Texte intégral
Interview à RTL le 16 décembre 1999.
Q - Demain les ministres des Affaires étrangères du G8, des huit pays les plus puissants du monde, vont se retrouver à Berlin, pour mettre la Russie en accusation en raison de la guerre en Tchétchénie ?
R - La Russie fait partie du G8, donc il y a le ministre russe dans cette réunion. A l'origine, les Allemands qui président le G8 jusqu'à la fin de l'année avaient souhaité une réunion pour que l'on réfléchisse ensemble à la prévention des crises, qui est un sujet important dont on peut parler là aussi bien qu'au Conseil de sécurité ou en Europe ou ailleurs. Compte tenu du contexte, il est clair que nous allons passer une partie de nos discussions sur la Tchétchénie et que nous allons redire en face, ensemble, dans le blanc des yeux à Igor Ivanov ce que nous disons avec beaucoup de netteté, en tout cas nous, les Français, depuis fin septembre...
Q - Prendez-vous des sanctions ?
R - Vous savez les sanctions c'est une facilité d'expression parce que, quand on regarde les relations avec la Russie, on s'aperçoit que l'essentiel des programmes de coopération qu'on a bâtis avec eux depuis ces dernières années, vise à faire évoluer la Russie dans le bon sens par rapport à nous. Cela répond à notre intérêt. Par exemple, on les aide à assurer une meilleure sécurité nucléaire, on les aide à développer un Etat de droit ou à faire fonctionner l'administration. Depuis Helsinki, où la France a été en pointe, il nous faut avoir une expression très ferme, parce que ce n'est pas parce qu'on n'a pas les moyens de pression immédiate, totale, pour les faire changer de politique qu'il faut renoncer à s'exprimer, au contraire. C'est d'autant plus clair sur les principes, sur la violation de tous les droits à laquelle ils se livrent en Tchétchénie et sur l'erreur tragique que cela représente, qu'il est d'autant plus net qu'il n'y a pas de moyens de force immédiats pour les contraindre. Alors, à Helsinki, nous avons décidé de passer au peigne fin tous les programmes européens pour ne garder à ce stade que ce qui est conforme à une sorte d'intérêt général des relations au sein de l'Europe et de suspendre les autres. Par exemple, il y a un programme TACIS, je ne vais pas rentrer dans le détail, mais on va garder dans TACIS que l'humanitaire et l'état de droit. Beaucoup d'Européens, et certains occidentaux ne cessent de dire : "attention, n'en faisons pas trop". Ne provoquons pas en Russie un engrenage ultra-nationaliste, dont il faut y aller avec beaucoup de précautions. Il faut savoir que la France est un peu seule à parler aussi nettement.
Q - Cet engrenage ultra-nationaliste n'est-il pas déjà là ? On a le sentiment, quand on lit les journaux russes, quand on voit la télévision russe et les sondages aussi, que finalement cette guerre en Tchétchénie sert à restaurer l'image d'une Russie forte face à un Occident qui l'aurait humiliée ?
R - Oui, c'est ainsi que les dix dernières années sont perçues par l'opinion russe. Mais cela ne veut pas dire qu'il y a une sorte de vague ultra-nationaliste qui parcourt la Russie. C'est un pays qui s'est senti humilié par la fin de l'URSS, par sa perte d'influence, par la séparation avec l'Ukraine, par la mise en tutelle de beaucoup de ses politiques, sur beaucoup de plans, mais on ne peut pas dire que cet esprit ait gagné toute la politique russe. Il y a une démocratie en Russie. Ils vont tenir des élections à la date prévue, la campagne électorale a eu lieu normalement, il y a donc des acquis ces dix dernières années.
Q - Avec une montée en puissance de M. Poutine, Premier ministre, qui a déclenché cette guerre en Tchétchénie ?
R - Oui, mais parce qu'il y a une sorte de concentration sur l'affaire du Caucase qui est un peu particulière. Pour les Russes, de façon unanime, c'est là le nid du terrorisme islamique qui est en relation avec le terrorisme islamique d'Asie centrale, avec un terrorisme islamique qui vient du Proche et du Moyen-Orient. Les liens sont attestés d'ailleurs dans les différents journaux, même français, vous voyez des témoignages sur certains combattants qui vont en Tchétchénie après être allé en Afghanistan, au Tadjikistan, cette partie-là n'est pas inventée par les Russes. Simplement ce que nous disons, c'est qu'il ne faut pas ramener tout le problème de la Tchétchénie à un problème de terrorisme et que la façon dont les Russes s'y prennent leur donnera peut-être une victoire militaire momentanée mais concentrera la haine, c'est donc une fuite en avant, un syndrome colonial. Ils ont tort, ils se trompent, ils n'y arriveront pas. Il faut qu'il reviennent à une solution politique.
