Texte intégral
JEAN-JACQUES BOURDIN
Notre invité ce matin, Thomas CAZENAVE, ministre des Comptes publics. Les comptes publics, l'État est dans le rouge, Thomas CAZENAVE, bonjour, d'abord.
THOMAS CAZENAVE
Bonjour.
JEAN-JACQUES BOURDIN
0 826 300 300, ça, c'est pour les auditeurs qui peuvent réagir évidement tout à l'heure après 9h00. L'État est dans le rouge, nous, nos comptes perso sont souvent dans le rouge aussi, Thomas CAZENAVE. Nous allons faire un peu un parallèle, alors le budget présenté la semaine prochaine, budget 2024 en Conseil des ministres, je vais commencer avec le coût du carburant, parce que ça plombe nos portefeuilles, le coût du carburant, le prix de l'essence, vous avez imaginé une vente à perte, et puis voilà que les distributeurs disent non, le PDG de TOTAL dit non, alors, franchement, je vais être un peu familier, vous faites un bide ?
THOMAS CAZENAVE
Non, on est complètement mobilisé sur le prix du carburant. On utilise toutes les solutions possibles, on demande aux distributeurs de limiter leurs prix, d'ailleurs, c'est le cas de TotalEnergies, avec le fait qu'il plafonne…
JEAN-JACQUES BOURDIN
À 1,99, oui…
THOMAS CAZENAVE
Oui, il plafonne, il maintient le plafonnement, c'est un effort. Est-ce qu'il y a d'autres distributeurs, certains disent : je ne peux pas faire mieux, je ne peux pas vendre à perte, ce que dit la Première ministre, elle dit : mais chiche, regardons dans quelles conditions vous pouvez aller plus loin, ce n'est pas une mesure obligatoire, celles et ceux qui peuvent, on leur crée la possibilité de faire des opérations coup de poing…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais ils vous disent non, ils vous ont tous dit non…
THOMAS CAZENAVE
Il n'y a pas d'obligation. Ce que l'on veut, c'est permettre à ceux qui peuvent le faire de le faire. Des opérations coup de poing, du plafonnement, et pour ceux qui le veulent, de la vente à perte.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous maintenez la mesure ?
THOMAS CAZENAVE
Oui, on maintient la mesure, on a même regardé comment avec les pompistes indépendants…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais qui va faire baisser, qui va vendre à perte ? Mais qui, puisque les distributeurs ne veulent pas, TOTAL, qui est aussi un distributeur, ne veut pas non plus. Alors qui ?
THOMAS CAZENAVE
Les distributeurs qui nous disaient, il y a encore quelques semaines, on ne peut pas faire plus, parce qu'il est interdit de vendre à perte, on les a pris au mot, avec la Première ministre, on dit : eh bien, on va regarder dans quelles conditions vous pouvez vendre à perte de manière exceptionnelle, de manière temporaire. On crée les conditions pour faire plus, c'est ça notre enjeu, et maintenant qu'ils expliquent : je peux, je ne peux pas faire, mais au moins, il n'y a plus l'argument : je ne peux pas vendre à perte pour faire plus d'efforts sur le prix des carburants.
JEAN-JACQUES BOURDIN
D'accord, bien. Nous verrons ce qu'ils feront. En revanche, les petites stations-services, elles, ne vont pas vendre à perte, elles vont fermer la porte.
THOMAS CAZENAVE
Et c'est la raison pour laquelle on leur a dit : on va vous accompagner, on a bien compris le problème, autant les grandes surfaces, les grands distributeurs, on comprend qu'ils peuvent faire des opérations coup de poing, les pompistes indépendants, c'est plus difficile, un fonds va être créé pour les accompagner, les protéger dans la période.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Un fonds ? De combien ?
THOMAS CAZENAVE
Oui, un fonds, on est en train de le chiffrer. On est en train de le chiffrer.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est-à-dire, si je comprends bien, si je comprends bien, pour résumer la situation, parce que c'est un peu compliqué votre affaire, pour résumer la situation : vente à perte, possible, très bien, personne ne dit : je vais vendre à perte, en revanche, puisque la vente à perte est possible, il y a des petites stations qui risquent de fermer, alors là, vous dites : on va créer un fonds, donc on va dépenser de l'argent pour aider ceux qui ne peuvent pas vendre à perte, c'est un peu compliqué votre affaire, alors, je résume encore, Thomas CAZENAVE, les pétroliers accroissent leurs bénéfices à travers le raffinage, en ce moment, vous en convenez, multipliés par 5 depuis le mois de juillet. Première chose. Les distributeurs ne veulent pas vendre à perte, deuxième chose. L'argent engrange de la TVA, si j'en crois Marine LE PEN et Xavier BERTRAND, sur le dos des Français. Et qui paie tout ça ? Eh bien, les Français ! Nous !
