Interview de M. Aurélien Rousseau, ministre de la santé et de la prévention, à Sud Radio le 14 novembre 2023, sur le droit à l'aide active à mourir, les cas de covid et de bronchiolite et la pénurie de médicaments.

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Texte intégral

JEAN-JACQUES BOURDIN
Notre invité politique qui répond à mes questions, ensuite, à partir de 09h, vous intervenez évidemment sur tous les sujets d'actualité : 0826 300 300. Vous avez maintenant l'habitude. Ce matin, nous recevons Aurélien ROUSSEAU, ministre de la Santé et de la Prévention. Bonjour.

AURELIEN ROUSSEAU
Bonjour.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci d'être avec nous. Fin de vie, réunion aujourd'hui à l'Elysée, autour d'Emmanuel MACRON et d'Elisabeth BORNE. En décembre, présentation d'un projet de loi, au Parlement en janvier, j'imagine, Aurélien ROUSSEAU, fin janvier, février ?

AURELIEN ROUSSEAU
Le président de la République s'est engagé, il y aura un projet de loi qui sera examiné, moi, je suis frappé par la sensibilité et l'intimité de ce sujet ; il y a encore de très beaux articles aujourd'hui qui sont tous poignants, et qui font à chaque fois qu'on revient sur le texte sur lequel on travaille pour vérifier que les mots soient les bons, Agnès FIRMIN-Le BODO, la ministre déléguée, qui a travaillé sur ça depuis plus d'un an, a fait un boulot remarquable, mais à chaque fois, moi, par exemple, je prends juste un exemple, le mot famille, est-ce que la famille, c'est les parents, la femme, les enfants, etc, quand je lis les articles et témoignages, je m'interroge, donc moi, je pense que sur ce sujet, il faut qu'on y aille quand on est absolument sûr de tout ce qu'on a écrit.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, est-ce que sera ouvert le droit à l'aide active à mourir ?

AURELIEN ROUSSEAU
Je pense qu'aujourd'hui, encore, c'est un sujet sur lequel la notion…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ce n'est pas tranché ?

AURELIEN ROUSSEAU
Le président, il... comment dirais-je, c'est quelqu'un qui regarde, qui lit, qui interroge, qui challenge, donc il challenge beaucoup, et avec Agnès FIRMIN-Le BODO, on essaie de répondre…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais ce n'est pas tranché ?

AURELIEN ROUSSEAU
Non, je crois qu'aujourd'hui, on ne peut pas dire que c'est- tranché, et…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc on ne peut pas dire que sera ouvert un droit à l'aide active à mourir ?

AURELIEN ROUSSEAU
On a examiné cette possibilité, on a écrit une manière de l'écrire, parce que c'était par exemple...

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui…

AURELIEN ROUSSEAU
... Dans la convention, fin de vie. Et aujourd'hui, je pense que, oui, les derniers arbitrages, le mot ne va pas bien pour ce sujet, mais les dernières décisions ne sont pas prises. Et puis, par ailleurs, derrière, il y a la transmission de ce texte au Conseil d'Etat, on attend aussi beaucoup de l'examen du Conseil d'Etat, et puis, évidemment un débat au Parlement.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Et accès aux soins palliatifs pour tous. Ce sera contenu dans le texte, ça…

AURELIEN ROUSSEAU
Ça, il n'y a pas de doute. Et c'est vrai que, moi, je suis particulièrement sensible, et Agnès aussi au fait que le plan de soins palliatifs, il soit robuste, et que ça ne soit pas juste une annonce, il faut que ce soit extrêmement solide, extrêmement précis sur tous les territoires, qu'il n'y ait pas d'hétérogénéité, c'est ça notre…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Voilà, ce qui existe aujourd'hui. Accès aux soins palliatifs pour tous, et peut-être donc droit à l'accès au suicide assisté.

AURELIEN ROUSSEAU
C'est des sujets qui sont sur la table, tout le monde les met sur la table, donc ils sont évidemment sur la table.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Un référendum sur cette question ou pas ?

AURELIEN ROUSSEAU
Aujourd'hui, l'article 11 de la Constitution ne permet pas le référendum sur ce type de choses, mais le président a dit que, par ailleurs, il y aurait une discussion. Il voulait engager la discussion sur cet article 11. Donc…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous êtes favorable pour un référendum sur cette question ? Franchement ? A titre personnel ?

