Texte intégral
Madame la Ministre,
Monsieur le Ministre,
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Mesdames, Messieurs,
Aujourd'hui s'est ouverte à Rennes la 5ème rencontre régionale du Débat National sur les Energies, initié par le gouvernement et dont le Premier Ministre m'a confié la charge. Je remercie ma collègue Roselyne Bachelot de sa présence, de ce qu'elle vous a dit ce matin et de son implication dans ce débat.
Les quatre premières rencontres ont clairement mis en lumière les enjeux : la croissance continue de notre consommation d'énergie n'est pas durable. Pour des raisons environnementales évidentes et fondamentales :
- aujourd'hui ce sont les catastrophes écologiques dues au transport de pétrole et qui ont si durement frappé les belles côtes de cette région. Elles doivent être absolument maîtrisées. C'est la raison pour laquelle le gouvernement a veillé dans ce domaine à accélérer au niveau européen le contrôle des navires à risques
- déjà ce sont les émissions à effet de serre qui augmentent dans des proportions vertigineuses et dont les conséquences sur le changement climatique et le réchauffement de la planète sont un désastre programmé si nous ne faisons rien.
- mais aussi pour des raisons économiques, le constat est là : les réserves d'hydrocarbures s'épuisent, la demande des pays en voie de développement va croissant.
Il semble donc qu'un premier consensus apparaisse d'ores et déjà à l'issue des premières rencontres. La prise de conscience qu'il nous faut décupler nos efforts ainsi que notre créativité pour maîtriser nos consommations d'énergie. C'est pour explorer toutes les voies possibles que nous nous trouvons à Rennes aujourd'hui. Pourquoi Rennes, pourquoi la Bretagne sous la double thématique choisie pour ces deux journées : les énergies renouvelables, l'énergie nucléaire ?
En premier lieu, parce que la Bretagne symbolise la dynamique nouvelle qui s'est créée autour des énergies renouvelables depuis quelques temps en France. En attestent les cinq parcs éoliens qui fonctionnent déjà notamment les sites Goulien et de Plouarzel et les cinquante projets qui sont actuellement en cours de réalisation. J'en veux également pour preuve le développement des chaufferies au bois, nombreuses dans cette région, ainsi que les trois projets de valorisation des déchets agricoles. Enfin nous n'oublions pas le potentiel formidable que les côtes bretonnes offrent pour un développement futur de l'éolien offshore et éventuellement, même si ces technologies sont encore futuristes, l'exploitation de la force des courants marins.
Demain, vous allez traiter de l'énergie nucléaire. La question est délicate, sensible particulièrement dans cette Bretagne où le choix de Plogoff avait été proposé il y a quelques années, quelques mois après l'Amoco Cadiz, suscitant de nombreuses réactions de la population locale. C'est parce que la question est difficile qu'elle doit être débattue sans tabou, avec toute la sérénité nécessaire, c'est-à-dire de manière pluraliste. C'est ainsi que j'ai tenu à ce que toutes les sensibilités sur le sujet puissent s'exprimer tant dans les tables rondes que bien évidemment dans la salle. J'ajouterai que traiter ces deux thèmes à Rennes n'est pas un pari, ni même un défi. Energies renouvelables et énergie nucléaire sont trop souvent opposées alors qu'elles ont un point commun non négligeable : ces énergies sont complémentaires pour lutter contre l'effet de serre, phénomène dont on ne connaissait pas l'existence en 1980 et qu'il nous faut aujourd'hui intégrer dans notre réflexion et dans nos propositions.
Pour revenir au thème qui nous retient aujourd'hui, je dirai que la France a bien compris les avantages des énergies renouvelables. A cet égard, elle n'a d'ailleurs pas à rougir de son rang : notre pays est aujourd'hui, avec 20% de la production européenne, le premier producteur d'énergies renouvelables. Certes, cette place est principalement due à nos barrages et à l'usine marémotrice de la Rance. Mais il est vrai aussi que nous sommes en retard sur d'autres pays, comme l'Allemagne ou l'Espagne, s'agissant des capteurs solaires ou de l'éolien, ou la Suède s'agissant des pompes à chaleur géothermales.
