Interview de M. Frédéric Valletoux, ministre délégué chargé de la santé et de la prévention à Europe 1 / CNEWS le 5 mars 2024, sur les solutions pour faciliter l'accès à l'IVG, le décret sur délégation de tâche pour une montée en compétence des sages femmes, la revalorisation des actes pour les sages femmes et la téléconsultation pour IVG médicamenteuse.

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Média : Europe 1 - CNews

Texte intégral

SONIA MABROUK
Bienvenue et bonjour Frédéric VALLETOUX.

FREDERIC VALLETOUX
Bonjour Sonia MABROUK

SONIA MABROUK
Et merci de votre présence. C'est votre grande interview ce matin sur CNews/Europe 1. Vous êtes le ministre délégué en charge de la Santé et de la Prévention. Monsieur le Ministre, le Parlement, réuni en Congrès hier, a donc inscrit la liberté garantie d'avoir recours à l'avortement dans la Constitution. Beaucoup y ont vu un moment historique. Et comment, vous, vous l'avez vécu, plus personnellement ?

FREDERIC VALLETOUX
Je l'ai vécu avec beaucoup de fierté, et sans doute comme un moment historique aussi, c'est-à-dire, un moment, d'abord, on l'a vu aux résultats, presque un moment d'unité nationale, où les votes très largement se sont portés pour voter cette inscription. Des discours emprunts, pour la très grande majorité, de beaucoup de hauteur de vue, quels que soient les orateurs. Et donc, un moment, effectivement, où la nation semblait soudée derrière cette idée, eh bien, de faire passer des étapes supplémentaires, de donner des droits supplémentaires aux femmes ; une reconnaissance, et donc, j'ai été très marqué par la gravité et la solennité, mais aussi avec beaucoup de fierté, j'ai été marqué par ce moment.

SONIA MABROUK
Unité, dites-vous, avez-vous été surpris par le changement de vote de certains, y compris les sénateurs, est-ce que certains même vous ont évoqué les raisons de ce changement de cette nouvelle conviction ?

FREDERIC VALLETOUX
On a vu la droite sénatoriale évoluer ces dernières semaines, avant le vote au Sénat déjà, et avant le vote encore jusqu'à hier. Certains évoquaient, au-delà, j'allais dire, il n'y a pas eu de consigne de partis, mais au-delà, je veux dire, de l'élan du parti auquel ils appartenaient, l'élan premier, c'est-à-dire, finalement, beaucoup de distance vis-à-vis de cette réforme, évoquaient plutôt des considérations personnelles, des compréhensions à travers des discussions personnelles de leurs entourages, finalement, de l'enjeu, au-delà du symbole, de ce que ça représentait aussi, à un moment où effectivement, on le voit dans beaucoup de pays, eh bien, le droit à l'avortement, la liberté de pouvoir recourir à l'IVG, finalement, est parfois une liberté fragile. Et donc cette volonté de l'inscrire dans la Constitution a aujourd'hui fait consensus, et je m'en félicite.

SONIA MABROUK
Et maintenant, Frédéric VALLETOUX, par exemple, qu'en sera-t-il de la clause de conscience des professionnels de santé ? Eric DUPOND-MORETTI, le Garde des sceaux, a assuré que les médecins conserveraient cette liberté de conscience, cette liberté donc de refuser de pratiquer une IVG. Notons, je tiens à le préciser, que certains médecins, tout en étant évidemment pour l'IVG, sont, j'allais dire, réticents par rapport au délai de quatorze semaines. Est-ce que la constitutionnalisation change la donne ?

FREDERIC VALLETOUX
Ça ne change absolument pas la donne…

SONIA MABROUK
Comment on peut le garantir ce matin ?

FREDERIC VALLETOUX
Eh bien, je vous le garantis, parce que le délai, je veux dire, la liberté qui est celle du médecin, restera une liberté d'appréciation, une liberté de conscience et qui lui est propre. Et ça ne change en rien le fait qu'on puisse garantir l'accès effectivement à cette liberté d'accès à l'IVG. Donc de ce point de vue-là, ça ne change rien. Il faut que les médecins se rassurent, et ceux qui ont regardé de près la question le savent très bien. Ils pourront continuer, pour ceux qui étaient réticents ou ne souhaitaient pas faire faire cet acte avant, pourront continuer à l'exprimer de la même manière après…

SONIA MABROUK
Malgré la constitutionnalisation…

FREDERIC VALLETOUX
Malgré la constitutionnalisation…

SONIA MABROUK
C'est-à-dire, Monsieur le ministre, la Constitution, j'allais dire, n'écrase pas, entre guillemets, cette liberté de conscience ?

