Texte intégral
STEPHANE CARPENTIER
Bienvenue à vous tous, l’invité de RTL Matin en direct et en studio est donc membre du gouvernement, ministre de l’Action et des Comptes publics, c’est Gabriel ATTAL. Gabriel ATTAL, ce matin sur RTL, vous allez parler clairement aux Français, il va falloir faire des efforts, oui, non, beaucoup d’efforts ?
GABRIEL ATTAL
Oui, on va tous faire des efforts, mais la question c’est quel sens on leur donne et à qui on les demande. D’abord, ce qui est très clair, c’est qu’il n’y aura pas d’augmentation d’impôts, et ça je veux être très clair sur ce sujet, on va suivre la ligne qui a été la nôtre depuis plus de cinq ans maintenant, je rappelle qu’on a, pour les Français, supprimé la taxe d’habitation, supprimé la redevance télé, baissé le barème de l’impôt sur le revenu de 5 milliards d’euros sur les premières tranches, défiscalisé les heures supplémentaires, permis la monétisation des RTT, augmenté le crédit d’impôt pour la garde d’enfants pour les classes moyennes qui travaillent, qui doivent faire garder leurs enfants, en crèche, chez une assistante maternelle, ça coûte de l’argent, on a augmenté de 50% le crédit d’impôt sur le sujet, on sera fidèle à cette ligne, et en 2027, les Français, les entreprises, paieront moins d’impôts qu’en 2022, de la même manière qu’on les a baissés dans le précédent quinquennat, donc ce qu’il fait faire c’est des économies.
STEPHANE CARPENTIER
Des économies, l’engagement du matin c’est pas d’augmentation d’impôts, on l’a bien entendu ?
GABRIEL ATTAL
Il n’y aura pas d’augmentation d’impôts.
STEPHANE CARPENTIER
Ça veut dire qu’ils ne vont pas baisser ?
GABRIEL ATTAL
Alors, le président de la République s’est engagé à ce que pour les classes moyennes qui travaillent, et vous savez qu’on y est très attaché, c’est ces Français finalement qui, contrairement à d’autres, peuvent ni compter sur des aides sociales particulièrement importantes pour leur quotidien, ni compter sur un patrimoine particulièrement important, c’est cette classe moyenne qui se lève le matin, qui nous écoute probablement, qui va travailler et qui compte essentiellement sur son travail et le fruit de son travail pour vivre, et le président s’est engagé à ce que dans le quinquennat il y ait à nouveau une baisse d’impôts pour ces classes moyennes. Est-ce que ce sera dès l’année prochaine, est-ce que ce sera l’année suivante, ça je ne peux pas encore vous le dire, on est encore en train de faire les arbitrages, et puis comme vous l’avez dit, il y a une situation budgétaire qui fait qu’on doit absolument tenir nos objectifs en matière de réduction des déficits, mais ce qui est certain c’est que nous n’augmenterons pas les impôts.
STEPHANE CARPENTIER
Quand vous dites des efforts pour les Français, les Français vont devoir faire des efforts supplémentaires, ça veut dire quoi ?
GABRIEL ATTAL
Ça veut dire que dès lors qu’on doit faire des économies il faut notamment sortir des dispositifs spécifiques qu’on a mis en place pendant la crise de l’inflation, c’est notamment la politique des chèques exceptionnels, on va mettre fin à cette politique des chèques exceptionnels qu’on a pu mettre en place sur tel sujet, pour telle catégorie de Français, ça veut dire qu’on va devoir sortir progressivement du bouclier tarifaire sur les prix de l’énergie, vous savez qu’on a beaucoup protégé en France, on a été probablement le pays d’Europe qui a le plus protégé face à l’inflation et notamment l’inflation sur les prix de l’énergie, donc on va progressivement sortir…
STEPHANE CARPENTIER
Progressivement ça veut dire quoi ?
GABRIEL ATTAL
Ça veut dire que ça ne va pas se faire d’un coup, d’un bloc, et que d’ici à la fin de l’année 2024, notamment sur le bouclier tarifaire sur l’électricité, on va en sortir progressivement.