Mais une dynamique est en train de naître comme l'illustraient les exemples que je citais à l'instant sur la Bretagne. Cette dynamique est le résultat d'une prise de conscience générale et d'un engagement sans équivoque du gouvernement.
Nous avons en effet veillé à achever la mise en place qui avait été initiée, de l'ensemble des instruments nécessaires au développement des ENR :
- premier instrument : la fixation d'objectifs ambitieux. Notre pays s'est engagé au niveau européen à porter la part des ENR dans la production d'électricité de 15 à 21% en 2010 ; nous tiendrons cet engagement.
- Ainsi en est-il de la programmation pluriannuelle des investissements que j'ai récemment décidée. Celle-ci fixe à titre provisoire et à l'horizon 2007 des objectifs de développement par filière et notamment un objectif moyen de 4000 Mega Watts pour l'éolien ;
- le mécanisme d'obligation d'achat de l'électricité produite par les énergies renouvelables a été conforté par la loi du 3 janvier 2003 ;
- le gouvernement a par ailleurs initié la procédure nécessaire pour le lancement de deux appels d'offre afin de développer les filières biomasse - biogaz et éoliennes offshore ;
- nous avons également conforté le dispositif fiscal d'aide aux biocarburants en le mettant en conformité avec la législation européenne ;
- enfin le gouvernement a procédé à la clarification du cadre administratif encadrant le développement de l'éolien et de la petite hydraulique.
A l'issue de ce grand débat national, la loi d'orientation sur l'énergie, que je soumettrai au Parlement cet automne, me donnera par ailleurs l'occasion de transposer en droit français l'obligation d'instituer un système de garantie nationale d'origine de l'électricité produite.
Enfin, ce panorama ne serait pas complet sans parler de l'importance de la recherche et de l'innovation. L'amélioration des technologies utilisées par les ENR est en effet indispensable pour assurer à terme leur rentabilité économique.
Si certaines filières, comme l'éolien, sont ainsi proches de leur maturité technologique, d'autres filières comme le photovoltaïque nécessitent encore des sauts technologiques importants.
Conscients de l'enjeu stratégique que représente la maîtrise des nouvelles technologies de l'énergie, nous avons donc, Francis Mer et moi-même, avec Roselyne Bachelot et Claudie Haigneré, mis en place une mission rassemblant industriels et organismes de recherche pour identifier des objectifs et des axes de recherche et d'innovation précis, et nous faire à l'automne des propositions opérationnelles pour y parvenir.
L'engagement résolu du gouvernement à développer les ENR et le dispositif existant n'épuisent pas pour autant le débat. Au contraire. Toutes les questions essentielles ont été ou seront abordées dans les tables rondes de cette journée.
1- Quelle place pour les ENR dans notre bouquet énergétique : complément ou alternative ?
2- Quelle filière aider en priorité ?
3- Quels moyens au delà du dispositif actuel ?
4- Comment améliorer l'acceptation des ENR comme l'éolien ou l'hydraulique par les populations concernées ?
5- Comment le développement des ENR peut-il contribuer au développement local et à l'aménagement du territoire ?
Les ENR ont suscité parfois de vives polémiques qui ont handicapé leur développement. Je souhaite que ce débat d'aujourd'hui soit l'occasion de sortir des oppositions stériles. Il nous faut leur donner toute leur place au sein du bouquet énergétique français. Car il s'agit bien de respecter nos engagements et d'inscrire notre politique énergétique dans la perspective cohérente et responsable du développement durable.
Je souhaite que les travaux de ces deux journées soient à la mesure des enjeux d'avenir. Rappelons nous ce que disait Saint-Exupéry : " Nous n'héritons pas la terre de nos parents. Nous l'empruntons à nos enfants ".
(source http://www.minefi.gouv.fr, le 6 mai 2003)
Ouverture de la 6ème rencontre du Débat national sur les énergies
Discours de Mme Nicole FONTAINE
Rennes, le 6 mai 2003
Madame la ministre, (Claudie Haigneré)
Mesdames et Messieurs les parlementaires,
Mesdames, Messieurs
Les participants de la journée d'hier ont pu apprécier qu'elle ait été largement inspirée par un esprit créatif et prospectif. Nous abordons la deuxième journée de notre rencontre régionale concernant le Débat national sur les énergies, consacrée plus particulièrement à l'énergie nucléaire.
