Texte intégral
Je souhaite tout d'abord remercier l'ensemble des intervenants qui se sont mobilisés ce matin pour venir illustrer les actions qui sont déjà menées ou qui vont être menées pour changer notre société et nous préparer à ce changement.
J'ai pu le dire au cours de mes propos introductifs, mais je le rappelle, nous vieillirons tous.
Il est de notre responsabilité collective de changer nos comportements, de nous adapter et de rendre notre société plus inclusive pour l'avancée en âge.
1. Comme vous avez pu l'entendre ce matin, avec cette nouvelle stratégie interministérielle, l'objectif est clair : avec tous mes collègues du gouvernement, que je remercie, nous voulons apporter des réponses concrètes aux préoccupations quotidiennes de nos concitoyens.
- Nos concitoyens souhaitent participer, contribuer pleinement à notre vie collective, quel que soit leur âge :
* Nous garantissons le respect de leur dignité et de l'exercice de tous leurs droits, comme tous ceux de nos concitoyens et je sais chère Martine Gruère pouvoir compter sur vous dans ce combat.
Nous avons retenu des leçons de la crise sanitaire : Oui, la sécurité des personnes nous importe, mais de quelle sécurité parlons-nous ?
Les états généraux des maltraitances nous ont permis de comprendre que souvent, les Français voient l'insécurité des seniors comme une question qui se limiterait à des agressions sur la voie publique.
Mais nous savons à présent combien cette question est plus complexe.
Il y a quelques jours Laurent Frémont, que je remercie pour sa participation ce matin, me rendait son rapport sur le droit de visite : j'y ai lu l'importance colossale des liens affectifs et familiaux pour que les personnes aillent bien, pour qu'elles restent elles-mêmes, pour qu'elles vivent et ne fassent pas que survivre. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons consacrer dans la loi le droit de visite dans les EHPAD
Nous savons aussi que l'exercice des droits n'est pas une évidence, ni en établissement, ni à domicile.
C'est tout le sens de la culture du contrôle que je souhaite développer dans le secteur : ça n'est pas une culture de la défiance, mais au contraire des assurances données aux personnes âgées, à leurs familles et aux professionnels.
C'est pourquoi nous avons lancé et maintiendrons dans la durée un plan d'inspection contrôle de nos 7 500 EHPAD.
C'est pourquoi nous avons renforcé les possibilités de contrôle des sièges des organisations gestionnaires.
Et c'est pourquoi, plus largement, nous installerons sur chaque territoire un dispositif de recueil des alertes de maltraitances, d'où qu'elles émanent, pour que le circuit soit clarifié, les responsabilités mieux assumées, et les coopérations entre tous les acteurs beaucoup plus efficaces.
* Nous développons aussi l'engagement citoyen et associatif des seniors : c'est entre 65 et 74 ans que le taux de participation bénévole dans les associations est maximal, proche de 30%.
- Nos concitoyens souhaitent vieillir chez eux :
* Nous sortons de la logique binaire entre le tout domicile et le tout EHPAD et nous construisons un véritable parcours résidentiel qui réponde à la diversité des besoins et qui respecte les choix des Français. Et nous partageons cette vision avec le Président de la CNSA, cher Jean-René Lecerf.
Nous proposons toute une palette de solutions pour laisser un libre choix de vie aux personnes.
Nous les accompagnons dans l'adaptation de leur logement avec Ma Prime Adapt', une nouvelle aide à laquelle je vous sais, cher Luc Broussy, très attaché.
J'y tiens, nous garantissons aussi aux personnes en situation de handicap de pouvoir vieillir chez elles : c'est la promesse de la Conférence nationale du handicap, de créer 5 000 places pour les personnes en situation de handicap vieillissantes.
Nous développons des habitats intermédiaires : accueil familial, résidences autonomie, résidences services, habitat inclusif, ou encore cohabitation générationnelles, moins connues mais que nous ont présentés tout à l'heure nos « colocataires lillois ».
* Vieillir chez soi dans les quartiers prioritaires aussi, et la ministre l'a très bien rappelé, c'est la mise en place d'une offre médico-sociale adaptée aux besoins des habitants des quartiers.
* Il y a de la place pour toutes les offres, mais aussi tous les statuts juridiques - je tiens à le rappeler - à la seule condition de garantir la qualité de l'accompagnement des personnes, mais aussi des professionnels.
* Vieillir chez soi, c'est enfin – et peut-être surtout – pouvoir sortir de son domicile, et ne pas être assigné à résidence faute de mobilité.