STEPHANE CARPENTIER
2024 vous avez dit !
GABRIEL ATTAL
Oui, fin de l’année 2024, ce sera une sortie progressive, ça veut dire ensuite que sur un certain nombre de politique publiques, effectivement, on regarde où est-ce que des mesures doivent être prises pour faire des économies. Je vous ai entendu citer tout à l’heure la question des arrêts maladie, c’est vrai qu’on a vu ces dernières années une explosion des arrêts maladie, les indemnités journalières ça nous coûte 15 milliards d’euros par an aujourd’hui, et selon la tendance actuelle ça pourrait nous coûter 23 milliards d’euros par an en 2027.
STEPHANE CARPENTIER
Ça veut dire quoi, que les Français ils trichent, qu’ils fraudent là-dessus, trop ?
GABRIEL ATTAL
Ce n’est pas ce que je dis, ce que je dis c’est qu’il y a un certain nombre d’arrêts dont on peut se demander s’ils doivent être à la fois prescrits et pris en charge dans les mêmes conditions, parce que, encore une fois, c’est un budget qui explose, ça va nous coûter plus cher que le budget annuel du ministère de l’Intérieur, si on ne prend pas de mesures, donc voilà. Ensuite il faut regarder plusieurs choses, regarder le sujet de la prescription, on sait qu’il y a un enjeu sur la prescription d’arrêts maladie par téléconsultation qui explose beaucoup, on vous prescrit un arrêt sans même vraiment regarder si vous êtes malades, ou pas, et sans même vraiment le vérifier, et ensuite il y a un enjeu de responsabilité globale pour les usagers, pour les entreprises, et puis pour ceux qui prescrivent, c’est-à-dire les médecins.
STEPHANE CARPENTIER
Ça veut dire qu’on serre la vis sur la santé ça !
GABRIEL ATTAL
Non. Encore une fois, on fait des choix…
STEPHANE CARPENTIER
Quand même.
GABRIEL ATTAL
Je vous donne un exemple. On ne fera pas d’économies massives sur l’hôpital, par exemple, on sait que l’hôpital a besoin de moyens supplémentaires, qu’on a mis beaucoup de moyens supplémentaires ces dernières années, que cette année il y a un budget historique pour l’hôpital public, on veut évidemment que les Français qui vont se faire soigner à l’hôpital soient accueillis dans des meilleures conditions, on veut que les soignants puissent travailler dans de meilleures conditions, sur ce sujet-là il n’y aura pas d’économies massives.
STEPHANE CARPENTIER
Mais on traque la fraude.
GABRIEL ATTAL
Bien sûr qu’on traque la fraude. J’ai présenté un plan sur le sujet il y a quelques semaines, la fraude fiscale et la fraude sociale, et il y a des mesures qui rentrent déjà en vigueur. Je vous donne un exemple je l’ai annoncé au printemps, on arrête de verser des allocations sociales sur des comptes bancaires étrangers, depuis le 1er juillet c’est en place, on ne verse plus d’allocations sociales sur des comptes bancaires étrangers, et on va continuer. Dans le prochain budget de la Sécurité sociale, que je présenterai avec mes collègues à la rentrée, on va remonter la condition de résidence en France pour bénéficier d’aides sociales et d’allocations sociales, voilà, c’est des mesures très concrètes, vous voyez bien, on s’attaque à tous les sujets qui nous permettent de faire des économies et de lutter contre la fraude. Pourquoi ? parce qu’on est endetté, c’est une réalité, on a fait le choix de se désendetter progressivement, on ne veut pas faire d’austérité, parce que ça aurait un impact sur la croissance, sur l’emploi des Français, mais il faut tenir cette trajectoire de désendettement, parce qu’à la fin, si on accumule une dette et qu’on traîne une dette, massive pendant des années, qui est-ce qui trinquera dans quelques années, ça serait les classes moyennes qui travaillent, c’est elles qui auraient à payer l’addition, donc moi je veux désendetter le pays, progressivement, comme on s’est engagé à le faire.