Je remercie ma collègue Claudie Haigneré de sa présence, de ce qu'elle vous dira dans quelques instants et de son implication dans ce débat.
Les cinq premières rencontres ont clairement mis en évidence les enjeux : la croissance continue de notre consommation d'énergie n'est pas durable.
Pour des raisons environnementales évidentes et fondamentales :
- aujourd'hui ce sont les catastrophes écologiques dues au transport de pétrole et qui ont si durement frappé les belles côtes de cette région. Elles doivent être absolument maîtrisées. C'est la raison pour laquelle le gouvernement a veillé dans ce domaine à accélérer au niveau européen le contrôle des navires à risque ;
- Déjà, ce sont les émissions de gaz à effet de serre qui augmentent dans des proportions vertigineuses et dont les conséquences sur le changement climatique et le réchauffement de la planète sont un désastre programmé si nous ne faisons rien.
Mais aussi pour des raisons économiques, le constat est là : les réserves d'hydrocarbures s'épuisent, la demande des pays en voie de développement va croissant.
Il semble donc qu'un premier consensus apparaisse d'ores et déjà à l'issue des premières rencontres : la prise de conscience qu'il nous faut décupler nos efforts ainsi que notre créativité pour maîtriser nos consommations d'énergie.
J'ai eu l'occasion de dire hier pourquoi nous avions choisi Rennes pour cette double thématique : celle des énergies renouvelables et celle du nucléaire.
En premier lieu, parce que la Bretagne symbolise la dynamique nouvelle qui s'est créée autour des énergies renouvelables depuis quelques temps en France.
En attestent les cinq parcs éoliens qui fonctionnent déjà sur les sites de Gouliens et de Plouarzel.
J'en veux également pour preuve le développement des chaufferies au bois, nombreuses dans cette région, ainsi que les trois projets de valorisation des déchets agricoles.
Enfin, nous n'oublions pas le potentiel formidable que les Côtes Bretonnes offrent pour un développement futur de l'éolien offshore et, éventuellement même si ces technologies sont encore futuristes, l'exploitation de la force des courants marins.
En second lieu, parce que la question du nucléaire est délicate, sensible, particulièrement dans cette Bretagne où le choix de Plogoff avait été proposé il y a quelques années, quelques mois après l'Amoco Cadiz, suscitant de nombreuses réactions dans la population locale.
C'est parce que la question est difficile qu'elle doit être débattue sans tabou, avec toute la sérénité nécessaire, c'est-à-dire de manière pluraliste. C'est ainsi que j'ai tenu à ce que toutes les sensibilités sur le sujet puissent s'exprimer tant dans les tables rondes que bien évidemment dans la salle.
J'ajouterai que traiter de ces deux thèmes à Rennes n'est pas un pari, ni même un défi.
Energies renouvelables et énergie nucléaire sont trop souvent opposées alors qu'elles ont un point commun non négligeable : ces énergies sont complémentaires pour lutter contre l'effet de serre, phénomène dont on ne connaissait pas l'existence en 1980 et qu'il nous faut aujourd'hui intégrer dans notre réflexion et dans nos propositions.
Pour nous concentrer sur le thème qui nous retient aujourd'hui, celui de l'énergie nucléaire, est-elle une " énergie d'avenir ou une fausse solution ? " Cette interrogation, un tantinet provocatrice du libellé de cette rencontre, est nécessaire à trois titres :
Tout d'abord, la France ne peut rester campée sur ses certitudes sans s'interroger de bonne foi sur les évolutions que l'on constate à l'étranger à l'égard du nucléaire. Où en sommes- nous ?
D'un côté, certains pays européens comme l'Allemagne, la Belgique ou la Suède ont fait le choix d'en sortir progressivement. De l'autre, des pays comme les Etats-Unis, la Finlande, la Chine ou la Corée du Sud investissent massivement dans le développement de cette filière.
