tient à jour la liste de tous les réservistes, qu'il connaît, qu'il a reçus, et les propose aux établissements scolaires en fonction des compétences souhaitées. Dès lors qu'un établissement est intéressé, les professeurs font appel à un réserviste.
Comment cela fonctionne-t-il ? Beaucoup d'articles ont été écrits sur la réserve citoyenne lors de la rentrée 2015, disant que ce n'était pas aussi simple et que les professeurs n'étaient pas forcément demandeurs de voir des réservistes citoyens intervenir dans leurs classes.
Il faut prendre des précautions avec toutes ces analyses réalisées à chaud. La réalité est qu'à l'automne 2015 ont eu lieu les attentats du 13 novembre. Les établissements scolaires se sont de ce fait à nouveau refermés sur eux-mêmes, et la première priorité des équipes, au sein des établissements, n'était pas de faire venir des personnes de l'extérieur.
Aujourd'hui, nous avons suffisamment de recul pour mieux voir les choses et nous constatons que, quelques mois plus tard, le dispositif est installé et qu'il fonctionne, je n'en démords pas, de mieux en mieux. Tous les enseignants que j'ai rencontrés et qui ont accueilli des réservistes citoyens louent cette initiative et souvent les invitent à revenir dans l'établissement.
Toutefois, sur 7 000 réservistes citoyens inscrits, tous ne sont pas appelés. Vous trouverez toujours des gens qui vous diront qu'ils sont inscrits pour participer à la réserve citoyenne depuis de longs mois mais n'ont pas encore été appelés. A contrario, d'autres ont été appelés, ont convenu et ont été rappelés à plusieurs reprises. C'est ainsi. Lorsqu'on s'inscrit pour participer à la réserve citoyenne, il faut accepter de ne pas être sollicité. Ce n'est pas grave. Il faut accepter ce rapport basé sur le don, sans attendre une contrepartie.
Quoi qu'il en soit, aujourd'hui, la réserve citoyenne fonctionne bien. C'est par centaines que l'on compte les séquences qui ont eu lieu et ont débouché sur des projets conduits avec les élèves. À l'occasion de la Journée de la laïcité, que nous avons instituée le 9 décembre dans les établissements scolaires pour faire travailler les élèves sur la question de la laïcité, des réservistes citoyens participent désormais systématiquement aux projets aux côtés des élèves.
Cette très belle réserve est à présent inscrite dans la loi égalité et citoyenneté et a donc vocation à durer.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Gomes, pour poser sa seconde question.
M. Philippe Gomes. Madame la ministre, je souhaitais également aborder la question du protocole d'accord que vous avez signé lors de votre déplacement en Nouvelle-Calédonie, le 26 octobre dernier, aux termes duquel l'État s'engage à accompagner la Nouvelle-Calédonie dans la mise en place de son projet éducatif qui doit permettre à l'école calédonienne de devenir le creuset du destin commun de notre pays.
Ce protocole d'accord contient un certain nombre de dispositions qui sont en train d'être mises en place. Je pense notamment à l'assistance qui nous est apportée pour la rédaction du code de l'éducation, mais également aux garanties qui nous ont été offertes pour que la correction locale du baccalauréat, du moins des 25 % de copies qui ne sont pas encore corrigées localement, bénéficie des garanties d'anonymat requises, s'agissant des matières à petit flux, et du timbre d'une académie métropolitaine, ce qui est important pour les jeunes Calédoniens qui font leurs études en France métropolitaine.
Pour autant, d'autres dispositions semblent soulever d'importantes difficultés de mise en oeuvre. Elles tiennent aux moyens devant être alloués à la Nouvelle-Calédonie pour lui permettre de mettre en place quatre nouveaux BTS, dont le premier à la rentrée 2017, mais aussi aux moyens humains et financiers nécessaires pour que les deux lycées dont la construction a été assumée par l'État - le lycée du Mont-Dore et celui de Pouembout - puissent fonctionner dans des conditions satisfaisantes.
À ce titre, je suis très inquiet car 7 900 heures d'accompagnement éducatif devaient être allouées dont nous ne voyons pas trace aujourd'hui. Or, comme chacun le sait, en Nouvelle-Calédonie, 27 % des élèves qui arrivent en sixième ont une année de retard. Cet accompagnement éducatif est donc essentiel pour notre pays.
De la même manière, madame la ministre, nous avons des inquiétudes concernant l'antenne de l'université dans la Province Nord. Des crédits d'investissement ont été débloqués, mais les moyens en fonctionnement sont incertains. Or vous savez à quel point cette antenne est importante pour notre pays en général et pour la Province Nord en particulier.
De la même manière, la politique de site qui a été initiée par l'université de la Nouvelle-Calédonie est digne d'être saluée – elle est probablement la plus avancée de tous les outre-mer. Vous avez, madame la ministre, eu les yeux de Chimène pour un territoire voisin et ami… Nous aurions aimé que vous les portiez également sur nous !
Ma question est donc la suivante : l'État apportera-t-il, à la rentrée 2017, les moyens nécessaires à la mise en oeuvre du projet éducatif, et notamment à l'ouverture des deux lycées ? L'université bénéficiera-t-elle d'une attention bienveillante afin que son antenne en Province Nord puisse fonctionner dans les meilleures conditions ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Monsieur le député, je suis surprise de vous entendre dire cela. Nous pourrons en reparler après cette séance, mais je peux d'ores et déjà vous affirmer que les engagements que j'ai pris personnellement ne seront absolument pas remis en question, en particulier pour les deux lycées. D'ailleurs je vous demanderai de me donner des nouvelles du lycée Mont-Dore, dont j'ai suivi l'évolution, après mon départ. Les 75 postes seront maintenus et les 7 900 heures d'accompagnement seront bien délivrées, il n'y a pas de sujet d'inquiétude.
S'agissant de l'université, je veux aussi vous rassurer puisque nous avons décidé, pour tenir compte de l'augmentation des effectifs d'étudiants, d'attribuer 60 millions de francs Pacifique de crédits supplémentaires au titre du budget 2017. Ce budget a été adopté par le Parlement. Il n'y a donc pas non plus de débat sur ce point.
Par ailleurs, dans le cadre de la politique de rééquilibrage à laquelle nous voulons contribuer, l'implantation de l'antenne Nord est inscrite dans le contrat de développement au titre duquel 477 millions de francs Pacifique ont été provisionnés.
