Texte intégral
Je voudrais, pour commencer, vous rappeler dans quel contexte se situe cette visite c'est-à-dire des perspectives de relance du processus de paix aussi bien sur le volet israélo-palestinien que sur le volet israélo-syro-libanais. Depuis l'arrivée au pouvoir en Israël de M. Barak la diplomatie française est toujours très attentive, très présente, très au contact des différents protagonistes. On pourrait dire plus que jamais et cela se traduit par ce que vous pouvez observer depuis quelques semaines ou quelques mois c'est-à-dire de très nombreux entretiens, des séances de travail à Paris, à New York, à Bruxelles, quand c'est au tour de l'Union européenne, et dans la région. Je ne reviens pas sur les entretiens qui ont eu lieu à Paris ces derniers jours, qui ont été très nombreux et que vous avez suivis. Je suis là pour la deuxième visite au Proche-Orient en quelques semaines, après avoir été en Israël et dans les territoires palestiniens au début du mois d'octobre. Je suis là pour une visite à Damas, à Beyrouth et au Caire. Naturellement cela m'amène à me concentrer cette fois-ci sur le volet israélo-syro-libanais. Je dis bien les trois termes puisque même si les problèmes sont distincts, ce sont des questions que nous estimons liées et qui ne connaîtront une solution durable et stable que si elles sont réglées ensemble. Les uns et les autres ont bien pris en compte justement ces interactions.
Je rappelle notre position dans cette affaire : La France n'est pas un protagoniste du conflit. La France n'est pas un négociateur ; elle n'a jamais entendu se substituer aux négociateurs qui ont à nouer le contact entre eux ou à le renouer, puis à avancer puis, un jour, à conclure et à prendre la responsabilité politique et historique des accords de paix qui donneront naissance à un Proche-Orient différent. Mais nous avons toutes les raisons de nous y intéresser de très près, pour des raisons historiques, politiques, culturelles, affectives. La France, dans toutes ses composantes, souhaite ardemment un Proche-Orient en paix et la politique étrangère française traduit cet intérêt, cette attente, ce désir d'être utile, ce qui veut dire qu'à travers nos contacts constants, nous regardons et nous recherchons ce que nous pouvons faire pour faciliter les choses. Je rappelle que l'on ne peut pas se substituer mais que l'on peut contribuer à créer un climat ou une atmosphère, à faire circuler des arguments, à amener les uns et les autres à se projeter dans l'avenir, avec des solutions et non pas être arrêté constamment par tel ou tel obstacle. C'est ce que nous faisons sur chaque point et c'est ce que nous faisons en ce moment sur la question israélo-syro-libanaise.
Pour prendre la question israélo-syrienne qui est l'objet principal de l'étape d'aujourd'hui, nous pensons que dès lors qu'Israël d'un côté et la Syrie de l'autre, estiment que c'est de leur intérêt de trouver une solution à cette question du Golan et bien nous estimons que les éventuels préalables devraient pouvoir être surmontés pour que la négociation s'engage, qu'elle ait lieu et qu'elle aboutisse, dans le respect naturellement des intérêts légitimes des uns et des autres. Israël comme la Syrie a des intérêts légitimes de sécurité. Israël comme la Syrie va devoir respecter son intégrité, sa souveraineté. Il y a des problèmes complexes mais pas insolubles comme l'affaire de l'eau par exemple. Nous souhaitons donc vivement que les Israéliens et les Syriens puissent aborder ces questions et aboutir à une solution. Mais je dois dire qu'aujourd'hui ce n'est pas encore le cas c'est-à-dire que les conditions d'une reprise des négociations directes entre eux ne sont pas encore réunies. La question du préalable n'est pas encore surmontée. Nous insistons pour qu'elle le soit, nous plaidons pour qu'elle le soit mais ce n'est pas encore le cas. Nous pensons que c'est leur intérêt d'y arriver. Cela a été dit il y a quelques jours à Paris par le président et par le Premier ministre. Je l'ai redit aujourd'hui au président Assad comme je le dirai tout à l'heure au ministre des Affaires étrangères. Pour le moment nous en sommes là. J'ajoute que cela été pour moi extrêmement utile dans cette analyse exacte de la situation d'aujourd'hui d'être reçu par le président Assad avec lequel j'ai passé 1h45 et qui m'a décrit exactement quelles étaient la position et les aspirations de la Syrie aujourd'hui.
Q - Justement, quelles sont-elles ?
R - Le président Assad m'a redit que la Syrie se considérait comme un pays engagé depuis longtemps dans le processus de paix, me rappelant les longs épisodes pendant lesquels ce n'était pas le fait de la Syrie si la recherche de la paix était bloquée dans la région. Il m'a redit que la Syrie souhaitait la paix, souhaitait une solution, n'avait jamais été hostile à des négociations, qu'elle l'avait montrée dans le passé et souhaitait que cette négociation puisse reprendre maintenant mais il n'y a toujours pas d'accord véritable entre les Israéliens et les Syriens sur la base à partir de laquelle cette négociation pourrait être reprise.
Q - Vous avez dit que la question du préalable n'est pas surmontée. Sur quoi bute t-elle ?
R - Elle bute sur l'interprétation à donner au point qui aurait été atteint il y a quelques années dans le cadre de négociations avec M. Rabin quand celui-ci était Premier ministre.
Q - C'est-à-dire sur le retrait du Golan ?
