Texte intégral
ROMAIN DESARBRES
Tout de suite, c'est " La grande interview ". Sonia MABROUK reçoit ce matin le ministre de l'Intérieur, Gérald DARMANIN. Lutte contre l'antisémitisme, insécurité, le ministre de l'Intérieur, Gérald DARMANIN, invité de " La grande interview ".
SONIA MABROUK
Place donc à "La grande interview ", sur Cnews et Europe 1. Bonjour à vous Gérald DARMANIN.
GERALD DARMANIN
Bonjour.
SONIA MABROUK
Et bienvenue. Vous êtes le ministre de l'Intérieur, des Outre-mer et en charge aussi des Cultes. A ce sujet, hier, le président de la République a reçu les représentants des cultes au lendemain de la Marche contre l'antisémitisme. Et maintenant Gérald DARMANIN, quels actes, quelles démarches, quelle impulsion comptez-vous donner après ce rassemblement ?
GERALD DARMANIN
D'abord, il faut rappeler que la lutte contre l'antisémitisme concerne tout le monde. La lutte contre tous les racismes concerne tout le monde. Mais la lutte contre l'antisémitisme concerne tout le monde et est d'actualité. Il y a 1 518 actes antisémites ou propos antisémites qui vont directement vers les Français de confession juive, qui ont été recensés depuis le 7 octobre, quasiment 600 interpellations. C'est vrai qu'essentiellement ce sont des tags, ce sont essentiellement des insultes, mais il y a aussi des coups et blessures. Il faut évidemment rappeler à chacune et à chacun que les Français de confession juive sont particulièrement concernés par le racisme que nous vivons dans notre société depuis le 7 octobre. Et puis, je pense que c'est important de dire aussi que la Communauté nationale doit regarder les choses, évidemment avec intérêt, mais sans projeter en France ce qui se passe au Proche-Orient. Ce ne sont pas les musulmans français qui sont responsables de ce qu'a fait le Hamas.
SONIA MABROUK
Est-ce que l'importation n'est pas là depuis longtemps, Gérald DARMANIN…
GERALD DARMANIN
Non, non non…
SONIA MABROUK
… du conflit ?
GERALD DARMANIN
Non, je ne le crois pas. Les musulmans…
SONIA MABROUK
Ce n'est pas un aveuglement de dire non ?
GERALD DARMANIN
Pardon ?
SONIA MABROUK
N'est-ce pas un aveuglement de dire…
GERALD DARMANIN
Mais ce n'est pas à moi que vous allez dire que je puisse être aveuglé…
SONIA MABROUK
Je vous pose une question générale.
GERALD DARMANIN
Vous n'êtes pas obligé de mettre non plus des jerricans d'essence sur du feu. Non, mais ce qui est sûr, c'est que les musulmans français ne sont pour rien, il faut le redire, dans ce qu'a fait le Hamas, évidemment. Et les Français de confession juive ne sont pour rien dans les bombardements qu'il y a à Gaza. Donc il faut éviter, le plus possible, d'importer un conflit qui est déjà extrêmement compliqué comme ça, qui mêle beaucoup de passion, qui mêle beaucoup d'histoires, qui mêle parfois des familles. Et il faut évidemment le respecter. Mais je pense que ce qui est important, c'est d'expliquer que les Français de confession juive sont français. Les Français de confession musulmane sont français.
SONIA MABROUK
Vous avez rappelé le nombre d'interpellations et les actes antisémites qui explosent. Il y a beaucoup d'enquêtes, mais qu'en est-il justement des sanctions ? Est-ce que vous appelez vous même à la plus grande fermeté de la justice ?
