Texte intégral
THOMAS SOTTO
Bonjour et bienvenue sur RTL, Amélie De MONTCHALIN.
AMELIE DE MONTCHALIN
Bonjour.
THOMAS SOTTO
Le Premier ministre, François BAYROU, va donc utiliser tout à l'heure le 49.3 pour adopter le projet de loi de finances. Vous nous confirmez que ce sera la même chose, 49.3, pour le projet de loi de finances de la Sécu ?
AMELIE DE MONTCHALIN
C'est ce qu'il a annoncé également, oui.
THOMAS SOTTO
C'est ce qu'il a annoncé. Sur le budget, le PLF, est-ce que vous allez reprendre le texte tel quel, issu de la commission mixte paritaire, ou est-ce que vous allez y apporter des modifications ?
AMELIE DE MONTCHALIN
Nous reprenons le texte…
THOMAS SOTTO
Mot pour mot ?
AMELIE DE MONTCHALIN
Parce que c'est un compromis qui a été trouvé entre les parlementaires, sans que le Gouvernement soit dans la pièce, je le rappelle, et ce qui montre que dans notre pays - et je crois que c'est rassurant - nous pouvons, quand les uns et les autres, avec courage, avec sens des responsabilités, ont mis au fond chacun la main à la pâte pour que ce budget soit meilleur, parce qu'il va permettre de réduire le déficit, et aussi meilleur parce que, du fait des propositions des uns et des autres, on a remis des moyens d'un côté pour la recherche, pour la transition écologique…
THOMAS SOTTO
On va venir dans les détails.
AMELIE DE MONTCHALIN
Et on a aussi fait beaucoup plus d'économies.
THOMAS SOTTO
Mais à la virgule près, ça sera le même texte ?
AMELIE DE MONTCHALIN
C'est le texte qui est sorti de la commission mixte paritaire, et qui sera rendu fonctionnel si, effectivement, il est adopté et donc promulgué.
THOMAS SOTTO
Qui dit 49.3 dit motion de censure. LFI a déjà annoncé qu'elle en déposerait une. Le sort du Gouvernement est donc entre les mains d'un côté des députés socialistes et de ceux du Rassemblement national. Qu'est-ce que vous leur dites ce matin, Amélie De MONTCHALIN ?
AMELIE DE MONTCHALIN
Déjà, je vais dire aux Français que la question qui est posée aux parlementaires cet après-midi, ce n'est pas : " est-ce que vous êtes pour ou contre ce budget de compromis ? " La question que François BAYROU va poser à travers ce 49.3, c'est " est-ce que vous êtes pour ou contre, au fond, que la France avance ? Est-ce qu'on en reste à ce niveau de blocage ou est-ce qu'on repart ? Est-ce qu'on repart avec une situation... "
THOMAS SOTTO
Le budget est quasiment accessoire, ce qui est important, c'est de ne pas bloquer le pays ?
AMELIE DE MONTCHALIN
Exactement, il ne faut pas qu'on bloque le pays, parce qu'une nouvelle censure serait dramatique. Mais surtout, je veux dire aux oppositions que nous ne leur demandons pas de rejoindre la majorité. Nous ne leur demandons pas de voter ce budget qui n'est pas le leur, d'ailleurs pas celui du Gouvernement non plus. Nous demandons à chaque député - mais c'est aussi une question que les Français peuvent observer - est-ce qu'ils veulent continuer à s'opposer et à proposer dans un cadre qui est le cadre d'un Gouvernement qui fonctionne, ou est-ce qu'ils veulent bloquer le pays ? Et quand on écoute Jean-Luc MELENCHON ou d'autres, un très grand chantage, au fond, a créé une crise, on le voit, un blocage, une forme de chaos qui se poursuivrait.
THOMAS SOTTO
Ça veut dire, Amélie De MONTCHALIN, que le principal mérite de ce budget, c'est d'exister finalement. Il n'est pas là pour régler les problèmes du pays. D'ailleurs à 5,4% de déficit, on ne va pas régler grand-chose.