THOMAS CAZENAVE
Alors, il y a un certain nombre de mensonges qui ont été véhiculés, alors quand j'entends dire que l'État se ferait de l'argent sur l'inflation et le prix du carburant, pardon, j'en tombe de ma chaise, pourquoi, en gros, l'augmentation des prix du carburant, ça a permis de générer des recettes, 2 milliards d'euros de plus de recettes de TVA, combien l'État français a dépensé pour protéger les Français face à l'inflation des prix du carburant en 2023, 40 milliards d'euros. Qui peut sérieusement dire dans notre pays que l'État se ferait un pactole sur le dos des Français ! On a protégé comme jamais 40 milliards d'euros, à comparer aux 2 milliards d'euros. Et j'en viens à votre réaction sur le prix des carburants, moi, le ministre des Comptes publics que je suis, eh bien, je préfère négocier avec les distributeurs plutôt que suivre Xavier BERTRAND qui nous propose une ristourne carburant qui serait un coût pour le contribuable, parce que l'État, c'est le contribuable, de 12 milliards d'euros, 12 milliards d'euros ! Je préfère qu'on négocie avec les distributeurs plutôt que de demander aux contribuables de financer une ristourne carburant.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et la TVA, comme le dit Marine LE PEN, qui veut faire passer la TVA à 5,5 ?
THOMAS CAZENAVE
Mais la TVA, je vous l'ai dit, on a mis 40 milliards d'euros pour protéger les Français, ça nous a rapporté, la TVA…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, mais maintenant, vous continuez à la protéger…
THOMAS CAZENAVE
La TVA ne nous a rapporté que 2 milliards d'euros face aux 40 milliards, ce n'est pas sérieux, Marine LE PEN, ce n'est pas sérieux.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, hausse des marges du secteur pétrolier, je le disais, alors justement, justement, et notamment le raffinage, multipliées par 5, allez-vous reconduire la taxe sur les superprofits des pétroliers ?
THOMAS CAZENAVE
Moi, je l'ai dit, tout est sur la table, on a lancé une mission pour regarder les marges de raffinage, c'est le cas notamment des services d'Agnès PANNIER-RUNACHER, et à Bercy, de Bruno LE MAIRE. Et tout est sur la table, et y compris la taxe…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Tout est sur la table…
THOMAS CAZENAVE
Vous l'avez dit, vous l'avez dit, Monsieur BOURDIN…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Elle sera reconduite ?
THOMAS CAZENAVE
Vous avez dit que nous avions l'année dernière mis en place une taxe de solidarité, et nous pouvons envisager de reconduire cette taxe en fonction…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous êtes favorable à la reconduction de cette taxe ?
THOMAS CAZENAVE
En fonction de l'analyse qui sera faite…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Thomas CAZENAVE…
THOMAS CAZENAVE
En fonction de l'analyse qui sera faite…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais moi, je vous la fais l'analyse !
THOMAS CAZENAVE
Non, parce qu'il faut regarder…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Multipliées par 5 depuis juillet !
THOMAS CAZENAVE
Non, il faut regarder ce qui se passe, le raffinage en France, le raffinage à l'étranger, c'est plus compliqué que ça, je pense que vous le savez, donc on regarde. Ce que je peux vous dire comme ministre des Comptes publics, c'est que cette question, elle est sur la table, et on est prêt, s'il le faut, à reconduire cette taxe de solidarité.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, le budget 2024, vous prévoyez une croissance de 1,4 et une inflation de 2,6, on est bien d'accord, la Banque de France n'est pas d'accord avec vous, elle prévoit 0,9 de croissance, écart de 12 milliards d'euros, pourquoi cet écart ? Le gouverneur de la Banque de France vous dit : le budget est trop optimiste, vous manquez de crédibilité. Que lui répondez-vous ?