GERALD DARMANIN
Oui, et je constate que la justice est ferme. Nous avons à plusieurs reprises demandé au procureur de la République, aux juges, de pouvoir interpeller des personnes, y compris extrêmement mineures. Vous avez vu que le dernier que nous avons interpellé dans ce groupe de jeunes qui chantait des chants nazis dans le métro parisien, et qui habitait dans le Sud de la France, avait 11 ans. 11 ans. Donc la justice accompagne la police. Nous permettons de déférer des personnes. C'est le cas de la personne qui sur TikTok appelait à la mort d'un rabbin à Levallois-Perret. C'est le cas, vous le savez, de cette « influenceuse » - je mets des guillemets – qui faisait de l'apologisme du terrorisme, en tout cas, ce que je considère, moi, être de l'apologie du terrorisme. Donc, la justice suit la police, interpelle les personnes, sont déférées. Pour ce qui est par exemple de cette influenceuse, le 22 novembre, elle sera présentée devant le tribunal, donc en quelques jours. Donc oui, il faut des réponses très fermes, et je l'ai dit, sur les à peu près 600 interpellations, il y en a 120, 130, qui sont des étrangers. Eh bien voilà, on va retirer, on retire en ce moment les titres de séjour de tout le monde, et il y a plus d'une cinquantaine de ces auteurs qui sont en centre de rétention administratif et qui sont très éloignés.
SONIA MABROUK
Je note l'âge, vous avez dit 11 ans, Gérald DARMANIN ! Dans ce cas, est-ce qu'il ne faut pas aussi en appeler à la responsabilité des parents qui, il faut le souligner, parfois, peuvent être aussi la cause de cette haine décomplexée.
GERALD DARMANIN
Il se peut que lorsque vous avez des adolescents qui partent mal, les parents sont un peu dépassés ou ils ne savent pas tout à fait. Et quand la police vient ou l'éducation nationale vient, on les remet droit. Voilà. Et puis il se peut que les parents participent malheureusement à cette déviance. Dans ces cas-là, la justice sait répondre. Il y a des centres éducatifs fermés, il y a une éducation qui se fait à la place des parents. Ce qui est certain, c'est que quand vous avez des enfants de 11 ans qui chantent des chants nazis, qui crient leur haine de juifs dans le métro parisien, au vu et au su de tous, il y a un problème en effet d'éducation, incontestablement, qu'il faut vite corriger, avec beaucoup de fermeté
SONIA MABROUK
Je vous pose la même question, Gérald DARMANIN, que j'ai posée hier à cette même place à la présidente de l'Assemblée nationale, Yaël BRAUN-PIVET : quel est, selon vous, le principal carburant de l'antisémitisme aujourd'hui ?
GERALD DARMANIN
Ah, il y en a plusieurs. Il y en a plusieurs. Les extrêmes, l'extrême gauche comme l'extrême droite, sont nourris d'un antisémitisme, on le sait, l'historique. Et puis il y a l'islam radical, incontestablement, qui fait de la haine du juif, d'ailleurs le contraire de ce qui est écrit dans le livre, puisque y compris ce qui est écrit dans les livres religieux et singulièrement le Coran, on ne doit pas s'en prendre aux gens du livre, donc ils trahissent leur propre religion, en étant antisémite. Et puis il y a une forme d'antisémitisme assez fort qui vient de l'antisionisme, la haine d'Israël, la destruction d'Israël. Donc c'est malheureusement cet antisémitisme cumulé, qui fait pour nos compatriotes de confession juive quelque chose de terrible à vivre. Et je voudrais ici le souligner, indépendamment des horreurs qu'ont vécu les Israéliens en Israël, à la suite des attaques du Hamas. Et par ailleurs, dire qu'évidemment il y a beaucoup de Français, donc c'est depuis l'attentat de Nice le moment où nos compatriotes ont le plus souffert. Voilà. Je ne vois pas des juifs, j'y vois des Français, incontestablement. Je voudrais aussi souligner qu'il y a l'histoire, et cela a été dit par un participant musulman à la réunion qu'on a eue avec le président de la République, et c'était très touchant : il comprenait pourquoi les Français de confession juive dans les actes antisémites étaient particulièrement touchés, parce qu'il y a notre histoire, une histoire où la France n'a pas su protéger les juifs. Histoire où la France a connu des attentats contre des écoles juives, contre des rues, on pense bien sûr à ce qui s'était passé à Paris, où il y avait des Français de confession juive qui mangeaient, qui vivaient là, où des enfants de quelques années ont été abattus dans des cours d'école. Il y a en France non seulement l'antisémitisme, mais il y a ce que l'antisémitisme a produit, c'est à dire de l'horreur, de l'horreur absolue.