Je ne dispose pas d'informations qui auraient des raisons de vous inquiéter, monsieur le député, mais nous suivons ce dossier avec intérêt et je vous invite à revenir vers nous si vous le souhaitez.
Mme la présidente. Nous en venons aux questions du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
La parole est à M. Jean-Noël Carpentier.
M. Jean-Noël Carpentier. Madame la ministre, la récente enquête PISA de l'OCDE sur le niveau scolaire classe notre pays à la vingt-sixième place sur soixante-douze. C'est décevant. Malheureusement, cette enquête corrobore d'autres enquêtes similaires, tout aussi alarmantes, notamment en ce qui concerne nos résultats en sciences et en mathématiques.
Ce qui est plus grave encore, c'est que notre école est jugée, au niveau international, trop inégalitaire. Les résultats des élèves dépendent beaucoup trop de leur niveau social. Cette inégalité est désormais chronique, tout le monde le reconnaît, et elle fragilise l'ensemble du système, les bons élèves comme les plus faibles.
Bien sûr, madame la ministre, je me félicite des efforts du Gouvernement en matière d'éducation…
M. Xavier Breton. Ils sont inefficaces !
M. Jean-Noël Carpentier. …mais tout de même ! Les évaluations internationales successives sont de plus en plus décevantes et montrent que notre école souffre de difficultés sérieuses.
Bien entendu, il ne s'agit pas de dire que tout est mauvais dans l'école française. Ce serait bien injuste. Au contraire, nous avons de très belles réussites et les enseignants font un travail formidable qu'il convient de saluer.
La vérité est que notre système scolaire est trop centralisé, trop technocratique…
Plusieurs députés du groupe Les Républicains. Très bien !
M. Jean-Noël Carpentier. …et qu'il a bien du mal à s'évaluer et à se réformer.
Ma question, madame la ministre, est simple. Tout en veillant à l'égalité républicaine, qui est essentielle – donner exactement les mêmes moyens à chaque élève – ne pensez-vous pas qu'il faudra, à l'avenir, engager une réforme structurelle visant à donner davantage d'autonomie d'action aux établissements scolaires et aux collectivités locales, qui font beaucoup pour l'éducation, et faire davantage confiance aux acteurs de terrain que sont les enseignants et les parents ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Monsieur le député, vous avez évoqué en premier lieu l'enquête PISA. Chacun d'entre vous le sait, mais cela ne fait pas de mal de le répéter, les évaluations PISA portent sur des enfants de quinze ans.
Mme Annie Genevard. Pas l'enquête TIMSS !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Je dois d'ailleurs cesser de parler d'enfants car cela peut induire en erreur : il s'agit de jeunes de quinze ans, et les évaluer revient à évaluer la scolarité qu'ils ont connue durant les dix années précédentes.
M. Xavier Breton. Ce qui inclut les cinq dernières !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Cessez de dire que le résultat de l'enquête PISA de 2015 aurait une quelconque corrélation avec l'action conduite par ce Gouvernement. Il n'y en a aucune ! Par définition, les élèves de quinze ans qui ont été évalués ont grandi et ont été scolarisés sous l'ancienne majorité.
M. Xavier Breton. Cinq ans ! Assumez un minimum, madame la ministre !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Il en va de même pour l'enquête TIMSS - Trends in International Mathematics and Science Study - madame la députée, puisque cette enquête, comme vous le savez, évalue des élèves de CM2 qui ont effectué leur CP en 2005 ou 2006, en tout cas bien avant que nous soyons aux responsabilités.
Mme Annie Genevard. Absolument pas !
M. Alain Fauré. Mais si, madame Genevard, et vous le savez !
M. Xavier Breton. En 2010 !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. En 2010, soit, en tout cas avant 2012 et vous le savez parfaitement.
Pour en revenir à l'enquête PISA qui nous intéresse, il faudra attendre 2019 - cela exige de la patience, je le sais - pour juger des effets de notre politique.
Pour répondre à votre question, monsieur le député, sur l'autonomie des établissements scolaires, je dirai que cela dépend de ce que l'on entend par autonomie. On voit bien qu'à droite et à gauche de l'échiquier politique, nous n'avons pas du tout la même conception de l'autonomie.
S'il s'agit d'une autonomie pédagogique, c'est-à-dire de la capacité donnée aux équipes d'adapter leur pédagogie et les réponses à apporter aux besoins de leurs élèves en consacrant plus de temps au français ou aux mathématiques en fonction de leurs difficultés, ou encore à l'art ou à la découverte du monde professionnel, c'est une bonne chose. C'est précisément ce que nous avons voulu développer dans le cadre de la réforme du collège.
M. Xavier Breton. Loupé !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre.  - qui accorde 20 % d'autonomie aux enseignants, ce qui n'était pas le cas par le passé.
S'il s'agit d'une autonomie comme celle que prône la droite, à savoir une autonomie financière au nom de laquelle chaque établissement scolaire se comporterait comme une petite entreprise, le chef d'établissement recrutant lui-même ses enseignants, expliquez-moi en quoi cela garantit une éducation de qualité sur tout le territoire national, ce qui a priori devrait tous nous intéresser puisque nous agissons pour l'ensemble de la France ?
M. Xavier Breton. Quelle égalité ? L'école n'a jamais été aussi inégalitaire !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Quelle égalité y aura-t-il le jour où les chefs d'égalité pourront recruter leurs enseignants ? Cela signifie que les chefs d'établissements cotés recruteront les meilleurs enseignants et que par définition, dans les territoires les plus difficiles, typiquement la Seine-Saint-Denis où on a tant de mal à envoyer des professeurs, ils seront encore moins nombreux !
M. Xavier Breton. Nous n'avons jamais vu autant d'inégalité !
M. Yves Durand. Est-ce qu'on peut s'écouter, monsieur Breton ?
Mme la présidente. S'il vous plaît !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Cette autonomie-là ne trouve pas grâce à nos yeux, c'est le moins que l'on puisse dire.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Maggi.
M. Jean-Pierre Maggi. Madame la ministre, la loi dispose que l'éducation est la première priorité nationale et qu'elle contribue à l'égalité des chances. Pour autant, l'école ne peut pas tout.
