Déclaration de M. Alain Richard, ministre de la défense, sur le rôle de l'OCCAR pour la coopération en matière de programmes d'armement, Bonn le 17 janvier 2002.

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Circonstance : Inauguration de l'OCCAR (Organisation conjointe pour la coopération en matière d'armement) à Bonn le 17 janvier 2002

Texte intégral

Messieurs les Ministres,
Messieurs les Officiers généraux,
Mesdames, Messieurs,
Nous célébrons aujourd'hui l'OCCAR lors du premier anniversaire de son fonctionnement comme organisation internationale. Les quatre partenaires de l'OCCAR ont en effet ratifié le texte fondateur, ce qui a permis de donner à l'Organisation conjointe un statut juridique le 28 janvier 2001.
Mais l'OCCAR a d'ores et déjà plus de cinq années d'existence et d'expérience. C'est donc l'occasion de dresser un premier bilan de sa gestion de programmes d'armement en coopération. C'est également l'occasion d'évoquer de nouveaux objectifs pour l'avenir.
L'OCCAR gérait, jusqu'à la fin de l'année 2001, sept programmes représentant un montant total de 800 millions d'euros par an. Je crois que nous pouvons collectivement nous féliciter des résultats obtenus par l'OCCAR dans la conduite de ces programmes importants, qui nous sont profondément nécessaires. Les équipes, les procédures internes et le corpus de règles organisant le dialogue de gestion avec les services nationaux sont en place et éprouvés. Nous avons l'occasion de la constater aujourd'hui à Bonn, siège de l'OCCAR. L'organisation a su, d'emblée, par la volonté des nations, par la qualité et le professionnalisme de ses équipes, atteindre un niveau de performance répondant aux enjeux et aux objectifs que les ministres de la Défense avaient fixés en 1996.
La montée en puissance de l'OCCAR s'opère de manière tout à fait satisfaisante. Cela nous a ainsi permis de lui confier, le 18 décembnre dernier, la gestion du programme A400M le plus important programme d'armement conjoint engagé en Europe - selon le mandat de programme que lui ont fixé huit pays acquéreurs de cet avion de transport militaire.
C'est sur la base de cette démonstration d'efficacité que nous envisageons également de confier à l'OCCAR la conduite de nouveaux programmes. Je pense en particulier au programme de système de défense antiaérien de forces navales PAAMS, mené par l'Italie, le Royaume-Uni et la France.
Je note aussi avec satisfaction l'intérêt marqué vis-à-vis de l'organisation par plusieurs de nos partenaires européens, représentés aujourd'hui au plus haut niveau.
Regardant l'avenir, je soumets à la réflexion deux séries d'objectifs.
En premier lieu, des objectifs à fixer au management de l'OCCAR avec l'aide des services nationaux d'armement.
Nous attendons en effet de l'OCCAR une efficacité plus grande en matière de coopération sur les programmes d'armement, en tirant les enseignements des succès comme des difficultés rencontrées par le passé, en s'appuyant sur les meilleurs méthodes de management et de conduite des programmes et en s'inspirant des méthodes mises en oeuvre dans le secteur concurrentiel.
Je citerai trois pistes qui me semblent constituer des éléments structurants de cette efficacité.
La première est l'engagement formel des nations lors du lancement des programmes, au travers du mandat de programme, décision du conseil de surveillance qui est juridiquement contraignante pour les Etats concernés. Comme pour les commandes globales réalisées par la France depuis plusieurs années, cet engagement apporte aux industriels la visibilité nécessaire pour améliorer leur offre ; il procure à tous les partenaires des réductions de coût et de délai très significatives ; c'est aussi la garantie du respect du calendrier de livraison des matériels.
La deuxième piste porte sur le maintien condition opérationnelle. Chacun de nos pays est engagé dans un travail d'optimisation de la disponibilité opérationnelle et de réduction des coûts d'entretien. L'OCCAR a, selon moi, dans ce domaine un rôle important à jouer, pour les programmes en préparation ou en notre possession, comme pour ceux qui sont actuellement en cours de gestion et qui étaient pour la plupart lancés préalablement à leur transfert à l'organisation conjointe.
Je suggère enfin que les équipes de l'OCCAR proposent, en liaison avec les services nationaux d'armement, d'impliquer l'Organisation conjointe dans la réalisation de démonstrateurs technologiques. Ces projets de montants de l'ordre de 20 à 50 millions d'euros, permettent, par la vérification des performances attendues de nouveaux concepts technico-opérationnels ou de technologies non encore éprouvées, de raccourcir les délais et les risques de réalisation des programmes. L'évolution rapide des technologies d'une part, du contexte stratégique d'autre part, doit en effet nous amener à réduire sensiblement les délais nécessaires à la réalisation des équipements ce qui permet également d'en réduire les coûts.
Les prochains mois donneront l'occasion, pour la première fois, aux équipes de l'OCCAR de négocier directement avec l'industrie les termes de plusieurs grands contrats nouveaux comme par exemple le contrat (dit "de phase 3") qui achève le développement et la production de programme FSAF, et de confirmer ainsi concrètement l'efficacité de l'organisation. Cette phase de poursuite de la montée en puissance doit être une réussite. Vous pouvez compter sur la totale collaboration de la DGA pour soutenir l'OCCAR dans cette phase.
En second lieu, je souhaite fixer l'objectif de mieux coordonner nos politiques d'armement et de créer un marché européen de l'armement, qui est indispensable si nous voulons que la capacité d'achat collective conduise à une réduction des coûts.
Il ne suffit pas de fixer des objectifs au management de l'OCCAR. Ceux-ci doivent être accompagnés d'un objectif politique des Etats qui en sont les membres. L'OCCAR est en effet un outil dont l'efficacité dépend autant de son fonctionnement interne que de la capacité des Etats à tirer les conséquences en matière d'armement d'une ambition commune européenne nouvelle en matière de défense.
Avec mes collègues ministre de la Défense, nous cherchons à créer les conditions du maintien, le cas échéant, de la consolidation de chacun de nos budgets nationaux. Un effort suffisant sera en effet nécessaire pour doter l'Europe des capacités nécessaires à la réalisation des missions de Petersberg.
Nous ne pouvons demander à nos collectivités nationales cet effort financier, dans un cadre budgétaire contraint, que si nous démontrons parallèlement notre capacité à tirer conjointement de ses ressources financières un effet de levier maximal au service de notre défense commune.
Cela suppose de disposer d'un tissu industriel au plan européen, ce qui est désormais le cas avec des groupes transnationaux de dimension mondiale.
Cela suppose également de renoncer à exiger programme par programme un "juste retour industriel", de susciter largement toute l'offre industrielle européenne en procédant pour la grande majorité de nos acquisitions à des appels d'offres européens. Tout ceci revient en fait à recourir le plus possible à des approches commerciales dans nos procédures d'acquisition et à considérer le marché européen de l'armement comme notre marché domestique commun.
En remerciant Rudolf Scharping de nous avoir accueillis dans ce lieu prestigieux de Petersberg, je veux donc vous dire la confiance de notre gouvernement en notre capacité collective de doter l'Europe de la défense des capacités militaires qui font sa cohérence et son efficacité, et ce dans les meilleures conditions de compétitivité et de performance, qui font honneur aux personnes qui travaillent à l'OCCAR.
Je vous remercie.
(source http :www.diplomatie.gouv.fr, le 22 janvier 2002)