C'est pourquoi vous l'avez vu, nous adaptons nos villes, nos transports, tous nos lieux de vie.
- Nos concitoyens rencontrent encore trop de difficultés pour réaliser leurs démarches administratives, connaître les services existants, demander de l'aide :
* Nous adaptons nos services publics en y remettant de l'humain.
Nous développons une démarche d'aller vers pour aller au contact des citoyens les plus éloignés pour les accompagner à réaliser leurs démarches administratives, avec les bus France services, ou pour accéder aux soins, avec le déploiement d'un médicobus par département ou encore avec des conseillers numériques dans les lieux publics pour lutter contre l'illectronisme et former les personnes à l'usage du numérique.
* Nous simplifions les démarches administratives qui s'apparentent encore trop souvent à un parcours du combattant pour les personnes âgées et leurs familles, en créant un guichet unique de proximité avec le SPDA. Et je salue son fervent défenseur, cher Dominique Libault.
Demain, un interlocuteur pour toutes les démarches, c'est ça la promesse.
Du lien, de l'humain, c'est aussi ce qui est nécessaire.
- Nos concitoyens souhaitent pouvoir accompagner leurs parents ou grands-parents lorsqu'ils en auront besoin :
* Nous passons à la vitesse supérieure dans le cadre de la nouvelle stratégie aidants que j'ai présentée le mois dernier avec Fadila Khattabi pour mieux reconnaître le rôle des proches aidants et mieux les accompagner et les soutenir au quotidien :
Nous avons la responsabilité de mieux prendre soin de ceux qui prennent soin des autres.
C'est pourquoi nous développons 6 000 nouvelles solutions de répit, nous renforçons les droits des aidants et nous améliorons l'accès aux bourses pour les étudiants aidants.
2. Pour préparer cette France de demain, nous mobilisons donc tous les leviers à notre disposition, et sur plusieurs années.
- Vous l'avez vu, cette stratégie transversale a été conçue dans une logique interministérielle :
* Nous sortons d'une logique strictement sanitaire ou médico-sociale. Car le vieillissement est une question et doit être une question sociétale.
* Si le Ministère des Solidarités et des Familles en a coordonné les travaux d'élaboration, la majorité des mesures de cette stratégie dépasse son seul périmètre et mobilise aujourd'hui près d'une vingtaine de ministères.
* Au-delà de la présentation de ces mesures, nous avons la responsabilité de nous assurer de leur bonne mise en oeuvre opérationnelle.
* Dans cette perspective, je souhaite proposer à la Première Ministre d'organiser de manière régulière un comité interministériel dédié au suivi de cette stratégie et à son amplification sur toute la durée du quinquennat.
- Face à l'ampleur du défi démographique, nous devons aussi avoir une vision à plus long terme et qui dépasse les échéances politiques.
* Comme la transition écologique, la transition démographique nécessite une planification, et je tiens à remercier le Haut-Commissariat au Plan pour ses travaux sur la question.
* J'ai entendu la demande des parlementaires et des acteurs du Grand Âge.
* Oui ils ont raison.
* Oui, vous avez raison : une loi de programmation du Grand Âge est nécessaire.
* Aussi, je m'engage devant vous à la faire aboutir.
* Cette loi de programmation nous permettra de nous poser collectivement trois questions cruciales :
Quels seront les nouveaux besoins liés au vieillissement de notre population à l'horizon 2030 ?
Comment les financer ?
Selon quelle trajectoire ?
- Face au défi démographique, il me semble également nécessaire d'engager un travail de fond sur la réforme du financement des établissements, d'une part, et des services de l'autre.
* Les difficultés économiques des EHPAD et des services d'aide à domicile nous appellent à apporter, au-delà des réponses d'urgence que nous avons déjà mises en place – comme le bouclier tarifaire pour lutter contre l'inflation et le fonds d'urgence, des réponses structurelles.
* En ce qui concerne les EHPAD, nous sommes en train de transformer leur modèle économique.
Nous franchissons une première étape dans le PLFSS 2024 en donnant aux départements qui le souhaitent la possibilité de fusionner les sections soins et dépendance des EHPAD.
Si le texte est adopté, cette mesure pourra être testée dans les départements volontaires.
J'ai souhaité dès le début de l'élaboration du texte que nous respections le libre choix des départements pour la mise en place des politiques publiques qu'ils mèneront en faveur de l'autonomie.
C'est comme cela que nous avancerons en confiance, cher Stéphane Haussoulier.