SONIA MABROUK
Vous parlez des représentants musulmans. Quelle France était à la Marche avant-hier, Gérald DARMANIN ? Beaucoup, en tout cas certains affirment qu'il n'y avait pas les quartiers populaires, qu'il n'y avait pas aussi la jeunesse. Qu'avez-vous vu dans cette marche ?
GERALD DARMANIN
Alors, évidemment, comme ministre de l'Intérieur, je me suis beaucoup organisé... je me suis beaucoup occupé de l'organisation des manifestations, il ne faut pas penser qu'il n'y a que Paris, d'ailleurs…
SONIA MABROUK
Sans incident, on peut en tous les cas notamment le souligner.
GERALD DARMANIN
Oui, je pense que ça s'est très bien passé.
SONIA MABROUK
Mais qui était là ?
GERALD DARMANIN
Grâce aux policiers et aux gendarmes. Mais il n'y a pas que Paris aussi dans la vie. Moi je sais qu'à Lille, il y avait plus de 1 500 personnes par exemple, ce qui n'est pas de nature, vraiment, à Lille on ne manifeste, pas beaucoup. Donc je pense qu'il y a eu une grosse mobilisation. Je ne sais pas. Je ne suis pas capable de vous dire qui était là. J'étais avec les officiels, j'ai traversé le Pont des Invalides pour aller les rejoindre. Donc je ne vais pas vous faire celui qui était parmi la foule, même si j'ai salué cette foule.
SONIA MABROUK
Vous n'allez pas me faire celui qui ne comprend pas ma question.
GERALD DARMANIN
Si, mais j'ai très bien compris…
SONIA MABROUK
Certains ont souligné…
GERALD DARMANIN
Mais, on aurait tous aimé qu'il y ait encore beaucoup plus de monde. On aurait tous aimé que l'ensemble des responsables politiques, l'ensemble des responsables religieux, voilà, que tout le monde soit là. Bon, tout le monde n'a pas été absolument là. Cependant, moi je pense que c'est une première action extrêmement forte, qui montre qu'on ne peut pas accepter l'antisémitisme en France. Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas par ailleurs des discriminations contre les personnes, contre les jeunes des quartiers. Qu'il y a bien sûr des actes antimusulmans, qu'il y a des antichrétiens. Et donc je pense qu'il faut éviter la concurrence victimaire.
SONIA MABROUK
Pourquoi vous avez besoin de le rappeler, vous craignez, Monsieur le ministre, qu'il y ait une confrontation, que certains attisent une guerre civile larvée, ou est-ce qu'elle est malheureusement un horizon à craindre ?
GERALD DARMANIN
Alors, moi je suis élu d'un territoire populaire. Comme beaucoup d'élus j'étais le 11 novembre dans ma commune à Tourcoing. J'en ai profité pour aller voir tous ceux que je connaissais. J'ai senti des Français qui nous encouragent à être fermes, beaucoup, sur ça et sur la loi immigration. J'ai senti des Français qui avaient peur aussi de l'importation du conflit, et j'ai senti aussi des Français, notamment ceux que vous appelez les Français des quartiers, mais les Français simplement, qui sont de confession musulmane, qui ont peur du deux poids, deux mesures. Voilà, ils me l'ont dit comme ça, et ils ont l'impression, moi je pense que c'est une fausse impression, mais je suis obligé de l'entendre, ils ont l'impression qu'on ne s'occupe pas d'eux, qu'on leur donne le crédit qu'ils sont du côté de ceux qui persécutent les juifs. Je sais que ce n'est pas vrai. Je sais que ce n'est pas vrai, mais voilà, je veux le redire ici, il y a bien sûr des actes antimusulmans. Je suis bien obligé de constater qu'il y a dix fois plus d'actes antisémites en ce moment, et c'est pour cela que je le répète, que c'est pour cela que les policiers protègent les juifs…
SONIA MABROUK
Je vais vous poser la question différemment, Gérald DARMANIN : est-ce qu'aujourd'hui, dans le contexte qui est celui-ci, d'importation malgré tout de ce conflit, est-ce qu'il y a plus d'actes antimusulmans ? Est-ce que ce conflit, ce qui se passe en Israël, a généré plus d'actes antimusulmans dans notre pays ?