Vous écriviez vous-même en 2014 que les élèves ne sont pas à égalité devant la réussite scolaire, avant d'ajouter que le poids des origines sociales est trop lourd. Ce diagnostic est également posé par le classement PISA qui met en évidence de façon constante la corrélation forte dans notre pays entre inégalités sociales et inégalités scolaires.
Il faut donc des outils d'ajustement supplémentaires. Les réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté - RASED - en sont un exemple. Ils sont pourtant dans une situation préoccupante, en particulier dans le département des Bouches-du-Rhône.
Mme Martine Martinel. La droite les a supprimés !
M. Jean-Pierre Maggi. Les psychologues scolaires, maîtres d'adaptation et rééducateurs employés en leur sein sont au contact des élèves les plus en difficulté, ils préviennent la violence et luttent contre le décrochage.
Ils apportent une aide précieuse aux enseignants, parfois démunis face aux difficultés de certains élèves. Ils sont aussi un trait d'union entre les familles et l'institution scolaire.
Les RASED ne se sont pas remis de la politique éducative de la majorité précédente.
M. Patrick Hetzel. Ça manquait !
M. Jean-Pierre Maggi. Mais il y a des vérités qui sont vraies, tout de même ! (Exclamations sur les bancs du groupe Les Républicains.) Bref, entre 2007 et 2012, leurs effectifs ont diminué d'un tiers, passant de 15 000 à 10 000.
M. Yannick Trigance. Eh oui !
M. Jean-Pierre Maggi. Dans les Bouches-du-Rhône, les postes au sein des RASED ont été divisés par deux depuis 1995 et les postes de rééducateurs ont tous été supprimés, alors que le travail des RASED avait été salué par deux grandes institutions de notre République. Il y a deux ans, la Cour des comptes indiquait ainsi que leurs activités commençaient à être bien intégrées dans la pratique. Quant au Sénat, il a produit en 2013 un rapport d'information recommandant de donner aux RASED les moyens de leurs missions.
Fier d'appartenir à une majorité qui a remis l'éducation au centre des politiques publiques de la nation depuis 2012,...
M. Yves Durand. Très bien !
M. Jean-Pierre Maggi. - je souhaite cependant vous questionner sur cette situation préoccupante et sur les moyens que vous mettez en oeuvre pour renforcer la présence des RASED dans les écoles, en particulier dans les Bouches-du-Rhône.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Monsieur le député, je tiens à revenir sur votre département. Celui-ci a connu depuis le début du quinquennat une hausse de la démographie scolaire qui a été bien accompagnée, avec la création de 215 emplois de professeur des écoles. Dans la ville de Marseille, pas moins de soixante-dix classes ont été ouvertes lors la dernière rentrée, ce qui constitue un fait inédit pour le territoire marseillais.
À la rentrée 2017, l'académie d'Aix-Marseille verra encore la création de 255 postes, pour une hausse démographique de 1 880 élèves. Concrètement, on comptera donc un poste de plus pour sept élèves supplémentaires.
Ces chiffres montrent que, sur place, les autorités académiques auront les moyens non seulement de mettre un professeur devant chaque classe, mais aussi de développer le dispositif « plus de maîtres que de classes », qui remporte un grand succès. Plébiscité sur le terrain, il rencontre en effet un grand succès dans les écoles en difficulté pour améliorer l'acquisition des fondamentaux par les enfants.
Les autorités pourront en outre consacrer davantage de moyens aux RASED, qui avaient été quasiment supprimés, ou réduits comme peau de chagrin, sous l'ancienne majorité. Ces dernières années, nous avons arrêté l'hémorragie. Nous avons reconstitué les réseaux, à quelques dizaines de postes près. Lors de la rentrée 2017, compte tenu de la baisse démographique, nous aurons beaucoup plus de moyens pour achever ce travail. Par conséquent, il y aura plus de RASED sur votre territoire.
Je terminerai en rappelant que nous avons décidé de créer un nouveau corps dans notre belle maison Éducation nationale : un corps unique de psychologues scolaires. C'est ainsi que nous pourrons recruter des psychologues pour les écoles, ce qui est très important.
Mme la présidente. Nous en venons aux questions du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Je vous propose, monsieur Serville, de poser vos deux questions à la suite, pour avoir une réponse commune.
M. Gabriel Serville. Bien, madame la présidente. Madame la ministre, avec une succession de dix recteurs en vingt ans, l'académie de la Guyane se distingue par la grande instabilité de sa gouvernance. Le départ précipité du dernier recteur est là pour nous rappeler l'impérieuse nécessité de renforcer l'attention portée à ce problème.
En effet, malgré les nombreux efforts réalisés conjointement par votre ministère et par les nombreux partenaires du système éducatif, force est de constater que les résultats obtenus sont encore largement en dessous de nos espérances, même si nous saluons les réelles avancées observées, notamment à la suite du classement de notre académie en REP+.
Cela posé, je plaide pour que soient affectés en Guyane des recteurs chevronnés, ayant de l'expérience et bénéficiant de la totale confiance de leur ministère de tutelle. C'est là une condition sine qua non si nous voulons générer une utilisation optimisée des moyens publics mis à disposition d'un territoire dont la complexité ne fait aucun doute.
Je plaide également pour qu'à défaut de nommer un recteur guyanais ou ancré dans le pays Guyane, votre ministère décide la création d'un véritable poste de DASEN – directeur académique des services de l'éducation nationale – sur lequel serait affecté un de ces cadres dont regorge la Guyane et qui possèdent une parfaite connaissance des problématiques du territoire, en vue d'établir une véritable relation d'empathie avec ses habitants.
Madame la ministre, suivant cette logique et sans pour autant remettre en cause vos choix, permettez que je sollicite l'application d'un parallélisme de formes pour que soit exercé envers les futurs cadres de notre académie le principe énoncé par Jean-Pierre Chevènement, alors ministre de l'éducation nationale, selon lequel il est souhaitable que l'enseignant soit quelqu'un qui partage les mêmes valeurs que les enfants auxquels il enseigne. L'académie de la Guyane vous en sait déjà gré.
Mme la présidente. Nous écoutons votre seconde question, monsieur Serville. J'espère que Mme la ministre saura faire tenir deux réponses au lieu d'une en quatre minutes…
M. Gabriel Serville. J'espère qu'elle saura garder le bon fil ! (Sourires.)
Ma seconde question porte sur les centres d'information et d'orientation – CIO.
