Interview de M. Hervé de Charette, président délégué de l'UDF, à France 2 le 28 septembre 1999, sur la politique de Lionel Jospin et sur l'idée d'une coopération européenne face à la mondialisation.

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Texte intégral

Françoise Laborde - Avez-vous été surpris par le ton de L Jospin et par ses propositions ?
Hervé de Charette - À vrai, dire oui, je crois que cette prestation du Premier Ministre est un grand événement parce qu'elle, nous permet de découvrir un nouveau Jospin. Pendant deux ans - c'était savamment organisé à Matignon, - nous avons eu l'impression que le Premier ministre était devenu un personnage modéré, de plus en plus modéré, de plus en plus proche de Blair, de Schröder, de plus en plus attentif aux réalités de l'économie. Enfin bref, c'était quelqu'un qui chassait, disait-on, sur les terres de l'opposition ; maintenant, c'est quelqu'un d'autre que l'on voit, qui regarde à gauche, qui n'a qu'un seul souci : les partis de gauche. Ce n'est plus le chef d'équipe qui dirige, c'est celui qui est condamné à suivre la pression de R. Hue ou la pression des Verts, des écolos, et qui, finalement, tombe à gauche de la façon la plus forte - tous les journaux disent cela ce matin d'ailleurs, de la façon la plus brutale, dépourvu de tout scrupule. C'est très impressionnant On a un nouveau Jospin. "
Sur le fond des mesures - que ce soit la pénalisation du travail précaire, les 35 heures obligatoires avant tout plan de licenciement ou encore l'effacement des dettes fiscales pour les foyers très endettés - ce ne sont pas des mesures qui vont changer fondamentalement la face de la politique ou de l'économie française ?
Ce que vous avez sur les familles endettées, toutes les mesures qui vont faciliter la vie de ces familles, ce sont des mesures utiles, bien entendu. En fait, je parle des décisions qui sont annoncées concernant les entreprises. La mondialisation, vous le savez, c'est un grand problème, je dirais, la grande affaire des années qui viennent. Je crois que c'est plutôt positif pour nos pays européens et notamment pour la France - probablement même, très positif, mais cela a aussi des problèmes. J'ai l'impression, que le gouvernement socialiste ne voit que des solutions réglementaires, que des solutions qui consistent à créer de nouveaux impôts, que des solutions qui consistent à taper sur les entreprises, alors qu'en réalité, il oublie la dimension principale : si l'on a des problèmes à résoudre face à 1a mondialisation - je suis persuadé que l'on en a - il faut travailler entre Européens ; il faut discuter entre Européens, élaborer des positions communes européennes qui permettent alors de peser de tout le poids de l'économie européenne face à nos partenaires américains, asiatiques et autres."
Ce que vous décrivez comme un coup de barre à gauche, cela ne rend pas service à la position du côté du RPR, qui est plutôt souffrant.
Il ne s'agit pas de savoir si ce que fait M. Jospin est favorable à l'opposition. La question est plutôt : est-ce que c'est bon pour le pays ? Le général de Gaulle nous parlait des " intérêts supérieurs de la France." Franchement, la distance est très longue entre ce que fut le général de Gaulle, toujours inspiré par le souci de l'intérêt supérieur des Français, et ce que nous voyons aujourd'hui : c'est-à-dire la politique vraiment politicienne installée à Matignon. Quant à l'opposition - on est à Cauterets - l'UDF va plutôt bien parce que nous sortons d'une élection européenne où nos idées ont été bien reçues par nos électeurs. La liste. Bayrou a donné de bons résultats. C'est vrai que vous trouvez aujourd'hui les députés et les sénateurs UDF qui travaillent à Cauterets avec la volonté d'être combatifs au Parlement, à l'Assemblée et au Sénat qui contre les décisions qui nous paraissent mauvaises du gouvernement, que ce soit le budget 2000 ou la loi sur les 35 heures obligatoires pour tout le monde.
La stratégie de l'UDF c'est de rester dans l'opposition, c'est aussi de confirmer, d 'affirmer son autonomie, y compris pour les présidentielles ? On peut déjà savoir si vous aller avoir un candidat UDF et comment vous allez le choisir ?
Union de l'opposition, identité de l'UDF ! Et puis, les présidentielles, franchement on verra ! Pour l'instant, je crois que nous avons tous à nous rassembler autour du Président de la République qui est - qui doit être, à mon avis - l'inspirateur de l'opposition ".

(source http://www.udf.org, le 30 septembre 1999)