Texte intégral
Cher Monsieur Koschnick, Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs, Je suis très heureux de vous accueillir aujourd'hui à Paris, en présence de nombreux amis français. Enfin nombreux, n'exagérons rien, vous avez fait cela de façon relativement discrète. Je suppose que les embouteillages de Paris ont contribué à renforcer le caractère discret de cette réunion, en présence de vos amis français et allemands, que vous avez vous-même souhaité associer à cette réception.
Depuis longtemps déjà, nous voulions rendre hommage à votre action, menée au nom de l'Union européenne pendant près de deux ans à Mostar. Nous avions envisagé de vous conférer le plus ancien et le plus prestigieux des ordres de la République. Mais, je comprends qu'une tradition de la ville de Brême, somme toute une tradition très honorable, vous interdit en votre qualité d'ancien sénateur de la ville hanséatique, de recevoir une distinction honorifique étrangère. Cela eut été l'un de ces nombreux paradoxes que la vie nous donne le plaisir de savourer que de voir attribuer un ordre institué par Napoléon et que vous auriez pourtant reçu avec honneur.
Nous sommes tombés d'un excès dans l'autre et, nous référant à votre volonté, nous avons décidé de remplacer Napoléon par une subvention à un jardin d'enfants de Mostar. Je le dis en plaisantant mais, en réalité, ce choix que vous avez fait est très émouvant. Il s'agit d'une école qui a été inaugurée par vous-même le 16 décembre dernier, et qui devrait accueillir près de 250 enfants issus des deux communautés qui vivent à Mostar et qui sont pour la plupart orphelins de guerre. Je ne peux que saluer ce geste et me réjouir avec vous que ces enfants puissent trouver un cadre approprié pour leur prime jeunesse.
Vous êtes un homme de dialogue. Vous êtes aussi un homme de détermination et de courage. Vous avez été désigné par l'Union européenne à Mostar en 1994, et vous y êtes resté jusqu'en juillet 1996. Vous avez vécu ce qu'est Mostar, c'est-à-dire le symbole de la division des peuples en Bosnie-Herzégovine. Deux fois, vous avez été l'objet d'attentats. Vous y avez échappé de peu, mais vous avez surtout fait preuve d'un très grand sang froid. Vous vous êtes donné avec passion à cette tâche qui ressemble à celle de Sisyphe.
Quand je suis arrivé au ministère des Affaires étrangères, je m'étais dit que j'allais lancer une initiative pour la reconstruction du pont de Mostar. J'y ai vite renoncé, attendant des jours meilleurs où ce pont pourrait rejoindre des populations qui expriment vraiment le désir de vivre ensemble. Vous avez été à Mostar, ville divisée, ville tragique, ville, au fond, désolante pour l'Europe. Vous avez été à Mostar les témoins courageux et dignes des efforts de la communauté internationale et de la volonté de l'Union européenne. Vous avez été ainsi, une fois encore, le témoin de l'action commune de la France et de l'Allemagne en Europe.
La France et l'Allemagne sont désormais présentes ensemble dans la même brigade sur le terrain. Nous travaillons, Klaus Kinkel et moi, en pleine harmonie sur beaucoup de sujets, et en particulier sur la réforme de l'Union européenne que constitue la négociation sur la CIG. Je sais que vous êtes l'artisan et le promoteur du grand projet de service volontaire européen, et je ne peux que saluer cette idée nouvelle, originale, qui j'espère donnera des résultats efficaces.
Que cette brève cérémonie entre nous, cher Monsieur Koschnick, soit l'occasion de vous témoigner du respect et de l'admiration dont vous jouissez en France. Qu'elle soit pour moi l'occasion de vous remercier pour ce que vous avez fait au nom de l'Union européenne à Mostar, et qu'elle me permette en même temps de souhaiter que l'année 1997 et l'année 1998 soient des moments forts de travail qu'Européens, c'est-à-dire Français et Allemands, nous avons à accomplir. Nous sommes dans une période décisive, nous sommes dans un tournant de l'histoire européenne. Je suis heureux de constater que nos deux chefs d'Etat, que nos deux diplomaties, nos deux ministres des Affaires étrangères travaillent ensemble avec la même vue de cet avenir, et je souhaite que cela soit la suite, la prolongation de ce que vous avez fait vous-même au service de l'amitié franco-allemande et de l'Union européenne. Merci.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 16 octobre 2001)