AURELIEN ROUSSEAU
Moi, je crois beaucoup que le Parlement, c'est un lieu, et il faut qu'on y retrouve la sérénité des débats. Il y a eu de grands textes. La loi Claeys-Leonetti, c'était un grand texte, et voilà, après, est-ce que…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous n'êtes pas très favorable au référendum sur ces questions-là ?

AURELIEN ROUSSEAU
Je n'ai pas d'avis définitif. Là, comme ça, je pense que le Parlement est le lieu où ce type de débat est le plus légitime.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que le nombre de cas de covid explose ?

AURELIEN ROUSSEAU
Non. Le nombre de cas de covid n'explose pas. On a, moi, je suis aussi très attentif, parce qu'on a tous pleins de capteurs. Alors, un médecin qui, un après-midi, a 5 cas positifs, donc on regarde. Non, le nombre de cas de Covid n'explose pas.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Où en est l'épidémie aujourd'hui ?

AURELIEN ROUSSEAU
L'épidémie, elle est là, elle existe, mais elle est faible. On a un faible impact sur les urgences. On a un très faible impact sur SOS Médecins et on a surtout une campagne de vaccination. Vous vous rappelez que j'avais décidé de l'avancer quinze jours plus tôt, justement parce que l'épidémie était partie, où on a aujourd'hui 3,2 millions de personnes qui sont vaccinées, c'est-à-dire 1 million de plus que l'an dernier, à la même date. Donc, ça, il faut qu'on continue là-dessus. L'épidémie, elle est là. Donc, nous, on est toujours en veille active…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Elle est toujours là avec un nouveau variant. Le Pirola, c'est ça ?

AURELIEN ROUSSEAU
Oui, pour l'instant, ce variant ne s'impose pas…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Pas très contagieux ?

AURELIEN ROUSSEAU
Il ne s'impose pas par rapport aux autres, et c'est l'essentiel. Les barrières entre eux, ils se battent pour savoir qui va prendre le dessus. Pour l'instant, c'est bien le variant sur lequel le vaccin est calé qui est très majoritairement présent en France.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Et la bronchiolite, l'épidémie, Où en est-on ?

AURELIEN ROUSSEAU
Alors, on est dans une situation épidémique dans quasiment tout le pays. Et, alors, je m'exprime avec beaucoup de prudence parce qu'il faut faire attention. Mais aujourd'hui, je crois pouvoir dire que les indications sont plutôt positives, c'est-à-dire qu'on a une épidémie, mais on a manifestement moins de forme graves, on a moins de passages aux urgences et à l'hôpital. Ça veut dire qu'il y a sans doute une multitude de facteurs, mais que le facteur du traitement par immunisation par le Beyfortus joue sans doute, mais je dis tout ça avec des « sans doute », avec des « conditionnels », parce que le retour des vacances scolaires est toujours un moment où ça refait bondir l'épidémie. Donc on va vérifier. Mais pour l'instant, par rapport à l'an dernier, la courbe n'a rien à voir par rapport à l'an dernier…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors ce nouveau traitement, le Beyfortus, sera bientôt de retour en pharmacie ?

AURELIEN ROUSSEAU
Alors, il faut être transparent dans ces cas-là, c'est le mieux, on a réussi à obtenir, la semaine dernière, des doses complémentaires. Donc la première chose, que je peux dire, c'est que, et je répondrai ensuite à votre question, c'est que pour les maternités, on aura bien du Beyfortus, donc du 50 milligrammes pour tous les bébés qui naissent, jusqu'à la fin de l'hiver. Et ça, ça n'était pas gagné, parce qu'on avait 200.000 doses. On est un des quatre pays au monde à en avoir acheté, mais comme ça a l'air de fonctionner, il y a beaucoup de pays qui en veulent. On a réussi, grâce au dialogue, parfois un peu... voilà, avec les industriels…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Musclé…

AURELIEN ROUSSEAU
Mais ils ont été très coopératifs, à avoir donc plus que 200.000 doses. Et donc, dans ce plus, ça nous permet de tenir en maternité. Donc on n'aura pas à faire des sur-priorisations, et on aura des doses pour les pharmacies, mais, je pense, une vingtaine de milliers de doses, donc un volume beaucoup moins important. La réalité quand même, il faut le dire, c'est que les formes les plus graves de bronchiolites, c'est chez les tout petits nourrissons. Donc l'an prochain, on essaiera d'avoir plus de 50 milligrammes et plus de 100 milligrammes…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Pas de pénurie…

