La Banque centrale européenne (BCE) continue sa politique de lutte contre l'inflation avec une remontée des trois taux d'intérêt directeurs de 0,25% à compter du 2 août 2023. Le Conseil des gouverneurs a également décidé de réduire la rémunération des réserves obligatoires (celle des banques auprès de la BCE) à 0% afin d'améliorer l’efficience de la politique monétaire malgré le risque de priver les banques de liquidité.
Un niveau d'inflation plus élevé pour les pays proches du conflit ukrainien
L'objectif principal de la BCE est le maintien de la stabilité des prix. Face à l'envolée de la dépréciation monétaire, la BCE était dans l'obligation d'agir. Aujourd'hui, après une année de resserrement monétaire, le niveau moyen de l'inflation a certes baissé en zone euro – de 10,6% en octobre 2022 à 5,5% en juin 2023 – mais le cœur de l'inflation, c'est-à-dire celle la plus ressentie, sur l'alimentation, l'alcool et le tabac, se situe toujours à 11,6% en juin 2023 (après un pic à 15,5% en mars) sur une base annuelle. Quand on rapporte cette hausse au revenu des ménages, c'est pour les ménages pauvres que l'incidence est la plus forte comme le rappelle France Stratégie dans son étude Alimentation, logement, transport : sur qui l'inflation pèse-t-elle le plus ?
Au sein de l'Union européenne, un clivage est-ouest apparaît clairement : plus les pays sont proches de la guerre en Ukraine, plus leur niveau d'inflation est élevé. Ceci s'explique par des tensions sur leurs marchés à la suite de l'afflux de réfugiés et par une prime de risque générale liée à leur situation géographique. C'est aussi une des raisons pour laquelle l'inflation baisse davantage aux États-Unis, pays très éloigné du conflit.
Des effets économiques suffisants ?
La BCE cherche à augmenter le coût auquel ménages et entreprises empruntent afin de réduire la demande globale, ainsi que la capacité des entreprises et du commerce à augmenter les prix. Sur les marchés des prêts, cette stratégie fonctionne et le pic du resserrement est proche : les prêts immobiliers, tous comme ceux pour les entreprises sont en nette hausse. Le marché de l'immobilier ralentit et commence à se retourner. Idem pour la masse monétaire : son expansion ralentit très nettement et tend même vers zéro, une situation inédite depuis la crise de la zone euro en 2010.
Malgré ces signes encourageants, la BCE est toujours en alerte, car non seulement le cœur de l'inflation demeure élevé, mais les liquidités présentes sur les marchés restent toujours abondantes après sept ans de politique particulièrement accommodante de la BCE. Pendant ces années, elle a pratiqué un assouplissement quantitatif très prononcé qui a notamment donné naissance à deux programmes d'achat de titres pour soutenir l'activité économique : le programme d'achats d'actifs (APP) et le programme d'achats d'urgence pandémique (PEPP). Ces programmes avaient fortement gonflé le bilan de la BCE. Depuis mars 2023, la BCE réduit son portefeuille d'APP et, depuis début juillet, elle cesse même complètement ses achats pour l'APP. Concernant le PEPP par contre, la BCE entend toujours réinvestir les remboursements des titres arrivant à échéance.