FREDERIC VALLETOUX
Elle n'écrase pas…

SONIA MABROUK
Elle ne pourra pas être un jour mise en avant…

FREDERIC VALLETOUX
Elle n'écrase pas la liberté de conscience. Elle assure simplement, dans la hiérarchie des normes du droit, je veux dire, une protection supplémentaire à cette liberté donnée pour les femmes. Mais ça ne change en rien l'approche des médecins, l'approche médicale et l'éthique qui est celle des médecins, alors, en conscience personnelle pour eux.

SONIA MABROUK
Alors, autre point, Frédéric VALLETOUX, comment s'assurer de l'accès à l'IVG partout dans notre pays ? Je voudrais préciser qu'en Gironde, par exemple, certaines femmes n'ont pas accès à l'IVG faute de médecins la pratiquant. Alors, c'est le cas aussi de certaines zones rurales. Quelles sont ce matin, très concrètement, vos propositions ou vos annonces à ce sujet ?

FREDERIC VALLETOUX
C'est vrai que constitutionnaliser ce principe, c'est un pas majeur. On l'a dit. Mon travail à moi maintenant, ça va être de garantir l'accès à l'IVG partout sur le territoire, dans des conditions de sécurité, qui soient, et de qualité des soins, qui soient la même pour toutes les femmes. Et donc on a déjà, ces derniers mois, travaillé, et notamment, au-delà du délai qui a été allongé, en permettant notamment qu'on puisse obtenir par téléconsultation des ordonnances pour les IVG médicamenteuses, ce qui n'était pas le cas, ça a changé en 2022. Mais au-delà de ça, ce que je voudrais dire ce matin, c'est qu'on a signé un arrêté qui permet d'augmenter de 25 % l'acte d'IVG, que ce soit un IVG par voie médicamenteuse ou un IVG chirurgical. L'acte a augmenté de 25 %. C'était une demande de la profession des sage-femmes, mais pas seulement, de l'ensemble des soignants qui pratiquent cet acte. C'est un acte qui n'était pas augmenté depuis 2016, et c'était une revalorisation qui était logique, qui était travaillée depuis quelques semaines. Et depuis deux jours, l'acte a été revalorisé.

SONIA MABROUK
Donc ça, c'est le premier point…

FREDERIC VALLETOUX
Ça, c'est le premier point…

SONIA MABROUK
Revaloriser les actes aussi en particulier pour les sages-femmes…

FREDERIC VALLETOUX
Effectivement, ça, c'est le premier point…

SONIA MABROUK
Je voudrais préciser, Monsieur le Ministre, par exemple, le tarif d'une IVG, comme on dit, entre guillemets, instrumentale à l'hôpital avec anesthésie générale et une hospitalisation disons d'une nuit, s'élève à 800…

FREDERIC VALLETOUX
Ça va être de 830 euros.

SONIA MABROUK
Alors que ça a été 600 et quelques…

FREDERIC VALLETOUX
C'était 660 euros. Et une consultation pour une IVG médicamenteuse qui était à 200 euros passe à un peu plus de 250 euros. Donc on a une application de 25 % de l'augmentation de l'acte, qui était attendue. La deuxième chose, c'est qu'on a donné la possibilité en 2022 aux sages-femmes de pratiquer, et même, des IVG chirurgicales. Aujourd'hui, le décret qui permettait de préciser la manière dont on exerce cet acte ne me satisfait pas, et ne satisfait pas non plus aux sages-femmes, parce qu'il a été entouré d'un certain nombre de…

SONIA MABROUK
De précautions, par exemple…

FREDERIC VALLETOUX
De précautions ou en tout cas de conditions…

SONIA MABROUK
Eh bien, de la présence d'un… comment dire… d'un médecin spécialiste d'orthogénie…

FREDERIC VALLETOUX
Oui, non, de… oui, enfin…

SONIA MABROUK
D'un gynécologue obstétricien…

FREDERIC VALLETOUX
C'était surtout une consultation préalable avec un médecin. Donc cela revenait, j'allais dire, à ne pas changer beaucoup les choses et à ne pas permettre de faire monter en responsabilité les sages-femmes qui ont toutes compétences pour pratiquer ce type d'actes. Donc je remets à la concertation cet arrêté. Je vais le reprendre avec bien sûr les professionnels, autant, les représentants des sages-femmes que, bien sûr, les obstétriciens, les gynécologues obstétriciens, de manière à ce qu'effectivement, on puisse donner une vraie délégation de responsabilité aux sages-femmes, ce qui permettra aussi de mieux assurer l'accès à l'interruption volontaire de grossesse...