AMELIE DE MONTCHALIN
Déjà, quand même, on reprend la trajectoire d'une baisse du déficit et on se bat contre le surendettement de notre pays. Mais à nouveau, je veux le dire, ce budget, c'est un budget de compromis. Pourquoi il faut qu'il existe ? Parce que si nous n'avons pas de budget, un million de Français rentreront dans l'impôt sur le revenu, alors qu'il n'est pas prévu qu'ils paient plus d'impôt sur le revenu qu'ils n'en paient aujourd'hui. 18 millions de Français verront leurs factures augmenter. Les agriculteurs, beaucoup nous écoutent ce matin… Toutes les mesures d'accompagnement face aux crises, à la fois climatiques et économiques, ne peuvent pas être prises. Donc la question, c'est, est-ce que le pays repart ? Est-ce que les chefs d'entreprise, qui ont raison de dire qu'à leurs contributions exceptionnelles, on leur doit soutien exceptionnel ?
THOMAS SOTTO
Justement, cette contribution exceptionnelle, c'est combien de temps ? C'est un an ?
AMELIE DE MONTCHALIN
C'est un an.
THOMAS SOTTO
C'est sûr et certain ?
AMELIE DE MONTCHALIN
Et en contrepartie de cet effort…
THOMAS SOTTO
C'est sûr et certain ?
AMELIE DE MONTCHALIN
Eh oui, on les a vus avec Éric LOMBARD, on a vu toutes les organisations professionnelles, on leur a dit : " Voilà, on joue carte sur table avec vous. On vous dit la vérité sur le déficit, on vous dit deux choses. Un, il est dans l'intérêt de l'économie française que nous repartions. " Ce qui coûte aujourd'hui énormément à notre tissu économique, c'est l'incertitude. C'est de ne pas savoir où on va. C'est d'avoir tous les carnets de commandes en suspens. On vient entendre toute la menace à l'extérieur de notre pays. Il faut que notre pays puisse avoir un cap.
THOMAS SOTTO
En gros, il y a le feu. C’est ce que vous nous dites ?
AMELIE DE MONTCHALIN
La deuxième chose qu'on a dit aux patrons, c'est qu'à leur engagement et leur contribution exceptionnelle, nous allions, nous, Gouvernement, répondre par un engagement exceptionnel. D'abord, en réduisant les dépenses de l'État comme cela n'a jamais été fait depuis 25 ans.
THOMAS SOTTO
Mais quand ? L’année prochaine ou… ?
AMELIE DE MONTCHALIN
Non, en 2025. Dans ce budget, nous réduisons les dépenses des ministères comme cela n'a jamais été fait depuis 25 ans. Nous les baissons en valeur. D'habitude, vous savez, on les baisse, mais on ne les baisse pas vraiment, on les baisse par rapport à une tendance. Là, ça baisse pour de vrai ; ça baisse dans les opérateurs, dans les agences de l'État, 3 milliards, et ça baisse dans les ministères comme ça n'a jamais été fait.
THOMAS SOTTO
C'est important les symboles ou pas, Amélie de MONTCHALIN ? Les symboles.
AMELIE DE MONTCHALIN
Les symboles, ça peut être important, ça peut parfois être très bloquant, donc je ne sais pas de quels symboles vous parlez.
THOMAS SOTTO
Parce que vous dites qu'il faut partager l’effort. C’est ce qu'ont répété les ingénieurs depuis des jours et des jours. C'est vrai pour les Français, c'est vrai pour les patrons, vous venez de l'expliquer, mais ce n’est pas vrai pour les anciens présidents de la République et les anciens premiers ministres dont vous avez finalement renoncé à toucher aux privilèges. Pourquoi ?
AMELIE DE MONTCHALIN
Alors, ce n’est pas le Gouvernement qui a renoncé, c'est le compromis qu'ont trouvé les parlementaires et les sénateurs.
THOMAS SOTTO
Il paraît que c'est François BAYROU qui ne voulait pas qu'on y touche.
AMELIE DE MONTCHALIN
Ce que je peux dire sur le sujet, d'abord, ce n’est pas un sujet tabou. Il y a eu une réforme en 2019… Et moi je peux vous dire que si les parlementaires veulent proposer une nouvelle réforme de sujet, on n'a pas, évidemment, de blocage a priori.
THOMAS SOTTO
Et vous, votre conviction ?
AMELIE DE MONTCHALIN
Ma conviction, c'est que dans les dépenses dont on parle, il y a énormément de dépenses qui sont liées à la sécurité de nos anciens Premiers ministres et de nos anciens Présidents.
THOMAS SOTTO
Mais pas que… Il y a les secrétaires, il y a les locations de bureaux, il y a tout ça.