STEPHANE CARPENTIER
Gabriel ATTAL, je reviens à la fin des aides - vous parlez de l’essence, de l’énergie – progressivement, comment ils vont faire les Français pour s’en sortir, déjà qu’ils n’y arrivent pas aujourd’hui, alors qu’on les aide ?
GABRIEL ATTAL
On fait des choix, évidemment, pour faire en sorte qu’ils puissent tenir dans cette situation. Je vous donne un exemple. L’an dernier sur les prix de l’essence, on avait mis en place la ristourne, ça a coûté très très cher, ça a coûté 8 milliards d’euros sur l’année, c’était difficile, on a assumé d’en sortir, on a mis en place un dispositif ponctuel en début d’année uniquement pour les Français qui travaillent et qui ont de très faibles revenus, on est passé de 8 milliards d’euros, l’an dernier, à 1 milliard d’euros, donc vous voyez bien, on sort d’une aide. Evidemment que ce n’est pas facile, évidemment que moi j’aimerais, le matin, venir vous dire on va aider tout le monde, on va dépenser beaucoup… ce serait mentir, à nouveau, pour reprendre la phrase qui a plu à William GALIBERT, que de dire que c’est possible, parce qu’à la fin les Français ils le savent, il y a toujours quelqu’un qui paye l’addition, et donc si on accepte que des dépenses partent de manière hors de contrôle, à la fin ce serait les Français, dans quelques années, qui paieraient l’addition par des augmentations d’impôts, on ne le veut pas.
STEPHANE CARPENTIER
Je reste sur le cas de l’essence par exemple, est-ce qu’aujourd’hui vous demandez à TOTAL de pérenniser le 1,99 euro ?
GABRIEL ATTAL
Je crois qu’ils ont annoncé que ça durerait encore un certain temps, donc évidemment que c’est une mesure qui est importante et que les entreprises qui le peuvent, et je crois que c’est le cas de TOTAL qui l’a annoncé, ça lui fait un investissement de plusieurs centaines de millions d’euros sur l’année, mais c’est important, évidemment, qu’elles prennent leur part et qu’elles prennent leur responsabilité, c’est la même chose sur l’inflation, sur les prix alimentaires. On a, vous le savez, beaucoup agi 7575auprès des industriels, on a pris les 75 plus gros industriels, on leur a dit " il y a les prix des matières premières qui baissent, maintenant, quand les prix des matières premières baissent, vous devez baisser vos prix. " Qu’est-ce qu’on constate aujourd’hui ? on constate que sur les 75 industriels qu’on a réunis, c’est ma collègue Olivia GREGOIRE notamment qui a été en charge de ce sujet, 40 industriels ont commencé à baisser leurs prix, parce que leurs matières premières baissent, et on commence à le voir sur un certain nombre de produits. Alors, évidemment, ce n’est pas suffisant, il y a des produits qui avaient beaucoup augmenté, mais on voit que cette marche est en train de s’installer.
STEPHANE CARPENTIER
Gabriel ATTAL, vous demandez des économies aux Français, des efforts aussi supplémentaires, et l’Etat dans tout ça, qu’est-ce qu’il fait en termes d’économies, concrètement, où, comment, donnez un exemple aux gens qui vous écoutent ce matin ?
