Déclaration de M. Edouard Philippe, Premier ministre, en réponse à une question sur la crise au Venezuela, au Sénat le 31 janvier 2019.

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Circonstance : Question au Gouvernement posée par M. Claude Malhuret, sénateur (président du groupe Les Indépendants - République et Territoires) de l'Allier, au Sénat le 31 janvier 2019

Texte intégral

Monsieur le sénateur, de quoi parlons-nous ? Nous parlons d'un pays plongé depuis plus de trois ans dans une crise terrible, sans précédent. Ce pays potentiellement riche connaît aujourd'hui des situations de préfamine. Son économie est totalement exsangue, sa population est privée de médicaments et de l'ensemble des biens de première nécessité.

Nous parlons d'un pays qui a mis en place une répression sanglante de ses oppositions.

Nous parlons d'un pays qui, vous l'avez rappelé, emprisonne des journalistes étrangers : deux journalistes français et trois journalistes espagnols ont été arrêtés. Le Gouvernement, par la voix du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, a exigé la libération immédiate des journalistes français et de leurs confrères espagnols.

Nous parlons d'un président qui revendique un second mandat sur la base d'élections, tenues au mois de mai 2018, qui ne répondaient de toute évidence à aucune des conditions essentielles de la démocratie.

Nous parlons d'un pays à la croisée des chemins depuis les manifestations massives du 23 janvier, jour qui a vu le président de l'Assemblée nationale, Juan Guaido, prêter serment en tant que président par intérim du Venezuela, en vue, a-t-il affirmé, d'organiser des élections véritablement démocratiques.

Notre responsabilité, celle de la France et celle de l'Union européenne, est de veiller au respect de la volonté du peuple vénézuélien. C'est dans cette perspective que, le 26 janvier dernier, le président de la République a appelé à l'annonce, dans un délai de huit jours, de la convocation de nouvelles élections. À défaut, nous reconnaîtrons, en pleine coordination avec nos partenaires européens, l'Allemagne, l'Espagne, le Royaume-Uni, Juan Guaido comme président par intérim du Venezuela.

C'est également le sens de la proposition formulée par l'Union européenne de créer un groupe de contact international. Nous sommes convaincus que la seule solution viable à cette crise est politique, négociée et pacifique. Il y faudra la coopération des organisations régionales et des pays voisins du Venezuela. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères, est aujourd'hui même à Bucarest avec ses homologues européens pour consolider et affirmer cette position commune face à la crise.

La situation humanitaire est préoccupante. Plus de 3 millions de Vénézuéliens ont quitté leur pays. L'ONU estime que ce chiffre pourrait monter jusqu'à 5,5 millions d'ici à la fin de l'année. C'est pourquoi l'Union européenne a débloqué une enveloppe de 55 millions d'euros d'aide humanitaire depuis 2018.

Enfin, et je sais que les membres du Sénat y seront particulièrement sensibles, le gouvernement se mobilise pour garantir la protection des quelque 4.000 ressortissants français demeurés sur place. Nous veillons à leur sécurité. Toutes les options, y compris celle de rapatrier ceux qui demanderaient à l'être si la situation devait empirer, sont étudiées.


Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 11 février 2019