AMELIE DE MONTCHALIN
En 2019, tous les avantages ont été retirés quand les anciens Premiers ministres ou Présidents redeviennent parlementaires. Ce qui veut dire que, par exemple, Gabriel ATTAL, Elisabeth BORNE, François HOLLANDE ne bénéficient pas de ces avantages. Moi, je n'ai pas de problème à ce que les parlementaires proposent, mais il faut… Là aussi, vous voyez, ça ressemble plus à une vraie réforme qu'à un trait de plume budgétaire parce qu'on supprimerait l'enveloppe… Supprimer l'enveloppe, ça ne fait pas la réforme.
THOMAS SOTTO
Après, à l'échelle des sommes et du budget du pays…
AMELIE DE MONTCHALIN
On parle de 2,8 millions.
THOMAS SOTTO
On parle de 2,8 millions, c'est symbolique. Mais vous comprenez que ça puisse choquer les Français à qui on demande des efforts, à qui on dit encore " faites un geste, faites quelque chose " ? Vous comprenez que ça puisse mal passer, ça ?
AMELIE DE MONTCHALIN
Je comprends que les Français veulent qu'on continue à proposer des réformes, qu'on fasse des économies. Je leur dis qu'il y a énormément d'économies dans ce budget qui n'ont jamais été faites depuis 25 ans, que sur ce sujet, les parlementaires ont la main, que nous pouvons évidemment travailler, qu'il n'y a pas de tabou. Et évidemment, il n'y a pas de principe qui dirait qu'il y a des réformes ou des dépenses qu'on ne peut pas regarder. Mais ce que je veux vraiment dire aux Français, c'est que ce budget, il est nécessaire, pas parce qu'il est idéal pour quiconque ; il est nécessaire parce que sans budget, notre pays est à l'arrêt. Et on le sait, on le voit dans tous les domaines, toutes les entreprises, tous les artisans, toutes les familles ont besoin de savoir qu'effectivement - et c'est bien ce qui devait être écrit - les impôts n'augmentent pas pour les classes moyennes. Si on n'a pas de budget, ça augmentera.
THOMAS SOTTO
Alors justement, petite question très pratique ; vous nous confirmez qu'il n'y aura pas de hausse d'impôts pour les ménages, pas de nouvel impôt pour les ménages ou pas ?
AMELIE DE MONTCHALIN
Je confirme.
THOMAS SOTTO
Qu'il y aura des hausses pour les plus aisés ?
AMELIE DE MONTCHALIN
Il y a une contribution qui avait été proposée par Michel BARNIER pour que nous passions à un an sur les hauts revenus.
THOMAS SOTTO
C'est combien ?
THOMAS SOTTO
C'est pour les personnes qui ont plus que 250 000 euros par fiscal, donc on est sur un nombre de Français qui est limité.
THOMAS SOTTO
Combien de Français ça fait ?
AMELIE DE MONTCHALIN
Je ne sais pas vous dire à dizaines de milliers près, mais on est sur des dizaines de milliers, et on n'est pas sur des millions de Français. Mais il n'y a pas d'hausse d'impôt sur l'impôt sur l'épargne, le PFU, il n'y a pas d'hausse d'impôt du revenu, il n'y a pas d'hausse d'impôt de la TVA. Pourquoi ? Parce que ce budget, il faut qu'il soit un budget d'exception, mais il y a des principes et des convictions que nous avons fait respecter.
THOMAS SOTTO
Et de combien va augmenter la taxe sur les billets d'avion, finalement ? Ça inquiète beaucoup Ben SMITH, le patron d'AIR FRANCE.
AMELIE DE MONTCHALIN
J'ai reçu Ben SMITH dans mon bureau la semaine dernière. Le compromis trouvé, c'est pour les billets internes à la France et pour les destinations européennes, à peu près 7 euros par billet, qui contribue au fond à une forme de fiscalité écologique, qui contribue aussi à financer nos investissements dans le train, parce qu'il faut bien qu'on finance les infrastructures. Et puis plus largement, on a aussi évidemment mis en place des compensations de soutien pour nos compatriotes qui sont en Corse et dans les Outre-mer, notamment pour les étudiants.
THOMAS SOTTO
Il y aura aussi le projet de loi de finances sur la sécurité sociale. Il semblerait que la taxe lapin revienne dans les tuyaux. C'est la taxe, c'est la sanction financière pour ceux qui prennent des rendez-vous, notamment sur DOCTOLIB, et qui posent des lapins, qui ne vont pas à ces rendez-vous. Quelles seront les modalités de cette taxe ? Comment ça va fonctionner ? Ça va être de combien ?