R - Le retrait du Golan n'est pas en soi le point précis du blocage. Le point précis du blocage est de savoir si M. Rabin s'était, oui ou non, engagé à évacuer le Golan jusqu'à ce que l'on appelle les frontières de 67. Est-ce que c'était un engagement ? Est-ce que c'était une hypothèse de travail ? Là-dessus les points de vue divergent. Est-ce que c'est un élément qui doit être préalable à la négociation ? Est-ce que c'est un élément à traiter dans le cours de la négociation ? Est-ce que c'est un élément qui doit être traité comme étant un aboutissement de la négociation ? Eh bien, aujourd'hui, je dois constater de nouveau que les Israéliens et les Syriens ne sont pas d'accord là-dessus.
Q - Avez-vous transmis au président Assad des idées françaises particulières pour essayer de trouver cette formule qui permettrait le redémarrage des négociations ?
R - J'ai redit au président Assad de la part des autorités françaises que nous pensions que dès lors que résoudre la question du Golan était de l'intérêt de la Syrie et d'Israël tout devait pouvoir être surmonté. Ce qui ne veut pas dire qu'en entrant dans une négociation l'un des deux pays abandonne quoi que se soit de ses positions. On peut commencer, naturellement, à négocier en gardant ses principes et ses positions. C'est d'ailleurs généralement le cas dans une négociation. Nous lui avons donc redit notre conviction sur cette orientation en général de la situation et d'autre part, nous avons avec les Syriens comme avec les autres protagonistes un certain nombre d'échanges qui portent sur des volets plus précis des éventuels accords futurs. Mais vous me permettrez à ce stade de ne pas en dire plus. Je vous dis simplement que ces échanges ont lieu et qu'ils sont intéressants, que les uns et les autres nous écoutent - je crois attentivement - de même que nous essayons avec nos partenaires syriens comme avec les autres de nous projeter dans un avenir où il y aurait des accords de paix au Proche-Orient pour voir comment tout fonctionnerait, serait stable, durable, garanti, ce qu'ils pourraient faire tous ensemble à partir de cette situation et ce qu'ils pourraient faire avec l'Europe notamment. On essaie de ne pas se limiter dans nos échanges au fait que tel ou tel point fait l'objet d'un blocage et ce qui empêcherait de parler des autres perspectives. Nous essayons à travers nos questions et nos suggestions et notre travail sur l'avenir à donner un peu de marge, un peu d'ampleur à cette réflexion pour que certains blocages puissent être surmontés.
Q - Est-ce que vous avez l'impression que le président Assad a envie de négocier aujourd'hui ?
R - Je crois le président Assad quand il dit que la Syrie est intéressée par la paix, qu'elle est intéressée par le processus de paix et qu'elle est intéressée par une solution, de même que nous croyons M. Barak quand il exprime sa volonté d'arriver à une solution. Ces solutions ne sont manifestement pas encore les mêmes. Mais cela est normal, les négociations n'ayant pas encore commencé et le point de départ des négociations ne faisant pas l'objet d'un consensus. Manifestement, il y a donc encore un gros travail et tous les pays amis de la paix au Proche-Orient et tous les pays qui sont bien placés pour être des facilitateurs ont encore du travail devant eux.
Q - Est-ce que ces pays qui facilitent la paix ou qui travaillent à la reprise des négociations peuvent imaginer ensemble une sorte d'issue à ces problèmes préalables, comme une sorte de garantie qui serait donnée aux Syriens selon laquelle les Israéliens ne vont pas reculer et je pense à la France et aux Etats-Unis ?
R - Je ferai deux observations : d'abord des deux pays que j'appelle facilitateurs qui essaient avec les moyens qu'ils ont de contribuer à cette relance travaillent en coordination et en complémentarité et non pas en concurrence. Cela est le premier point.
Le second point concerne les garanties. Elles peuvent s'imaginer dans le cadre d'accords. Elles ne sont pas préalables et ce sont les Israéliens et les Syriens, les Israéliens et les Libanais, les Israéliens et les Palestiniens qui ont au premier chef à faire ce travail et à définir les accords définitifs. A ce moment-là, nous verrons qu'elles sont les garanties dont ils ont besoin. C'est à eux de les formuler, de les demander et à ce moment-là ce sera aux Etats-Unis, aux pays d'Europe, à des organisations de savoir quelles garanties elles peuvent apporter sur certains de ces points. Je ne crois pas que nous en soyons encore là sur cette question israélo-syrienne. Le fait d'exprimer à l'avance le type de garantie qui pourrait être donné peut faciliter les choses, peut montrer que tel ou tel problème qui apparaîtrait insoluble pourrait peut-être être résolu. Voilà une façon de faciliter au sens propre du terme . On n'en est pas encore là mais on est tout à fait prêt.
Q - Quand vous dites qu'on l'on n'en est pas encore à la levée des préalables, progresse t-on ou la situation n'a pas changé depuis 1996 ?
R - Si vous comparez avec 1996, je ne suis pas sûr qu'on puisse dire, à ce stade, qu'il y ait un progrès évident par rapport à 1996. Si vous comparez par rapport à il y a six mois, il y a un progrès évident puisqu'on peut dire que de part et d'autre vous avez affaire à des responsables politiques qui cherchent une solution qui la cherchent vraiment même si elle n'est pas encore trouvée. Cela ne peut pas nous surprendre à ce stade. Peut-être qu'il y a quelques années, à un moment donné, on n'était pas loin en effet d'un accord mais il se trouve qu'il n'a pas eu lieu. Il reste donc à faire. Mais par rapport à il y a quelques mois, par rapport à la situation des deux dernières années et un peu plus nous sommes dans une meilleure position. Nous sommes collectivement, les parties sont dans une meilleure position.
