Déclaration de M. Hervé de Charette, ministre des affaires étrangères, sur l'opération "Alba" et la mission de la force multinationale de protection en Albanie (assistance humanitaire, rétablissement de l'ordre et préparation des élections), Paris le 13 mai 1997.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Réunion ministérielle du Comité directeur de la force "Alba"-conférence de presse franco-italienne à Paris le 13 mai 1997

Texte intégral

Merci de nous avoir attendu car nous avons un peu de retard. Je voulais, avec mon collègue italien et avec Charles Millon vous rendre compte de la réunion qui s'est tenue ce matin du Comité directeur de la Force multinationale de protection en Albanie.

Comme vous le savez, nous avions pris l'initiative de cette réunion avant l'ouverture du Conseil des ministres de l'UEO, mais à cette occasion, nous avons dressé le bilan ensemble de l'opération "Alba" et de la contribution de la Force multinationale de protection dans sa mission telle qu'elle a été définie par la résolution 1101 du Conseil de sécurité, à savoir, faciliter l'acheminement rapide et sûr de l'assistance humanitaire et aider à créer un climat de sécurité nécessaire aux missions des organisations internationales en Albanie, y compris celles qui apportent une assistance humanitaire.

Cette réunion a permis aux ministres réunis de rappeler leur souhait d'un règlement pacifique de la situation en Albanie et de souligner l'importance que nous attachons à la tenue d'élections libres, justes et démocratiques à la date prévue, le 29 juin, et à cet effet, l'adoption rapide de la loi électorale.

Les ministres ont souligné que les responsabilités prises par les Européens, pour assister l'Albanie, s'inscrivent dans la perspective d'une action déterminée des Albanais eux-mêmes afin de permettre le retour à la stabilité, à la sécurité et à la vie démocratique, ceci passant d'abord par l'organisation des élections dont je viens de parler. C'est dans le cadre de l'effort d'ensemble engagé par les Nations unies, l'OSCE, le Conseil de l'Europe, l'Union européenne et l'UEO que se situe l'action de la Force multinationale pour aider à créer les conditions de cette stabilité et de cette sécurité.

Enfin, nous nous sommes réjouis que l'élément de police internationale qui vient d'être mis en place, dans le cadre de l'UEO, sur place, sous la responsabilité française comme vous le savez, va permettre d'apporter une contribution importante à la remise en ordre des institutions albanaises.

Pour toutes ces raisons, je crois que le comité directeur a pu constater que les choses se passaient bien, et aussi que c'est un exemple assez remarquable de ce que l'on pourrait appeler une coopération renforcée entre Européens en situation de crise. En tout cas, je voudrais dire, pour ce qui me concerne que c'est une démonstration de ce que, du point de vue de l'UEO, le concept de "nations-cadre" qui a été approuvé aujourd'hui par le conseil ministériel devrait permettre à l'avenir à l'UEO de réagir rapidement grâce à l'attribution de responsabilités spécifiques à un groupe de nations qui se déclarent prêtes à prendre toutes leurs responsabilités. C'est ce qui s'est passé, de faction, sur le terrain, dans des conditions dont ce matin, nous nous sommes félicités.

Q - Avez-vous l'intention de prolonger le mandat de la force internationale en Albanie actuellement, qui arrive à échéance fin juin ?
R - Non, la question n'est pas à l'ordre du jour. Pour l'instant, la question à l'ordre du jour est de remplir la mission et veiller à ce, que du côté des autorités albanaises et des forces politiques albanaises, les engagements pris pour faire en sorte qu'il y aient des élections le 29 juin, avec le concours de l'OSCE comme vous le savez, soit tenus.

Q - Croyez-vous que l'UEO soit une nouvelle partie du Traité d'Amsterdam ?
R - Je crois qu'il est prématuré que je fasse, maintenant le bilan de ce que nous avons fait ce matin, au cours de la session ministérielle de l'UEO. Nous ferons le point cet après-midi. Il y aura une conférence de presse. Je voudrais ce matin concentrer notre échange de vue sur les questions albanaises... qui paraissent vous laisser de glace.