Depuis la publication de la carte cible et le désengagement de certains départements, le nombre de fermetures ou de prévisions de fermeture tout autant que les regroupements de CIO inquiètent les syndicats, les salariés et les populations. D'autant que, lors de la publication de la carte cible, de nombreuses interrogations ont paru renforcées par le fait que certains rectorats la considéraient comme indiquant le nombre maximal de structures à atteindre.
Dès 2015, puis en 2016 madame la ministre, vous avez répondu à mon collègue Gaby Charroux lors d'une rencontre dans votre ministère pour apaiser les inquiétudes des professionnels et des acteurs. Néanmoins, nous observons un désengagement des conseils départementaux : celui de la Seine-Saint-Denis se retire du financement de huit CIO, ce qui risque d'entraîner la fermeture d'au moins six structures. Nous constatons les mêmes inquiétudes en région Provence-Alpes-Côte d'Azur et sur le reste du territoire.
Lors du comité technique du ministère de l'éducation nationale, vous avez présenté la nouvelle carte dans le cadre du maillage départemental mis en place par votre ministère.
Madame la ministre, vous connaissez notre attachement au service public national de l'orientation, car les CIO sont des services publics de proximité appréciés pour leur gratuité et leur implication au bénéfice des jeunes, des élèves, des parents d'élèves et des étudiants.
Pouvez-vous nous confirmer la prise en charge par l'État de soixante-treize CIO au plan national et dissiper nos craintes quant aux projets de fermeture des CIO qui subissent le désengagement des conseils départementaux ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Pour ce qui est de la gouvernance de l'éducation en Guyane, monsieur le député, je veux que vous soyez convaincu, mais je pense que c'est déjà le cas, que je suis très sensible à l'éducation en Guyane. Les créations de postes que vous avez pu constater ne doivent rien au hasard. À la prochaine rentrée, quatre-vingts postes seront créés dans le premier degré pour 177 élèves supplémentaires, ce qui représente un poste supplémentaire pour deux élèves supplémentaires. C'est assez remarquable.
Allons plus haut : dans le second degré, 113 postes seront créés pour 737 élèves supplémentaires. Vous le voyez, nous donnons au département les moyens d'apporter des réponses éducatives de qualité. Je rappelle aussi, parce que nous avons eu l'occasion d'en parler, qu'à la dernière rentrée, l'ensemble des écoles et des collèges de la Guyane, à quelques exceptions près, est passé en REP+, ce qui n'est pas moins remarquable.
En ce qui concerne la gouvernance de l'académie, vous connaissez ma réponse. Dans les académies d'outre-mer, qui sont toutes mono-départementales, le recteur exerce les fonctions de DASEN. Il est assisté d'un secrétaire général qui a pour charge de piloter l'administration du rectorat et d'un directeur académique adjoint, auquel il délègue les compétences dans les domaines relatifs aux écoles, collèges et lycées.
Au-delà de cette question, certains réaménagements sont en cours dans votre académie. Les services sont en restructuration. Ce chantier engagé en début d'année sera finalisé rapidement. Il nous permettra de renforcer l'animation de l'encadrement intermédiaire et de mettre en place des indicateurs de pilotage, ainsi que des outils adaptés au contexte de forte croissance démographique que connaît l'ouest guyanais, en particulier le secteur de Saint-Laurent-du-Maroni.
Dans cette optique, j'ai demandé fin 2016 à l'inspection générale de mon ministère de venir en Guyane identifier des axes d'amélioration de la gouvernance et des outils de suivi de nos politiques. Je tiens à vous rassurer sur le fait que le nouveau recteur, M. Alain Ayong Le Kama, qui vient de rejoindre son poste, les mettra en oeuvre.
Je répondrai plus rapidement à votre seconde question. Vous avez rappelé que certains départements se désengageaient du financement des CIO, qui remplissent pourtant, à n'en pas douter, une véritable mission de service public, et qu'une évolution du maillage territorial s'en est suivie. C'est le cas en Provence-Alpes-Côte d'Azur comme sur l'ensemble du territoire. Je suis très attentive à ce qu'on accompagne les situations que vous avez évoquées. C'est aussi le cas en Seine-Saint-Denis où, avec le président du conseil départemental, nous venons de trouver un accord permettant de maintenir un maillage acceptable des CIO.
Je vous rassure sur le fait que ce nouveau maillage reposera sur un potentiel total non de 373, mais de 375 CIO financés par l'État, si cela s'avérait nécessaire, du fait du désengagement des départements. Par ailleurs, le rôle des CIO sera consolidé dans le système éducatif grâce à la création du corps unique des psychologues de l'éducation nationale, qui consacre le rôle de la psychologie dans l'éducation et dans l'accompagnement du parcours des élèves.
M. Yves Durand. Enfin un discours qui défend l'école de la République !
Mme la présidente. Nous en venons aux questions du groupe socialiste, écologiste et républicain. La parole est à Mme Colette Langlade.
Mme Colette Langlade. Madame la ministre, depuis 2012, un effort sans précédent a été porté à la création de postes de personnels enseignants dans l'éducation nationale. Ainsi, ce sont près de 60 000 postes de professeur qui auront été créés au cours du quinquennat, conformément à la promesse faite par le Président de la République. Ces postes nourrissent l'enseignement scolaire et supérieur mais aussi les filières agricoles ou professionnelles.
Ces créations de postes n'ont relevé d'aucun dogme. Elles avaient au contraire un objectif pragmatique : refaire de l'école de la République un outil d'égalité, un moyen, pour l'ensemble des élèves, d'acquérir partout sur le territoire des compétences communes et des savoirs indispensables.
Oui, même si l'époque est à la stigmatisation permanente des fonctionnaires, la France a besoin de professeurs, de personnels enseignants plus nombreux et mieux formés pour corriger tant les inégalités de notre société que l'iniquité de notre système scolaire.
Mais pour recruter de nouveaux professeurs, et c'est le sujet de mon interrogation, il faut aussi améliorer leurs conditions de travail et leur rémunération. Car si dans notre société, on n'épouse pas la vocation de professeur par intérêt économique, on la quitte parfois par manque de reconnaissance.
