Texte intégral
Monsieur le Premier Ministre,
Monsieur le Ministre,
Monsieur le Préfet de Région,
Madame la Présidente du Conseil régional
Mesdames et Messieurs les sénateurs et députés,
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames et Messieurs les Présidents,
Mesdames, Messieurs,
C'est pour moi un honneur et un bonheur que de participer avec vous, aujourd'hui, à l'inauguration de cette 5ème édition de la Biennale d'art contemporain de Lyon, qui a su devenir l'un des événements majeurs du calendrier artistique national et international.
La réussite de la Biennale de Lyon est d'abord le fruit d'une collaboration étroite de la ville de Lyon, de la région Rhône-Alpes et des services de l'Etat, en particulier ceux de la Délégation aux arts plastiques, de la Direction des musées de France et de la DRAC Rhône-Alpes. Elle est aussi le fruit des efforts de ces deux directeurs artistiques, Thierry Raspail et Thierry Prat, deux personnalités fortes et engagées de l'art contemporain qui réussissent, à chaque nouvelle édition, à nous surprendre et à nous faire partager un grand moment d'émotion artistique.
Ils ont confié le commissariat artistique de l'édition 2000 à Jean-Hubert Martin, dont nul n'ignore plus le rôle de précurseur et d'initiateur dans l'ouverture du monde de l'art à des acteurs et à des mondes jusque là méconnus. Il me suffira de rappeler à ce sujet sa grande exposition fondatrice de 1989, "Les Magiciens de la Terre" qui continue aujourd'hui encore à marquer profondément la scène artistique.
Jean-Hubert Martin nous convie, cette année, à un "Partage d'exotismes". Un thème qui lui est cher et qui traduit sa curiosité, sa fréquentation et sa connaissance des cultures et des artistes les plus originaux et les plus typiques.
Ce rassemblement d'autant de personnalités remarquables et de pratiques tellement différentes en un même lieu souligne l'un des enjeux essentiels de la création d'aujourd'hui: la transformation d'une vision temporelle de l'art contemporain en une vision spatiale. L'art vivant a été surtout, jusqu'à présent, confronté à l'histoire. Cette 5ème Biennale de Lyon le confronte à la géographie.
La nouveauté et l'intérêt de la carte planétaire de la création artistique qui nous est ainsi proposée tient à son décentrement et à la réciprocité des exotismes qui s'y révèlent. Chacun comprendra sans peine ce que peut avoir de stratégique et de politique au sens plein du terme, pareille remise en cause des réflexes ethno-centristes à l'heure de la mondialisation et en cette symbolique année 2000.
Cette exposition est exemplaire en ce qu'elle permet de mesurer, malgré une certaine hégémonie occidentale, que le nivellement culturel mondial est encore largement, et heureusement d'ailleurs, une fiction. Mais elle permet aussi, en même temps, de comprendre que l'art, et je reprends les mots de Jean-Hubert Martin, est " une suite d'appropriations, de contacts, d'influences et de métissages, n'en déplaise aux tenants de la pureté stylistique ou ethnique ". Et de ce point de vue, cette exposition renvoie à la réalité de la vie artistique de notre pays aujourd'hui au pays réel en quelque sorte, celui dont on ne parle pas assez, celui auquel je m'attache, personnellement, tout particulièrement. Je pense à ces nouveaux lieux souvent reconquis sur la ville, à ces ateliers, à ces fabriques qui réunissent des équipes artistiques issues d'histoires, de communautés, de pratiques différentes, de matériaux, supports et disciplines qu'elles croisent pour proposer de nouveaux objets d'art, souvent surprenant, forcément déroutant mais forcément vivant.
Nous devons, nous, puissances publiques, saisir ce mouvement, s'attacher à ces " nouveaux exotismes ", pour parler comme Jean-Hubert Martin. Là encore cette exposition est éclairante.
