Texte intégral
JEFF WITTENBERG
Bonjour à tous. Bonjour Benjamin HADDAD.
BENJAMIN HADDAD
Bonjour.
JEFF WITTENBERG
Le week-end, on va le dire, sera pluvieux, mais on ne pourra pas se réfugier à l'Assemblée nationale, s'abriter, puisqu'on l'a appris hier soir, l'Assemblée va suspendre ses travaux. C'est une décision du Gouvernement qui ne plaît pas à la gauche, alors que la partie recette du budget devait être votée lundi. Comment on va faire alors que ce texte est déjà très, très en retard dans la lecture, notamment de tous ces amendements ?
BENJAMIN HADDAD
Non, mais vous voyez, le débat a avancé. Et c'est vrai que les parlementaires font un travail qui est très exigeant, mais qui est important, et je pense qui est de très bonne tenue ces dernières semaines. Vous savez, le Gouvernement, il a tenu ses engagements. Il avait pris des engagements, déjà, pour que les débats puissent commencer, notamment de proposer aux parlementaires la suspension de la réforme des retraites et de ne plus utiliser le 49.3, ce qui était une petite révolution.
JEFF WITTENBERG
Et c'est définitif ? Certains disent qu'il faudra l'utiliser, vu les retards pris.
BENJAMIN HADDAD
Mais vous l'avez vu, le Gouvernement a tenu tous ses engagements en disant qu'il y a une copie initiale qui doit maintenant être débattue, amendée, votée par les parlementaires, une première partie qui a été votée par les députés, et le débat continue. Moi, vous savez, je voyage beaucoup en Europe, évidemment, et je vois qu'autour de nous, il y a des pays qui n'ont pas de majorité absolue et qui ont aussi cet esprit de compromis, de coalition pour trouver des consensus. C'est ce que nous faisons aujourd'hui en France. Je pense que ça fait du bien aussi à notre démocratie, et puis notre pays, il a besoin d'avancer, d'avoir un budget.
JEFF WITTENBERG
Monsieur HADDAD, vous êtes le ministre en charge des Affaires européennes. Et voilà un domaine, l'Europe, où, contrairement à la tendance générale, les dépenses vont augmenter en 2026 pour atteindre 28,8 milliards d'euros, soit une hausse de presque six milliards. Pourquoi la contribution de la France, au budget européen augmente-t-elle tant ?
BENJAMIN HADDAD
Il faut expliquer. Tous les sept ans, les États membres de l'Union européenne et les parlements nationaux votent un budget de sept ans pour l'Union européenne. Et donc, tous les ans, on a une contribution qui est envoyée à l'Union européenne, qui parfois diminue, qui parfois augmente, selon les rattrapages de paiements sur certaines dépenses. Mais ce que je voudrais quand même expliquer, c'est que la France est le premier bénéficiaire des fonds européens en Europe, que ce soit…
JEFF WITTENBERG
Le premier bénéficiaire.
BENJAMIN HADDAD
Le premier bénéficiaire, que ce soit par exemple…
JEFF WITTENBERG
Mais le premier contributeur aussi avec l'Allemagne…
BENJAMIN HADDAD
Alors, c'est l'Allemagne le premier contributeur, mais par exemple, soit le budget pour nos agriculteurs – c'est 9,5 milliards d'euros par an –, que ce soit les fonds pour nos territoires, que ce soit pour nos universités, nos centres de recherche. On est le premier bénéficiaire du plan de relance aussi qui avait été créé lors de la crise Covid, ou des investissements de la Banque européenne d'investissement. Et puis, cette contribution, c'est aussi un levier d'influence. Si la voix de la France porte en Europe sur les sujets comme l'Europe de la défense, sur les sujets comme l'innovation, encore le soutien à l'Ukraine, c'est aussi grâce à cette contribution. Je le dis parce que ce que nous avons vu hier à l'Assemblée nationale…
JEFF WITTENBERG
Justement, permettez-moi juste de vous interrompre un instant. On entend la France insoumise et surtout le Rassemblement national dire : " Pourquoi la France ne bénéficie-t-elle pas de rabais comme d'autres pays, alors qu'elle est donc une très forte contributrice et qu'aujourd'hui, elle doit faire des économies ? " Et le Rassemblement national dit notamment : " Pour compenser la suspension de la réforme des retraites, il suffirait que la France baisse sa contribution à l'Europe. "
BENJAMIN HADDAD
Mais ce qu'on a vu de façon très claire hier à l'Assemblée nationale, vous avez une majorité des députés qui ont fait le choix de dire : " Nous, on veut faire partie de l'Union européenne, on veut continuer à contribuer, on veut continuer à bénéficier de notre appartenance à l'Union européenne au marché intérieur, que ce soit le PS, les Verts, le Bloc central, les Républicains. " Et puis, vous avez eu une coalition du Frexit entre la France insoumise et le Rassemblement national qui, au fond, veulent remettre en question ce qui font les règles communes de notre appartenance.
JEFF WITTENBERG
Il n'y a rien entre les deux. C'est le Frexit, on sort de l'Europe ou on paye beaucoup. Il n'y a pas moyen de payer un petit peu moins.
BENJAMIN HADDAD
Mais se mettre en contravention avec les règles communes de l'Union européenne, tous les pays de l'Union européenne respectent leurs engagements, paient cette contribution. Nous, nous portons une voie exigeante. Quand on est pro-européen, on est aussi lucide, on veut transformer l'Europe. On est exigeant que ce soit sur la défense, que ce soit sur le soutien à l'innovation, sur la simplification des règles. On a des mesures récemment pour que l'Europe se protège aussi contre la concurrence déloyale de la Chine, par exemple, sur l'acier ou sur les véhicules électriques. Ça, c'est la voie de la France qu'elle porte. Ce n'est pas en s'isolant, en se mettant en contravention avec les règles, en se mettant sur un strapontin qu'on va défendre nos intérêts. Nous, on défend les intérêts de la France et des Français, des entreprises, des agriculteurs au sein de l'Union européenne. On ne fait pas le Frexit.