Q - Avez-vous l'impression que le président Assad fait confiance à Ehud Barak comme il semblait faire confiance à M. Rabin ?
R - J'ai noté que peu de temps après l'arrivée au pouvoir de M. Barak, le président Assad, par différentes déclarations, a manifesté une certaine satisfaction, une certaine attente et il a montré qu'il croyait avec prudence - tout en prenant compte en priorité naturellement les intérêts syriens - qu'il croyait jusqu'à un certain point à la volonté de M. Barak de trouver une solution. Il y a donc eu une réaction positive on peut le dire du côté syrien après l'arrivée au pouvoir de M. Barak et là maintenant je note quelque chose qui n'est pas fondamentalement différent mais qui est plutôt une attente de clarification des positions à partir desquelles la négociation pourrait reprendre. Cela nous renvoie à cette discussion sur le point auquel la négociation était parvenue dans le passé à l'époque de M. Rabin.. Par rapport à cela il n'y a pas eu de progrès notable. Mais je trouve les Syriens tout à fait attentifs à ce que nous leur disons, à ce que disent les Américains, à ce que disent les autres européens. Je les trouve attentifs, je les trouve à la recherche d'une solution même si manifestement, elle n'est pas, encore tout à fait trouvée.
Q - Il n'y a pas d'urgence ou les Syriens ont-ils le sentiment qu'une opportunité se présente ?
R - Je ne l'ai pas noté.
Q - Avez-vous évoqué avec le président Assad une éventuelle évacuation du Liban Sud par les Israéliens ?
R - Il y a plusieurs choses différentes. D'abord je prends note comme tout le monde des annonces faites par M. Barak. M. Barak a exprimé sa détermination à procéder à cette évacuation. En général quand il en parle il y procédera de toute façon. Il est arrivé dans quelques cas qu'il dise que cela s'inscrivait dans un ensemble. Il n'en a pas fait une condition. Il me semble donc pouvoir résumer la position israélienne actuelle en disant qu'il doit procéder à cette évacuation pour une série de raisons que nous connaissons, qu'il préférerait que ce soit dans le cadre d'un accord plus général mais qu'ils le feront même s'il n'y a pas d'accord général. Voilà ce que dit M. Barak en public et ce qu'il dit dans les entretiens.
Nous pensons, nous répétons régulièrement, que la question du Golan et la question du Liban-Sud doivent être réglées en liaison. Il doit y avoir une approche générale et cohérente pour que les solutions soient vraiment durables, qu'elles apportent la paix dans ces régions mais personne ne peut contester aux Israéliens le droit de décider de retirer leur armée du Sud Liban. Cela est incontestable.. Cela dit, j'ajouterai que nous n'en sommes pas là. C'est une perspective qui concerne le mois de juin ou de juillet prochain. D'ici là, il peut se passer beaucoup de choses et des choses positives. On en a parlé avec le président Assad mais c'était plutôt une analyse sur la détermination des dirigeants israéliens à le faire hors du cadre d'un arrangement général. La conclusion était celle que je viens de résumer.
Q - Monsieur Le Ministre, vous avez passé 1h45 avec le président Assad comment l'avez-vous trouvé physiquement et intellectuellement, cela ayant une répercussion sur la situation intérieure syrienne.
R - Je n'ai aucun commentaire à faire sur ce qui concerne le pouvoir à l'intérieur. La durée a permis un entretien très dense comme vous le voyez sur les propos des sujets que j'évoque devant vous. Quant au président Assad je l'ai trouvé en forme.
Q - Monsieur Le Ministre, avez-vous le sentiment que cet entretien vous a permis de progresser dans la recherche d'une formule permettant la reprise des négociations.
R - Cet entretien a été extrêmement utile pour avoir une perception exacte et à jour de la position syrienne aujourd'hui. C'est un des éléments majeurs. Depuis très peu de jours les négociations israélo-palestiniennes ont recommencé. Nous savons qu'ils vont vers de grandes difficultés mais cela a recommencé alors que du côté israélo-syrien cela n'a pas recommencé. C'est très important pour nous comme pour tous les pays qui espèrent dans la paix de savoir exactement où en sont les Israéliens. Nous le savons bien, par nos contacts récents avec M. Barak. C'est tout à fait important symétriquement, de savoir exactement où en sont les autorités syriennes c'est-à-dire le président Assad. C'est ce que cette visite m'a permis de vérifier.
Q - Il y a un mois vous étiez en Israël. Là vous venez de rencontrer le président Assad, vous êtes plus optimiste ou plus pessimiste qu'il y a un mois ou deux. Les positions sont-elles insurmontables puisque vous avez les deux versions ?
R - Je ne pense pas que la différence de position sur les bases de laquelle la négociation israélo-syrienne sur le Golan devrait reprendre soit insurmontable mais elle n'est pas encore surmontée.
Q - Avez-vous fait des propositions de méthode ?
R - Je crois avoir déjà répondu. J'ai expliqué pourquoi nous pensions que cette question de préalable ne devrait pas être un facteur de blocage. Selon nous, si l'enjeu est vraiment de l'intérêt de la Syrie, Israël doit trouver une solution directement ou avec l'aide des uns et des autres et avec les idées mises en avant par les uns et par les autres. Nous souhaitons donc contribuer à un effort collectif pour que le préalable ne devienne pas un blocage. Parce qu'il me semble qu'il y a un moment important, une opportunité et que tout ce qui leur tient à coeur, et qui est légitime de part et d'autre, doit pouvoir être traité par la négociation. Il s'agit d'un commentaire pas d'une contribution générale sur les méthodes, ce n'est pas à nous de nous substituer.