Q - Vous dites "pas d'ultra-nationalisme", quand Boris Eltsine rappelle tout simplement que la Russie dispose d'une puissance nucléaire et qu'il faut la prendre au sérieux, les éditorialistes des journaux russes applaudissent ?
R - Oui, mais cela n'est pas l'ultra-nationalisme, c'est une réaction d'un grand pays qui n'a pas trop mal réagi en réalité à ce qui s'est passé pour lui depuis une dizaine d'années. Notre intérêt est de les accompagner aussi longtemps qu'il le faudra jusqu'à ce que la Russie soit devenue un grand pays moderne, démocratique - ils le sont aujourd'hui - mais pacifique, stable. C'est notre intérêt. C'est notre cap stratégique. Mais en même temps, il faut faire comprendre que cette façon dont ils gèrent ce problème particulier de la Tchétchénie dans le Caucase du Nord, est totalement contradictoire avec le cap général, avec leurs engagements et avec les valeurs qui devraient nous être communes. Il faut donc gérer cet exercice et je trouve que ce que la France a fait au sommet de l'OSCE à Istanbul, ce que nous avons fait juste avant Helsinki pour qu'il y ait une expression très ferme, très nette, très claire en dépit des réticences de nos partenaires, que je rappelais, et dont il faut tenir compte dans vos analyses, je crois que c'est quelque chose que les Russes finiront par entendre.
Q - La paix au Proche-Orient. Le Premier ministre israélien et le ministre des Affaires étrangères syrien sont réunis à Washington sous le parrainage de Bill Clinton. Cette fois-ci, est-ce la bonne occasion ?
R - Sur le volet israélo-syrien, oui. Ces dernières semaines nous avons constaté un certain blocage, qu'ils étaient arc-boutés, qu'ils n'arrivaient pas à se mettre d'accord sur le redémarrage des relations. Mais, en même temps - je l'avais dit après mes voyages en Israël et en Syrie - que dès qu'ils se seraient mis d'accord pour recommencer, ce qui m'apparaissait évident, qu'ils allaient réussir à le faire, ce serait moins compliqué ensuite à résoudre que le volet palestinien. Je le pense toujours. Je crois donc que c'est la bonne occasion, qu'ils soient arrivés après avoir mûrement réfléchi, notamment le président Assad, que finalement il y avait un peu plus d'intérêts à s'engager dans la paix qu'à rester dans le statu quo. Il y a toutes sortes de raisons qui ont dû jouer. Je crois que notre travail, à nous Français, de persuasion de part et d'autre, a joué son rôle aussi, même si ce sont les Américains qui avaient les clés centrales parce que ce sont eux qui étaient dépositaires de ce qu'on appelle les promesses de Rabin. Ils étaient donc un peu arbitres de cette controverse, l'essentiel est que ce déblocage ait eu lieu. Je crois maintenant qu'il est plus facile d'aboutir sur ce volet que sur l'autre, mais précisément notre vigilance sera de faire en sorte que le volet palestinien ne soit pas sacrifié dans l'affaire, parce que la paix au Proche-Orient à laquelle nous travaillons depuis si longtemps forme et doit former un tout.
Q - L'adhésion de la Turquie à l'Europe. Beaucoup de parlementaires de l'opposition réclament un débat au parlement et même un vote au parlement sur cette question ?
R - C'est une vieille affaire puisque l'Europe fait des promesses à la Turquie depuis 1963. C'est donc une question qui fait partie de la politique étrangère de l'Europe depuis donc trente-six ans et beaucoup d'occasions se sont présentées pour en débattre,, certainement il y en aura d'autres, notamment le jour où il faudra débattre hypothétiquement d'un traité d'adhésion. Il faut bien dire que ce qui a été décidé à Helsinki où les Européens se sont réconciliés sur une ligne de synthèse à propos de l'élargissement, alors que cela fait une dizaine d'années qu'ils s'affrontent, les maximalistes voulant élargir à toute vitesse, à tout le monde, quasiment sans négociations, en fixant les dates a priori, et sans réformes institutionnelles préalables. Et là aussi la France a réussi à faire remonter la pente à l'Europe jusqu'à ce qu'on arrive à une vision maîtrisée de l'élargissement. Nous avons décidé d'ouvrir les négociations avec douze candidats, de mener des négociations au cas par cas, et non pas artificiellement par groupes, de les mener le temps qu'il faudra, jusqu'à ce que tous les problèmes soient résolus et non pas de fixer des dates a priori pour qu'ils entrent, de nous fixer une date pour faire des réformes avant et cela, c'est une idée française qui a prévalu. Il fallait considérer qu'il fallait une réforme institutionnelle avant.
Q - La Turquie est-elle européenne ?