SONIA MABROUK
Bien sûr. Pour être précis, vous allez réécrire ce décret. Donc je le précise quand même, évidemment, les sages-femmes sont habilitées à mener, mais, il est vrai que ce décret précise, en consultation, je suppose, ou après, d'être accompagné d'un médecin spécialiste. Pourquoi ne pas abroger ce décret ?

FREDERIC VALLETOUX
Eh bien, c'est ce que je dis, quand je dis : je le réécris…

SONIA MABROUK
Ah, très bien…

FREDERIC VALLETOUX
C'est qu'on va l'abroger pour le réécrire. Et on va le faire très vite, dans les prochaines semaines, de manière, là aussi, à donner du corps à la délégation de tâches. On est dans un grand mouvement, on en reparlera peut-être, dans le système de santé, où on souhaite faire monter en compétence, autour des médecins, sous la responsabilité des médecins, à côté des médecins, et on souhaite faire monter des professionnels qui peuvent venir prendre en charge, pour certains actes, et pour certains types d'intervention, les patients, de manière aussi à mieux répartir la charge et à dégager du temps médical pour les médecins. Concernant les IVG, c'était vrai de cette volonté du Parlement de confier aux sages-femmes des missions, des responsabilités nouvelles. A l'arrivée, le montage administratif n'est pas satisfaisant, et donc on va réécrire dans les prochains jours cet acte sous décret…

SONIA MABROUK
Voilà pour l'annonce. Monsieur le Ministre, le fait aussi que le nombre d'IVG ne cesse d'augmenter en France. Est-ce que ça vous interroge ? Et est-ce que vous avez une explication ? Pourquoi autant aujourd'hui d'avortements dans notre pays ?

FREDERIC VALLETOUX
Alors, je n'ai pas d'explication, là aussi, il faut essayer de tempérer ce fait. Le nombre de IVG avait beaucoup baissé pendant le Covid, est-ce qu'il y avait un lien, sans doute, inévitablement, avait beaucoup diminué. Donc c'est vrai que si on le regarde par rapport à ce qu'étaient les chiffres de 2020, 2021, 2022, on a cette impression, tout d'un coup, d'un bond. Mais quand on regarde plutôt sur le long terme…

SONIA MABROUK
J'ai regardé sur une quinzaine d'années quand même…

FREDERIC VALLETOUX
Oui, ça augmente, vous avez raison…

SONIA MABROUK
C'est une augmentation continue…

FREDERIC VALLETOUX
Mais ça n'est pas une augmentation massive. Donc voilà, c'est sans doute un fait de société qui fait qu'effectivement, il y a plus d'IVG. C'est aussi peut-être le fait que… enfin, c'est la société qui évolue, et sans doute, il faut aussi pousser le recours – et c'est pour ça que le Président de la République l'avait décidé – au préservatif, c'est-à-dire, effectivement, en le rendant gratuit, permette effectivement qu'on n'aille pas forcément jusqu'à un IVG, mais qu'on se protège avant. Voilà.

SONIA MABROUK
Plus largement, Frédéric VALLETOUX, vous ne cessez de dire, là, sur un plan plus large, qu'il y a plus de moyens qui ont été mis pour la santé sous les deux quinquennats d'Emmanuel MACRON. Mais les urgences, et là, c'est plus large, et ça dépasse évidemment ces deux quinquennats. Mais quand même, les urgences sont débordées, nos hôpitaux sont endettés, le système risque, vous le savez bien, l'effondrement, à en croire certains spécialistes. Ce matin, vous l'avez entendue sur Europe1, nous avons reçu Claudine, c'est la fille de cette patiente dont on avait parlé…

FREDERIC VALLETOUX
Bien sûr…

SONIA MABROUK
De 85 ans. Et je le dis pour nos téléspectateurs de CNews et auditeurs d'Europe1, cette patiente qui a été retrouvée morte dans une benne à ordures des urgences de l'hôpital d'Aix. Cette femme devait être surveillée, prendre évidemment ses traitements, elle était atteinte d'une forme de démence. Vraiment, je pense qu'on est tous d'accord. Ceux qui nous écoutent et nous regardent, ce qu'a décrit sa fille est révoltant, est indigne dans ce pays ou ailleurs, et encore plus en France. Comment expliquez qu'on puisse arriver à ça ?