Madame la ministre, vous avez poursuivi le travail engagé par vos prédécesseurs et complété l'ambitieux plan de recrutement des personnels enseignants par l'amélioration de leur rémunération, à travers la signature du PPCR, le protocole Parcours professionnels, carrières et rémunérations. Celui-ci revalorise l'engagement fait chaque année par ces milliers d'enseignants dans le but de permettre à chaque élève de s'émanciper et de trouver sa voie.
Ce besoin de revalorisation passe par des conditions salariales plus dignes, notamment en début de carrière où les difficultés sont les plus criantes, et par une plus forte lisibilité de l'évolution des carrières. Mais surtout, ce besoin de récompenser et de favoriser l'engagement dans notre système éducatif doit concerner l'ensemble des personnels : professeurs bien sûr mais également conseillers pédagogiques, assistants d'éducation ou contractuels.
Pouvez-vous détailler concrètement les apports de ce protocole et le calendrier d'application de ces dispositions ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Madame la députée, je vous remercie de votre question. Ce qui est en cause, lorsqu'on soulève la question des démissions d'enseignants – même si j'ai rappelé qu'elles sont extrêmement marginales rapportées à l'ensemble des personnels de l'éducation nationale – ou de la difficulté à pourvoir certains postes, c'est la reconnaissance et la valorisation de ces métiers aujourd'hui.
Disons-le clairement : cela faisait des années que les enseignants, mais aussi les personnels non enseignants de l'éducation nationale, attendaient une revalorisation. Nous avons voulu procéder en plusieurs temps.
Nous avons commencé par réparer les injustices qui pouvaient exister entre les professeurs du premier degré et ceux du second degré : la fameuse indemnité de suivi et d'accompagnement des élèves – ISAE – des premiers a été portée au même niveau que celle des seconds à la rentrée 2016.
Mais surtout, nous avons voulu apporter une réponse à l'ensemble des personnels sur l'ensemble de leur carrière, avec le fameux PPCR. Celui-ci prévoit d'abord une revalorisation des rémunérations de base pour un montant total de 1 milliard d'euros, dont 500 millions ont d'ores et déjà été budgétés sur 2017 – elle commence donc en janvier 2017. Concrètement, les stagiaires entreront à terme dans la carrière avec un salaire revalorisé, soit une rémunération de base annuelle augmentée de plus de 1 400 euros. Le PPCR aura également un impact favorable sur la fin de carrière et la retraite, puisque le rééquilibrage progressif au profit de la rémunération indiciaire et la revalorisation de la rémunération de base des milieux et des fins de carrière se traduira par une augmentation des pensions.
En ce qui concerne le déroulé de la carrière, les parcours seront plus clairs, plus lisibles. Dès le 1er septembre 2017, la carrière rénovée entrera en vigueur : elle s'organisera désormais en deux grades, la classe normale et la hors classe pour ceux qui sont promus, avec une troisième, la classe exceptionnelle, accessible en priorité aux personnels ayant exercé dans l'éducation prioritaire ou assumé des responsabilités de directeur d'école pendant au moins huit ans.
La carrière est donc rendue plus lisible et l'engagement mieux reconnu. L'évaluation des enseignants est aussi moins infantilisante que par le passé, les rendez-vous de carrière étant clairs et connus de tous – environ une fois tous les sept ans, sous les regards croisés de l'inspecteur et du chef d'établissement.
Voici donc, au-delà de la revalorisation salariale, tous les changements que porte ce PPCR. On estime que pour un professeur certifié, il permettra un gain de quelque 24 000 euros sur l'ensemble de la carrière par rapport à la situation antérieure.
Mme la présidente. La parole est à Mme Sandrine Doucet.
Mme Sandrine Doucet. Madame la ministre, l'éducation publique est une fierté pour la France. Gratuite, laïque et ouverte à tous, l'école d'aujourd'hui est l'héritière de grands combats et peut revendiquer sa qualité, son expérience et l'engagement de ses enseignants.
Forte de ces qualités, l'école publique porte aujourd'hui un nouvel enjeu, celui de l'innovation pédagogique face à des établissements privés qui prétendent souvent en être les défenseurs les plus avertis, voire les plus indiscutables. Il y a un siècle ou encore cinquante ans, l'enseignement privé se distinguait de l'enseignement public par la religion ; puis est venu le temps de l'autorité et de la discipline ; désormais, c'est celui de l'innovation pédagogique. Ces revendications ne sont pourtant pas fondées.
M. Xavier Breton. Arrêtez d'opposer le public et le privé, il y a de la place pour tout le monde ! Ne rallumez pas la guerre scolaire. Les vieux combats, c'est fini !
Mme Sandrine Doucet. De nombreuses initiatives existent dans l'enseignement public. Elles sont même institutionnalisées. Les exemples que l'on pourrait prendre concernent très souvent des activités artistiques et culturelles, comme les classes jazz de Marciac, dans le Gers, ou de Monségur, dans la circonscription de Martine Faure.
La réforme du collège, avec la mise en place des enseignements pratiques interdisciplinaires – EPI – et la consécration d'un emploi du temps à 20 % défini par les établissements, favorise également l'innovation : nous sommes là dans la co-construction pédagogique des cours entre les disciplines. Elle s'inspire de pédagogies innovantes, notamment de ce qui est pratiqué depuis une quinzaine d'années dans un collège de ma circonscription, le collège Clisthène, qui s'appuie sur des cours conjoints et sur le respect des rythmes de l'enfant. Les lycées ne sont pas en reste.
Cette volonté d'innovation va de la maternelle à l'université, puisque la stratégie nationale de l'enseignement supérieur – STRANES – a fait de l'innovation pédagogique un des enjeux des enseignements à dispenser pour penser les formations de demain dans un monde en constante mutation. Le budget de 150 millions d'euros du troisième Programme d'investissements d'avenir – PIA3 – sera consacré à l'innovation numérique et pédagogique dans l'enseignement supérieur.
Voilà donc des expériences et des institutions vivantes, qui témoignent de la capacité des enseignants à se renouveler et à travailler ensemble. Pouvez-vous, madame la ministre, nous rappeler toutes les actions qui ont été menées depuis le début du quinquennat en faveur de l'innovation pédagogique et les perspectives à venir pour permettre à l'enseignement public d'être le lieu reconnu de l'innovation pédagogique ?