R - Il faut voir la situation dont nous avons hérité, nous, je veux dire le président depuis 1995, ce gouvernement depuis 1997. Voilà un pays à qui on fait des promesses européennes en lui organisant une vocation européenne, terme qui est dans les textes, depuis 1963. La Turquie a présenté sa candidature en 1987, la Communauté a répondu en 1989 sur la base d'une analyse de la Commission. Personne, à aucun moment, n'a contesté le caractère européen de la Turquie, disons en partie européen, parce que la Turquie, en fait, est à cheval sur l'Europe des Balkans et sur l'Asie, l'Asie mineure pour être plus précis. En revanche, la question de la démocratie a été posée. Il faut bien voir qu'à Helsinki, les Quinze ont fait preuve de responsabilité, ils se sont dit : "cela fait trente-six ans que, dans ce pays, les forces modernistes s'appuient sur cette promesse de l'Europe, sur cette porte entrebâillée et sous ceux qui sont, qui veulent moderniser la Turquie, qui veulent qu'on traite autrement les Droits de l'Homme, les minorités s'appuient là-dessus. On ne peut pas leur tirer le tapis sous les pieds, on n'a pas d'autre politique à leur proposer à la place, on n'a plus le droit de le faire, même si, au départ, c'était peut-être contestable en pure logique, mais en pure logique géographique. Ensuite on n'a pas décidé de faire entrer la Turquie, on a décidé de reconnaître que la Turquie était candidate, il y a désormais tout un travail pour que la Turquie respecte les critères de Copenhague qui définissent la démocratie à l'européenne. Après seulement la négociation commencera et la négociation sera d'une extraordinaire complexité. Vous voyez donc qu'on n'est pas à la veille de cet événement. En gros, les Quinze ont dit : "on va faire de cette aspiration de la Turquie, un levier pour faire évoluer la Turquie dans le meilleur sens possible".
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 20 décembre 1999).
Entretien avec les radios et télévisions françaises le 17 décembre 1999.
Q - M. Védrine quel message avez-vous adressé aujourd'hui à la Russie à propos de la Tchétchénie ?
R - Nous avons d'abord entendu le rapport du ministre norvégien M. Vollebaek qui est le Président en exercice de l'OSCE et qui avait enfin reçu des autorités russes l'autorisation de se rendre dans la région du Caucase du Nord, en Tchétchénie et autour. Il nous a fait un rapport qui malheureusement n'est pas encourageant, dans la mesure où il n'y a pas encore de réponse claire de la Russie aux questions qui ont été posées depuis des semaines et qui ont été reposées ce matin et que je peux rappeler. Nous leur avons demandé quand interviendra un cessez le feu, et en tout cas l'arrêt des bombardements sur les villes. Nous avons demandé quelles mesures concrètes précises seraient prises pour faciliter l'action humanitaire et l'acheminement d'aide aux réfugiés qui en ont besoin. Et surtout, nous avons redemandé ce que les Russes allaient faire pour revenir sur le terrain d'une solution politique, ce qui passe par un dialogue politique, ce qui suppose d'accepter des interlocuteurs tchétchènes. Cela, c'est le point central qui regroupe tous les autres, puisque le fond de notre condamnation et de notre critique, c'est que nous pensons qu'on ne peut pas régler une crise aussi large que cette crise de la Tchétchénie uniquement par des moyens militaires massifs, aveugles et indiscriminés, qu'en plus nous condamnons pour leur violence. Mais sur le plan de la solution politique cela ne peut pas marcher. L'ensemble de la question tchétchène ne peut pas être ramené à une seule question de terrorisme, même s'il y a aussi un terrorisme très important malheureusement. C'est cela le fond de ce qui est dit aux Russes. Depuis des semaines nous avons avec eux un partenariat sur le long terme , c'est un partenaire stratégique de l'Europe. Nous ne les condamnons pas pour le plaisir de les condamner, nous les condamnons parce qu'ils se trompent complètement, et que nous voulons par tous les moyens les convaincre de changer de politique.
Q - Quelle a été la réponse russe ?
R - Malheureusement je dois dire que je repars déçu de cette rencontre de Berlin, parce que M. Igor Ivanov, le ministre russe, n'a pas été en mesure de nous donner des réponses claires sur aucun de ces points.
Q - Quel regard portez-vous sur la gesticulation ou même l'intimidation nucléaire des Russes en ce moment ?
R -Je ne pense pas que l'on puisse parler d'intimidation ou de gesticulation, le Président russe a rappelé que la Russie restait une puissance nucléaire, mais nous le savons. C'est un fait, mais ce n'est pas pour cela qu'entre puissances nucléaires on ne peut pas se dire les quatre vérités quand il le faut.
Q - Est-ce qu'on sait que les élections de dimanche ont changé quelque chose à la donne ?
R -C'est ce que pense Joschka Fischer par exemple, le ministre allemand des affaires étrangères, qui présidait notre réunion dont il était l'hôte, et c'est ce qu'il a dit il y a quelques minutes. Je voudrais le croire, mais en tout cas, quelle que soit la cause d'un changement de la position russe, elle sera la bienvenue et nous l'attendons impatiemment, parce que vraiment c'est une erreur qui est tragique.
