Déclaration de M. Lionel Jospin, Premier ministre, en réponse à une question sur le retrait des troupes israéliennes du sud-Liban, à l'Assemblée nationale le 24 mai 2000.

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Texte intégral

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les députés,
Monsieur le Député,
Nous l'avons constaté : les événements se sont précipités depuis lundi. L'allégement du dispositif militaire israélien entamé en prévision de son retrait définitif du Sud-Liban a entraîné un effondrement de l'armée du Liban-Sud. En moins de 48 heures, au fur et à mesure du retrait des troupes israéliennes, le Hezbollah a pris le contrôle de la quasi-totalité de l'ancienne zone de sécurité. La plupart des combattants de l'ALS se sont rendus au Hezbollah ou au mouvement Amal. Les 150 prisonniers de la prison de Khiam ont été libérés. Il ne semble pas qu'il y ait eu d'exactions, et les pertes humaines ont été limitées.
L'initiative revient maintenant aux Nations unies. A New York, le Conseil de sécurité, hier, a adopté une déclaration approuvant un premier rapport du Secrétaire général concernant le rôle à venir de l'organisation. Il relève des points positifs, qui semblent traduire la volonté des parties concernées de coopérer pour la mise en uvre des résolutions 425 et 426 du Conseil de sécurité. Mais certains aspects doivent être clarifiés dans la perspective de la certification, par le Secrétaire général de l'ONU, du retrait israélien. L'envoyé spécial de l'ONU, M. Roed-Larsen, est donc reparti hier soir dans la région.
Toutes les options aujourd'hui restent ouvertes. Une fois que le Secrétaire général de l'ONU aura certifié, au Conseil de sécurité, que le retrait israélien est conforme aux exigences de la résolution 425, se posera la question d'un éventuel redéploiement de la Finul - au prix d'un renforcement qui reste à définir pour compléter son mandat qui est "d'aider le gouvernement libanais à assurer la restauration de son autorité effective dans la région".
Avant de nous engager, nous-mêmes Français, dans cette voie, nous examinerons la situation sur le terrain et les garanties que les parties sont prêtes à donner. Ces garanties concernent notamment la sécurité des forces de l'ONU et donc éventuellement de nos propres forces, et les engagements du gouvernement libanais tenant notamment au déploiement de l'armée libanaise.
En tout état de cause, comme l'a rappelé, ce matin, Hubert Védrine, le ministre des Affaires étrangères, si la Finul devait être redéployée, ce ne pourrait être dans notre esprit que pour une période très courte et à seule fin d'aider l'Etat libanais à restaurer son autorité dans cette région.
La France est particulièrement active. Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, notre pays ne peut que se réjouir du retrait israélien du Sud-Liban que la communauté internationale réclamait depuis plus de 20 ans. Mais nous aurions préféré - et nous l'avons dit - que ce retrait s'opère dans le cadre d'un accord de paix global entre la Syrie, le Liban et Israël.
Une fois obtenue la certification du retrait israélien, nous sommes prêts à prendre nos responsabilités au sein des forces des Nations unies, pour autant que l'Organisation ait obtenu un engagement concret des parties concernées - Israël, Syrie, Liban - ainsi que des garanties de sécurité indispensables.
C'est ce message que le président de la République, qui s'est entretenu avec les principaux responsables de la région, et le gouvernement, en particulier le ministre des Affaires étrangères qui rencontre aujourd'hui même, à Florence, Mme Madeleine Albright, répètent à toutes les parties au conflit, que nous appelons à respecter la plus grande mesure.
Si toutes les conditions sont remplies, M. Kofi Annan sait qu'il pourra compter sur la détermination de la France à s'engager pour servir la cause d'une paix durable dans toute la région, dont nous espérons qu'elle pourra progresser à partir des événements actuels au Sud-Liban et sur la base d'un accord global de paix négocié entre toutes les parties.
Par ailleurs, naturellement, nous soutiendrons l'évolution du processus de paix dans toutes ses dimensions, et particulièrement nous souhaitons que ce processus avance positivement entre les Israéliens et les Palestiniens.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 25 mai 2000).