THOMAS CAZENAVE
Alors, vous savez, les prévisions de croissance, c'est toujours un exercice difficile, pour l'année 2023, la Banque de France s'était trompée dans ses prévisions, nous allons avoir 1 % de croissance en 2023 contre…
JEAN-JACQUES BOURDIN
1 %, 2023 ?
THOMAS CAZENAVE
1 % en 2023, contre tous, celles et ceux qui pensaient qu'on était trop optimiste, notre croissance, nos entreprises résistent en 2023, elles résistent, regardez, l'Allemagne est entrée en récession, la France résiste, donc vous savez, c'est compliqué ces prévisions, on ne s'est pas trompé en 2023, on a révisé la croissance, pour 2024, on voulait 1,6, on avait dit : 1,6, avec Bruno LE MAIRE, on a dit : compte tenu du climat international, du ralentissement de la Chine, de la politique monétaire, il est plus raisonnable de faire 1,4, donc on a revu notre croissance à la baisse, mais en reste optimiste sur 2024, parce qu'on a un tissu économique solide, parce que nos entreprises continuent à créer des emplois, parce que nous réindustrialisons le pays. Donc nous avons encore une hypothèse optimiste, et nous tiendrons cet objectif.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors budget à l'Assemblée avec utilisation probable du 49.3, vous vous préparez, j'imagine, Thomas CAZENAVE, remarquez, sur les questions budgétaires, c'est habituel.
THOMAS CAZENAVE
Eh bien, écoutez, moi, je pense…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, allez-y…
THOMAS CAZENAVE
Là-dessus, je pense que les Français peuvent comprendre que les oppositions ne votent pas un budget. Moi, je ne jette pas la pierre aux oppositions si elles ne votent pas le budget, quand on est dans l'opposition, c'est vrai qu'on ne vote pas le budget. En revanche, les Français, ils ne comprendraient pas qu'on n'ait pas de budget à la fin de l'année, avoir un budget, c'est quoi ? C'est financer nos écoles, nos hôpitaux, nos enseignants, nos forces de l'ordre. Donc il nous faut absolument un budget, donc finalement, le recours au 49.3, c'est la garantie que le pays ait un budget avant la fin de l'année. Et ma seule responsabilité comme ministre des Comptes publics, c'est qu'on ait un budget en 2024.
JEAN-JACQUES BOURDIN
On aura un budget…
THOMAS CAZENAVE
Et on aura un budget…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça, j'en suis absolument certain…
THOMAS CAZENAVE
Mais il faut un 49.3 pour un budget.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, derniers arbitrages avec les parlementaires, vous les avez rencontrés, vous en avez rencontré une vingtaine, je crois, de tous bords politiques, mais avant de parler de ces arbitrages, je voudrais revenir sur un fait qui défraie la chronique sur les réseaux sociaux, c'est ce Youtubeur Mertel, inconnu au bataillon, qui se vante de toucher plusieurs aides sociales et de vivre avec 1.800 euros par mois d'argent public, notre argent, sans rien faire.
THOMAS CAZENAVE
Je trouve ça, je vais vous dire, scandaleux, et nous allons, et je vous l'annonce, nous allons mettre dans le projet de loi de finances un délit de promotion de la fraude, il faut que l'on puisse condamner celles et ceux qui font la promotion de la fraude fiscale sociale avec la plus grande fermeté, et c'est la raison pour laquelle, il y aura un dispositif dans le projet de loi de finances que nous défendrons dès la semaine prochaine à l'Assemblée avec Bruno LE MAIRE.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. Autre sujet évoqué, l'impôt maximal mondial de 15 % sur les multinationales, est-ce que vous allez l'appliquer aussi aux particuliers ?
THOMAS CAZENAVE
Alors, d'abord, véritable avancée, quand j'entends la Nupes qui nous dit : il faut avancer sur un impôt universel sur les entreprises, je leur dis : c'est le cas, grâce à l'accord que nous avons trouvé avec les pays de l'OCDE, à l'initiative de la France, un taux minimal d'impôt sur les sociétés de 15 % va être inscrit, pour la première fois, dans notre budget 2024. Moi, j'ai proposé, dans le cadre des dialogues de Bercy, c'est quoi les dialogues de Bercy, c'est toutes les forces politiques de l'Assemblée et du Sénat…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je l'évoquais…
THOMAS CAZENAVE
Réunies. Et moi, je leur ai dit : mettons-nous d'accord sur quelques sujets, là-dessus, je les ai invitées, on va créer un groupe de travail trans-partisan pour faire la même chose pour les particuliers, en disant, au fond, si on pense qu'à l'échelle internationale, il faut s'assurer que les particuliers sont bien redevables de l'impôt, chiche, je suis prêt à y travailler, je suis prêt à mettre un groupe de travail…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Impôt de 15 % pour les particuliers ?