Q - Vous n'avez pas parlé de sanction contre la Russie. Est-ce que vous avez abandonné toute idée de prendre des sanctions ?
R -Les sanctions sont une question qui doit être traitée avec précaution et sérieux, parce que c'est un piège dans la plupart des cas, qui se retourne contre ceux qui y songent. Regardez la plupart de nos relations avec la Russie depuis des années sont fondées sur le fait d'aider la Russie à devenir un grand pays moderne qui puisse être un voisin paisible avec lequel on puisse coexister sans difficulté, et si on supprime ces coopérations dans la plupart des cas cela se retourne immédiatement contre nous. C'est pour cela que l'Union Européenne à Helsinki a été assez avisée de dire qu'elle allait suspendre certaines dispositions de l'accord de partenariat et de coopération avec la Russie, ce qui est un signal politique qui a été d'ailleurs très mal pris en Russie. Ce qui montre qu'il a été entendu, et ce qui montre qu'il a fait un certain effet, et qu'il ne faut pas le considérer comme négligeable. Mais nous n'allons suspendre que les programmes ou les actions qui n'ont pas un intérêt direct pour nous. Donc, il faut prendre les choses finement point par point. Mais les Russes n'ont pas du tout le sentiment qui ressort de votre question. Les Russes voient bien que ces dernières semaines, au fur et à mesure qu'ils s'enfoncent et qu'ils se fourvoient dans cette action militaire massive, et alors que nous attendons la réponse politique, ils voient très bien que la position européenne et occidentale se durcie, se précise, se concrétise, et pour eux le message d'Helsinki était considéré comme dur et fort. Ils n'ont pas encore répondu et ma conviction est qu'il y a des Russes, des responsables russes, qui, en dépit de leurs protestations très fortes sur le thème de la souveraineté, de l'intégrité territoriale que l'on ne conteste pas, entendent ce que nous disons et vont finir par en tenir compte. Mais le temps presse, le plus tôt sera le mieux et chaque jour de perdu est tragique pour la Tchétchénie.
Q - Quel a été le ton de la conversation. Est-ce que les Russes ont reproché, comme ils ont pu le faire ces derniers jours, à leurs partenaires, leur hypocrisie ou leurs larmes de crocodile ?
R -C'est un ton ferme dans les discussions avec les ministres des 8, ce sont des gens qui ont l'habitude de travailler ensemble et qui se disent les choses carrément, donc le ton de M. Ivanov dans les séances est un peu son ton public, c'est de dire vous vous trompez, votre analyse est incomplète votre information est erronée, ce que nous faisons, ce n'est pas ce que vous racontez, venez sur place, que les journalistes viennent et ils verront que c'est plus compliqué, et vous finirez par comprendre que vous vous êtes trompés, et nous on réexplique pourquoi nous pensons que ce sont eux qui se trompent. Voila, c'est dit sans concession, sans complaisance qui naîtrait du fait qu'on se parle et qu'on se rencontre beaucoup, mais en même temps nous avons à traiter des réalités et on voit bien aujourd'hui qu'il n'y a pas de recette miracle qui puisse faire changer l'ensemble de la Russie dans la minute par rapport à cette conviction qu'elle agit avec un bon droit en Tchétchénie. Cela nous oblige à parler plus nettement encore et plus fortement encore, et c'est cela que nous faisons depuis des jours et depuis des semaines, et je crois que ce message est très net. En tout cas les Européens vont finir par percer ce pseudo mur d'incompréhension et d'indifférence à nos protestations.
Q - Vous n'avez donc pas l'impression que la Russie s'éloigne diplomatiquement de l'Occident ?
R -Non, si on raisonne sur le long terme, je suis convaincu que l'orientation stratégique de la Russie reste la même, c'est-à-dire d'établir une coopération solide avec les Européens, avec l'Occident. Je n'ai pas de doute là-dessus et je suis convaincu que cela reste la ligne du Président Eltsine, du gouvernement de M. Poutine et des tous les candidats à la présidence pour l'élection de l'an prochain. Mais il y a une contradiction, il y a une contradiction forte entre cette orientation stratégique à long terme et la façon dont ils gèrent cette affaire tchétchène, et cette contradiction nous la portons devant eux en disant il faut choisir et c'est à vous de dire ce que vous voulez devenir, quel type de grand pays vous voulez devenir, et il faut savoir que vous ne pouvez pas être le grand partenaire que vous voulez devenir à n'importe quelles conditions et que nous sommes obligés de lier les deux. Or c'est quelque chose qu'ils n'apprécient pas du tout, à ce stade, mais je suis convaincu que nous nous retrouverons à un moment ou à un autre.