M. Yannick Trigance. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Je viens d'entendre « Si elle fait la liste, on n'est pas couché. » C'est sympathique ! (Sourires)
Vous l'avez rappelé, cette marge d'autonomie supplémentaire octroyée aux établissements dans le cadre de la réforme du collège – ces 20 % de l'emploi du temps – est une formidable occasion de développer l'innovation, y compris pour les enseignants. Mes multiples déplacements sur le terrain m'ont permis de le constater, l'innovation s'implante de mieux en mieux dans l'éducation prioritaire, où nous avons, grâce à la réforme menée en 2014 pour les collèges et les écoles, dégagé beaucoup plus de temps pour les enseignants, grâce à des décharges, afin qu'ils puissent mieux se former et davantage travailler en équipe. Des choses formidables sont en train de se passer.
Il faut que notre système éducatif aille de plus en plus vers ce temps libéré pour les enseignants et cette autonomie, au sens pédagogique du terme, pour que chacun puisse trouver les réponses adaptées à ses élèves. Pour cela, il faut que les enseignants soient formés. L'innovation consiste aussi à être capable d'évaluer sa pratique pédagogique pour la changer ou l'améliorer. Nous avons déjà parlé du retour de la formation initiale depuis que nous sommes aux responsabilités ; à l'évidence, il faut aussi plus de formation continue, et une formation continue qui soit systématique - les enseignants doivent pouvoir y consacrer plusieurs jours chaque année. Il faut aussi qu'ils puissent renouer, au cours d'une remise à niveau tous les trois ou cinq ans, avec la démarche de chercheur et l'université et obtenir des certifications. Les écoles supérieures du professorat et de l'éducation ont aussi vocation à soutenir cette capacité d'innovation.
Enfin, nous avons voulu développer des instituts Carnot, à l'image de ce qui se fait pour cultiver le lien entre université et entreprise et organiser le transfert de la recherche. Nous avons donc créé des instituts Carnot dans le domaine de l'éducation, le tout premier étant situé en région Auvergne-Rhône-Alpes. Il s'agit de tiers lieux où pourront se retrouver chercheurs et enseignants, avec un objet de recherche pensé par les deux parties, et par conséquent une pratique pédagogique qui s'améliore. Je souhaite que ces instituts maillent l'ensemble de notre territoire, et je me suis assurée que le PIA3 les soutienne financièrement. C'est ainsi qu'il faut continuer à agir.
Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Trigance.
M. Yannick Trigance. Madame la ministre, ma question porte sur les moyens alloués à l'école primaire depuis 2012 au regard des inégalités sociales et scolaires.
Nous le savons tous, les premières années de la scolarité d'un enfant sont cruciales pour la réussite de son parcours ultérieur, d'où la nécessité de faire de l'école maternelle et élémentaire une priorité absolue.
Le dernier classement PISA des pays de l'OCDE fait le constat d'une persistance de la reproduction des inégalités sociales et scolaires en France, résultat dramatique du sabordage des moyens alloués à l'éducation nationale par la droite, qui a délibérément démantelé le service public de l'enseignement lorsqu'elle était aux responsabilités.
M. Xavier Breton. Et allez donc !
M. Alain Fauré. 80 000 postes !
M. Yannick Trigance. Or dans une démocratie moderne, un enfant doit pouvoir faire sa vie avec d'autres cartes que celles trouvées dans son berceau.
M. Xavier Breton. L'école n'a jamais été aussi inégalitaire qu'aujourd'hui !
M. Christian Jacob. Pourquoi donc autant d'enfants partent-ils dans le privé ?
M. Yannick Trigance. Face à l'héritage désastreux que nous a laissé la droite, la loi de refondation de l'école de la République de 2013, que vous appliquez aujourd'hui avec conviction, madame la ministre, a refait du budget de l'école le premier budget de la nation, avec par exemple la mise en place de dispositifs tels que celui du « plus de maîtres que de classes » ou de la scolarisation des enfants de moins de trois ans, véritables leviers dans la lutte contre les inégalités appréciés et reconnus par l'ensemble des acteurs du monde de l'éducation. Ainsi, dans mon département de Seine-Saint-Denis, la proportion d'enfants de moins de trois ans scolarisés, après être passée de 12 % à 0 % sous la droite…
M. Yves Durand. Je ne serais pas fier, à leur place !
M. Yannick Trigance. …est remontée à 7 %.
Cette refondation de l'école de la République porte le projet d'une République moderne, celui d'une France forte et juste dans l'Europe du XXIe siècle, celui d'une école inclusive, juste pour tous et exigeante pour chacun. Pouvez-vous dès lors nous dire comment vous comptez renforcer les moyens alloués à l'école maternelle et élémentaire afin de lutter contre la persistance des inégalités scolaires…
M. Xavier Breton. Il n'y en a jamais eu autant !
M. Yannick Trigance. …et de poursuivre dans la voie d'une véritable démocratisation de la réussite, dans ma circonscription de Seine-Saint-Denis par exemple comme partout sur le territoire de notre République ?
M. Yves Durand. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Monsieur le député, ce quinquennat aura été non seulement celui du réinvestissement dans l'éducation…
M. Xavier Breton. Ben voyons ! Un quinquennat d'échecs !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. …mais aussi celui de la priorité donnée à l'école primaire.
M. Christian Jacob. Les élèves quittent le public en courant !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Je le répète, car ceux qui s'époumonent aujourd'hui comme si tout cela était une évidence ont toujours abordé l'éducation en partant du haut : quand il fallait réformer, c'était d'abord le lycée, quand il fallait donner plus de moyens, c'était d'abord les classes préparatoires… Mais c'est bien nous qui, à partir de 2012, avons remis les choses dans le bon ordre : les fondamentaux, c'est dès le plus jeune âge que cela s'acquiert.
M. Yves Durand. Absolument.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Nous devons donc poursuivre ce travail.
M. Xavier Breton. C'est un discours d'inspecteur ! Vous êtes à la fois juge et partie !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. C'est pourquoi un travail a été entrepris dès l'école maternelle, avec d'abord une rénovation des programmes, qui sont aujourd'hui plébiscités, comme j'ai pu m'en rendre compte sur le terrain,…
M. Christian Jacob. Il est étonnant qu'avec un tel bilan, Hollande ne se représente pas !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. …et qui font davantage place au jeu, au ludique, qui traitent l'enfant tel qu'il est, à l'âge qui est le sien, sans prétendre être une école pré-élémentaire, mais qui font progresser l'enfant et lui apprennent à vivre en société ; et avec d'autre part la volonté de scolariser les enfants avant l'âge de trois ans.