AURELIEN ROUSSEAU
Voilà. Pas de pénurie, mais en tout cas, moi, ma bataille, ça a été beaucoup d'assurer que jusqu'à la fin de l'hiver, on soit en maternité protégé.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Je vous parle de pénurie, parce que je vais vous parler de pénurie de médicaments, évidemment, Aurélien ROUSSEAU. D'abord, je regardais ces chiffres, nous consommons beaucoup trop d'antibiotiques. Ça continue. Rien à faire. Nous sommes rétifs à toutes les campagnes nous appelant à... et les médecins aussi d'ailleurs. Plus 16 % en un an de consommation d'antibiotiques, plus 40 % pour les 0-14 ans. Que faire ? Mais que faire ?

AURELIEN ROUSSEAU
Alors, vous avez raison, tout le monde a en tête cette campagne de l'Assurance-maladie d'il y a quelques années, les antibiotiques, ce n'est pas automatique, et c'est vrai qu'on a une bataille à mener, parce que c'est une double bataille. Pardon, je vais mettre les deux casquettes, comme ministre de la Santé et des Comptes sociaux, c'est d'abord qu'on diffuse l'antibiorésistance. C'est-à-dire qu'il faut chaque fois mettre des doses plus fortes, parce qu'en fait, on résiste aux antibiotiques quand on en prend trop souvent. Et deuxièmement, ça coûte, ça coûte beaucoup, beaucoup d'argent à l'Assurance, à l'Assurance-maladie. Donc effectivement, il y a ce sujet, mais c'est vrai aussi que les Français, quand on va chez le médecin, on a une angine, si on revient sans médicament, on se dit : mince…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Je n'ai pas été soigné…

AURELIEN ROUSSEAU
Je n'ai pas été soigné, eh bien, si, en fait, quelquefois, c'est viral, et c'est pour ça que cette année, on a ouvert la possibilité aux pharmaciens de faire ces tests de dépistage rapide pour les angines et pour les cystites, pour savoir s'il faut ou non des antibios, et que les pharmaciens puissent le faire eux-mêmes. Je rappelle juste, les angines, c'est 6 millions de visites chez les médecins, et les cystites, c'est 3 millions de visites. Donc, c'est du temps médical de gagné si on a une attitude plus éclairée, plus responsable sur ce sujet.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Les pénuries de médicaments, on en est où ? Combien de médicaments en tension aujourd'hui ?

AURELIEN ROUSSEAU
Alors aujourd'hui, on a, pour être, là aussi…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Transparent…

AURELIEN ROUSSEAU
Donner tous les chiffres, on a 450 molécules, enfin, médicaments, mais qui peuvent avoir différents noms, qu'on suit à la trace tous les jours. Moi, j'ai des tableaux pour me dire où on en est, l'immense majorité, et c'est le grand changement par rapport à l'an dernier, on a les stocks sur le territoire national, par exemple, sur l'amoxicilline, l'antibiotique le plus commun…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, on a les stocks...

AURELIEN ROUSSEAU
On a les stocks sur le territoire national. Mais, comme l'an dernier, il y a eu pénurie, tous les acteurs, tout le système s'est dérégulé. Un peu comme…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, et les gros pharmaciens ont traité directement avec les fabricants et ont accumulé des stocks.

AURELIEN ROUSSEAU
Alors, ce n'est pas forcément les gros pharmaciens…

JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est vrai ou pas ?

AURELIEN ROUSSEAU
Mais en tout cas, ce qui est sûr, c'est qu'il y a aujourd'hui beaucoup plus de pharmaciens qui se livrent directement chez les industriels…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Voilà, chez les industriels.