En se faisant ainsi plus anthropologique qu'esthétique, le regard porté sur la création vivante se libère de certains tabous. La dimension proprement visuelle de l'art, dont les références sont souvent à chercher davantage du côté de la publicité et du cinéma que de l'histoire de l'art, est pleinement réinvestie, sans craindre le spectaculaire parce qu'elle se donne la chance (et elle a raison) d'être accessible au public le plus large. Et si l'on ne retenait que cet angle là, cette exposition devrait aussi, je crois, faire date. Je tiens à souligner l'importance de cette démarche qui, selon les propres termes de Jean-Hubert Martin, défend " l'égale valeur des cultures, l'égale valeur des regards qu'elles se portent les unes aux autres, comme étranges et comme exotiques ". Proposer cette conception aujourd'hui, en ces temps de résurgences idéologiques malsaines, là où le révisionnisme persiste, n'est pas indifférent. Mais une réussite, comme la Biennale de Lyon, qui va faire partager ses exotismes à des milliers de visiteurs, au cur de cette magnifique construction de Tony Garnier, au cur d'une ville prestigieuse ne doit pas nous faire oublier que la création contemporaine est un combat permanent, et que nos responsabilités en ce domaine, qu'il s'agisse des artistes, des Ecoles d'Art, deCentres d'Art, des Galeries, des éditeurs et plus généralement de l'éducation artistique sont essentielles. Catherine Tasca et moi-même en sommes pleinement conscients et l'éducation artistique notamment est notre priorité.
Avant de conclure, et de rendre la parole aux uvres, je voudrais souligner que, sous l'effet de cette véritable mosaïque de points de vue ici constituée, grâce également au déploiement d'une scénographie intelligente, cette exposition réussit à rendre exotiques jusqu'aux travaux que nous connaissions le mieux. Mais n'est-ce pas la fonction la plus profonde de l'art que de réussir à faire naître l'étrange sous le familier, l'inconnu sous l'habituel ?
Il me reste à remercier tous les artistes qui ont accepté l'audacieuse entreprise qui leur était proposée : partager entre eux et nous faire partager leurs exotismes respectifs.
(Source http://www.culture.gouv.fr, le 27 juin 2000)
Monsieur le Ministre,
Monsieur le Préfet de Région,
Madame la Présidente du Conseil régional
Mesdames et Messieurs les sénateurs et députés,
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames et Messieurs les Présidents,
Mesdames, Messieurs,
C'est pour moi un honneur et un bonheur que de participer avec vous, aujourd'hui, à l'inauguration de cette 5ème édition de la Biennale d'art contemporain de Lyon, qui a su devenir l'un des événements majeurs du calendrier artistique national et international.
La réussite de la Biennale de Lyon est d'abord le fruit d'une collaboration étroite de la ville de Lyon, de la région Rhône-Alpes et des services de l'Etat, en particulier ceux de la Délégation aux arts plastiques, de la Direction des musées de France et de la DRAC Rhône-Alpes. Elle est aussi le fruit des efforts de ces deux directeurs artistiques, Thierry Raspail et Thierry Prat, deux personnalités fortes et engagées de l'art contemporain qui réussissent, à chaque nouvelle édition, à nous surprendre et à nous faire partager un grand moment d'émotion artistique.
Ils ont confié le commissariat artistique de l'édition 2000 à Jean-Hubert Martin, dont nul n'ignore plus le rôle de précurseur et d'initiateur dans l'ouverture du monde de l'art à des acteurs et à des mondes jusque là méconnus. Il me suffira de rappeler à ce sujet sa grande exposition fondatrice de 1989, "Les Magiciens de la Terre" qui continue aujourd'hui encore à marquer profondément la scène artistique.
Jean-Hubert Martin nous convie, cette année, à un "Partage d'exotismes". Un thème qui lui est cher et qui traduit sa curiosité, sa fréquentation et sa connaissance des cultures et des artistes les plus originaux et les plus typiques.
Ce rassemblement d'autant de personnalités remarquables et de pratiques tellement différentes en un même lieu souligne l'un des enjeux essentiels de la création d'aujourd'hui: la transformation d'une vision temporelle de l'art contemporain en une vision spatiale. L'art vivant a été surtout, jusqu'à présent, confronté à l'histoire. Cette 5ème Biennale de Lyon le confronte à la géographie.