Ce que vous avez dit est très juste (Interruptions sur les bancs du groupe Les Républicains)…
Mme Colette Langlade. Quelle attitude !
M. Yves Durand. Le mépris, c'est cela, madame la présidente !
Mme la présidente. Je vous invite à retrouver un peu de calme, mes chers collègues.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Vous devriez vraiment écouter…
M. Christian Jacob. Pourquoi les élèves quittent-ils le public ?
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Depuis tout à l'heure, vous parlez d'inégalités. Or M. Trigance vient de rappeler que lorsque vous étiez au pouvoir, la proportion d'enfants de deux ans pré-scolarisés est passée de 12 % à 0 % !
M. Yannick Trigance. 0 % !
M. Christian Jacob. Avec un tel bilan, pourquoi François Hollande ne se représente-t-il pas ?
M. Alain Fauré. Taisez-vous, monsieur Jacob !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. 0 % ! Vous rendez-vous compte ? C'est le résultat de votre action ! Ayez donc l'obligeance de me laisser répondre !
M. Xavier Breton. Dans quel état laissez-vous l'école ?
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. La pré-scolarisation des enfants de deux ans est aujourd'hui en constante progression. Nous avons notamment voulu l'accomplir dans les réseaux d'éducation prioritaire. Sachez que dans l'éducation prioritaire, nous sommes à quelque 22 % d'enfants de deux ans pré-scolarisés, contre 11 % en 2012. Il nous faut aller plus loin : l'objectif est 30 %. Un travail doit être conduit avec les caisses d'allocations familiales et les collectivités locales pour ouvrir davantage de classes et convaincre les parents de scolariser leurs enfants.
Quant à la priorité au primaire, c'est ce dispositif « plus de maîtres que de classes », dont nous avons tiré le bilan pas plus tard que tout à l'heure avec le comité de suivi. Je vous assure que c'est un beau succès. Il faudra veiller à ce qu'il ne soit pas détricoté. Nous avons vu des enfants de CP et de CE1 qui retrouvent goût aux apprentissages et acquièrent la maîtrise du langage et des mathématiques, mais aussi des enseignants qui sortent de la solitude, qui sont accompagnés et aidés par l'enseignant surnuméraire, qui « débriefent » avec lui et améliorent ainsi leurs pratiques pédagogiques. Nous avions jusqu'à présent créé quelque 3 200 de ces dispositifs ; à la rentrée 2017, il y en aura 1 900 de plus ! Cela nous permettra de couvrir l'ensemble des écoles de l'éducation prioritaire. Je crois que c'est une très bonne nouvelle. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)
M. Yves Durand. Ça mérite un peu de respect, ça !
Mme la présidente. La parole est à Mme Julie Sommaruga.
Mme Julie Sommaruga. Madame la ministre, ma question porte sur la lutte contre le décrochage scolaire. Dans le cadre de la refondation de l'école, nous mettons en œuvre de nombreuses mesures en faveur de la réussite pour tous, afin de permettre à chaque jeune de mieux préparer son avenir. La lutte contre le décrochage scolaire est de ce point de vue un axe majeur de notre politique éducative, et jamais ce fléau n'avait été combattu avec autant de force. Dès 2012, nous avons décidé d'en faire une priorité nationale, car c'est avant tout un enjeu de cohésion sociale. Il était en effet inconcevable pour la majorité de continuer à laisser nos jeunes quitter l'école sans qualification ni diplôme, alors que le taux de chômage des non-diplômés est évalué à 50 %, ce qui a, bien évidemment, des conséquences très importantes en termes de précarité sociale.
Les résultats de notre mobilisation sont là : on dénombre 40 000 jeunes décrocheurs de moins qu'il y a cinq ans. Nous passons ainsi sous la moyenne européenne, avec 9,3 % d'élèves décrocheurs en France, contre 11 % en Europe. Ces résultats encourageants sont le fruit du plan d'action « Tous mobilisés contre le décrochage », qui prévient le décrochage tout en facilitant le retour des jeunes vers l'école. Ce plan que vous avez lancé en 2014, madame la ministre, mobilise l'école mais aussi les entreprises, les associations et les collectivités territoriales, car la lutte contre le décrochage scolaire est l'affaire de tous.
Afin de réduire encore le nombre de décrocheurs, de nouveaux dispositifs ont été mis en place à la rentrée, comme l'instauration d'une bourse de 1 000 euros pour les jeunes de 16 à 18 ans qui décident de reprendre une formation.
Madame la ministre, pouvez-vous nous décrire l'ensemble des actions mises en œuvre afin d'atteindre notre engagement de diviser par deux le nombre de décrocheurs scolaires en 2017 ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Madame la députée, vous abordez un sujet absolument crucial puisque, derrière le décrochage, ce n'est pas seulement le sort d'un individu – en l'occurrence d'un jeune qui sort sans qualification du système scolaire – qui est en jeu, c'est aussi le sort d'une nation, car une économie confrontée à autant de jeunes sans formation qui, par définition, ne trouvent pas d'emploi, est une économie contrainte. Et c'est aussi le sort de notre système scolaire qui est en question. Nous avions à rougir de compter chaque année, comme c'était le cas par le passé, plus de 100 000 jeunes sortant du système scolaire sans qualification. Cela signifiait, reconnaissons-le, que nous n'arrivions pas à avoir des pratiques pédagogiques adaptées à l'ensemble des élèves. Le résultat auquel nous sommes parvenus – passer sous le seuil de 100 000 décrocheurs annuels, avec une baisse de 40 000 depuis le début du quinquennat – constitue un très beau résultat, qui démontre que notre système est capable d'évoluer.
C'est le cas tout d'abord sur le plan de la remédiation, qui consiste à aller chercher des élèves qui ont décroché, de les convaincre de revenir et de les réinstaller dans un parcours de formation, ce qui n'a rien d'évident. Cette remédiation a été améliorée par le nouveau droit au retour en formation, que nous avons adopté en 2014 et qui porte maintenant ses fruits, ainsi que par notre choix de développer des structures de retour en formation, telles que les microlycées, qui rencontrent un grand succès.