Merci.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 22 décembre 1999)
Q - Demain les ministres des Affaires étrangères du G8, des huit pays les plus puissants du monde, vont se retrouver à Berlin, pour mettre la Russie en accusation en raison de la guerre en Tchétchénie ?
R - La Russie fait partie du G8, donc il y a le ministre russe dans cette réunion. A l'origine, les Allemands qui président le G8 jusqu'à la fin de l'année avaient souhaité une réunion pour que l'on réfléchisse ensemble à la prévention des crises, qui est un sujet important dont on peut parler là aussi bien qu'au Conseil de sécurité ou en Europe ou ailleurs. Compte tenu du contexte, il est clair que nous allons passer une partie de nos discussions sur la Tchétchénie et que nous allons redire en face, ensemble, dans le blanc des yeux à Igor Ivanov ce que nous disons avec beaucoup de netteté, en tout cas nous, les Français, depuis fin septembre...
Q - Prendez-vous des sanctions ?
R - Vous savez les sanctions c'est une facilité d'expression parce que, quand on regarde les relations avec la Russie, on s'aperçoit que l'essentiel des programmes de coopération qu'on a bâtis avec eux depuis ces dernières années, vise à faire évoluer la Russie dans le bon sens par rapport à nous. Cela répond à notre intérêt. Par exemple, on les aide à assurer une meilleure sécurité nucléaire, on les aide à développer un Etat de droit ou à faire fonctionner l'administration. Depuis Helsinki, où la France a été en pointe, il nous faut avoir une expression très ferme, parce que ce n'est pas parce qu'on n'a pas les moyens de pression immédiate, totale, pour les faire changer de politique qu'il faut renoncer à s'exprimer, au contraire. C'est d'autant plus clair sur les principes, sur la violation de tous les droits à laquelle ils se livrent en Tchétchénie et sur l'erreur tragique que cela représente, qu'il est d'autant plus net qu'il n'y a pas de moyens de force immédiats pour les contraindre. Alors, à Helsinki, nous avons décidé de passer au peigne fin tous les programmes européens pour ne garder à ce stade que ce qui est conforme à une sorte d'intérêt général des relations au sein de l'Europe et de suspendre les autres. Par exemple, il y a un programme TACIS, je ne vais pas rentrer dans le détail, mais on va garder dans TACIS que l'humanitaire et l'état de droit. Beaucoup d'Européens, et certains occidentaux ne cessent de dire : "attention, n'en faisons pas trop". Ne provoquons pas en Russie un engrenage ultra-nationaliste, dont il faut y aller avec beaucoup de précautions. Il faut savoir que la France est un peu seule à parler aussi nettement.
Q - Cet engrenage ultra-nationaliste n'est-il pas déjà là ? On a le sentiment, quand on lit les journaux russes, quand on voit la télévision russe et les sondages aussi, que finalement cette guerre en Tchétchénie sert à restaurer l'image d'une Russie forte face à un Occident qui l'aurait humiliée ?
R - Oui, c'est ainsi que les dix dernières années sont perçues par l'opinion russe. Mais cela ne veut pas dire qu'il y a une sorte de vague ultra-nationaliste qui parcourt la Russie. C'est un pays qui s'est senti humilié par la fin de l'URSS, par sa perte d'influence, par la séparation avec l'Ukraine, par la mise en tutelle de beaucoup de ses politiques, sur beaucoup de plans, mais on ne peut pas dire que cet esprit ait gagné toute la politique russe. Il y a une démocratie en Russie. Ils vont tenir des élections à la date prévue, la campagne électorale a eu lieu normalement, il y a donc des acquis ces dix dernières années.
Q - Avec une montée en puissance de M. Poutine, Premier ministre, qui a déclenché cette guerre en Tchétchénie ?
R - Oui, mais parce qu'il y a une sorte de concentration sur l'affaire du Caucase qui est un peu particulière. Pour les Russes, de façon unanime, c'est là le nid du terrorisme islamique qui est en relation avec le terrorisme islamique d'Asie centrale, avec un terrorisme islamique qui vient du Proche et du Moyen-Orient. Les liens sont attestés d'ailleurs dans les différents journaux, même français, vous voyez des témoignages sur certains combattants qui vont en Tchétchénie après être allé en Afghanistan, au Tadjikistan, cette partie-là n'est pas inventée par les Russes. Simplement ce que nous disons, c'est qu'il ne faut pas ramener tout le problème de la Tchétchénie à un problème de terrorisme et que la façon dont les Russes s'y prennent leur donnera peut-être une victoire militaire momentanée mais concentrera la haine, c'est donc une fuite en avant, un syndrome colonial. Ils ont tort, ils se trompent, ils n'y arriveront pas. Il faut qu'il reviennent à une solution politique.