* En ce qui concerne les services d'aide à domicile, je le dis très clairement : nous devons sortir enfin et de manière définitive dans les prochains mois de la logique de la tarification à l'heure qui mine les aides à domicile.
C'est pour moi non seulement un sujet de simplification mais surtout un enjeu de conditions de travail de nos professionnelles.
Le système actuel a atteint ses limites : on ne peut pas accepter qu'il conduise à ce que des personnes paient aujourd'hui pour travailler.
J'ai particulièrement été sensible aux travaux des deux pilotes du CNR métiers, que je remercie très sincèrement, Myriam El Khomri et Dafna Mouchenik.
Je souhaite donc que nous puissions travailler à la refonte du système pour parvenir enfin à valoriser les temps dits invisibles pourtant indispensables.
Les échanges qui interviendront la semaine prochaine lors de la reprise des débats sur la proposition de loi « Bien Vieillir », nous permettront d'ancrer dans la loi cet engagement de simplification des financements des services d'aide à domicile.
Je salue encore l'engagement de ses deux corapporteures, Laurence Cristol et Annie Vidal.
Je lancerai immédiatement après des travaux en ce sens en partenariat avec les Départements pour changer enfin en profondeur la tarification des services d'aide à domicile.
3. Pour préparer la France de demain, nous avons besoin de toutes les forces vives de notre pays.
- Je pense d'abord à toutes les professionnelles engagées pour accompagner nos concitoyens âgés, et je dis toutes car ce sont majoritairement des femmes.
* Je tiens à saluer le travail remarquable des professionnelles du soin, du lien et du médico-social, sans qui les réformes que nous portons ne peuvent se mettre réellement en place.
* L'intervention de Rosyne Nono est un beau témoignage de cet investissement du quotidien, ce travail que notre société ne voit pas toujours mais tellement essentiel.
* J'en profite pour rappeler que nous avons créé en 2023 la 1ère journée nationale de l'aide à domicile :
Une journée créée à l'initiative de toutes les fédérations du domicile qui ont souhaité se mobiliser sous un même étendard pour valoriser ces métiers essentiels.
Je vous donne donc rendez-vous le 17 mars prochain pour une nouvelle édition et dire merci aux professionnelles.
* Nous le savons, l'ensemble du secteur souffre depuis de nombreuses années de difficultés de recrutement qui créent un cercle vicieux entre tensions de recrutement, dégradation des conditions de travail et perte d'attractivité.
* Depuis 2017, nous travaillons ensemble à renforcer l'attractivité de ces métiers que nous devons mieux reconnaître, mieux valoriser et mieux rémunérer.
Nous avons réalisé des efforts de revalorisations qui représentent plus de 3,5 Md€ de dépenses annuelles pour la branche autonomie.
Cela représente 900 000 bénéficiaires d'une revalorisation équivalente à 183 € net mensuels.
* Afin de mieux coordonner nos réponses sur l'attractivité et les conditions de travail des différents champs du secteur – sanitaire, social, médico-social – je vous annonce aujourd'hui la création d'une délégation interministérielle aux métiers du social, du médico-social et du soin.
Cette nouvelle délégation doit devenir l'interlocuteur privilégié de l'ensemble des partenaires et clairement identifié au sein de l'administration.
Elle sera pleinement dédiée à traiter de façon transversale les avancées en matière de qualité de vie au travail mais également de revalorisations de nos professionnels et donc spécifiquement les professionnels du champ du grand âge.
* Nous accorderons une importance particulière à la question de la formation initiale comme continue.
Les professionnelles regrettent en effet qu'elle soit devenue obsolète.
Il faut simplifier l'existant et améliorer le contenu de ce qui est enseigné.
Le respect des recommandations des bonnes pratiques professionnelles, la prise en considération du libre choix des personnes accompagnées, la reconnaissance de leur expertise propre et la lutte contre toutes les formes de maltraitance doivent devenir des priorités absolues des formations.
Nous le devons aux professionnels et nous le devons à tous nos concitoyens qui bénéficient de leurs interventions.
Pour cela, le travail engagé dans la création d'un nouveau métier « d'accompagnant autonomie » permettra à terme de mieux qualifier les professionnels et assurer des mobilités entre le domicile et les établissements
* Par ailleurs, je lance aujourd'hui - en concertation et à l'initiative des 3 fédérations employeurs d'EHPAD : la FEHAP, la FHF et le SYNERPA – des travaux autour d'un protocole d'accord entre l'Etat et les fédérations pour parvenir ensemble au recrutement des 50 000 professionnels en EHPAD à horizon 2030.