GERALD DARMANIN
Alors, ce n'est pas à la mesure de ce que nous connaissons pour les actes antisémites. Mais oui, il y a des actes antimusulmans supplémentaires, et il y a des mosquées qui reçoivent des lettres de menaces de mort, des menaces d'attentats, de très nombreux propos anti-islam, y compris sur les plateaux de télévision. Donc bien sûr, c'est choquant pour nos compatriotes musulmans. Encore une fois, les musulmans français, ils n'ont rien à voir avec ce qu'a fait le Hamas.
SONIA MABROUK
Et s'il y a des propos anti-islam, comme des propos antisémites, ils tombent sous le coup de la justice, qu'ils soient sur un plateau ou en dehors.
GERALD DARMANIN
Oui, bien sûr. Et c'est pour ça que moi-même je saisis l'ARCOM, lorsqu'un certain nombre de personnes disent des choses qui sont contraires à la loi. C'est pour ça que moi-même je saisis la justice. Mais je pense que nous ne le disons pas assez. Voilà. Moi j'ai retenu ça aussi de mes échanges avec les gens. Nous ne le disons pas assez. La France ne protège pas davantage les juifs que les musulmans. La France protège tout le monde. L'Etat français protège tout le monde, tous ceux qui sont menacés. Et en France, c'est un pays magnifique, on peut vivre de sa religion, on peut s'habiller comme on le souhaite dans la rue, pratiquer son culte, changer évidemment de religion.
SONIA MABROUK
Ça c'est la France souhaitée ou c'est la France réelle ?
GERALD DARMANIN
Non, mais c'est la France réelle, bien évidemment. Il y a eu…
SONIA MABROUK
On peut être habillé comme on veut, partout sur le territoire, et ne pas avoir de problème en fonction de ses origines et de ses croyances ?
GERALD DARMANIN
Et la police... Non, mais que vous ayez envie de porter une mini-jupe, que vous ayez envie de porter une kippa, que vous ayez envie de porter un voile dans la rue, la France vous permet de le faire. Ensuite, c'est à la police, évidemment, de permettre de le faire. C'est pour ça que je suis ministre de l'Intérieur, et que je pense incarner une forme d'autorité qu'attendent les Français. Mais ce que je veux dire, c'est que les Français, la France ne protège pas un culte plutôt qu'un autre. Aujourd'hui, ce sont les Français de confession juive qui sont particulièrement menacés, attaqués. C'est normal que nous les protégions. Et je suis très fier d'être ministre de l'Intérieur qui les protège. Mais je veux dire à nos compatriotes musulmans, à nos compatriotes chrétiens, à tous ceux qui, au fond, sentent que leur religion, parce qu'ils appartiennent à un groupe particulier, peuvent être menacés. C'est le cas aussi des musulmans. C'est le cas aussi des chrétiens, il ne faut pas l'oublier. Nous les protégeons. Et la France ne fait aucune distinction parmi ses enfants. Elle ne fonde sa sécurité, son autorité, que sur le fait que les gens sont menacés.
SONIA MABROUK
Gérald DARMANIN, quand je vous ai posé la question sur le ou les carburants de l'antisémitisme, vous avez aussi cité l'extrême droite. Le Rassemblement national, est ce que vous diriez, comme l'ancien Premier ministre Edouard PHILIPPE, qu'il n'avait aucun problème à la présence du RN dans la Marche et qu'il assume, je cite, " de ne pas choisir ceux avec qui il livre un combat essentiel contre l'antisémitisme " ?
GERALD DARMANIN
Non, je pense que la polémique autour de la présence des dirigeants du Rassemblement national n'a fait que servir le Rassemblement national.
SONIA MABROUK
Je rappelle que c'est Olivier VERAN qui en est à l'origine, c'est-à-dire votre collègue au gouvernement.