Il reviendra à la troisième table ronde de nous éclairer sur ces expériences étrangères et leurs conséquences en termes de politique énergétique et de respect des engagements de Kyoto. Je tiens à cet égard à remercier très vivement les orateurs allemands, finlandais et coréens qui ont accepté de venir éclairer nos débats.
Ce débat est ensuite nécessaire pour sortir le nucléaire du cercle d'experts, d'initiés ou de partisans au sein duquel il a été trop longtemps enfermé. J'en veux pour preuve les idées reçues et la relative méconnaissance des Français sur ces sujets. L'enquête que nous avons fait effectuer en décembre dernier a par exemple fait apparaître que 2/3 de nos concitoyens pensent que l'énergie nucléaire émet des gaz à effet de serre.
Pour qu'une politique énergétique soit durable, il faut que les Français y adhèrent, et parce qu'il n'est pas d'adhésion sans connaissance ou compréhension des enjeux et des faits, il était urgent que l'Etat renoue le dialogue sur ce sujet des énergies et notamment du nucléaire. En toute hypothèse, une chose est sûre pour le gouvernement : aucun projet ne peut voir le jour sans une transparence absolue à l'égard des citoyens et leur association aux processus de décision.
Ce débat est donc d'une particulière actualité car le temps des choix est venu.
Que l'on choisisse en effet de sortir du nucléaire ou de continuer, ce n'est pas en 2020, c'est à dire à la veille du renouvellement du parc, qu'il faudra se poser la question. En quelque sorte, pour le nucléaire, comme pour toutes les grandes questions qui conditionnent l'avenir, il nous faut préparer les réponses très en amont.
Au cours de cette journée, je vous invite donc, sans tabou, à débattre de deux questions essentielles :
- la France peut-elle envisager de sortir progressivement du nucléaire comme le fait l'Allemagne ou au contraire poursuivre résolument dans cette voie comme la Finlande ?
- si la France poursuit dans le nucléaire, quelle devra en être le poids dans le bouquet énergétique de 2020 et de 2050 ? Et pour préparer cet avenir, est-il souhaitable que nos industriels nationaux, EDF et AREVA, construisent un réacteur EPR dès maintenant ou bien dans 5 ans ? Ou au contraire est-il préférable de consacrer l'ensemble de nos efforts sur la génération suivante de réacteurs ?
La réponse à la première question nécessite que l'on compare les avantages et les inconvénients du nucléaire aujourd'hui et demain.
Les avantages sont connus :
- la compétitivité de l'électricité produite en France. Elle permet à notre pays d'exporter 15% de sa production à l'étranger, et aux industriels et aux ménages de disposer d'une énergie bon marché ;
- une indépendance énergétique accrue, passée de 26 % en 1973 à 50 % aujourd'hui. Elle nous rend moins vulnérables à la forte volatilité des prix du pétrole ou du gaz.
- enfin, à la différence du gaz ou du charbon, l'absence d'émissions de gaz à effet de serre. La France évite ainsi l'émission dans l'atmosphère d'environ 30 millions de tonnes de carbone par an, soit 30 % de nos émissions liées à l'énergie.
Les interrogations que soulève le nucléaire sont tout aussi connues : risques d'accidents et de prolifération des matières radioactives, question du traitement des déchets nucléaires à longue durée de vie. Certes, des catastrophes comme celle de Tchernobyl ont eu lieu dans des contextes de technicité et de normes de sécurité très différents des nôtres. Il n'empêche qu'elles restent présentes à l'esprit de tous, tant elles nous rappellent le prix humain de tout incident. La sécurité doit être, dans le nucléaire, une préoccupation de tous les instants.
Il reviendra aux deux tables rondes de ce matin d'examiner ces différentes questions et de voir les réponses qui y sont apportées aujourd'hui et les voies d'amélioration possibles pour l'avenir. En particulier :
Quel contenu devra-t-on donner à la loi sur la transparence nucléaire pour aller encore plus loin en matière de sûreté nucléaire en France et d'information du public ? Quelles sont les améliorations que pourraient apporter à cet égard les futurs réacteurs nucléaires ? Comment l'Agence Internationale de l'Energie Atomique peut-elle lutter plus efficacement contre la prolifération des matières nucléaires ?
