Le rapport 2022 de la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) sur la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie s'appuie sur des données institutionnelles (ministères de l’intérieur, de la justice, de l'éducation nationale...) mais aussi sur une série d'enquêtes d'opinion (baromètres) et d'informations recueillies auprès d'organismes de la société civile (associations, instituts de recherche, syndicats...). Une partie du rapport est consacrée à deux "focus" : l'un sur les discours de haine sur YouTube, l'autre sur l'instrumentalisation politique du rejet de l'autre.
Recul des faits racistes mais désinhibation de la haine sur les réseaux sociaux
La CNCDH observe un recul des faits racistes officiellement enregistrés de 2021 à 2022 (-23%). Les faits antimusulmans (188 faits en 2022 selon le Service central du renseignement territorial) sont en légère baisse (-12%). Les actes antimusulmans constituent 11% des faits racistes et xénophobes recensés.
Les atteintes antisémites (436 faits recensés en 2022 d'après le Service central) sont en baisse par rapport à 2021 (-25%). Les atteintes aux lieux de culte et aux sépultures sont en net recul, en particulier les atteintes vis-à-vis de lieux de communauté juive (-46%).
Dans la sphère judiciaire, le nombre de crimes et délits "à caractère raciste" enregistrés par les forces de sécurité en 2022 est en légère hausse (+10% avec 6 912 infractions) mais la CNCDH note une légère inflexion par rapport à la progression enregistrée en 2021 (+16%). Pour les deux tiers de ces infractions, il s'agit de provocations, d'injures et de diffamations.
Les victimes de ces faits racistes sont majoritairement les populations masculines, d'âge intermédiaire (entre 35 et 44 ans) avec une surreprésentation des étrangers ressortissants d'un pays d'Afrique (12% pour 4% de la population).
Un volet du rapport évoque l’effet désinhibant de la propagation de la haine sur les réseaux sociaux qui a été particulièrement observé lors de deux épisodes : la crise sanitaire et l’invasion de l’Ukraine par la Russie, avec une recrudescence de propos antisémites.
Après un pic de signalements lors du confinement rapporté par la plateforme Pharos, portail officiel de signalement des contenus illicites de l'internet, une baisse est observée en 2022. La plateforme relève cependant une part croissante de signalements pour "provocation publique à la haine et la discrimination raciale, ethnique ou religieuse" dans la catégorie "xénophobie et discrimination" (de 32% en 2019 à 65% en 2022).
Les recommandations de la CNCDH
À l'issue des travaux d'enquête et des différents recueils d'informations, la CNCDH formule une série de recommandations adressées aux pouvoirs publics :
- une formation plus approfondie des forces de l’ordre et des magistrats en vue d’améliorer le taux de réponse des contentieux racistes ;
- une meilleure adaptation des sanctions aux faits et aux personnalités des auteurs d’infractions racistes (recours à des peines alternatives à l’emprisonnement avec un objectif pédagogique) ;
- un renseignement plus précis des types d’infraction lors de l’enregistrement des plaintes ;
- une évaluation de la qualité de l’accueil des plaignants ;
- l’organisation d’une convention citoyenne sur les migrations ;
- la mise en place d’un plan national d’action sur la formation à la citoyenneté numérique dans le cadre scolaire (en direction des élèves et des enseignants).