GERALD DARMANIN
Quand il y a des événements comme cela, je pense qu'on n'a pas de position morale à avoir. Les Français, je pense qu'ils en ont marre d'avoir des positions morales. Ce qui est sûr, c'est que personne n'est dupe. Voilà. Madame LE PEN, elle, fait partie d'un parti qui a été fondé en effet par des gens d'extrême droite, qui étaient antisémites, chacun le sait. Monsieur LE PEN, son père, a été condamné. Bon, madame LE PEN essaie de se rattraper, si j'ose dire, dans l'histoire. Tant mieux. Je préfère que…
SONIA MABROUK
Y-a-t-il un propos antisémite qu'elle aurait tenu, qui nous aurait échappé ?
GERALD DARMANIN
Je ne peux pas... Son parti, bon, voilà, son parti ce n'est pas non plus la blanche colombe. Il ne faut pas non plus... Bon, voilà. Donc je pense que les Français, à la fois, ne sont pas dupes, ce n'est pas le parti de la blanche colombe. Et en même temps, je pense que devant les drames que nous vivons, ce n'est pas le Rassemblement national qui marche, qui est un problème en soi. Voilà. Ce qui est un problème en soi, me semble-t-il, c'est qu'on ne soit pas tous en train de se dire : l'antisémitisme, c'est un poison contre la vie de tous les jours.
SONIA MABROUK
Alors, est ce qu'il y a un parti politique qui nourrit l'antisémitisme ? C'est une question que je vous pose. Jean-Luc MELENCHON a dénoncé une marche de la droite, de l'extrême droite. Il a fustigé un rassemblement rabougri. J'ajoute également les propos du député de la France insoumise, David GUIRAUD, à Tunis, qui est accusé de propos négationnistes. Il s'en défend. De quoi, Gérald DARMANIN, la France insoumise est le nom aujourd'hui ?
GERALD DARMANIN
Monsieur GUIRAUD a déshonoré son mandat, il a déshonoré les habitants de Roubaix que je connais bien. Voilà. Il s'est laissé aller à une diatribe qui est honteuse. Alors, je vois qu'il se rattrape un petit peu, il essaie de se rattraper un peu, mais il devrait présenter ses excuses. Je pense que c'est vraiment…
SONIA MABROUK
Il est loin de présenter ses excuses. Il a tenté de dire qu'il avait un ton trop léger à Tunis…
GERALD DARMANIN
Non, mais il devrait le faire. Il devrait le faire. Voilà. Je pense que ce monsieur, à l'Assemblée nationale, encore une fois, déshonore ses électeurs. Moi je suis du Nord, je suis de Tourcoing-Roubaix. Je sais que les gens de Tourcoing-Roubaix, ils ne pensent pas comme lui. Bien sûr qu'il y a des gens qui peuvent être pro-palestiniens, et c'est normal. Moi je suis pour un Etat palestinien, mais l'envie d'avoir un Etat palestinien ne pousse pas à la haine d'Israël, à la haine des juifs, à la haine des autres, à la haine, à remettre en cause les drames qui touchent les enfants. Et donc je pense que monsieur GUIRAUD, voilà, il s'est mis en dehors de ce qu'il est convenu d'appeler la décence. Monsieur MELENCHON fait de la provocation et il utilise évidemment les bas instincts pour avoir des voix. Mais vous savez, je connais des parlementaires de la France Insoumise, je connais même des gens chez moi qui sont pour la gauche ou la gauche radicale, l'extrême gauche, qui ne pensent pas comme monsieur MELENCHON, qui ont honte…
SONIA MABROUK
On les entend assez selon vous ?
GERALD DARMANIN
Non, pas du tout, bien sûr que non, bien sûr que non, mais je ne veux pas globaliser. Je ne veux pas dire que toute la France Insoumise, je sais qu'il y a des députés, je pense à monsieur CORBIERE par exemple, je sais qu'il est Républicain monsieur CORBIERE. Alors, il ne pense pas du tout comme moi, mais il est Républicain, et on voit bien qu'il est en désaccord avec monsieur MELENCHON. Voilà, après il y a des gens très courageux comme monsieur ROUSSEL, qui ose le dire au nom du parti communiste, eh bien tant mieux, au moins on sait tous que monsieur ROUSSEL est un homme de bien et il pose une digue. On n'est d'accord sur rien avec monsieur ROUSSEL, mais on est d'accord sur l'essentiel, c'est quand même la République. Monsieur MELENCHON est dans une aventure personnelle qui, je crois, fait beaucoup de mal à l'extrême gauche.