AURELIEN ROUSSEAU
Et cet échelon essentiel de la chaîne de la pharmacie, que sont les grossistes répartiteurs, vous savez, les petits camions qu'on voit, vous savez, du coup, eh bien, ne jouent plus leur rôle de distribution pour qu'il y ait de l'amoxicilline dans la pharmacie de Nîmes, mais qu'il y en ait aussi au Vigan ou à Saint-Hilaire-de-Brethmas. Donc ça, c'est un sujet majeur. Moi, je les ai réunis la semaine dernière, on a passé 2h ensemble, il n'y a pas eu de langue de bois, on se serait cru chez BOURDIN, on s'est parlé, et moi, je leur ai dit en fait, soit, dans les dix jours, vous remettez de l'ordre dans votre secteur, soit, c'est l'Etat qui prend la main pour organiser. Et moi, je suis toujours convaincu qu'on fait moins bien ça qu'eux, et je pense qu'ils se sont tous engagés. La présidente de l'Ordre des pharmaciens a accepté cette mission que je lui ai confiée d'élaborer ces principes, et notamment, le fait qu'on remette le grossiste répartiteur au coeur, pour qu'il y ait de l'amoxicilline partout. Et je le dis très solennellement, ce ne seront pas les patients qui seront la variable d'ajustement de calcul économique et de rentabilité des industriels…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc il n'y aura plus de pénurie de médicaments ?

AURELIEN ROUSSEAU
En tout cas, moi, je vous assure que je me bagarre sans arrêt.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, Aurélien ROUSSEAU, la relocalisation, parce qu'on nous a beaucoup parlé de relocalisation après le Covid, où est ce qu'on en est ? Moi, la relocalisation de la production en Europe, j'imaginais ça, j'ai vu, et vous le savez, que l'Europe va taxer les véhicules électriques venus de Chine ou d'ailleurs, d'Asie, qui sont importés en Europe. Pourquoi ne pas taxer les médicaments qui sont fabriqués en Inde ou en Chine ?

AURELIEN ROUSSEAU
Alors aujourd'hui, il y a plusieurs... c'est une question évidemment compliquée. D'abord, il y a certaines molécules qui sont fabriquées là-bas, mais parce que c'est eux qui ont les brevets, donc on passe, on ne peut pas s'en passer. Après, l'action, elle est résolue. Le président de la République, je crois que c'était en Ardèche, j'en suis même sûr, en juin, il a lancé un plan de relocalisation. C'est aussi pour ça que dans notre dialogue avec les industriels, moi, je présente au PLFSS le prix global qu'on met dans les médicaments…

JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est le projet de loi Sécurité sociale, PLFSS...

AURELIEN ROUSSEAU
Oui, pardon, PLFSS, projet de financement de la Sécurité sociale. Et on a avec eux ce dialogue sur le prix du médicament, mais qu'est-ce que vous réinstallez en France, qu'est-ce que vous réinstallez en Europe pour qu'on ait... c'est essentiel, qu'on reconquière une souveraineté en la matière…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, vous posez la question, mais, et la réponse ?

AURELIEN ROUSSEAU
Il y a des engagements qui sont pris, voyez, par exemple sur, je crois qu'elle était sur une radio la semaine dernière, mais la PDG de SANOFI a annoncé des investissements importants sur leurs usines en France pour produire un médicament célèbre, qui a une boite jaune, qui est du paracétamol, pour en produire…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, Doliprane, disons les choses…

AURELIEN ROUSSEAU
Pour en produire plus, presque 140 millions de boîtes de plus en France. Et on est en discussion permanente avec les labos pour les accompagner. En France, par ailleurs, on a une culture où le labo pharma, c'est toujours le grand méchant loup. Mais on doit les pousser à se réinstaller, parce que cette souveraineté, elle est essentielle.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Le coût des nouveaux traitements, des nouveaux traitements, par exemple contre les cancers. Je donne simplement un chiffre, traitement annuel par immunothérapie, ça coûte entre 70.000 et 100.000 euros, un traitement annuel par cellules réinjectées, entre 300.000 et 400.000 euros. Certains traitements sont utilisés depuis plusieurs années. Mais pourquoi est-ce que le coût de ces traitements ne baisse pas ?

AURELIEN ROUSSEAU
Alors, il y a toute une partie de ces traitements qui sont des médicaments très complexes, notamment quand il y a des dérivés du sang qui sont utilisés, des dérivés du plasma. Donc, il y a des coûts qui sont extrêmement élevés. Après, évidemment, les industriels du médicament, ce sont des industriels. Tant qu'ils ont les brevets, ils utilisent. Mais c'est là aussi où il faut se dire, aujourd'hui, en France, la dépense de médicaments, elle progresse, elle a progressé l'an dernier de 7 %, c'est énorme. C'est même quasiment insoutenable pour un système de protection sociale, mais elle est tirée essentiellement par ces médicaments innovants. On a la chance d'avoir accès à des médicaments qui sont payés par la Sécu. 82 % de la dépenses de santé en France est payée par la Sécu. C'est une chance inouïe. Et c'est pour ça que quand on dit : il faut du coup se responsabiliser sur d'autres pratiques. Moi, je vais chez mon médecin, c'est vrai, je m'en fais la réflexion, je vais direct à la pharmacie, je ne repasse pas chez moi pour vérifier si j'ai les boîtes dans ma pharmacie, et du coup, chez moi, comme tous les Français, je suis un mini pharmacien…