Q - Vous nous aviez dit que vous alliez l'interroger sur la situation des Palestiniens au Liban. Qu'en pense t-il ?
R - C'est une question que je vais développer dans mon entretien avec M. Charaa. Je vous en parlerai après. Quand j'ai parlé de cette question je rappelle que j'ai dit que nous pensons que si on veut vraiment arriver à un Proche-Orient en paix il faut qu'aucun des accords envisagés ne se fassent au détriment d'un autre. Donc pas d'accord israélo-syrien au détriment des libanais, pas d'accord israélo-libanais au détriment des palestiniens, pas d'accord israélo-palestinien au détriment des libanais. Vous voyez les formules sont valables dans tous les sens. Cela montre la complexité, on la connaît tous et si on veut que les solutions tiennent il faut qu'elles se confortent et non pas qu'elles se contredisent.
Q - L'attitude de la France part de l'idée qu'il y aurait un intérêt convergent des deux parties à trouver une solution. Ne pourrait-on pas penser le contraire ?
R - Nous pensons qu'il y a un intérêt en Israël pour une solution c'est ce que M. Barak a exprimé dans sa campagne et il a été nettement élu. Nous avons des raisons logiques de penser qu'il y a une attente israélienne pour une solution d'un côté comme de l'autre. D'autre part nous pensons qu'il y a une volonté syrienne de récupérer le Golan, c'est aussi simple que cela sauf que même si ce commentaire général est simple il y eut très rarement des situations historiques où les choses paraissaient possibles ou la négociation paraissait concevable et ou un accord paraissait envisageable. Et bien nous pensons nous la France que nous sommes dans une de ces périodes et qu'ils ne devraient pas la laisser passer.
Q - Il y deux volets le Golan et le Sud Liban. Les Syriens pourraient-ils faire une concession en laissant les Libanais négocier directement ?
R - Disons que c'est une sous-question à l'intérieur de la question générale cela. Donc je n'en sais rien parce que nous n'en sommes pas là. Je dirai pour le moment que c'est une perspective qui concerne la fin du printemps prochain. On ne sait pas du tout dans quelle situation nous serons ni sur le volet israélo-palestinien ni sur les autres donc on ne sait pas quel sera le contexte. Nous y travaillons tous les jours.
Q - Le Golan passe avant le Sud Liban ?
R - Non il y a plusieurs choses en même temps et tout le travail des mécaniciens de la paix qui essaient de travailler essaient de faire en sorte que les choses s'ajustent. Il y a un processus israélo-israélien qui conduit à la volonté de se retirer du Sud-Liban fondé sur l'idée qu'Israël doit pouvoir assurer la sécurité de sa frontière nord par d'autres moyens que l'occupation du Sud Liban. Donc, il y a un processus. Il y a d'autre part la recherche qui n'a pas encore enclenché un processus de discussions sur le Golan donc cela c'est une question israélo-syrienne et quand ce sera enclenché alors là se posera la question de savoir qu'elle est la place de la négociation israélo-libanaise sur la question du Sud-Liban. Ce serait logique. On peut imaginer que ce soit complété d'ailleurs par une discussion syro-libanaise et on peut imaginer que ce soit complété par une discussion internationale lorsque la question des réfugiés palestiniens au Sud-Liban sera abordée parce qu'elle est trop lourde, elle est d'une grande ampleur et elle a des liens avec les autres pays qui ont des réfugiés palestiniens chez eux. Voilà comment les choses devraient se décortiquer et comment il faudrait essayer de les prendre les unes après les autres si tout allait bien mais on en est pas tout à fait encore là.
Nous avons une espérance quand même.
Q - Quand vous étiez à Jérusalem vous avez dit que vous aviez le pressentiment que les Syriens et les israéliens vont arriver à reprendre les négociations tout en précisant que c'est pas basé sur une équation mathématique. Est-ce que l'entretien d'aujourd'hui vous permet de continuer de penser qu'ils vont reprendre les négociations et dans un futur proche ?
R - Je voudrais rappeler ce que j'ai dit à l'époque si vous le permettez. A l'époque j'ai dit que ce serait assez facile pour les israéliens et les palestiniens de recommencer à négocier et que ce serait extrêmement difficile de conclure. J'ai rappelé à l'époque que, en sens inverse, ce serait extrêmement difficile pour les israéliens et les syriens de recommencer à négocier et qu'une fois la négociation reprise ce serait relativement moins difficile de conclure. Eh bien, je le pense toujours.
Q - Vous avez évoqué une certaine divergence. Engagement israélien à se retirer sur les lignes du 4 juin..
R - Précisément il reste une divergence entre une conception selon laquelle la décision de retrait jusqu'aux ligne de 67 est un point de départ à partir duquel le reste de la négociation a lieu et une autre conception selon laquelle la ligne exacte selon laquelle le retrait doit être opéré doit être discuté. Il faut que la négociation commence et on verra après.
Q - Quelles sont les attentes du président Assad par rapport à la France ?
R - Le président Assad m'a dit à plusieurs reprises qu'il était tout à fait favorable à un rôle accru de la France, de l'Europe, et qu'il regrettait que dans le passé d'ailleurs que tel ou tel autre protagoniste de cette affaire n'ait pas souhaité un rôle pour la France et pour l'Europe aussi grand que les Syriens le souhaitent.