THOMAS CAZENAVE
Non, c'est encore différent, on ne peut pas traduire... mais non, on ne peut pas passer des entreprises aux particuliers…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah, bon, d'accord, donc le taux ne sera pas le même ?
THOMAS CAZENAVE
Non, il y a un travail, c'est plus compliqué…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça peut être plus élevé ou moins élevé ?
THOMAS CAZENAVE
Ça peut être moins, ça peut prendre plus de formes…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah, bon, pas plus élevé, ça peut être moins, ça ne sera pas plus, si j'ai bien compris…
THOMAS CAZENAVE
Ça peut prendre des formes très différentes. En revanche, nous, on est prêts à y travailler, c'est une demande, tout comme, je le dis, hier, tous les groupes politiques m'ont interpellé sur la question des rachats d'actions…
JEAN-JACQUES BOURDIN
J'allais en parler, alors, qu'allez-vous faire ?
THOMAS CAZENAVE
Rachats d'actions, c'est quoi, c'est quand vous avez une politique, une entreprise qui utilise ses bénéfices pour racheter ses actions, ça peut être une pratique courante, mais c'est aussi, et c'est là-dessus que, moi, je suis prêt à ce qu'on regarde ce sujet-là, des fois, une manière d'enlever un peu du bénéfice qui aurait pu être redistribué aux salariés…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Évidemment…
THOMAS CAZENAVE
Et donc…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ou à l'investissement.
THOMAS CAZENAVE
Exactement. Et donc comme ça a été demandé par tous les groupes politiques, moi, j'ai annoncé hier soir que nous étions prêts à travailler avec toutes les forces politiques qui le demandaient pour que dans le débat parlementaire, par amendement, on puisse avancer sur ce sujet.
JEAN-JACQUES BOURDIN
La fiscalité du logement touristique, là aussi, c'est totalement anormal, quand on loue son logement à des fins… je pense à AIRBNB ou d'autres plateformes, on a une fiscalité avantageuse par rapport à celui qui loue son logement à l'année.
THOMAS CAZENAVE
Vous avez raison…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, qu'allez-vous faire ?
THOMAS CAZENAVE
Vous avez raison, et c'est d'ailleurs une proposition qui a été avancée par les parlementaires hier soir, et des groupes d'opposition comme de la majorité. Vous savez, moi, je suis dans le dialogue, ils sont arrivés, des parlementaires d'horizons différents, en disant : on souhaite remettre en cause l'avantage fiscal sur les logements touristiques. Je leur ai dit : je vois que se dessine un consensus entre vous, nous sommes prêts à y travailler, parce que j'ai bien conscience que dans certaines zones tendues, celles et ceux qui travaillent dans ces territoires n'arrivent plus à se loger au bénéfice de logements touristiques, ce n'est pas que du AIRBNB…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais vous êtes prêt à quel effort ? A baisser, à baisser cet abattement fiscal ?
THOMAS CAZENAVE
On est prêt, oui…
JEAN-JACQUES BOURDIN
A le ramener à 50 % par exemple ?
THOMAS CAZENAVE
Les parlementaires le souhaitent, nous sommes ouverts à remettre en question cet avantage fiscal pour le mettre sur le droit fiscal normal.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Les économies. Administration, baisse des dépenses de fonctionnement dans le budget. Réduction du nombre de fonctionnaires ?
THOMAS CAZENAVE
Non. Non, non, je préfère le dire. On va baisser la dépense de l'État, on va faire 16 milliards d'euros d'économies mais dans le même temps, je le dis, on a un budget tourné vers l'avenir qui va permettre d'investir pour recruter des magistrats, des policiers, mieux payer nos enseignants. Il y a un besoin dans le pays de service public. Donc notre enjeu, c'est baisser la dépense et protéger nos services publics, tout comme réaliser la transition écologique. On y reviendra.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Eh bien j'y reviens ! La transition écologique dans le budget, c'est 7 milliards d'euros supplémentaires. Alors j'ai vu la répartition, la Première ministre en a parlé. Est-ce qu'il y aura une augmentation de la taxe sur les billets d'avion ?