JEAN-JACQUES BOURDIN
J'ai accumulé…

AURELIEN ROUSSEAU
J'ai accumulé. Eh bien, c'est cette responsabilisation, ça ne veut pas dire que je suis coupable, qu'il faut me jeter en place de grève, c'est juste qu'on doit, pour permettre d'être toujours à la pointe sur ces traitements de pointe, et par ailleurs, on négocie cette année, on fait 1 milliard de baisse de prix à nouveau sur les prix des médicaments, on négocie avec les labos, qui disent qu'on est beaucoup trop dur avec eux. Au Parlement, une partie des oppositions me disent qu'on est trop coulant avec les labos, et les labos disent qu'on est trop dur avec eux. Donc je me dis qu'on doit être à peu près sur la ligne de crête.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Aurélien ROUSSEAU. Deux choses, concernant les jeunes ou les moins jeunes, le fentanyl, qui est une drogue, un stupéfiant. Je rappelle que le fentanyl, c'est un analgésique opioïde, qui est 50 fois plus puissant que l'héroïne, et 100 fois plus puissant que la morphine. Est-ce qu'on constate une utilisation du fentanyl en France par des drogués ou par…

AURELIEN ROUSSEAU
Alors, aujourd'hui, le fentanyl, c'est vrai que c'est un stupéfiant, et il est dans certains cas prescrit pour des douleurs que rien d'autre ne soulage. Il est prescrit avec ces fameuses ordonnances sécurisées, c'est-à-dire que le pharmacien, à chaque fois qu'il en prescrit, doit le noter dans un dans un gros registre. Donc aujourd'hui, on n'a pas du tout d'explosion. Ce qui s'est passé aux Etats-Unis…

JEAN-JACQUES BOURDIN
On a vu les images, partout, aux Etats-Unis, et notamment en Californie…

AURELIEN ROUSSEAU
Mais les industriels ont fait des campagnes de pub, mais, de publicité pour ce produit. Aujourd'hui, nous, on n'est pas dans cette situation-là. Il ne peut être prescrit qu'avec des ordonnances sécurisées.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, mais, est-ce qu'aujourd'hui il est consommé par des drogués ?

AURELIEN ROUSSEAU
Alors, aujourd'hui, on n'a pas d'alerte sur ce…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il n'y a pas d'alerte sur ce sujet ?

AURELIEN ROUSSEAU
Il n'y a pas d'alerte sur ce point-là. Mais évidemment, notre sujet, c'est la contrebande, parce que c'est un produit de synthèse…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien sûr, et les laboratoires clandestins, les timbres volés…

AURELIEN ROUSSEAU
Aujourd'hui, on a un sujet, il faut là aussi le dire, on a un sujet de présence de plus en plus forte sur le territoire de l'héroïne. Donc on a renforcé notamment les contrôles dans les ports de manière…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Il y a de plus en plus d'héroïne en France ?

AURELIEN ROUSSEAU
Oui, oui, il y a de plus en plus d'héroïne, parce qu'elle arrive, et elle arrive notamment par les ports. Donc on a renforcé, on a pris des mesures, Gérald DARMANIN a pris des mesures très fortes sur le contrôle des ports. Aujourd'hui, on n'a pas d'alerte sur le fentanyl, mais c'est une de nos préoccupations et qu'on suit de très près aussi.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Et puisqu'on parle de drogue, je voulais vous parler des sachets de nicotine qui touchent les ados. Théoriquement, les plus de 18 ans, mais, on le sait, de nombreux ados consomment ces sachets de nicotine, et même, il y a des promotions qui sont offertes aux ados. C'est une poudre, c'est de la nicotine de synthèse dangereuse, évidemment, cette nicotine de synthèse, parce que les jeunes sont ciblés, ça peut les pousser à fumer. Que va faire l'Etat ?