Q - A t-il fait référence aux efforts américains et aux nôtres ?
R - Oui il m'a demandé comment nous nous situions par rapport aux efforts américains. J'ai rappelé que nous travaillons à cet égard et sur ce sujet en complémentarité avec les efforts américains nous considérons que nous faisons un travail de facilitation avec un même objectif commun même si sur tel ou tel point nous pouvons avoir des positions différentes ou des nuances dans l'expression. Nous travaillons quand même dans la même direction.
Q - A-t-il jugé le degré d'engagement américain suffisant ?
R - Il ne me l'a pas dit./.
((source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 15 novembre 1999)
Je rappelle notre position dans cette affaire : La France n'est pas un protagoniste du conflit. La France n'est pas un négociateur ; elle n'a jamais entendu se substituer aux négociateurs qui ont à nouer le contact entre eux ou à le renouer, puis à avancer puis, un jour, à conclure et à prendre la responsabilité politique et historique des accords de paix qui donneront naissance à un Proche-Orient différent. Mais nous avons toutes les raisons de nous y intéresser de très près, pour des raisons historiques, politiques, culturelles, affectives. La France, dans toutes ses composantes, souhaite ardemment un Proche-Orient en paix et la politique étrangère française traduit cet intérêt, cette attente, ce désir d'être utile, ce qui veut dire qu'à travers nos contacts constants, nous regardons et nous recherchons ce que nous pouvons faire pour faciliter les choses. Je rappelle que l'on ne peut pas se substituer mais que l'on peut contribuer à créer un climat ou une atmosphère, à faire circuler des arguments, à amener les uns et les autres à se projeter dans l'avenir, avec des solutions et non pas être arrêté constamment par tel ou tel obstacle. C'est ce que nous faisons sur chaque point et c'est ce que nous faisons en ce moment sur la question israélo-syro-libanaise.
Pour prendre la question israélo-syrienne qui est l'objet principal de l'étape d'aujourd'hui, nous pensons que dès lors qu'Israël d'un côté et la Syrie de l'autre, estiment que c'est de leur intérêt de trouver une solution à cette question du Golan et bien nous estimons que les éventuels préalables devraient pouvoir être surmontés pour que la négociation s'engage, qu'elle ait lieu et qu'elle aboutisse, dans le respect naturellement des intérêts légitimes des uns et des autres. Israël comme la Syrie a des intérêts légitimes de sécurité. Israël comme la Syrie va devoir respecter son intégrité, sa souveraineté. Il y a des problèmes complexes mais pas insolubles comme l'affaire de l'eau par exemple. Nous souhaitons donc vivement que les Israéliens et les Syriens puissent aborder ces questions et aboutir à une solution. Mais je dois dire qu'aujourd'hui ce n'est pas encore le cas c'est-à-dire que les conditions d'une reprise des négociations directes entre eux ne sont pas encore réunies. La question du préalable n'est pas encore surmontée. Nous insistons pour qu'elle le soit, nous plaidons pour qu'elle le soit mais ce n'est pas encore le cas. Nous pensons que c'est leur intérêt d'y arriver. Cela a été dit il y a quelques jours à Paris par le président et par le Premier ministre. Je l'ai redit aujourd'hui au président Assad comme je le dirai tout à l'heure au ministre des Affaires étrangères. Pour le moment nous en sommes là. J'ajoute que cela été pour moi extrêmement utile dans cette analyse exacte de la situation d'aujourd'hui d'être reçu par le président Assad avec lequel j'ai passé 1h45 et qui m'a décrit exactement quelles étaient la position et les aspirations de la Syrie aujourd'hui.
Q - Justement, quelles sont-elles ?
R - Le président Assad m'a redit que la Syrie se considérait comme un pays engagé depuis longtemps dans le processus de paix, me rappelant les longs épisodes pendant lesquels ce n'était pas le fait de la Syrie si la recherche de la paix était bloquée dans la région. Il m'a redit que la Syrie souhaitait la paix, souhaitait une solution, n'avait jamais été hostile à des négociations, qu'elle l'avait montrée dans le passé et souhaitait que cette négociation puisse reprendre maintenant mais il n'y a toujours pas d'accord véritable entre les Israéliens et les Syriens sur la base à partir de laquelle cette négociation pourrait être reprise.
Q - Vous avez dit que la question du préalable n'est pas surmontée. Sur quoi bute t-elle ?
R - Elle bute sur l'interprétation à donner au point qui aurait été atteint il y a quelques années dans le cadre de négociations avec M. Rabin quand celui-ci était Premier ministre.
Q - C'est-à-dire sur le retrait du Golan ?
R - Le retrait du Golan n'est pas en soi le point précis du blocage. Le point précis du blocage est de savoir si M. Rabin s'était, oui ou non, engagé à évacuer le Golan jusqu'à ce que l'on appelle les frontières de 67. Est-ce que c'était un engagement ? Est-ce que c'était une hypothèse de travail ? Là-dessus les points de vue divergent. Est-ce que c'est un élément qui doit être préalable à la négociation ? Est-ce que c'est un élément à traiter dans le cours de la négociation ? Est-ce que c'est un élément qui doit être traité comme étant un aboutissement de la négociation ? Eh bien, aujourd'hui, je dois constater de nouveau que les Israéliens et les Syriens ne sont pas d'accord là-dessus.
Q - Avez-vous transmis au président Assad des idées françaises particulières pour essayer de trouver cette formule qui permettrait le redémarrage des négociations ?