Outre la remédiation, nous avons aussi amélioré la prévention du décrochage, grâce aux pratiques pédagogiques employées, dès le plus jeune âge, dans tous nos établissements scolaires ; nos enseignants sont désormais en mesure de détecter, grâce à une formation plus importante, les signaux précurseurs du décrochage, et nos chefs d'établissement ou directeurs peuvent travailler davantage avec les familles. De fait, le décrochage est souvent multifactoriel, et la persévérance dans le domaine scolaire nécessite bien sûr l'implication des parents. Désormais, les établissements, notamment ceux du second degré, abritent systématiquement des référents décrochage. Cela n'a l'air de rien, mais c'est très important : cela signifie que le décrochage n'est plus un sujet périphérique, mais un problème placé au coeur de l'école, que l'on s'efforce de prévenir et face auquel on ne lâche rien.
J'évoquerai une mesure qui me tient tout particulièrement à coeur, qui a été expérimentée l'année dernière et qui est entrée en application partout cette année : le parcours aménagé de formation initiale – PAFI – offre la possibilité à des élèves de plus de quinze ans, qui sont engagés dans un processus de décrochage, de sortir quelques semaines, quelques mois, de l'environnement scolaire, pour effectuer un stage en entreprise ou en association, tout en restant sous statut scolaire et en demeurant tutoré par un membre de l'établissement, et de revenir une fois qu'ils ont retrouvé la motivation dans ce cadre extérieur. Cela me paraît très important. En effet, par le passé, on était nombreux à se demander pourquoi l'école devait ressembler à la même chose pour chacun ; on pensait que certains élèves qui ne trouvaient plus de motivation devaient pouvoir la chercher ailleurs. Cela existe à présent grâce au PAFI, dispositif très satisfaisant qui bénéficie aux élèves de plus de quinze ans et qui contribue à expliquer pourquoi nous améliorons nos résultats.
En faisant monter en charge tous ces dispositifs, nous sommes capables de passer en 2017 sous le seuil des 80 000 décrocheurs annuels. Quand ce résultat sera obtenu, cela signifiera que l'on verra le bout du tunnel, que l'on sera capable, dans quelques années, de ne plus avoir de décrocheurs, si tant est qu'on ne les reproduise pas.
Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Martinel, pour la dernière question.
Mme Martine Martinel. Madame la ministre, vous semblez avoir convaincu toute l'Assemblée…
M. Xavier Breton. Non, pas exactement !
Mme Martine Martinel. …que, depuis 2012, le Gouvernement a fait de l'éducation nationale sa priorité. Cette place prééminente s'est traduite par des choix budgétaires qui ont garanti solidité et pérennité en termes de moyens et d'effectifs. Jamais, durant cette législature, l'engagement en faveur de l'éducation n'a faibli. Jusqu'à la rentrée prochaine, au moins, nous sommes assurés que des moyens financiers et humains substantiels lui sont alloués.
Ainsi la rentrée 2017 verra-t-elle la poursuite des créations de postes. Vous avez annoncé, madame la ministre, un apport significatif en direction de l'enseignement primaire. Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet, même si vous avez déjà développé ce thème durant cette séance ? Quel est le devenir du dispositif « plus de maîtres que de classes », qui a vraiment fait ses preuves dans l'éducation prioritaire ? Des problématiques spécifiques demeurent dans les zones rurales, les zones de montagne. Par ailleurs, le secondaire doit accueillir plus de 40 000 élèves supplémentaires à la rentrée. Pour sa part, l'enseignement professionnel, comme vous l'avez dit, mérite aussi d'être choisi, mieux connu et reconnu.
La rentrée 2017, que vous avez pensée et préparée avec vos services, doit permettre aux élèves et aux enseignants, dans la logique qui prévaut depuis 2012, d'effectuer la rentrée dans un climat serein, animés par la conviction que l'école de la République joue un rôle essentiel dans l'avenir et la réussite de tous. Pourriez-vous nous préciser, madame la ministre, même si cela vous force à vous répéter, les principes qui fondent vos choix et les priorités que vous retenez pour la rentrée 2017 ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Puisque je me suis assez longuement étendue, de fait, sur le premier degré et les 4 300 postes qui y seront consacrés malgré la baisse démographique, je dirai un mot du second degré. Là aussi, des efforts importants vont être engagés, grâce à la création de 4 400 postes. Ils permettront, en premier lieu, de continuer à accompagner la réforme du collège, qui a notamment pour objet de conférer plus de moyens à chaque établissement, pour dédoubler les groupes et permettre le travail en petits effectifs.
En deuxième lieu, s'agissant du lycée, je voudrais insister sur le fait que le lycée professionnel va bénéficier, en cette rentrée 2017, de 500 nouvelles formations et de 1 000 enseignants supplémentaires, pour préparer les élèves aux métiers de demain et aux métiers en tension. Nous avons dressé la liste de ces métiers avec France Stratégie. Il s'agit d'une rénovation relativement inédite des filières et des formations offertes dans l'enseignement professionnel. En effet, pour mettre en place 500 nouvelles formations, il faut généralement six ou sept ans. Y parvenir en une seule rentrée scolaire nécessite un travail assez considérable, que nous avons mené avec les régions, pour mieux identifier, territoire par territoire, les besoins – je parle des régions qui ont bien voulu travailler avec nous, ce qui n'a pas été le cas de la région Auvergne-Rhône-Alpes, s'agissant de laquelle nous avons dû décider seuls. Bref, c'est un travail important, qui va dans le sens de la revalorisation de l'enseignement professionnel, que j'évoquais tout à l'heure.
Enfin, un mot des lycées d'éducation prioritaire, dont il a été question tout à l'heure : étant parfaitement consciente du fait que ceux-ci peuvent avoir besoin d'un soutien supplémentaire sans attendre la réforme qu'il faudra mener en bonne et due forme, j'ai souhaité que l'on alloue 450 postes supplémentaires aux lycées les plus fragiles, notamment dans l'éducation prioritaire, ce qui permettra de réduire les effectifs par classe et d'améliorer l'encadrement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.)
Mme la présidente. La séance de questions sur la politique en matière d'éducation est terminée.
Source http://www.assemblee-nationale.fr, le 12 janvier 2017