Q - Vous dites "pas d'ultra-nationalisme", quand Boris Eltsine rappelle tout simplement que la Russie dispose d'une puissance nucléaire et qu'il faut la prendre au sérieux, les éditorialistes des journaux russes applaudissent ?
R - Oui, mais cela n'est pas l'ultra-nationalisme, c'est une réaction d'un grand pays qui n'a pas trop mal réagi en réalité à ce qui s'est passé pour lui depuis une dizaine d'années. Notre intérêt est de les accompagner aussi longtemps qu'il le faudra jusqu'à ce que la Russie soit devenue un grand pays moderne, démocratique - ils le sont aujourd'hui - mais pacifique, stable. C'est notre intérêt. C'est notre cap stratégique. Mais en même temps, il faut faire comprendre que cette façon dont ils gèrent ce problème particulier de la Tchétchénie dans le Caucase du Nord, est totalement contradictoire avec le cap général, avec leurs engagements et avec les valeurs qui devraient nous être communes. Il faut donc gérer cet exercice et je trouve que ce que la France a fait au sommet de l'OSCE à Istanbul, ce que nous avons fait juste avant Helsinki pour qu'il y ait une expression très ferme, très nette, très claire en dépit des réticences de nos partenaires, que je rappelais, et dont il faut tenir compte dans vos analyses, je crois que c'est quelque chose que les Russes finiront par entendre.
Q - La paix au Proche-Orient. Le Premier ministre israélien et le ministre des Affaires étrangères syrien sont réunis à Washington sous le parrainage de Bill Clinton. Cette fois-ci, est-ce la bonne occasion ?
R - Sur le volet israélo-syrien, oui. Ces dernières semaines nous avons constaté un certain blocage, qu'ils étaient arc-boutés, qu'ils n'arrivaient pas à se mettre d'accord sur le redémarrage des relations. Mais, en même temps - je l'avais dit après mes voyages en Israël et en Syrie - que dès qu'ils se seraient mis d'accord pour recommencer, ce qui m'apparaissait évident, qu'ils allaient réussir à le faire, ce serait moins compliqué ensuite à résoudre que le volet palestinien. Je le pense toujours. Je crois donc que c'est la bonne occasion, qu'ils soient arrivés après avoir mûrement réfléchi, notamment le président Assad, que finalement il y avait un peu plus d'intérêts à s'engager dans la paix qu'à rester dans le statu quo. Il y a toutes sortes de raisons qui ont dû jouer. Je crois que notre travail, à nous Français, de persuasion de part et d'autre, a joué son rôle aussi, même si ce sont les Américains qui avaient les clés centrales parce que ce sont eux qui étaient dépositaires de ce qu'on appelle les promesses de Rabin. Ils étaient donc un peu arbitres de cette controverse, l'essentiel est que ce déblocage ait eu lieu. Je crois maintenant qu'il est plus facile d'aboutir sur ce volet que sur l'autre, mais précisément notre vigilance sera de faire en sorte que le volet palestinien ne soit pas sacrifié dans l'affaire, parce que la paix au Proche-Orient à laquelle nous travaillons depuis si longtemps forme et doit former un tout.
Q - L'adhésion de la Turquie à l'Europe. Beaucoup de parlementaires de l'opposition réclament un débat au parlement et même un vote au parlement sur cette question ?
R - C'est une vieille affaire puisque l'Europe fait des promesses à la Turquie depuis 1963. C'est donc une question qui fait partie de la politique étrangère de l'Europe depuis donc trente-six ans et beaucoup d'occasions se sont présentées pour en débattre,, certainement il y en aura d'autres, notamment le jour où il faudra débattre hypothétiquement d'un traité d'adhésion. Il faut bien dire que ce qui a été décidé à Helsinki où les Européens se sont réconciliés sur une ligne de synthèse à propos de l'élargissement, alors que cela fait une dizaine d'années qu'ils s'affrontent, les maximalistes voulant élargir à toute vitesse, à tout le monde, quasiment sans négociations, en fixant les dates a priori, et sans réformes institutionnelles préalables. Et là aussi la France a réussi à faire remonter la pente à l'Europe jusqu'à ce qu'on arrive à une vision maîtrisée de l'élargissement. Nous avons décidé d'ouvrir les négociations avec douze candidats, de mener des négociations au cas par cas, et non pas artificiellement par groupes, de les mener le temps qu'il faudra, jusqu'à ce que tous les problèmes soient résolus et non pas de fixer des dates a priori pour qu'ils entrent, de nous fixer une date pour faire des réformes avant et cela, c'est une idée française qui a prévalu. Il fallait considérer qu'il fallait une réforme institutionnelle avant.
Q - La Turquie est-elle européenne ?