SONIA MABROUK
Deux questions d'actualité, avant d'en venir à l'actualité qui est le projet de loi immigration, Gérald DARMANIN, Il y a ces prières, en tous les cas ces deux élèves, ces deux enfants de CE2 dans une école à Nice, qui ont organisé une prière, qui ont prié dans la cour de l'école. Quel message envoyer ? Le maire de Nice envoie un message de fermeté. Il en appelle aussi à la République. Que lui dire ?
GERALD DARMANIN
Eh bien il a raison. Il a raison. L'école, à partir du moment où c'est une école publique, bien évidemment, puisqu'il y a toujours un choix en France, on peut aller dans les écoles qui sont sous contrat religieux, rien ne l'interdit. Mais quand on est à l'école publique il y a une neutralité. Une chose très importante, comprendre ça, la laïcité française, c'est la neutralité de certains services publics, dont l'école. Parce que quand vous êtes mineur, vous n'avez pas autre chose à faire que d'être à vous construire en tant que républicain, et ensuite vous faites évidemment votre choix majeur, la liberté de pouvoir aller à son culte, et surtout, je pense, la non-préférence de l'Etat envers une religion. Eh bien je crois que ce que fait le maire de Nice, avec la fermeté, c'est rappeler ces règles élémentaires que celles de la République.
SONIA MABROUK
Bien. Un autre appel d'habitants, ceux de Villeurbanne, suite à une fusillade et au trafic de drogue qui gangrène, en tous les cas qui occupe des pans de cette ville et des territoires. Que répondez-vous à cet appel de détresse et un cri de détresse ?
GERALD DARMANIN
Je connais bien Villeurbanne et je connais bien les difficultés extrêmement fortes qui viennent du trafic de drogue. Je veux d'abord dire que s'il y a du trafic de drogue, c'est qu'il y a des gens qui consomment. Donc je veux rappeler aux consommateurs, qui sont les responsables de ces règlements de compte, de la vie qui est un enfer pour certains de ces habitants. La préfète s'est rendue sur place, à ma demande, dès samedi, a rencontré les habitants. Des opérations de police ont eu lieu et vont continuer à avoir lieu.
SONIA MABROUK
Dans ce contexte général, évidemment, de tout ce que nous avons vécu et ce que nous avons dit depuis le début de cet entretien, Gérald DARMANIN, le projet de loi immigration sera mis au vote ce mardi au Sénat. Pour le patron des sénateurs LR, Bruno RETAILLEAU, c'est un texte durci, avec vraiment sa patte et la patte du Sénat. Pour preuve, le texte original comportait 27 articles. Au final, il y en a 96. Cela n'a plus rien à voir avec votre texte ?
GERALD DARMANIN
Non, c'est faux. Bien sûr qu'il a été enrichi par le Sénat, c'est bien normal. Monsieur RETAILLEAU a oublié de dire qu'il y a une vingtaine d'articles qui ont été créés par le gouvernement, mais ce n'est pas très « à fond » dans ce débat. Bon, voilà, je pense que ça aurait été plus simple de considérer que c'est un texte qui a été coconstruit avec le Sénat. C'est tout à fait vrai. C'est ça, le débat parlementaire. Moi, je ne suis pas un homme rigide qui se dit : eh ben voilà, ne discutons pas avec le Parlement, c'est comme ça, et puis c'est tout. Bien au contraire, discutons avec tout le monde. Il y a des articles qui ont été créés par le Parti communiste. J'ai pris un amendement de monsieur BROSSAT, pour lutter contre les marchands de sommeil.
SONIA MABROUK
Oui, on a surtout vu la transformation de l'article 3, je vous avoue, en article 4 bis.