THOMAS CAZENAVE
Aujourd'hui, la décision n'est pas prise.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah bon ? À 8 jours de la présentation du budget.
THOMAS CAZENAVE
Non mais je suis transparent avec vous. Pourquoi ? Parce qu'on réfléchit aussi à une taxation des gestionnaires d'infrastructures qui concerne les sociétés d'autoroutes mais aussi les aéroports.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est-à-dire ? Les sociétés d'autoroutes seront taxées ?
THOMAS CAZENAVE
Notre souhait, c'est de mettre à contribution les gestionnaires d'infrastructures, notamment des transports les plus polluants, donc la route, les autoroutes et les aéroports, pour financer des transports propres notamment le ferroviaire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc taxe au péage.
THOMAS CAZENAVE
Non ! Non, non, non !
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous savez pourquoi je dis ça ? Je le fais exprès. Parce que les sociétés d'autoroute vont évidemment répercuter.
THOMAS CAZENAVE
Évidemment non, ce n'est pas possible. Parce que l'augmentation des péages c'est la décision de l'État et, je peux vous dire que quand on mettra en place cette contribution des gestionnaires d'infrastructures pour financer la transition écologique, ça se fera sans hausse des péages. Que je sois très clair sur le sujet.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc taxe sur les sociétés d'autoroutes et sur les aéroports, on est bien d'accord. Ça va être annoncé avant mercredi prochain j'imagine. On est d'accord. Bon, plus de bonus automatique pour l'achat d'un véhicule électrique, 5 000 ou 7 000 euros. Alors ça sera plus simple, désormais chaque véhicule vendu en France aura son score environnemental. Il y aura une liste qui sera connue mi-décembre, une liste de véhicules. Ça veut dire plus de bonus pour les voitures électriques fabriquées en Chine.
THOMAS CAZENAVE
Notre objectif c'est que la transition écologique, ça doit être aussi une bonne nouvelle pour notre réindustrialisation. Il y a aussi quelque chose de paradoxal : si vous importez un véhicule électrique qui arrive du bout du monde avec un gros impact environnemental…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Comme la Spring de RENAULT.
THOMAS CAZENAVE
Il faut qu'on regarde le coût environnemental complet, et donc c'est pour ça que l'on souhaite revoir le dispositif du bonus, pour favoriser des véhicules propres mais aussi des véhicules qui sont fabriqués au plus proche de notre territoire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc plus de bonus pour les véhicules électriques fabriqués en Chine.
THOMAS CAZENAVE
Oui. L'objectif c'est d'inciter aux véhicules électriques qui sont fabriqués notamment sur notre territoire européen continental.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc plus de bonus pour la Spring de RENAULT par exemple. Bien, terminée la détaxation du gazole pour les agriculteurs, les travaux publics, vous avez trouvé des accords. Les pêcheurs ?
THOMAS CAZENAVE
Non. Aujourd'hui ce qu'on souhaite, je le dis très clairement, ce qu'on appelle le gazole non-routier, le gazole non-routier, c'est un avantage fiscal…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Le GNR.
THOMAS CAZENAVE
Le GNR, qui est contraire à notre ambition de la transition écologique. On ne fera aucune économie sur le sujet, que les choses soient très claires. On discute avec chacun des secteurs pour regarder quelles sont les alternatives sur la table et nous allons les accompagner. Donc nous ne ferons pas un euro d'économie sur ces professions, on les accompagne. Par contre c'est notre objectif de verdissement de la fiscalité, il faut qu'on soit cohérent. On ne peut pas mettre 7 milliards d'euros de plus sur la transition écologique d'un côté et laisser des avantages fiscaux qui sont contraires à nos objectifs de transition écologique.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Une vignette pour les poids lourds étrangers qui ne feront pas le plein en France ? C'était une réflexion, une idée.
THOMAS CAZENAVE
Non, elle n'est pas sur la table.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Elle n'est pas sur la table, très bien. La lutte contre la pauvreté, est-ce que vous confirmez l'intégration dans le budget d'une aide exceptionnelle pour lutter contre la pauvreté ?
