La justice internationale climatique désigne les mécanismes permettant d’engager des procédures en cas de manquement des acteurs (États, entreprises...) à leurs responsabilités climatiques. À l'échelle internationale, la mise en œuvre d’une justice climatique est supposée permettre une meilleure application des engagements pris par les États lors de la signature des conventions sur l’environnement. L'accord de Paris de 2015 exige notamment des États signataires la mise en œuvre d’un programme pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre (GES), ainsi qu’une transparence sur les actions entreprises.
Il n’existe aucun tribunal international climatique susceptible de condamner les acteurs ne respectant pas leurs obligations ou coupables de crimes contre l’environnement. Certains défenseurs de l’environnement souhaiteraient un élargissement des compétences de la Cour pénale internationale (CPI) pour lui permettre de traiter des questions environnementales, via l’inscription de la notion d’"écocide" (crime contre l’environnement) dans ses statuts. Il s’agirait de pouvoir condamner les individus responsables de décisions politiques menant à la dégradation grave d’un écosystème (déforestation, assèchement d’une mer, déversement de produits toxiques, marée noire...). Le manque de consensus pour une telle évolution la rend à court terme peu probable.
Les avis des tribunaux internationaux
Certains tribunaux internationaux commencent à se prononcer sur des questions liées à la lutte contre le réchauffement climatique, à travers des avis consultatifs :
- le Tribunal international du droit de la mer a pu apporter des précisions sur les obligations des États parties à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (Convention de Montego Bay). Par un avis du 21 mai 2024, il a indiqué que les États ont l'obligation de prendre les mesures nécessaires pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, afin de respecter leurs engagements en matière de protection et de préservation du milieu marin. C'était la première fois qu'une juridiction internationale se prononçait sur le changement climatique ;
- la Cour internationale de justice (CIJ) a été saisie en mars 2023 par l'Assemblée générale des Nations Unies pour un avis consultatif sur les obligations des États à l'égard du changement climatique. Ce sera la première fois que la CIJ se prononcera sur ce sujet.
Si ces décisions sont dépourvues de force contraignante, elles permettent de créer des précédents juridiques en matière climatique.
Depuis plusieurs années, des initiatives citoyennes ou associatives se développent devant des juridictions nationales et régionales. Ces actions visent à mettre en cause les États pour le non-respect de leurs engagements en matière de protection de l’environnement.
En France, des associations de défense de l'environnement ont saisi le juge administratif pour réparation du préjudice écologique résultant de l'inaction de l’État. L’État a ainsi été condamné à plusieurs reprises pour manquements dans la lutte contre le réchauffement climatique (décision du Tribunal administratif de Paris du 14 octobre 2021, dans le cadre de "l'Affaire du siècle", et décisions du Conseil d’État du 1er juillet 2021 et du 10 mai 2023, Commune de Grande-Synthe et autre). Le gouvernement a été enjoint à prendre des mesures supplémentaires pour respecter les engagements internationaux et européens de la France - notamment celui d'atteindre l'objectif fixé par l'accord de Paris de 2015 de réduire les émissions de gaz à effet de serre de 40% d'ici 2030.
Cette judiciarisation est également observable au niveau européen :
- la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a condamné plusieurs États de l'Union européenne (UE) pour violation des seuils fixés en matière de pollution atmosphérique (notamment la Bulgarie, la Pologne, l'Italie, l'Allemagne et la France) ;
- la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) a condamné pour la première fois un État européen - la Suisse - pour son action climatique insuffisante, dans une décision du 9 avril 2024 (Verein KlimaSeniorinnen Schweiz et autres). Elle reconnaît ainsi le droit des individus d'être protégés contre "les effets néfastes graves du changement climatique sur leur vie, leur santé, leur bien-être et leur qualité de vie". Cette décision historique ouvre la voie à un potentiel précédent pour de futures requêtes à ce sujet.