R - J'ai redit au président Assad de la part des autorités françaises que nous pensions que dès lors que résoudre la question du Golan était de l'intérêt de la Syrie et d'Israël tout devait pouvoir être surmonté. Ce qui ne veut pas dire qu'en entrant dans une négociation l'un des deux pays abandonne quoi que se soit de ses positions. On peut commencer, naturellement, à négocier en gardant ses principes et ses positions. C'est d'ailleurs généralement le cas dans une négociation. Nous lui avons donc redit notre conviction sur cette orientation en général de la situation et d'autre part, nous avons avec les Syriens comme avec les autres protagonistes un certain nombre d'échanges qui portent sur des volets plus précis des éventuels accords futurs. Mais vous me permettrez à ce stade de ne pas en dire plus. Je vous dis simplement que ces échanges ont lieu et qu'ils sont intéressants, que les uns et les autres nous écoutent - je crois attentivement - de même que nous essayons avec nos partenaires syriens comme avec les autres de nous projeter dans un avenir où il y aurait des accords de paix au Proche-Orient pour voir comment tout fonctionnerait, serait stable, durable, garanti, ce qu'ils pourraient faire tous ensemble à partir de cette situation et ce qu'ils pourraient faire avec l'Europe notamment. On essaie de ne pas se limiter dans nos échanges au fait que tel ou tel point fait l'objet d'un blocage et ce qui empêcherait de parler des autres perspectives. Nous essayons à travers nos questions et nos suggestions et notre travail sur l'avenir à donner un peu de marge, un peu d'ampleur à cette réflexion pour que certains blocages puissent être surmontés.
Q - Est-ce que vous avez l'impression que le président Assad a envie de négocier aujourd'hui ?
R - Je crois le président Assad quand il dit que la Syrie est intéressée par la paix, qu'elle est intéressée par le processus de paix et qu'elle est intéressée par une solution, de même que nous croyons M. Barak quand il exprime sa volonté d'arriver à une solution. Ces solutions ne sont manifestement pas encore les mêmes. Mais cela est normal, les négociations n'ayant pas encore commencé et le point de départ des négociations ne faisant pas l'objet d'un consensus. Manifestement, il y a donc encore un gros travail et tous les pays amis de la paix au Proche-Orient et tous les pays qui sont bien placés pour être des facilitateurs ont encore du travail devant eux.
Q - Est-ce que ces pays qui facilitent la paix ou qui travaillent à la reprise des négociations peuvent imaginer ensemble une sorte d'issue à ces problèmes préalables, comme une sorte de garantie qui serait donnée aux Syriens selon laquelle les Israéliens ne vont pas reculer et je pense à la France et aux Etats-Unis ?
R - Je ferai deux observations : d'abord des deux pays que j'appelle facilitateurs qui essaient avec les moyens qu'ils ont de contribuer à cette relance travaillent en coordination et en complémentarité et non pas en concurrence. Cela est le premier point.
Le second point concerne les garanties. Elles peuvent s'imaginer dans le cadre d'accords. Elles ne sont pas préalables et ce sont les Israéliens et les Syriens, les Israéliens et les Libanais, les Israéliens et les Palestiniens qui ont au premier chef à faire ce travail et à définir les accords définitifs. A ce moment-là, nous verrons qu'elles sont les garanties dont ils ont besoin. C'est à eux de les formuler, de les demander et à ce moment-là ce sera aux Etats-Unis, aux pays d'Europe, à des organisations de savoir quelles garanties elles peuvent apporter sur certains de ces points. Je ne crois pas que nous en soyons encore là sur cette question israélo-syrienne. Le fait d'exprimer à l'avance le type de garantie qui pourrait être donné peut faciliter les choses, peut montrer que tel ou tel problème qui apparaîtrait insoluble pourrait peut-être être résolu. Voilà une façon de faciliter au sens propre du terme . On n'en est pas encore là mais on est tout à fait prêt.
Q - Quand vous dites qu'on l'on n'en est pas encore à la levée des préalables, progresse t-on ou la situation n'a pas changé depuis 1996 ?
R - Si vous comparez avec 1996, je ne suis pas sûr qu'on puisse dire, à ce stade, qu'il y ait un progrès évident par rapport à 1996. Si vous comparez par rapport à il y a six mois, il y a un progrès évident puisqu'on peut dire que de part et d'autre vous avez affaire à des responsables politiques qui cherchent une solution qui la cherchent vraiment même si elle n'est pas encore trouvée. Cela ne peut pas nous surprendre à ce stade. Peut-être qu'il y a quelques années, à un moment donné, on n'était pas loin en effet d'un accord mais il se trouve qu'il n'a pas eu lieu. Il reste donc à faire. Mais par rapport à il y a quelques mois, par rapport à la situation des deux dernières années et un peu plus nous sommes dans une meilleure position. Nous sommes collectivement, les parties sont dans une meilleure position.
Q - Avez-vous l'impression que le président Assad fait confiance à Ehud Barak comme il semblait faire confiance à M. Rabin ?