JEFF WITTENBERG
Monsieur HADDAD, on reste dans ce domaine européen avec cette médiation de l'Allemagne, c'est la coopération franco-allemande qui a permis la libération de Boualem SANSAL. Est-ce qu'à cette occasion, on en parlait dans le journal de 8 heures, on assiste, selon vous, à un réchauffement des relations entre Paris et Alger ? Ça, c'est la première question. Et puis, comment avoir accepté finalement que la France n'accueille pas directement l'écrivain alors qu'il aurait pu revenir directement sur le sol français ?
BENJAMIN HADDAD
Alors, si vous permettez, d'ailleurs, je voudrais remercier l'Allemagne, le Président allemand, STEINMEIER, qui a joué le rôle d'un tiers de confiance. On a été en lien permanent avec l'Allemagne pour obtenir cette libération qui est un immense…
JEFF WITTENBERG
Parce que la France seule n'aurait pas pu le faire ? C'est ça que vous dites ?
BENJAMIN HADDAD
Vous l'avez vu, il y avait eu des relations qui s'étaient dégradées entre la France et l'Algérie. Et au fond, on parlait à l'instant du rôle de la France dans l'Union européenne, mais c'est utile d'avoir des amis, des alliés, des partenaires de confiance, là, dans ce cas comme l'Allemagne, c'est un sujet qui a été une immense inquiétude et une exigence du président de la République. Il l'a répété à de très nombreuses reprises. Pour avoir un dialogue franc, respectueux, d'égal à égal, qui défende les intérêts de populations entre la France et l'Algérie, on avait besoin d'avoir cette libération. Nous avons des intérêts communs à faire valoir. Je pense à la coopération sur le plan sécuritaire, à la coopération sur le plan migratoire, évidemment, avec l'Algérie.
JEFF WITTENBERG
Mais vous confirmez qu'il y a aujourd'hui un vrai réchauffement qui va avoir lieu à l'occasion de cette libération ?
BENJAMIN HADDAD
C'était une exigence du président de la France.
JEFF WITTENBERG
On sait que le ministre de l'Intérieur notamment, Monsieur NUNEZ, va se rendre sur place.
BENJAMIN HADDAD
Le ministre de l'Intérieur l'avait dit. Et c'est une étape importante, effectivement, dans ce dialogue que nous appelons de nos voeux.
JEFF WITTENBERG
Tout autre sujet, Benjamin HADDAD, parce que vous êtes aussi un élu parisien, élu du XVIe arrondissement de Paris. Pourquoi j'ai envie de vous poser une question ce matin ? Parce que contrairement à votre parti, Renaissance, le parti macroniste, vous avez décidé, vous, de soutenir Rachida DATI à l'élection municipale du 15 et 22 mars prochains. Ça crée quand même quelques remous, puisque Gabriel ATTAL, le patron de Renaissance, lui a dit qu'il soutiendrait un autre candidat, Monsieur BOURNAZEL. Vous assumez votre différence ?
BENJAMIN HADDAD
Vous savez, j'ai fêté mes quarante ans il y a quelques semaines. Et de toute ma vie d'adulte, d'électeur, j'ai vu le même parti, la gauche, au pouvoir à Paris. Et j'ai vu 100 000 Parisiens qui ont quitté la ville ces dernières années, notamment les familles qui n'arrivent plus à se loger. J'ai vu les entreprises qui fuient. Je vois une ville qui sombre aussi dans l'insécurité. Et Rachida DATI peut gagner à Paris. Elle peut nous faire gagner. Elle peut nous rassembler, créer la dynamique dès le premier tour pour remettre de la sécurité, pour remettre de l'attractivité économique, pour remettre de l'énergie dans cette ville. C'est pour ça que je soutiens avec mon collègue Sylvain MAILLARD, avec beaucoup d'autres, avec énormément de militants.
JEFF WITTENBERG
Et vous n'avez pas convaincu Gabriel ATTAL et tous les autres élus Renaissance de Paris ? Ça fait quand même un petit peu désordre la décision au sein de votre parti.
BENJAMIN HADDAD
Écoutez, moi, je suis Renaissance, je suis loyal à ma famille politique, je suis loyal au chef de l'État. Là, je pense sincèrement qu'on a une opportunité pour créer une dynamique et gagner la ville. Moi, je souhaite l'union le plus large possible autour de Rachida DATI. C'est une femme libre, c'est une femme forte, c'est une Parisienne engagée et expérimentée. Et encore une fois, ça fait 25 ans que nous avons le même parti au pouvoir à Paris. On en voit les résultats. Il y a énormément de Parisiens qui veulent l'alternance. On peut l'avoir.
JEFF WITTENBERG
Mais c'est aussi une femme qui, avec toutes les qualités que vous venez de décrire, aura à répondre devant la justice au mois de septembre 2026 pour corruption et trafic d'influence. Est-ce que ce n'est pas un handicap majeur dans la campagne qui va s'ouvrir dans les prochaines semaines ?
BENJAMIN HADDAD
Moi, sur ces sujets-là, je suis Ministre, j'ai toujours eu la même ligne qui est la présomption d'innocence. Rachida DATI s'est déjà expliquée sur ces sujets. Maintenant, on va parler des Parisiens, des Parisiennes et de notre projet.
JEFF WITTENBERG
Merci beaucoup, Benjamin HADDAD, ministre en charge de l'Europe, élu de Paris. Et c'est la suite de Télématin.
BENJAMIN HADDAD
Merci.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 19 novembre 2025