Rapport d'information (...) par la mission d'information sur la dégradation des finances publiques depuis 2023

Remis le :

Auteur(s) : Jean-François Husson

Auteur(s) moral(aux) : Sénat. Commission des finances

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Entre 2017 et 2023, le déficit public a doublé, passant de 77 à 154 milliards d'euros. En 2023, il atteint donc le niveau inédit, hors période de crise, de 5,5 % du PIB.
La mission d'information sur la dégradation des finances publiques depuis 2023 créée par la commission des finances du Sénat attribue cette évolution au seul fait du budget de l'État et de ses opérateurs. Ce niveau élevé de déficit n'était pas prévu, ni à l'issue de l'examen du projet de loi de finances pour 2023, ni lors de l'examen de la loi de programmation des finances publiques pour 2023-2027, de la loi de finances de fin de gestion pour 2023 et de la loi de finances pour 2024.

L'écart entre les prévisions et l'exécution n'est pas dû à une erreur de prévision de croissance mais à un niveau de recettes plus faible qu'espéré. Le déficit budgétaire de l'État a finalement été de 173 milliards d'euros en exécution (au lieu de 164,9 milliards d'euros, prévu par la loi de finance initiale pour 2023) :

  • la contribution sur la rente inframarginale (CRIM) de la production d'électricité, recette nouvelle incertaine, surestimée ;
  • une prévision d'accroissement de 12,1 milliards d'euros du produit de l'impôt sur les sociétés ;
  • s'agissant des administrations publiques locales, un solde exécuté à - 0,4 % (- 0,1 % prévu initialement) ;
  • s'agissant des administrations de sécurité sociale, une estimation trop optimiste de l'évolution de la masse salariale, à l'origine d'une surestimation des cotisations et contributions sociales.

Cette forte dégradation du déficit pour 2023 aura un impact sur l'année 2024.

La mission d'information adresse une quinzaine de recommandations au Gouvernement, regroupées sous quatre axes principaux :

  • améliorer les prévisions de recettes et de déficit public ;
  • renforcer la transparence et la crédibilité des données à partir desquelles sont construits les textes financiers ;
  • garantir l'information et le rôle du Parlement dans le vote du budget et le contrôle financier et budgétaire ;
  • renforcer le rôle et l'information du Haut Conseil des finances publiques (HCFP).

L'ESSENTIEL
LES 15 RECOMMANDATIONS DE LA MISSION D'INFORMATION
AVANT-PROPOS

PARTIE 1 - DÉFICIT 2023 : LES RAISONS D'UN NIVEAU AUSSI HISTORIQUE QU'INATTENDU

I. LE DÉFICIT PUBLIC POUR 2023, QUI A ATTEINT UN NIVEAU INÉDIT HORS PÉRIODE DE CRISE SOUS LA Ve RÉPUBLIQUE, INTERROGE SUR LA CRÉDIBILITÉ DE LA PRÉVISION GOUVERNEMENTALE
A. UN DÉFICIT PUBLIC HISTORIQUEMENT ÉLEVÉ, DONT LE BUDGET DE L'ÉTAT EST RESPONSABLE
1. Un niveau de déficit public jamais atteint hors période de crise
2. Le doublement du déficit public depuis 2017 incombe à l'État et non aux collectivités territoriales ou à la sécurité sociale
B. UN DÉRAPAGE INÉDIT ENTRE PRÉVISION ET EXÉCUTION

II. L'ÉCART ENTRE LA PRÉVISION ET L'EXÉCUTION DU SOLDE PUBLIC POUR 2023 PORTE PRINCIPALEMENT SUR LES RECETTES ET AURA DES RÉPERCUSSIONS IMPORTANTES EN 2024
A. L'ÉCART DE 0,6 POINT DE PIB ENTRE LA PRÉVISION ET L'EXÉCUTION PROVIENT D'ABORD DE RECETTES MOINS ÉLEVÉES QU'ATTENDU
1. Un écart dont l'explication est inhabituelle : il tient moins à un dérapage des dépenses qu'à de mauvaises prévisions de recettes
2. Côté État : une forte dégradation du déficit par rapport à la prévision initiale, expliquée par des moins-values fiscales de grande ampleur et malgré des expédients budgétaires pour gérer la dépense en fin d'année
3. Côté collectivités : des recettes moins élevées sur les droits de mutation à titre onéreux (DMTO) et des dépenses d'investissement plus dynamiques que prévu
4. Côté sécurité sociale : des cotisations sociales moins élevées du fait de prévisions optimistes d'évolution de la masse salariale
5. Le changement de base de l'Insee explique 0,14 point seulement de l'écart entre prévision et exécution
6. L'année 2023, un début de normalisation par rapport aux années 2021 et 2022 qui avaient enregistré un niveau de recettes exceptionnel au regard du niveau d'activité
B. LA DÉGRADATION NON ANTICIPÉE EN 2023 IMPACTE LE DÉFICIT 2024, DÉJÀ REVU À LA HAUSSE, ET QUI POURRAIT ENCORE S'ALOURDIR
1. Un "effet base" : partant d'un déficit plus élevé en 2023, la cible pour 2024 est devenue intenable, ce qui a poussé à l'adoption d'un plan d'économies
2. De fortes incertitudes entourent l'estimation de l'élasticité des prélèvements obligatoires au PIB pour 2024, ce qui pourrait dégrader encore les perspectives de finances publiques