AMELIE DE MONTCHALIN
Je laisserai le ministre de la Santé et Catherine VAUTRIN présenter la modalité. Mais ce qu'il faut peut-être dire aux Français sur la sécurité sociale et la santé, c'est qu'aujourd'hui, notre déficit, on le prévoit dans le projet de loi de la sécurité sociale, à 22-23 milliards pour 2025.
THOMAS SOTTO
C’était 16 milliards il y a quelques mois encore.
AMELIE DE MONTCHALIN
Et si nous n'avons pas de budget de la sécurité sociale, on sait qu'on va perdre 30 milliards. Donc c'est un bon exemple du gâchis, du temps qu'on perd, de l'argent qui est au fond perdu, dilapidé, parce que nous n'avons pas de budget de la sécurité sociale. Et donc oui, il y a des mesures, des mesures de responsabilité, il y a des mesures où on va renégocier le prix des médicaments avec les industriels, il y a des mesures où effectivement, on va demander à ceux qui prennent des rendez-vous de les honorer, parce que sinon c’est du temps perdu.
THOMAS SOTTO
Ça, ça ira dans la poche du médecin ou dans la poche du budget ?
AMELIE DE MONTCHALIN
Non, ça va évidemment dans la poche du budget, puisque le but…
THOMAS SOTTO
Le budget ? La taxe lapin va dans la poche du budget ?
AMELIE DE MONTCHALIN
Le but, c'est quoi ? C'est que les médecins aient plus de patients, donc si les gens se présentent, c'est quand même des revenus pour les médecins, mais c'est aussi que le système fonctionne mieux. On a des milliers de Français qui cherchent un médecin traitant. On a des milliers de Français, des millions peut-être même chaque jour qui cherchent des rendez-vous. Si les rendez-vous pris ne sont pas honorés, c'est une perte, et pour les médecins, et pour les patients. Donc je laisserai les ministres expliquer comment marche cette taxe.
THOMAS SOTTO
En tout cas, ça ira dans votre poche à vous… enfin, dans la poche du budget.
AMELIE DE MONTCHALIN
Non, ça ira pour les Français, pour que le système de santé fonctionne. Personne ne s'enrichit… Aucun ministre ne s'enrichit dans le budget. Ce qui s'enrichit, ce sont les services publics, c'est le bon fonctionnement de l'État.
THOMAS SOTTO
Anouk, au 64-900, elle a 22 ans ; elle a effectué un service civique. Pourquoi avez-vous choisi de suspendre soudainement le financement du service civique, mettant à l'arrêt le recrutement de 5 000 jeunes ?
AMELIE DE MONTCHALIN
Non, alors, ce n’est pas ça qui s'est passé. Nous sommes en loi spéciale. Nous avons un budget où nous ne faisons que le minimum. Et donc, nous honorons tous les engagements passés. Tous les jeunes en service civique qui ont déjà un contrat seront bien évidemment payés. Mais nous suspendons les nouveaux engagements, parce qu'à défaut de budget, on doit être très précautionneux avec la somme qui nous a été confiée pour qu'on finisse l'année. Le risque, si on n'a pas cette précaution, c'est qu'on ne soit pas en capacité, à la fin de l'année 2025, de payer nos engagements.
THOMAS SOTTO
S’il y a un budget, le service public sera assuré ?
AMELIE DE MONTCHALIN
Donc, il y a une suspension, il y a une pause. Et quand on connaîtra l'enveloppe dédiée au service civique, je peux garantir que si ce budget passe, si la France peut repartir, elle repart aussi pour le service civique. Donc, c'est une pause qui est liée à ce qui se passe dans tous les domaines de l'État. Tous les nouveaux projets, tous les nouveaux investissements sont actuellement suspendus. Parce que la responsabilité qui est la mienne, c'est qu'on ne lance pas le pays dans l'inconnu. Mais donc, on a besoin d'un cadre. Et on a besoin que le pays reparte. Et c'est la question que François BAYROU pose aux députés cet après-midi.
THOMAS SOTTO
Merci Amélie De MONTCHALIN d’être venue sur RTL ce matin. Vous restez avec nous ; il y a Philippe CAVERIVIERE. Ça sera peut-être votre seul moment de détente de la journée. A tout de suite.
Source : Service d’information du Gouvernement, le 4 février 2025