R - J'ai noté que peu de temps après l'arrivée au pouvoir de M. Barak, le président Assad, par différentes déclarations, a manifesté une certaine satisfaction, une certaine attente et il a montré qu'il croyait avec prudence - tout en prenant compte en priorité naturellement les intérêts syriens - qu'il croyait jusqu'à un certain point à la volonté de M. Barak de trouver une solution. Il y a donc eu une réaction positive on peut le dire du côté syrien après l'arrivée au pouvoir de M. Barak et là maintenant je note quelque chose qui n'est pas fondamentalement différent mais qui est plutôt une attente de clarification des positions à partir desquelles la négociation pourrait reprendre. Cela nous renvoie à cette discussion sur le point auquel la négociation était parvenue dans le passé à l'époque de M. Rabin.. Par rapport à cela il n'y a pas eu de progrès notable. Mais je trouve les Syriens tout à fait attentifs à ce que nous leur disons, à ce que disent les Américains, à ce que disent les autres européens. Je les trouve attentifs, je les trouve à la recherche d'une solution même si manifestement, elle n'est pas, encore tout à fait trouvée.
Q - Il n'y a pas d'urgence ou les Syriens ont-ils le sentiment qu'une opportunité se présente ?
R - Je ne l'ai pas noté.
Q - Avez-vous évoqué avec le président Assad une éventuelle évacuation du Liban Sud par les Israéliens ?
R - Il y a plusieurs choses différentes. D'abord je prends note comme tout le monde des annonces faites par M. Barak. M. Barak a exprimé sa détermination à procéder à cette évacuation. En général quand il en parle il y procédera de toute façon. Il est arrivé dans quelques cas qu'il dise que cela s'inscrivait dans un ensemble. Il n'en a pas fait une condition. Il me semble donc pouvoir résumer la position israélienne actuelle en disant qu'il doit procéder à cette évacuation pour une série de raisons que nous connaissons, qu'il préférerait que ce soit dans le cadre d'un accord plus général mais qu'ils le feront même s'il n'y a pas d'accord général. Voilà ce que dit M. Barak en public et ce qu'il dit dans les entretiens.
Nous pensons, nous répétons régulièrement, que la question du Golan et la question du Liban-Sud doivent être réglées en liaison. Il doit y avoir une approche générale et cohérente pour que les solutions soient vraiment durables, qu'elles apportent la paix dans ces régions mais personne ne peut contester aux Israéliens le droit de décider de retirer leur armée du Sud Liban. Cela est incontestable.. Cela dit, j'ajouterai que nous n'en sommes pas là. C'est une perspective qui concerne le mois de juin ou de juillet prochain. D'ici là, il peut se passer beaucoup de choses et des choses positives. On en a parlé avec le président Assad mais c'était plutôt une analyse sur la détermination des dirigeants israéliens à le faire hors du cadre d'un arrangement général. La conclusion était celle que je viens de résumer.
Q - Monsieur Le Ministre, vous avez passé 1h45 avec le président Assad comment l'avez-vous trouvé physiquement et intellectuellement, cela ayant une répercussion sur la situation intérieure syrienne.
R - Je n'ai aucun commentaire à faire sur ce qui concerne le pouvoir à l'intérieur. La durée a permis un entretien très dense comme vous le voyez sur les propos des sujets que j'évoque devant vous. Quant au président Assad je l'ai trouvé en forme.
Q - Monsieur Le Ministre, avez-vous le sentiment que cet entretien vous a permis de progresser dans la recherche d'une formule permettant la reprise des négociations.
R - Cet entretien a été extrêmement utile pour avoir une perception exacte et à jour de la position syrienne aujourd'hui. C'est un des éléments majeurs. Depuis très peu de jours les négociations israélo-palestiniennes ont recommencé. Nous savons qu'ils vont vers de grandes difficultés mais cela a recommencé alors que du côté israélo-syrien cela n'a pas recommencé. C'est très important pour nous comme pour tous les pays qui espèrent dans la paix de savoir exactement où en sont les Israéliens. Nous le savons bien, par nos contacts récents avec M. Barak. C'est tout à fait important symétriquement, de savoir exactement où en sont les autorités syriennes c'est-à-dire le président Assad. C'est ce que cette visite m'a permis de vérifier.
Q - Il y a un mois vous étiez en Israël. Là vous venez de rencontrer le président Assad, vous êtes plus optimiste ou plus pessimiste qu'il y a un mois ou deux. Les positions sont-elles insurmontables puisque vous avez les deux versions ?
R - Je ne pense pas que la différence de position sur les bases de laquelle la négociation israélo-syrienne sur le Golan devrait reprendre soit insurmontable mais elle n'est pas encore surmontée.
Q - Avez-vous fait des propositions de méthode ?
R - Je crois avoir déjà répondu. J'ai expliqué pourquoi nous pensions que cette question de préalable ne devrait pas être un facteur de blocage. Selon nous, si l'enjeu est vraiment de l'intérêt de la Syrie, Israël doit trouver une solution directement ou avec l'aide des uns et des autres et avec les idées mises en avant par les uns et par les autres. Nous souhaitons donc contribuer à un effort collectif pour que le préalable ne devienne pas un blocage. Parce qu'il me semble qu'il y a un moment important, une opportunité et que tout ce qui leur tient à coeur, et qui est légitime de part et d'autre, doit pouvoir être traité par la négociation. Il s'agit d'un commentaire pas d'une contribution générale sur les méthodes, ce n'est pas à nous de nous substituer.
Q - Vous nous aviez dit que vous alliez l'interroger sur la situation des Palestiniens au Liban. Qu'en pense t-il ?