THOMAS CAZENAVE
Aujourd'hui, nous avons des moyens considérables qui sont mis pour lutter contre la pauvreté. Ce sont des moyens à destination du secteur associatif. Et je vais vous dire, la décision qu'on a prise dans ce budget, c'est d'indexer les pensions de retraite, d'indexer les prestations sur l'inflation. 25 milliards d'euros destinés à protéger les Français de l'inflation, et des salariés aussi. Pourquoi ? Je vais au bout de mon raisonnement.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Attendez ! Ça veut dire que les retraites vont augmenter. L'inflation, elle sera à 4,6.
THOMAS CAZENAVE
Elle sera connue… Entre 4 et 5.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça veut dire que le montant des retraites va augmenter de 4,5 ou 4,6.
THOMAS CAZENAVE
On va l'indexer sur l'inflation. Pourquoi parce qu'on veut protéger contre l'inflation mais également les salariés. On va faire quelque chose de très important, c'est que le barème de l'impôt sur le revenu va être revu en fonction de l'inflation.
JEAN-JACQUES BOURDIN
J'ai vu ça, oui.
THOMAS CAZENAVE
Pourquoi ? Parce que les salariés ont obtenu à peu près 4 % d'augmentation de leur salaire. Donc certains pourraient se mettre à payer de l'impôt ou d'autres payer plus d'impôts. On ne va pas reprendre aux salariés d'un côté ce qu'ils ont négocié de l'autre. Donc on va faire augmenter ces barèmes de l'impôt sur le revenu pour protéger les salariés de l'inflation. Donc c'est un effort considérable qui est fait dans le budget de l'État pour protéger tous les Français de l'inflation.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je reviens à la lutte contre la pauvreté. Il y a eu cette annonce d'une aide exceptionnelle dans le budget. Il y aura une aide exceptionnelle ? J'ai vu, 50 % d'augmentation des crédits attribués à la lutte contre la pauvreté. Oui ou non ?
THOMAS CAZENAVE
Oui, il y a un plan pauvreté sur plusieurs années qui a été présenté…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais là, dans le budget 2024 ?
THOMAS CAZENAVE
Mais qui traduit nos engagements.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc 50 % d'augmentation des crédits ?
THOMAS CAZENAVE
Non, mais pas 50 % d'augmentation des crédits en une année.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Sur plusieurs années.
THOMAS CAZENAVE
Sur plusieurs années, voilà.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et sur l'année 2024, ce sera quoi ?
THOMAS CAZENAVE
Je ne sais pas quel est le montant précis sur l'année 2024 de chacune des lignes du budget.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non mais parce que vous avez entendu les associations.
THOMAS CAZENAVE
Bien sûr. Et après je vais vous dire, le vrai combat contre la pauvreté, c'est notre combat pour le plein emploi. Le plein emploi. On a réussi à créer 2 millions d'emplois, le chômage a été ramené à 7 %.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Sauf que le chômage dans les prévisions devrait légèrement augmenter l'année prochaine.
THOMAS CAZENAVE
Non. On va se battre pour ça parce que la plus grande des conquêtes sociales, je voudrais insister là-dessus, c'est de lutter contre le chômage de masse. Je me souviens encore il y a quelques années où le sujet de préoccupation numéro un, c'était le chômage de masse. On est en train de remporter cette bataille et c'est ça la meilleure protection contre la pauvreté.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors le coût de la vie, j'en parlais. Les assurances vont augmenter, les assureurs l'ont annoncé hier. Vous savez vu, entre 4 et 8 %, c'est énorme, énorme pour les Français. La santé va coûter plus cher. Tiens, parlons de la santé, le budget de la Sécurité sociale. Les médecins généralistes veulent une augmentation du tarif des consultations et passer à 30 euros minimum sinon c'est la grève. Qu'est-ce que vous leur répondez ?
THOMAS CAZENAVE
Nous on a un enjeu, moi je l'assume comme ministre des Comptes publics, je tiens à la pérennité de notre modèle de Sécurité sociale. Et pour pérenniser notre modèle de Sécurité sociale, il faut qu'on maîtrise mieux nos dépenses notamment de santé. Elles sont extrêmement dynamiques et je pense à un sujet en particulier, c'est les dépenses dans le secteur du médicament. Il y a des prescriptions qui sont des fois trop importantes, une consommation de médicaments, chacune et chacun…
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est un reproche que vous faites aux médecins.