AURELIEN ROUSSEAU
Alors sur ça, on va faire comme on va faire sur les PUF, vous savez ces fameux petits trucs qui paraissent ludiques et qui sont en fait la première marche vers la consommation. On va, alors je n'ai pas la réponse aujourd'hui sur les sachets de nicotine, mais on va prendre nos responsabilités, c'est…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Les interdire.

AURELIEN ROUSSEAU
On va voir sous quelles conditions, mais c'est un premier pas d'accès….

JEAN-JACQUES BOURDIN
Les interdire, vous souhaitez les interdire.

AURELIEN ROUSSEAU
A titre personnel et je n'ai pas étudié le dossier dans sa totalité, je pense qu'il faut aller vers l'interdiction. Je vais regarder parce que je ne suis pas fan des annonces où derrière en fait, on n'est pas capable de le faire. Mais mon idée c'est que tout ce qui favorise l'accès au tabac, ça reste la première cause de mortalité par cancer, le tabac, tout ce qui fait que ça paraît ludique, il faut qu'on arrive à le supprimer.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Et ce sont les grands cigarettiers qui les mettent sur le marché, on le sait, American Tobacco par exemple, ou d'autres. Bon, le projet de loi immigration, dites-moi, je vous ai écouté sur France Info, c'était dimanche, je crois, l'AME ne sera pas supprimée, vous êtes ferme là, vous êtes clair et vous soutenez même ces milliers de médecins opposés à la suppression de l'AME. Vous êtes prêts à désobéir ?

AURELIEN ROUSSEAU
Alors moi, ce que ce que j'ai dit, l'AME ne sera pas supprimé parce que c'est un dispositif d'abord pour protéger et soigner les gens, et c'est un dispositif de santé publique qui protège tout le reste de la population, parce que ces populations migrantes, fussent-elles sans papiers, eh bien elles sont porteuses de plus de risques d'épidémies, de virus, de maladies pneumologique, donc il faut les soigner et il ne faut pas renvoyer tout ce monde vers les urgences, sinon on va faire exploser notre système de santé. J'ai dit que ce que le gouvernement dit globalement, c'est que je ne souhaite pas que les 3 500 médecins signataires de cette lettre soient amenés à désobéir, tout simplement…

JEAN-JACQUES BOURDIN
Ils soigneront.

AURELIEN ROUSSEAU
Ils soigneront et le sujet, c'est surtout que la médecine de ville continue à être embarquée dans la prise en charge des personnes….

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc globalement, globalement, ça veut dire qu'il y a des dissensions, on le sait au sein même du gouvernement. Vous êtes, vous pour le maintien strict de l'AME, on est bien d'accord. Est-ce que l'AME pourrait être retirée du texte à l'Assemblée nationale ?

AURELIEN ROUSSEAU
Alors d'abord, l'AME, elle n'était pas dans le texte du gouvernement, ça, il faut le relire et c'est pourquoi, enfin moi je dis très simplement, on a compris, mis en exergue des désaccords qu'on pouvait avoir avec Gérald DARMANIN, Gérald DARMANIN, il a présenté un texte dans lequel il n'y avait pas de suppression de l'AME.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc le texte à l'Assemblée nationale, il n'y aura pas d'AME ?

AURELIEN ROUSSEAU
Dans le texte à l'Assemblée nationale, moi, ce que je dis, c'est que petit un, il n'a pas grand-chose à faire dans un texte immigration. Ce ne sont que des dispositions liées au code de la santé publique. Petit deux et c'est là aussi où il faut être transparent, un dispositif qui coûte 1,2 milliard d'euros, si les parlementaires veulent en discuter, on en discute. On a lancé une mission pour regarder s'il y avait des choses à faire évoluer, mais en tout cas sur l'idée qu'on basculerait de l'aide médicale dans laquelle il y a médecine de ville plus urgences dans un système où y aurait plus que le soin urgent, ça, on n'ira pas jusque-là. Après…

JEAN-JACQUES BOURDIN
On n'ira pas jusque-là, ça veut dire Aurélien ROUSSEAU qu'à partir du 11 décembre à l'Assemblée nationale, vous pourriez, pas vous, mais les parlementaires, les députés pourraient discuter d'un texte sans l'AME ?