Ce protocole inédit permettra d'engager tous les acteurs dans la même voie : celle du recrutement de professionnels qualifiés dans nos établissements.
Il ciblera les attendus en matière de recrutement et, lèvera les irritants rencontrés sur le terrain, notamment en recréant du lien entre les employeurs et le service public de l'emploi.
- Je pense aussi aux associations et aux milliers de bénévoles qui agissent tous les jours pour accompagner les seniors.
* Nous souhaitons aussi reconnaître et soutenir le rôle des centres sociaux et des associations avec et pour les seniors.
* Coïncidence : aujourd'hui, tandis que je vous présente cette feuille de route interministérielle, un contre salon des vieilles et des vieux se réunit à Paris.
* Les associations et leurs bénévoles sont présents à la fois pour apporter une présence, une écoute, une aide concrète.
* Ils jouent aussi un véritable rôle social et sociétal pour signaler les besoins systémiques auxquels nous répondons encore trop mal : la lutte contre l'isolement social, l'écoute téléphonique des maltraitances, l'accueil de personnes souffrant de troubles neuro dégénératifs, ... Tels sont quelques exemples des actions évidemment essentielles que portent les bénévoles.
* Ils sont également aux avant-postes de certains constats et de certaines propositions : Je pense ici par exemple aux Petits Frères des pauvres, dont je tiens à remercier le délégué général Yann Lasnier, et à leur campagne sur la vie affective et la sexualité personnes âgées, exemple parfait du rôle des associations au plan symbolique pour faire évoluer nos regards.
- Je pense aussi à tout l'écosystème du Grand Age :
* Les enjeux liés au vieillissement sont de formidables terrains d'innovation et de création de services et de start-ups.
* Ce sont aussi des emplois supplémentaires dans tous les secteurs commerciaux, publics et non-lucratifs.
* Nous devons aujourd'hui mieux structurer l'écosystème du bien vieillir pour définir une véritable stratégie visant à coordonner l'ensemble des initiatives existantes et donner une vision intégrée de toutes les dimensions scientifique, sociale, économique culturelle, sanitaire, médico-sociale liées au vieillissement.
* Je veux aussi que l'on regarde comment accélérer la modernisation du secteur du grand âge et mieux accompagner les différents acteurs et pourquoi pas créer un institut national du vieillissement.
* L'ensemble des acteurs sera réuni pour lancer officiellement cette mission, qui s'appuiera bien évidemment sur les réseaux existants et associera les représentants des Ministères de la Santé et de la Prévention, de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, de la Recherche et de l'Enseignement Supérieur, dans cet esprit de transversalité et d'interministérialité qui est au coeur de la stratégie que nous présentions aujourd'hui.
- Je pense aux collectivités territoriales.
* Elles sont les partenaires indispensables pour mettre en oeuvre concrètement ce grand projet de transformation de notre société au plus près de nos concitoyens.
* Pour cela, nous avons besoin de l'engagement de tous les élus de notre République, qui connaissent bien l'implication de nos aînés dans la vie sociale, associative et démocratique de leur territoire et je vous sais, chère Florence Thibaudeau Rainot très attachée à cette dimension.
* Ils sont déjà parties prenantes pour adapter notre société au vieillissement et je tiens à les remercier.
* Ensemble nous devons aller plus loin : c'est pourquoi je réunirai prochainement l'ensemble des associations de collectivités pour avancer concrètement sur la manière dont nous pouvons faire avancer cette stratégie ensemble et l'enrichir de dispositions concrètes.
* Car nous le savons, le vieillissement se manifeste de manière différente selon les territoires et nous avons la responsabilité d'adapter nos réponses aux spécificités et aux enjeux de chaque territoire : villes, banlieues ou campagnes, hexagone ou Outre-mer.
Notre responsabilité est grande : transformer notre société pour réussir la transition démographique de notre pays.
Notre ambition est là : faire de la vieillesse une véritable question de société et construire un pacte renouvelé entre générations.
Nous parlons souvent de la responsabilité que nous avons à l'égard des générations futures.
C'est ce même esprit qui doit nous guider à l'égard de nos familles, de nos parents, de nos grands-parents.
Nous ne pouvons pas manquer ce rendez-vous.
C'est maintenant qu'il se prépare.
C'est maintenant que nous devons le relever.
Et le relever ensemble !
J'y mettrai toute ma détermination et mon énergie.
Source https://www.unaf.fr, le 29 novembre 2023