Dans les matières civiles ayant une incidence transfrontalière, l’Union européenne (UE) développe une coopération judiciaire et façonne ainsi des passerelles entre les différents systèmes juridiques. Cette coopération se fonde sur la reconnaissance mutuelle des décisions judiciaires et extrajudiciaires (art. 81 TFUE).
Ses objectifs sont la sécurité juridique et un accès aisé et effectif à la justice, ce qui implique :
- une identification facile de la juridiction compétente ;
- une indication claire du droit applicable ;
- des procédures de reconnaissance et d’exécution rapides et efficaces.
Cette coopération vise au règlement des litiges transfrontaliers en matière familiale (divorces, garde d’enfants, successions…), de faillites d’entreprises, d’injonctions de payer…
Des règlements de l'Union permettent de déterminer la juridiction compétente ainsi que la loi applicable et facilitent le déroulement du procès. La simplification des procédures civiles est également favorisée afin d’améliorer la compatibilité des lois des États membres.
La coopération judiciaire en matière pénale repose sur le principe de la reconnaissance mutuelle des jugements et des décisions judiciaires et comprend des mesures visant à rapprocher les législations des États membres dans plusieurs domaines (art. 82 TFUE).
Afin d'assurer la coopération judiciaire en matière pénale, une plateforme unique a été mise en place. Créée par une décision du Conseil de l'UE du 28 février 2002 et installée à La Haye en 2003, Eurojust est dotée de la personnalité juridique. Les autorités judiciaires nationales y collaborent pour la réalisation de trois objectifs :
- promouvoir et améliorer la coordination entre les autorités nationales pour lutter contre la criminalité transfrontalière organisée (trafic de drogue, blanchiment d’argent, traite des êtres humains, contrefaçons…) ;
- améliorer leur coopération en facilitant l’entraide judiciaire ;
- soutenir les autorités compétentes afin de renforcer l’efficacité des enquêtes et des poursuites. Eurojust peut demander aux autorités nationales d’entreprendre une enquête ou d’engager des poursuites.
Eurojust intervient dès lors qu’un crime concerne au moins deux États membres de l’UE, ou un État membre et un État tiers, ou un État membre et l’UE (art. 85 TFUE). Elle est compétente dans les 27 États qui la composent. Eurojust est composée de procureurs, de magistrats et d’officiers de police détachés par chaque État membre (27 membres nationaux assistés d’une ou plusieurs personnes, dont la durée du mandat est déterminée par l’État membre d’origine).
Eurojust mène sa mission sur la base des informations fournies par les États membres et les analyses d'Europol, agence européenne de police spécialisée dans la répression de la criminalité créée en 1998.
Le mandat d’arrêt européen est un outil judiciaire et policier facilitant la remise aux autorités nationales d'un État membre de l'UE d'un individu recherché résidant dans un autre État membre. Adopté en 2002 (après les attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis) et en vigueur depuis 2004, il remplace la procédure d’extradition dans l’UE. Il est applicable pour plusieurs types d'infractions et de condamnations, à partir d'une durée minimale de peine.
Le mandat d'arrêt européen impose à chaque autorité judiciaire nationale (autorité d'exécution) de reconnaître la demande de remise de l'autorité judiciaire d'un autre État membre (autorité d'émission), en vue de l’exercice de poursuites judiciaires ou de l’exécution d’une peine.
Quelle est la différence avec la procédure d'extradition ?
L'extradition est une procédure permettant également de livrer l'auteur d'une infraction à l’État d'émission. La demande d'extradition est faite sur décision du ministère des affaires étrangères, tandis que le mandat d'arrêt européen ne fait pas l'objet d'une décision politique : il s'agit d'une simple procédure judiciaire.
La procédure d'extradition ne prévoit aucun délai, tandis que le mandat d'arrêt européen impose la remise de la personne recherchée dans les 90 jours suivant la réception de la demande.
Le principe de la double incrimination, appliqué dans la procédure d'extradition, selon lequel les faits doivent être réprimés à la fois dans l’État d’exécution et dans l’État d’émission, a été supprimé pour plusieurs catégories d'infractions dans le mandat d'arrêt européen.
Un Parquet européen a été instauré le 1er juin 2021 à Luxembourg pour combattre les infractions portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union.
Bureau indépendant, il est chargé des enquêtes, des poursuites et de l’administration de la justice pour les infractions portant atteinte au budget de l’Union (corruption, fraude transfrontalière à la TVA pour un montant de plus de 10 millions d’euros, corruption, détournement de fonds ou d'actifs de l'Union, blanchiment de capitaux...).
C'est le Parquet européen qui exerce l'action publique devant les juridictions des États membres.
Le saviez-vous ?
Le Parquet européen compte aujourd'hui 22 États membres. La Hongrie, la Pologne, et la Suède n'ayant pas voulu en faire partie, le Parquet européen a été mis en place via le mécanisme de la coopération renforcée, permettant à plusieurs États membres de coopérer en l'absence d'accord unanime. La Hongrie a signé un accord de coopération avec le Parquet européen en 2021, et a annoncé fin 2023 qu'elle l'intègrerait.
Le Danemark et l'Irlande, quant à eux, disposent d'une dérogation sur les questions de justice et d'affaires intérieures.