Q - Regrettez-vous que l'UEO n'est pas été partie prenante dans cette affaire albanaise et peut-on imaginer que dans le cadre d'une prolongation de la mission en Albanie, l'UEO puisse prendre le relais opérationnel ? On n'arrête pas de lire dans les journaux et d'entendre à la radio que l'UEO a désormais les moyens opérationnels ?
R - Oui, je regrette que cette opération n'ait pas été menée dans le cadre de l'UEO. Ceci dit, je m'en console aussi, car, de facto, il en est bien ainsi. C'est bien un groupe de pays qui s'est constitué, sur la base du volontariat, de pays européens, qui ont manifesté leurs décisions et leurs disponibilités à intervenir avec des forces militaires dans le cadre d'un consensus général au sein de l'ensemble européen. Il est vrai qu'il eût été préférable, non pas militairement mais politiquement, sur le plan politique que ce soit l'occasion pour l'UEO, en tant qu'organisation, de se montrer elle-même. Mais je ne désespère pas et nous poursuivrons nos démarches à l'avenir.
Les choses peuvent-elles évoluer dans le cas précis de l'Albanie ? Je ne crois pas. C'est une opération de courte durée dont la vocation est d'être de courte durée et je crois que nous devons constater que, à la fois nous n'y sommes pas arrivés juridiquement mais que, de facto, en pratique, nous pouvons considérer que cette initiative a été approuvée par l'UEO.

Q - Est-ce que la conception de "nations-cadre" va donner plus de liberté d'intervention ? La règle de l'unanimité ne va-t-elle plus être observée pour envoyer des forces ?
R - Encore une fois, nous aurons l'occasion de parler cet après-midi de façon plus abondante et plus précise de ce qui a été discuté ce matin et de ce qui le sera cet après-midi. Mais, puisque je l'ai moi-même évoqué, je vais être forcé de répondre à votre question.
Il est hors de question d'imaginer qu'au sein de l'UEO, on ne respecterait pas la règle du consensus qui est notre règle de fonctionnement. Toutefois, je le répète, le concept de "nations-cadre" devrait, à l'avenir permettre sans aucun doute, en tout cas dans l'esprit de la France il en est bien ainsi, de faire avancer l'idée qui n'en est qu'à son début, qu'un groupe de nations pourrait être amené à conduire une intervention du type de celle que nous conduisons en Albanie, dans le cadre d'un consensus général, je le répète. Il ne s'agit donc pas de passer du consensus à je ne sais quelle majorité qui serait je crois tout à fait contraire à l'esprit de notre institution. Puisque nous arrivons à la fin de ce point de presse, il y a lieu, je crois, de se féliciter de l'intervention de la Force multinationale de protection. C'est la première fois qu'à l'occasion d'une crise en Europe, on obtient une décision européenne, une démarche d'un ensemble de pays européens, agissant au nom de leur conception des choses et aussi, agissant au nom de l'ensemble de leurs partenaires et voisins d'Europe. C'est donc bien une action des Européens. Je dois dire aussi pour le souligner que cette intervention s'est effectuée dans un délai rapide, démontrant ainsi, c'était la première fois que cela se voyait avec cette netteté, que l'Europe, si souvent critiquée était capable d'agir vite et efficacement.
Le bilan que dressait le ministre de la Défense italien à l'instant soulignait que, pour l'instant, les choses évoluent positivement mais bien sûr, nous sommes au début de cette opération, et pour en tirer un bilan complet, il faudra encore attendre le déroulement du calendrier et des échéances que j'ai rappelé.

Q - Par rapport aux conseillers de police qui vont être détachés en Albanie, quel est leur rôle exact car j'ai entendu dire que l'une de leurs fonctions serait de garantir des élections libres. La deuxième question concerne à la réélection du Secrétaire général de l'UEO.
R - Je me félicite de la réélection du Secrétaire général de l'UEO, mais nous en parlerons tout à l'heure, au cours du point de presse qui clôturera nos travaux. Sur le premier point, je vous précise de façon très claire que ce détachement qui est placé sous la responsabilité française n'a pas pour fonction de garantir le caractère libre des élections. Cette tâche est confiée
à l'OSCE à qui revient la mission de contrôle du processus électoral. Ce détachement a pour objet de conseiller les forces de police albanaises pour remettre en place, remettre debout, un dispositif dont vous savez qu'il avait été singulièrement secoué par la période de crise que nous venons de connaître en Albanie.

(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 21 septembre 2001)