FREDERIC VALLETOUX
Bien sûr. J'ai entendu son intervention sur vos ondes, et effectivement, c'est un drame terrible. C'est un drame terrible, et moi, j'ai une pensée pour la famille, pour la fille qu'on a entendue, mais au-delà, pour l'ensemble de ses proches. Parce qu'effectivement, on ne s'attend pas à mourir à l'hôpital, et sans doute encore moins aux urgences. L'hôpital, c'est l'endroit où on produit du soin, et on le fait, on le sait. Et les personnels le font avec professionnalisme, et souvent, beaucoup d'humanité. Et les Français savent que quand ils vont à l'hôpital, ils croisent des gens qui se démènent au-delà, je le redis, de leurs qualités professionnelles, pour accompagner ce moment où on est si fragile…

SONIA MABROUK
On leur rend hommage, mais Claudine, dans son témoignage a décrit l'inverse…

FREDERIC VALLETOUX
Bien sûr…

SONIA MABROUK
C'est-à-dire, des personnels qui ont abandonné…

FREDERIC VALLETOUX
Mais après, ce qui est vrai, et il faut regarder les choses avec lucidité, c'est que les urgences aujourd'hui ont vu leur fréquentation doubler en une vingtaine d'années. 25 ans, et 21 millions de passages aux urgences par an, ce qui est invraisemblable, ce qui est énorme. C'est aussi l'endroit où l'on va, parce que la lumière est allumée, et aussi parce que sans doute, on ne trouve pas assez, je veux dire, de prises en charge dans la médecine de ville ou ailleurs, et beaucoup de gens vont aux urgences alors que peut-être, ils n'auraient pas à y aller. Parce que, si jamais, effectivement, le premier recours était mieux organisé. C'est une des intentions qu'on a. Et d'ailleurs Gabriel ATTAL l'a dit dans son discours de politique générale, à travers les services d'accès aux soins, de mieux réguler l'arrivée aux urgences, de manière à ce qu'effectivement, ceux qui vont aux urgences sont les gens qui ont besoin, effectivement, par définition, de soins urgents…

SONIA MABROUK
Monsieur le Ministre, vous venez, pardonnez-moi, d'évoquer la médecine de ville. J'ai une question précise, si la médecine de ville peut parfois éviter ou, disons, raccourcir les hospitalisations et soulager – c'est un grand mot – l'hôpital. Pourquoi, par exemple, ne pas revaloriser les infirmiers ? Je sais qu'un déplacement, c'est 2,75 euros, le déplacement, au lieu de laisser par exemple développer les plateformes, reconnaissez que c'est un peu… ce n'est pas la meilleure des qualités quand même, ces plateformes…

FREDERIC VALLETOUX
Je suis là depuis à peine… enfin, depuis trois semaines, et j'ai déjà vu…

SONIA MABROUK
Oui, mais il y a tellement d'attente…

FREDERIC VALLETOUX
Non, non, mais vous avez raison. Et j'ai déjà vu l'ensemble des syndicats infirmiers, infirmiers libéraux de manière à ce qu'effectivement, on regarde l'affaire aujourd'hui du rôle et de la place des infirmiers plus généralement ; il y a la question effectivement, vous l'avez dit, il y a la question financière, budgétaire, de l'accompagnement financier, mais il y a aussi la question, effectivement, on le disait tout à l'heure à propos des sages-femmes, de leur rôle et de leur place dans un système de santé dont on voit aujourd'hui qu'il évolue et qu'il va continuer à évoluer dans les prochains mois et les prochaines années. Et donc c'est une discussion un peu large qu'on a ouverte, et je leur ai promis des réponses assez rapidement, donc, j'espère, sur ce chantier- là, sur des infirmiers, infirmières, et notamment, je ne méconnais pas la question… je ne mets pas de côté la question financière de pouvoir leur donner des solutions rapidement…

SONIA MABROUK
Donc, éventuellement sur la question financière, il pourrait y avoir une revalorisation ?

FREDERIC VALLETOUX
Mais le sujet n'est pas de revenir en arrière, mais sur le sujet de l'accès aux urgences, je veux simplement dire que là où les services d'accès aux soins qu'on a monté avec la médecine libérale dans aujourd'hui, une soixantaine de départements, là où on a un peu de recul, c'est à dire des dispositifs qui existent depuis près de deux ans environ, eh bien on voit les résultats, c'est 10 à 30 % de moins de fréquentation aux urgences, parce que l'orientation téléphonique permet est bien pour certaines personnes, évidemment pas tout le monde, mais pour certaines personnes de mieux les orienter, c'est à dire de les orienter vers des rendez-vous le jour même ou le lendemain vers la médecine de ville. Je rappelle que la médecine de ville joue déjà un rôle important en matière de permanence des soins. 40 % des médecins généralistes participent à la permanence des soins, c'est à dire le soir, le week-end. Il faut qu'on pousse ce chiffre un peu plus loin et ça on le fera, non pas par la coercition, mais on le fera en discutant avec eux. Et moi je souhaite qu'on ait une discussion très franche avec l'ensemble des opérateurs de soins. On a remis…

SONIA MABROUK
Elle le sera…

FREDERIC VALLETOUX
Obligatoire pour les cliniques au mois de décembre, ça va aussi soulager les hôpitaux et pour ça, on doit l'organiser dans les prochaines semaines.