PARTIE 2 - FACE AUX DONNÉES ET REMONTÉES D'INFORMATIONS, L'IMPRUDENCE ET L'INACTION DU GOUVERNEMENT

I. LE GOUVERNEMENT AURAIT DÛ ÊTRE PLUS PRUDENT DANS LA PRÉPARATION DU BUDGET ET DE LA LOI DE FIN DE GESTION 2023
A. LE CARACTÈRE HORS NORME DE L'ANNÉE 2022, DE MÊME QUE LA BAISSE DES IMPÔTS DEPUIS 2017, AURAIENT DÛ DAVANTAGE ÊTRE PRIS EN COMPTE DANS LA PRÉPARATION DU BUDGET 2023
B. DES PRÉVISIONS DES RECETTES FISCALES DE L'ÉTAT RÉVISÉES EN COURS D'EXÉCUTION 2023 QUI PARAISSENT IMPRUDENTES ET SURTOUT DESTINÉES À MAINTENIR FACIALEMENT LE NIVEAU DE DÉFICIT ANNONCÉ
C. UN "PILOTAGE" TOUT RELATIF DE LA DÉPENSE, VISANT À UN RESPECT FORMEL DE LA NORME DE DÉPENSES MAIS SANS RÉELLE ÉCONOMIE
D. LES REPORTS DE CRÉDIT OU LA POLITIQUE DÉLÉTÈRE DU LAISSER-ALLER
E. DE LA PRUDENCE DU DÉBUT DU PREMIER QUINQUENNAT À L'OPTIMISME DÉRAISONNABLE DU SECOND

II. LA PROCRASTINATION COUPABLE D'UN GOUVERNEMENT QUI NE TIENT PAS COMPTE DES ALERTES DE SON ADMINISTRATION
A. LA TEMPORALITÉ DU PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2024 PERMETTAIT DIFFICILEMENT DE TENIR COMPTE DU DÉRAPAGE EN COURS AU MOMENT DU DÉPÔT DU TEXTE
B. LES ALERTES ADRESSÉES PAR L'ADMINISTRATION AU GOUVERNEMENT EN FIN D'ANNÉE 2023 AURAIENT DÛ AU MIEUX LE CONDUIRE À RÉAGIR, ET AU MOINS À INFORMER LE PARLEMENT
C. LE MANQUE DE RIGUEUR DU PROGRAMME DE STABILITÉ 2024-2027 ET L'ABSENCE DE PLFR DÉMONTRENT L'AVEUGLEMENT D'UN GOUVERNEMENT QUI NE PREND PAS LA MESURE DE L'ENJEU ET NE TIENT PAS COMPTE DES ALERTES DE SON ADMINISTRATION
1. Un programme de stabilité qui manque de sérieux et ne retient pas les prévisions techniques des services
2. L'absence de projet de loi de finances rectificative malgré le bouleversement des équilibres actés dans la loi de finances initiale pour 2024 relève du déni de réalité, voire du déni de démocratie
3. Le prétendu volontarisme politique des prévisions de croissance et de déficit public, ou la dangereuse confusion entre technique et politique

PARTIE 3 - UN MANQUE D'INFORMATION PROBLÉMATIQUE ET NON CONFORME À LA LOLF

I. UN PARLEMENT PRIVÉ DE L'INFORMATION NÉCESSAIRE À L'EXERCICE DE SES PRÉROGATIVES ET NOTAMMENT LE VOTE DU BUDGET
1. Le Parlement légifère sans disposer des données les plus récentes sur la situation des finances publiques de la part du Gouvernement
2. Le projet de loi de finances (PLF) pour 2024 a été adopté à coups de procédures d'exception altérant l'information du Parlement
3. La nécessité pour le Parlement de disposer d'informations objectives et actualisées tant lors de l'adoption du budget que durant son exécution

II. LE HAUT CONSEIL DES FINANCES PUBLIQUES (HCFP) GAGNERAIT ÉGALEMENT À DISPOSER D'UN MEILLEUR NIVEAU D'INFORMATION

TRAVAUX DE LA MISSION D'INFORMATION

  • Audition de M. Pierre Moscovici, Président du Haut conseil des finances publiques et Premier président de la Cour des comptes (Mardi 30 avril 2024)
  • Audition de MM. François Ecalle, président fondateur de l'association "finances publiques et économie" (FIPECO), Mathieu Plane, directeur adjoint de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) et Olivier Redoulès, directeur des études de l'Institut Rexecode (Mercredi 15 mai 2024)
  • Audition de M. Thomas Cazenave, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics (Mardi 28 mai 2024)
  • Audition de M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique (Jeudi 30 mai 2024)
  • Examen en commission (Mercredi 12 juin 2024)

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
LISTE DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES
TABLEAU DE MISE EN ŒUVRE ET DE SUIVI (TEMIS)

  • Autre titre : Dégradation des finances publiques : entre pari et déni
  • Type de document : Rapport parlementaire
  • Pagination : 238 pages
  • Édité par : Sénat
  • Collection : Les Rapports du Sénat
  • Numéro dans la série : 685