La nouveauté et l'intérêt de la carte planétaire de la création artistique qui nous est ainsi proposée tient à son décentrement et à la réciprocité des exotismes qui s'y révèlent. Chacun comprendra sans peine ce que peut avoir de stratégique et de politique au sens plein du terme, pareille remise en cause des réflexes ethno-centristes à l'heure de la mondialisation et en cette symbolique année 2000.
Cette exposition est exemplaire en ce qu'elle permet de mesurer, malgré une certaine hégémonie occidentale, que le nivellement culturel mondial est encore largement, et heureusement d'ailleurs, une fiction. Mais elle permet aussi, en même temps, de comprendre que l'art, et je reprends les mots de Jean-Hubert Martin, est " une suite d'appropriations, de contacts, d'influences et de métissages, n'en déplaise aux tenants de la pureté stylistique ou ethnique ". Et de ce point de vue, cette exposition renvoie à la réalité de la vie artistique de notre pays aujourd'hui au pays réel en quelque sorte, celui dont on ne parle pas assez, celui auquel je m'attache, personnellement, tout particulièrement. Je pense à ces nouveaux lieux souvent reconquis sur la ville, à ces ateliers, à ces fabriques qui réunissent des équipes artistiques issues d'histoires, de communautés, de pratiques différentes, de matériaux, supports et disciplines qu'elles croisent pour proposer de nouveaux objets d'art, souvent surprenant, forcément déroutant mais forcément vivant.
Nous devons, nous, puissances publiques, saisir ce mouvement, s'attacher à ces " nouveaux exotismes ", pour parler comme Jean-Hubert Martin. Là encore cette exposition est éclairante.
En se faisant ainsi plus anthropologique qu'esthétique, le regard porté sur la création vivante se libère de certains tabous. La dimension proprement visuelle de l'art, dont les références sont souvent à chercher davantage du côté de la publicité et du cinéma que de l'histoire de l'art, est pleinement réinvestie, sans craindre le spectaculaire parce qu'elle se donne la chance (et elle a raison) d'être accessible au public le plus large. Et si l'on ne retenait que cet angle là, cette exposition devrait aussi, je crois, faire date. Je tiens à souligner l'importance de cette démarche qui, selon les propres termes de Jean-Hubert Martin, défend " l'égale valeur des cultures, l'égale valeur des regards qu'elles se portent les unes aux autres, comme étranges et comme exotiques ". Proposer cette conception aujourd'hui, en ces temps de résurgences idéologiques malsaines, là où le révisionnisme persiste, n'est pas indifférent. Mais une réussite, comme la Biennale de Lyon, qui va faire partager ses exotismes à des milliers de visiteurs, au cur de cette magnifique construction de Tony Garnier, au cur d'une ville prestigieuse ne doit pas nous faire oublier que la création contemporaine est un combat permanent, et que nos responsabilités en ce domaine, qu'il s'agisse des artistes, des Ecoles d'Art, deCentres d'Art, des Galeries, des éditeurs et plus généralement de l'éducation artistique sont essentielles. Catherine Tasca et moi-même en sommes pleinement conscients et l'éducation artistique notamment est notre priorité.
Avant de conclure, et de rendre la parole aux uvres, je voudrais souligner que, sous l'effet de cette véritable mosaïque de points de vue ici constituée, grâce également au déploiement d'une scénographie intelligente, cette exposition réussit à rendre exotiques jusqu'aux travaux que nous connaissions le mieux. Mais n'est-ce pas la fonction la plus profonde de l'art que de réussir à faire naître l'étrange sous le familier, l'inconnu sous l'habituel ?
Il me reste à remercier tous les artistes qui ont accepté l'audacieuse entreprise qui leur était proposée : partager entre eux et nous faire partager leurs exotismes respectifs.
(Source http://www.culture.gouv.fr, le 27 juin 2000)