SONIA MABROUK
Je ne vais pas citer s'il y a des cas poignants qui font mal au coeur, je voudrais quand même revenir rapidement sur le témoignage de Ioumoussa, sa fille Anissa aurait eu 25 ans cette année. Prise de douleurs à la poitrine…

FREDERIC VALLETOUX
J'ai entendu ça aussi.

SONIA MABROUK
Elle a été transportée au centre hospitalier de Saint-Denis, en banlieue parisienne, et les médecins la renvoient chez elle, Monsieur le Ministre. J'ai entendu cette expression de morts évitables. C'est affreux, des morts, morts évitables mais alors cette jeune femme 25 ans, qui est envoyée chez elle, qu'est-ce qu'on peut répondre à ça ? Il y a une enquête.

FREDERIC VALLETOUX
Non mais il y a une enquête, comme il y a une enquête, bien sûr à Aix en Provence, comme il y a une enquête après le dramatique suicide qui a eu lieu aux urgences psychiatriques de Toulouse. Donc, vous savez, l'hôpital, d'abord c'est une organisation complexe, très complexe, qui accueille de plus en plus de monde, inévitablement. Mais sachez que chaque incident grave est examiné, fait l'objet d'un retour, fait l'objet d'une analyse, un peu comme dans l'aérien où chaque incident fait l'objet d'une analyse pour sécuriser toujours plus les process et les organisations. C'est ce qui est fait. Il y a 7 000 incidents graves qui ont été répertoriés entre 2017 et 2022, la Haute Autorité de santé ramasse l'ensemble de ces données, si on peut dire ça comme ça, de manière à les analyser, à en tirer des conséquences à la fois pour les établissements eux-mêmes là où l'incident a eu lieu, mais au-delà, pour l'organisation des hôpitaux. Le souci de la sécurité, il est majeur. Et quand on regarde les millions, millions et millions de Français qui passent chaque année dans les hôpitaux, inévitablement, même si c'est choquant, heurtant et quelque part, ça semble totalement incongru, inévitablement, on en arrive parfois effectivement à des drames malheureux. Il y en a eu quelques-uns ces dernières semaines, il y en a eu par le passé. J'ai été dix ans président de la Fédération hospitalière de France et j'ai bien. Enfin voilà on a eu à d'autres époques, dans d'autres hôpitaux, dans d'autres régions, des drames absolus et qui sont toujours choquants. Je le redis parce que l'hôpital, c'est normalement un lieu et c'est un lieu où effectivement on prodigue du soin avec humanité. Malheureusement, il arrive parfois effectivement des drames. Il faut regarder avec lucidité ces drames et surtout demander des enquêtes. C'est ce que j'ai fait dès qu'elles sont nécessaires.

SONIA MABROUK
Bien sûr. Dernière question l'hôpital, c'est peut-être aussi le grand malade, on espère qu'il ne soit pas le grand cadavre à la renverse. C'est votre principale mission, est-ce qu'elle est impossible ? vous ‘n'avez pas l'impression d'être si vif avec le rocher face aujourd'hui à un effondrement potentiel….

FREDERIC VALLETOUX
C'est un sujet complexe, il faut redonner confiance à l'ensemble des acteurs du soin privé, public, tous les acteurs du soin. On a besoin de tout le monde pour relever effectivement le niveau de ce système de santé auquel les Français sont profondément attachés. C'est mon souhait. Quand on regarde financièrement, les gouvernements ont plutôt accompagné. On a augmenté de 60 milliards depuis sept ans les moyens du système de santé en général, les dépenses de santé en France. Il faut sans doute continuer. Il faut regarder effectivement comment on peut sauver l'essentiel. Et dans l'essentiel, c'est à la fois une médecine de ville qui joue son rôle de premier recours, qui joue son rôle effectivement très important dans le système de santé parce que l'essentiel des consultations se fait là et c'est aussi un hôpital qui soit vaillant dans ses missions.

SONIA MABROUK
Merci Frédéric VALLETOUX.

FREDERIC VALLETOUX
Merci beaucoup.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 6 mars 2024