R - C'est une question que je vais développer dans mon entretien avec M. Charaa. Je vous en parlerai après. Quand j'ai parlé de cette question je rappelle que j'ai dit que nous pensons que si on veut vraiment arriver à un Proche-Orient en paix il faut qu'aucun des accords envisagés ne se fassent au détriment d'un autre. Donc pas d'accord israélo-syrien au détriment des libanais, pas d'accord israélo-libanais au détriment des palestiniens, pas d'accord israélo-palestinien au détriment des libanais. Vous voyez les formules sont valables dans tous les sens. Cela montre la complexité, on la connaît tous et si on veut que les solutions tiennent il faut qu'elles se confortent et non pas qu'elles se contredisent.
Q - L'attitude de la France part de l'idée qu'il y aurait un intérêt convergent des deux parties à trouver une solution. Ne pourrait-on pas penser le contraire ?
R - Nous pensons qu'il y a un intérêt en Israël pour une solution c'est ce que M. Barak a exprimé dans sa campagne et il a été nettement élu. Nous avons des raisons logiques de penser qu'il y a une attente israélienne pour une solution d'un côté comme de l'autre. D'autre part nous pensons qu'il y a une volonté syrienne de récupérer le Golan, c'est aussi simple que cela sauf que même si ce commentaire général est simple il y eut très rarement des situations historiques où les choses paraissaient possibles ou la négociation paraissait concevable et ou un accord paraissait envisageable. Et bien nous pensons nous la France que nous sommes dans une de ces périodes et qu'ils ne devraient pas la laisser passer.
Q - Il y deux volets le Golan et le Sud Liban. Les Syriens pourraient-ils faire une concession en laissant les Libanais négocier directement ?
R - Disons que c'est une sous-question à l'intérieur de la question générale cela. Donc je n'en sais rien parce que nous n'en sommes pas là. Je dirai pour le moment que c'est une perspective qui concerne la fin du printemps prochain. On ne sait pas du tout dans quelle situation nous serons ni sur le volet israélo-palestinien ni sur les autres donc on ne sait pas quel sera le contexte. Nous y travaillons tous les jours.
Q - Le Golan passe avant le Sud Liban ?
R - Non il y a plusieurs choses en même temps et tout le travail des mécaniciens de la paix qui essaient de travailler essaient de faire en sorte que les choses s'ajustent. Il y a un processus israélo-israélien qui conduit à la volonté de se retirer du Sud-Liban fondé sur l'idée qu'Israël doit pouvoir assurer la sécurité de sa frontière nord par d'autres moyens que l'occupation du Sud Liban. Donc, il y a un processus. Il y a d'autre part la recherche qui n'a pas encore enclenché un processus de discussions sur le Golan donc cela c'est une question israélo-syrienne et quand ce sera enclenché alors là se posera la question de savoir qu'elle est la place de la négociation israélo-libanaise sur la question du Sud-Liban. Ce serait logique. On peut imaginer que ce soit complété d'ailleurs par une discussion syro-libanaise et on peut imaginer que ce soit complété par une discussion internationale lorsque la question des réfugiés palestiniens au Sud-Liban sera abordée parce qu'elle est trop lourde, elle est d'une grande ampleur et elle a des liens avec les autres pays qui ont des réfugiés palestiniens chez eux. Voilà comment les choses devraient se décortiquer et comment il faudrait essayer de les prendre les unes après les autres si tout allait bien mais on en est pas tout à fait encore là.
Nous avons une espérance quand même.
Q - Quand vous étiez à Jérusalem vous avez dit que vous aviez le pressentiment que les Syriens et les israéliens vont arriver à reprendre les négociations tout en précisant que c'est pas basé sur une équation mathématique. Est-ce que l'entretien d'aujourd'hui vous permet de continuer de penser qu'ils vont reprendre les négociations et dans un futur proche ?
R - Je voudrais rappeler ce que j'ai dit à l'époque si vous le permettez. A l'époque j'ai dit que ce serait assez facile pour les israéliens et les palestiniens de recommencer à négocier et que ce serait extrêmement difficile de conclure. J'ai rappelé à l'époque que, en sens inverse, ce serait extrêmement difficile pour les israéliens et les syriens de recommencer à négocier et qu'une fois la négociation reprise ce serait relativement moins difficile de conclure. Eh bien, je le pense toujours.
Q - Vous avez évoqué une certaine divergence. Engagement israélien à se retirer sur les lignes du 4 juin..
R - Précisément il reste une divergence entre une conception selon laquelle la décision de retrait jusqu'aux ligne de 67 est un point de départ à partir duquel le reste de la négociation a lieu et une autre conception selon laquelle la ligne exacte selon laquelle le retrait doit être opéré doit être discuté. Il faut que la négociation commence et on verra après.
Q - Quelles sont les attentes du président Assad par rapport à la France ?
R - Le président Assad m'a dit à plusieurs reprises qu'il était tout à fait favorable à un rôle accru de la France, de l'Europe, et qu'il regrettait que dans le passé d'ailleurs que tel ou tel autre protagoniste de cette affaire n'ait pas souhaité un rôle pour la France et pour l'Europe aussi grand que les Syriens le souhaitent.
Q - A t-il fait référence aux efforts américains et aux nôtres ?
R - Oui il m'a demandé comment nous nous situions par rapport aux efforts américains. J'ai rappelé que nous travaillons à cet égard et sur ce sujet en complémentarité avec les efforts américains nous considérons que nous faisons un travail de facilitation avec un même objectif commun même si sur tel ou tel point nous pouvons avoir des positions différentes ou des nuances dans l'expression. Nous travaillons quand même dans la même direction.
Q - A-t-il jugé le degré d'engagement américain suffisant ?
R - Il ne me l'a pas dit./.
((source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 15 novembre 1999)