GABRIEL ATTAL
Je vais vous dire les pistes sur lesquelles je travaille, tout ce qui est comités Théodule, agences, il y a un très bon rapport qui a été remis par les parlementaires Véronique LOUWAGIE et Robin REDA, il y a quelques jours, vous avez notamment des comités, des agences, qui ne se sont pas réunis ces douze derniers mois, eh bien moi je considère qu’il faut les supprimer. Je regarde tout. On est en train de regarder également sur la politique en matière de véhicules, de voitures de l’Etat, quand on enlève la police, la gendarmerie, dont on sait évidemment qu’ils ont besoin d’un matériel pour pouvoir lutter contre la délinquance, on peut considérer qu’on doit faire des efforts sur ce sujet-là, bien évidemment. Et ensuite vous avez des politiques publiques, sur lesquelles on dépense beaucoup, sur lesquelles on doit réduire un certain nombre de dépenses. Sur la question de l’apprentissage, par exemple, il ne s’agit pas de remettre en cause la politique qui a été mise en place, qui a un très grand succès, on va atteindre le million d’apprentis dans notre pays, mais on sait que sur un certain nombre de subventions qu’on verse, que l’Etat paye pour l’apprentissage, on peut faire des économies, on y travaille aussi avec mon collègue Olivier DUSSOPT.
STEPHANE CARPENTIER
Du coup, avec tout ça, avec cette situation financière du pays, avec les efforts demandés, avec les émeutes, est-ce que le président MACRON n’aurait pas dû parler aux Français ce 14 juillet ?
GABRIEL ATTAL
Non mais, le président il s’exprime quand il considère qu’il a un message à passer aux Français…
STEPHANE CARPENTIER
Mais, il n’a rien à dire aux Français ?
GABRIEL ATTAL
Non, mais il le fait d’ailleurs assez régulièrement, je crois qu’hier il a fait une conférence de presse dans le cadre de son déplacement au sommet de l’OTAN, qu’il a été interrogé par certains de vos confrères, quand il considérera qu’il faut s’adresser aux Français il le fera et j’ai compris, ça a été communiqué par l’Elysée, que ce serait le cas dans les prochains jours, c’est ce qui a été dit. Moi je ne suis plus porte-parole du gouvernement, donc je ne peux pas vous donner tous les détails sur ces sujets…
STEPHANE CARPENTIER
Vous savez des choses quand même. Alba VENTURA elle disait par exemple sur RTL, dans son édito tout à l’heure, il y a 30 minutes, qu’il se défile, parce qu’il n’a pas de réponse au dossier des banlieues par exemple.
GABRIEL ATTAL
D’abord il y a eu une réponse, qui a été une réponse de sécurité pour les Français qui vivent dans les quartiers, et dans les banlieues, pour qui cette situation a été la plus insupportable. Imaginez, des Français qui se lèvent le matin, qui vont travailler, qui payent des impôts, et qui voient l’école de leurs enfants, la mairie, ou des services publics, même de commerces, qui sont incendiés, c’est insupportable, donc il y a eu cette réponse d’ordre et de sécurité. Maintenant, on va continuer à agir, je pense que la question qui est au coeur de ce qui s’est passé c’est la question de l’autorité, je le dis, et de l’autorité notamment auprès d’une certaine jeunesse dont on a vu qu’elle était hors de tout cadre. Quand vous avez des gamins de 12 ans, même de 15 ans, de 19 ans, qui sortent la nuit à 3h du matin, qui vont brûler un commerce, ou qui vont brûler une mairie, c’est insupportable.
STEPHANE CARPENTIER
Il y aura un remaniement un jour ou pas ?
GABRIEL ATTAL
Ça vous savez que par définition les ministres sont les derniers à être au courant…
STEPHANE CARPENTIER
C’est ce que vous dites toujours.
GABRIEL ATTAL
Non, mais ça c’est vrai, ça je peux vous dire que c’est vrai
STEPHANE CARPENTIER
Ah oui, c’est du vécu ?
GABRIEL ATTAL
Oui, par définition c’est le choix du président et de la Première ministre, donc moi je… je prépare le budget 2024 avec Bruno LE MAIRE, on travaille sur ce sujet d’arrache-pied ces derniers jours, j’ai réuni les parlementaires de l’ensemble des groupes politiques à l’Assemblée nationale, pour travailler sur le budget très en amont, hier, de la même manière que la Première ministre a réuni les organisations syndicales, on travaille, on avance, s’il doit y avoir des évolutions dans le dispositif gouvernemental ça sera le choix du président.
Source : Service d’information du Gouvernement, le 19 juillet 2023