R - Il faut voir la situation dont nous avons hérité, nous, je veux dire le président depuis 1995, ce gouvernement depuis 1997. Voilà un pays à qui on fait des promesses européennes en lui organisant une vocation européenne, terme qui est dans les textes, depuis 1963. La Turquie a présenté sa candidature en 1987, la Communauté a répondu en 1989 sur la base d'une analyse de la Commission. Personne, à aucun moment, n'a contesté le caractère européen de la Turquie, disons en partie européen, parce que la Turquie, en fait, est à cheval sur l'Europe des Balkans et sur l'Asie, l'Asie mineure pour être plus précis. En revanche, la question de la démocratie a été posée. Il faut bien voir qu'à Helsinki, les Quinze ont fait preuve de responsabilité, ils se sont dit : "cela fait trente-six ans que, dans ce pays, les forces modernistes s'appuient sur cette promesse de l'Europe, sur cette porte entrebâillée et sous ceux qui sont, qui veulent moderniser la Turquie, qui veulent qu'on traite autrement les Droits de l'Homme, les minorités s'appuient là-dessus. On ne peut pas leur tirer le tapis sous les pieds, on n'a pas d'autre politique à leur proposer à la place, on n'a plus le droit de le faire, même si, au départ, c'était peut-être contestable en pure logique, mais en pure logique géographique. Ensuite on n'a pas décidé de faire entrer la Turquie, on a décidé de reconnaître que la Turquie était candidate, il y a désormais tout un travail pour que la Turquie respecte les critères de Copenhague qui définissent la démocratie à l'européenne. Après seulement la négociation commencera et la négociation sera d'une extraordinaire complexité. Vous voyez donc qu'on n'est pas à la veille de cet événement. En gros, les Quinze ont dit : "on va faire de cette aspiration de la Turquie, un levier pour faire évoluer la Turquie dans le meilleur sens possible".
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 20 décembre 1999).
Entretien avec les radios et télévisions françaises le 17 décembre 1999.
Q - M. Védrine quel message avez-vous adressé aujourd'hui à la Russie à propos de la Tchétchénie ?
R - Nous avons d'abord entendu le rapport du ministre norvégien M. Vollebaek qui est le Président en exercice de l'OSCE et qui avait enfin reçu des autorités russes l'autorisation de se rendre dans la région du Caucase du Nord, en Tchétchénie et autour. Il nous a fait un rapport qui malheureusement n'est pas encourageant, dans la mesure où il n'y a pas encore de réponse claire de la Russie aux questions qui ont été posées depuis des semaines et qui ont été reposées ce matin et que je peux rappeler. Nous leur avons demandé quand interviendra un cessez le feu, et en tout cas l'arrêt des bombardements sur les villes. Nous avons demandé quelles mesures concrètes précises seraient prises pour faciliter l'action humanitaire et l'acheminement d'aide aux réfugiés qui en ont besoin. Et surtout, nous avons redemandé ce que les Russes allaient faire pour revenir sur le terrain d'une solution politique, ce qui passe par un dialogue politique, ce qui suppose d'accepter des interlocuteurs tchétchènes. Cela, c'est le point central qui regroupe tous les autres, puisque le fond de notre condamnation et de notre critique, c'est que nous pensons qu'on ne peut pas régler une crise aussi large que cette crise de la Tchétchénie uniquement par des moyens militaires massifs, aveugles et indiscriminés, qu'en plus nous condamnons pour leur violence. Mais sur le plan de la solution politique cela ne peut pas marcher. L'ensemble de la question tchétchène ne peut pas être ramené à une seule question de terrorisme, même s'il y a aussi un terrorisme très important malheureusement. C'est cela le fond de ce qui est dit aux Russes. Depuis des semaines nous avons avec eux un partenariat sur le long terme , c'est un partenaire stratégique de l'Europe. Nous ne les condamnons pas pour le plaisir de les condamner, nous les condamnons parce qu'ils se trompent complètement, et que nous voulons par tous les moyens les convaincre de changer de politique.
Q - Quelle a été la réponse russe ?
R - Malheureusement je dois dire que je repars déçu de cette rencontre de Berlin, parce que M. Igor Ivanov, le ministre russe, n'a pas été en mesure de nous donner des réponses claires sur aucun de ces points.
Q - Quel regard portez-vous sur la gesticulation ou même l'intimidation nucléaire des Russes en ce moment ?
R -Je ne pense pas que l'on puisse parler d'intimidation ou de gesticulation, le Président russe a rappelé que la Russie restait une puissance nucléaire, mais nous le savons. C'est un fait, mais ce n'est pas pour cela qu'entre puissances nucléaires on ne peut pas se dire les quatre vérités quand il le faut.
Q - Est-ce qu'on sait que les élections de dimanche ont changé quelque chose à la donne ?
R -C'est ce que pense Joschka Fischer par exemple, le ministre allemand des affaires étrangères, qui présidait notre réunion dont il était l'hôte, et c'est ce qu'il a dit il y a quelques minutes. Je voudrais le croire, mais en tout cas, quelle que soit la cause d'un changement de la position russe, elle sera la bienvenue et nous l'attendons impatiemment, parce que vraiment c'est une erreur qui est tragique.