GERALD DARMANIN
Oui, eh bien, on peut s'en réjouir. Il y a un article de régularisation.
SONIA MABROUK
Monsieur DARMANIN, il n'y a plus de droit opposable automatiques. Il est dit aussi que pour être régularisé dans ces métiers, il faut prouver une durée de travail encore plus importante que prévu initialement. Le tout est soumis au pouvoir discrétionnaire du préfet qui doit aussi vérifier le caractère…
GERALD DARMANIN
Je ne suis pas sûr que les Français qui nous regardent, ont compris.
SONIA MABROUK
Ah, c'est important, intégrable ou pas de la personne.
GERALD DARMANIN
Oui, d'abord, un, c'est un texte de loi très important, qui vise à régulariser la nounou et à expulser l'étranger délinquant. Si on est d'accord avec ce principe général, on peut discuter.
SONIA MABROUK
On peut aller dans le détail, quand même.
GERALD DARMANIN
Oui, bien sûr. On peut donner d'abord, un, le principe. Je ne suis pas sûr que tout le monde suit les débats de Public Sénat, même si c'est une chaîne très intéressante.
SONIA MABROUK
N'est-ce pas.
GERALD DARMANIN
Donc un, nous sommes très durs contre les étrangers délinquants, et on écoute ceux qui ne peuvent pas être régularisés, mais qui travaillent, qui respectent les règles de la République. J'ai entendu monsieur RETAILLEAU dire partout : " Jamais le texte de loi ne sera voté, jamais il n'y aura un élément de régularisation ". Bon, le texte de loi a été voté. Il y a un élément de régularisation. Ce n'est pas le même que le gouvernement. C'est vrai. Nous discutons. A l'Assemblée, nous allons reprendre ce texte.
SONIA MABROUK
Est-ce que vous allez détricoter…
GERALD DARMANIN
Mais on va modifier !
SONIA MABROUK
... ce qui se fait autour de l'article 4 bis ?
GERALD DARMANIN
On va modifier, puisque le Sénat va faire son travail…
SONIA MABROUK
La nuance est importante, entre détricoter et modifier.
GERALD DARMANIN
Non mais, on ne va pas détricoter, on va... Le Sénat a fait son travail de modification du texte du gouvernement, l'Assemblée va faire son travail de modification du texte du Sénat, et après il y aura un compromis. Mais vous savez...
SONIA MABROUK
Vous y croyez au compromis ?
GERALD DARMANIN
Bien évidemment.
SONIA MABROUK
Les députés LR ne sont pas dans la même disposition par rapport à l'exécutif.
GERALD DARMANIN
Il y a 6 mois, y a 3 mois, il y a 15 jours, vous m'avez tous dit " Vous n'arriverez pas à faire voter un texte au Sénat ". Il a été voté, avec un article régularisation. C'est un texte qui est essentiel pour les Français, pour réguler l'immigration, pour forcer à une meilleure intégration. Dans ce texte de loi, par exemple, il y a l'idée que désormais, pour pouvoir avoir un titre de séjour en France, il faut passer un examen de français. Est-ce que vous pensez que des députés peuvent voter contre quelque chose comme ça ? Aujourd'hui, y a 4 000 étrangers délinquants que je ne peux pas expulser, parce que la loi me l'interdit, pas la Constitution, pas l'Europe, la loi française. Je demande qu'on modifie ça. Comment peut-on refuser ça au ministre de l'Intérieur dans le contexte dans lequel nous sommes ? Je suis là pour discuter. On ne peut pas à la fois envoyer une majorité relative à l'Assemblée nationale, et demander au ministre de l'Intérieur de ne pas discuter. Moi je suis un homme ouvert, de dialogue. Discutons. Et j'ai 15 jours, 3 semaines, 1 mois, plus s'il le faut, pour trouver un compromis avec les parlementaires.
SONIA MABROUK
Eh bien, à bon entendeur. On suivra cela. Merci Gérald DARMANIN.
GERALD DARMANIN
Merci à vous.
SONIA MABROUK
Merci et bonne journée.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 16 novembre 2023