AURELIEN ROUSSEAU
Ça peut être ça. Il y a eu des tas de prises de position qui sont à droite ou à gauche. Edouard PHILIPPE a été très clair. J'entendais Roselyne BACHELOT expliquant combien elle s'était battue aussi pour l'AME, mais je veux dire aussi à nos auditeurs l'AME, c'est une des dépenses les plus contrôlées qui soit. On suit pour la maîtriser parce qu'effectivement, c'est une mesure de solidarité de la France et donc il ne faut pas que des gens puissent en être…, en profiter. Mais je crois que vraiment, aujourd'hui, il y a très, très, très peu de profiteurs de l'AME.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien Aurélie ROUSSEAU J'ai deux questions Budget de la Sécurité sociale examiné au Sénat depuis hier. Alors le trou de la sécu s'aggrave. La taxe pour responsabiliser les patients qui n'honorent pas le rendez-vous, c'est ce C'est la droite au Sénat qui souhaite instaurer cette taxe. Vous y êtes favorable ?

AURELIEN ROUSSEAU
Ce n'est pas que la droite, il y a beaucoup de… même à gauche. Le Président La République est aussi très sensible à cette question de ce qu'on appelle en vocabulaire médical les lapins. Donc effectivement, les médecins, ils en ont assez d'avoir des gens qui n'ont pas les rendez-vous qu'ils ont pris. Donc on regarde comment faire. Ce serait assez compliqué, et ce serait assez simple, pardon si je puis dire, si tout le monde prenait ce rendez-vous sur une plateforme, etc. Mais ça n'est pas le cas. Donc, il y a cet amendement, il y a la négociation avec les médecins….

JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais vous êtes favorable à cet amendement, cette taxe ?

AURELIEN ROUSSEAU
Moi, je suis favorable à ce qu'on regarde ce qu'on peut faire sur les lapins.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Le gouvernement est favorable à cet amendement, à cette taxe ?

AURELIEN ROUSSEAU
Moi, je suis favorable à ce qu'on regarde, ce qu'on peut faire et que ce ne soit pas juste un effet d'annonce. J'ai demandé au Directeur général de l'assurance maladie, dans la négociation qui commence avec les médecins demain, de mettre ce point à l'ordre du jour et qu'on voit ce qu'on peut faire.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc possibilité d'une taxe ?

AURELIEN ROUSSEAU
Oui, oui, je pense qu'il faut responsabiliser les gens. C'est des centaines de rendez-vous qui sont paumés dans un pays où on a des problèmes d'accès aux soins.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors dernière question le tarif des consultations. Effectivement, il y a discussion à partir de demain entre les médecins libéraux et l'assurance maladie. 1,50 euro de plus depuis le 1er novembre, il faut aller plus loin ?

AURELIEN ROUSSEAU
Moi, je pense que oui, Il faut aller plus loin parce que les médecins ont pour la plupart, y compris perdu les revenus avec notamment le poids de l'inflation. Mais quand on ouvre une négociation conventionnelle et je me réjouis que tout le monde soit revenu à la table des négociations, on s'est beaucoup engagé pour ça, il faut avoir en tête le but final, quand même c'est qu'il y ait plus d'offre de soins pour nos compatriotes sur tout le territoire. Donc oui, l'attractivité du métier de médecin compte pour s'installer comme médecin, mais ça va être une discussion qui va être longue, qui va être difficile parce qu'évidemment, si nous augmentons le tarif remboursé, en contrepartie, si je puis dire, il faut des engagements des médecins. C'est pour ça que ça s'appelle une négociation et sans doute aussi des organismes complémentaires.

JEAN-JACQUES BOURDIN
D'ailleurs, les mutuelles qui vont augmenter, j'attends, vous avez des chiffres déjà ? Est-ce que vous savez de combien vont augmenter nos mutuelles ?

AURELIEN ROUSSEAU
Alors, je pense, une partie d'entre elles ont annoncé des chiffres moi qui me surprennent beaucoup.

JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est-à -dire ?

AURELIEN ROUSSEAU
Autour de 8 %.

JEAN-JACQUES BOURDIN
De 8 % exactement, j'allais y venir.

AURELIEN ROUSSEAU
De 8 %. Et en disant que c'est notamment parce que le gouvernement a prélevé 500 millions d'euros, 500 millions d'euros, ça ne correspond pas à 8 % d'augmentation... Donc….

JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est trop, c'est trop ?

AURELIEN ROUSSEAU
Il faudra qu'on ait la vérité des prix. 8 %, c'est énorme quand on pense aux tarifs des mutuelles. Oui, je pense que c'est beaucoup trop.

JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci Aurélien ROUSSEAU d'être venu nous voir.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 16 novembre 2023