THOMAS CAZENAVE
Non ! Chacune et chacun d'entre nous, vous le constatez. Vous ouvrez votre boîte à pharmacie, j'imagine que vous avez plein de médicaments inutilisés que vous finirez par jeter…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, oui.
THOMAS CAZENAVE
Donc il faut qu'on fasse collectivement plus attention à la prescription des médicaments. Et je pense, et ça c'est le l'engagement aussi pris par le ministre de la Santé, de travailler avec les professionnels de santé en disant : comment est-ce qu'on peut mieux prescrire, moins prescrire, pour éviter des dépenses qui parfois sont inutiles.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il n'est pas question d'aller plus loin que 27,50 euros la consultation ?
THOMAS CAZENAVE
Ça, c'est la négociation.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il y a une marge de manœuvre ?
THOMAS CAZENAVE
C'est la négociation qui sera menée.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, mais est-ce qu'il y a une marge ? Non, vous n'êtes pas ministre de la Santé.
THOMAS CAZENAVE
Voilà ! Je ne suis pas ministre de la Santé.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui mais enfin, vous regardez les comptes.
THOMAS CAZENAVE
Bien sûr, et je suis très attentif, je suis très attentif.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il est sous surveillance, si j'ai bien compris, le ministre de la Santé.
THOMAS CAZENAVE
C'est une construction commune le budget. Et je tiens, parce que c'est l'engagement qu'on a pris vis-à-vis des Français, il faut qu'on baisse de notre déficit public.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, c'est normal.
THOMAS CAZENAVE
Si l'État a pu protéger tout le monde, c'est qu'on avait un déficit public faible en…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, mais le déficit de la Sécurité sociale va encore se creuser en 2024. 13 milliards d'euros de plus.
THOMAS CAZENAVE
Et donc notre responsabilité, il sera divisé par deux par rapport à 2023 donc il y a des efforts…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui mais enfin, 13 milliards de plus.
THOMAS CAZENAVE
Mais bien sûr. Mais c'est pour ça que je vous dis qu'il faut qu'on soit attentif et qu'on n'ait pas peur d'ouvrir des sujets comme la prescription des médicaments. Je pense que les Français peuvent le comprendre. Il faut qu'on fasse plus attention et je ne suis pas en train de dire : on ne va pas de baisser les dépenses de santé, il faut qu'elles augmentent moins vite.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, les dépenses de santé, il faut qu'elles augmentent moins vite mais l'effort que vous faites en direction des hôpitaux et des EHPAD est insuffisant, c'est ce que vous dit la Fédération hospitalière.
THOMAS CAZENAVE
On sort d'une période où on a mis plus de 10 milliards d'euros sur le Ségur de la Santé. On a fait des investissements considérables, considérables. Il faut aussi, moi je considère que les ressources publiques elles ne sont pas illimitées. Il faut qu'on fasse des choix et qu'on gère un peu mieux chaque euro dont nous disposons. Et donc je pense qu'il faut qu'on ait ce débat-là dans le secteur de la santé comme dans d'autres secteurs en disant : comment on peut faire mieux, comment on peut parfois dépenser moins. Je crois que tout le monde peut le comprendre y compris sur les dépenses de santé.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors le coût de la vie, j'en termine Thomas CAZENAVE avec le prix d'électricité en 2024. Moins de 10% la hausse ?
THOMAS CAZENAVE
Aujourd'hui on ne sait pas comment va évoluer le prix de l'électricité, il faut être clair avec les Français.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, il y a un accord à Bruxelles entre les 28.
THOMAS CAZENAVE
On le saura à la fin de l'année. Ce qu'il faut savoir quand même, c'est que le prix de l'électricité et du gaz il a considérablement baissé par rapport à 2022, par rapport à la crise. Il a considérablement baissé et c'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous, progressivement, on sort des dispositifs de protection. 10 milliards d'euros, or ma responsabilité c'est quand même aussi de réduire le déficit public. On verra à la fin de l'année mais ce que je peux vous dire, c'est que le prix de l'électricité, si jamais il devait augmenter, il n'augmentera pas au-delà de 10 %.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et moins de 10 %, c'est possible.
THOMAS CAZENAVE
Oui, c'est tout à fait possible mais aujourd'hui on ne le sait pas encore.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci Thomas CAZENAVE d'être venu nous voir ce matin nous parler du budget.
THOMAS CAZENAVE
Merci à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 26 septembre 2023