Q - Vous n'avez pas parlé de sanction contre la Russie. Est-ce que vous avez abandonné toute idée de prendre des sanctions ?
R -Les sanctions sont une question qui doit être traitée avec précaution et sérieux, parce que c'est un piège dans la plupart des cas, qui se retourne contre ceux qui y songent. Regardez la plupart de nos relations avec la Russie depuis des années sont fondées sur le fait d'aider la Russie à devenir un grand pays moderne qui puisse être un voisin paisible avec lequel on puisse coexister sans difficulté, et si on supprime ces coopérations dans la plupart des cas cela se retourne immédiatement contre nous. C'est pour cela que l'Union Européenne à Helsinki a été assez avisée de dire qu'elle allait suspendre certaines dispositions de l'accord de partenariat et de coopération avec la Russie, ce qui est un signal politique qui a été d'ailleurs très mal pris en Russie. Ce qui montre qu'il a été entendu, et ce qui montre qu'il a fait un certain effet, et qu'il ne faut pas le considérer comme négligeable. Mais nous n'allons suspendre que les programmes ou les actions qui n'ont pas un intérêt direct pour nous. Donc, il faut prendre les choses finement point par point. Mais les Russes n'ont pas du tout le sentiment qui ressort de votre question. Les Russes voient bien que ces dernières semaines, au fur et à mesure qu'ils s'enfoncent et qu'ils se fourvoient dans cette action militaire massive, et alors que nous attendons la réponse politique, ils voient très bien que la position européenne et occidentale se durcie, se précise, se concrétise, et pour eux le message d'Helsinki était considéré comme dur et fort. Ils n'ont pas encore répondu et ma conviction est qu'il y a des Russes, des responsables russes, qui, en dépit de leurs protestations très fortes sur le thème de la souveraineté, de l'intégrité territoriale que l'on ne conteste pas, entendent ce que nous disons et vont finir par en tenir compte. Mais le temps presse, le plus tôt sera le mieux et chaque jour de perdu est tragique pour la Tchétchénie.
Q - Quel a été le ton de la conversation. Est-ce que les Russes ont reproché, comme ils ont pu le faire ces derniers jours, à leurs partenaires, leur hypocrisie ou leurs larmes de crocodile ?
R -C'est un ton ferme dans les discussions avec les ministres des 8, ce sont des gens qui ont l'habitude de travailler ensemble et qui se disent les choses carrément, donc le ton de M. Ivanov dans les séances est un peu son ton public, c'est de dire vous vous trompez, votre analyse est incomplète votre information est erronée, ce que nous faisons, ce n'est pas ce que vous racontez, venez sur place, que les journalistes viennent et ils verront que c'est plus compliqué, et vous finirez par comprendre que vous vous êtes trompés, et nous on réexplique pourquoi nous pensons que ce sont eux qui se trompent. Voila, c'est dit sans concession, sans complaisance qui naîtrait du fait qu'on se parle et qu'on se rencontre beaucoup, mais en même temps nous avons à traiter des réalités et on voit bien aujourd'hui qu'il n'y a pas de recette miracle qui puisse faire changer l'ensemble de la Russie dans la minute par rapport à cette conviction qu'elle agit avec un bon droit en Tchétchénie. Cela nous oblige à parler plus nettement encore et plus fortement encore, et c'est cela que nous faisons depuis des jours et depuis des semaines, et je crois que ce message est très net. En tout cas les Européens vont finir par percer ce pseudo mur d'incompréhension et d'indifférence à nos protestations.
Q - Vous n'avez donc pas l'impression que la Russie s'éloigne diplomatiquement de l'Occident ?
R -Non, si on raisonne sur le long terme, je suis convaincu que l'orientation stratégique de la Russie reste la même, c'est-à-dire d'établir une coopération solide avec les Européens, avec l'Occident. Je n'ai pas de doute là-dessus et je suis convaincu que cela reste la ligne du Président Eltsine, du gouvernement de M. Poutine et des tous les candidats à la présidence pour l'élection de l'an prochain. Mais il y a une contradiction, il y a une contradiction forte entre cette orientation stratégique à long terme et la façon dont ils gèrent cette affaire tchétchène, et cette contradiction nous la portons devant eux en disant il faut choisir et c'est à vous de dire ce que vous voulez devenir, quel type de grand pays vous voulez devenir, et il faut savoir que vous ne pouvez pas être le grand partenaire que vous voulez devenir à n'importe quelles conditions et que nous sommes obligés de lier les deux. Or c'est quelque chose qu'ils n'apprécient pas du tout, à ce stade, mais je suis convaincu que nous nous retrouverons à un moment ou à un autre.
Merci.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 22 décembre 1999)