J'attends également que la table ronde sur les déchets nucléaires permette de dresser un état objectif et dépassionné de cette question. Que nous poursuivions ou non dans la voie du nucléaire, la question des déchets est posée et un choix devra être fait en 2006 entre les différentes solutions qui existent. Je remercie à cet égard vivement Mme ENEGSTRÖM qui nous présentera le cas de la Suède, un exemple très intéressant puisque ce pays a à la fois décidé de sortir du nucléaire et de recourir au stockage géologique pour résoudre la question des déchets nucléaires.
Il conviendra ensuite d'aborder notre deuxième interrogation : faut-il continuer le nucléaire et si oui comment ?
Je le sais : chacun attend le Gouvernement sur ce sujet de société, ce sujet qui n'a été abordé jusqu'à présent -quand il l'a été- que de manière passionnée, révoltée ou convaincue.
Et bien, le Gouvernement, par ce débat, répond présent. Oui, nous allons en parler. Oui, nous examinerons à Rennes, dans cette salle, toutes les hypothèses, sans tabou, ouvertement, avec tous les citoyens. C'est ainsi que nous concevons le dialogue démocratique : chacun doit pouvoir s'exprimer, librement, et sera entendu. Car c'est de notre avenir qu'il s'agit, un avenir que nous inscrivons dans une démarche de développement durable.
La conviction du Gouvernement sur ces sujets n'est pas faite et doit encore mûrir, en s'appuyant sur les éléments qui émergeront du débat et notamment de la quatrième table ronde.
Quels constats pouvons-nous d'ores et déjà dresser ?
En premier lieu : la moitié des centrales nucléaires sera probablement arrêtée entre 2020 et 2025. C'est donc à cette échéance qu'il conviendra d'être prêts, s'il y a lieu, à renouveler le parc.
En second lieu : notre volonté de réduire par quatre nos émissions de gaz à effet de serre doit être le principal déterminant de nos choix. Il nous faudra en effet trouver les moyens de produire au moins 300 TéraWhattsheures électriques sans émettre de CO2.
Troisièmement, à la différence des années 1970, les choix énergétiques de demain seront réalisés dans un marché européen intégré et ouvert. Cela veut dire aussi que les nouveaux moyens de production seront financés par les industriels et non par les consommateurs qui pourront choisir leur électricité au meilleur prix.
La réflexion devra également intégrer les dimensions sociales et d'indépendance nationale et, en particulier, l'atout que représente pour notre pays le savoir-faire des 40 000 employés qui se consacrent au nucléaire au sein d'EDF, d'AREVA et de tous leurs sous-traitants.
Enfin, ce panorama ne serait pas complet sans parler de la recherche et de l'innovation. Qu'il s'agisse des énergies renouvelables, ou du traitement des déchets nucléaires.
Conclusion
Le nucléaire est une des inventions les plus ambivalentes du XXème siècle. Utilisée à des fins civiles, la fission de l'atome, par ses applications à la médecine, par la formidable source d'énergie qu'elle représente, constitue en effet une avancée scientifique et technologique majeure.
Utilisé à des fins militaires, son pouvoir destructeur est à l'aune de l'énergie libérée. Par son entrée tragique dans l'histoire, et par les risques de prolifération qu'elle peut aujourd'hui susciter, l'énergie nucléaire inquiète et interroge fondamentalement chacun de nous, au plus profond de nos consciences, sur une question simple : celle de l'avenir de notre planète.
Ces questionnements, qui nous renvoient tous à nos responsabilités, et aux conséquences de nos décisions, sont primordiaux. Ils participent à la marche de l'humanité dans sa quête de progrès, lorsqu'elle bâtit son avenir par ses interrogations et ses espoirs.
C'est avec l'éclairage du Débat, qu'avant la fin de l'année, le Gouvernement prendra ses décisions dans le cadre de la loi d'orientation sur les énergies que je soumettrai au Parlement. C'est pourquoi j'attache beaucoup d'intérêt et d'importance à la richesse et à la contribution de vos échanges.
Je vous remercie, et je laisse maintenant la parole à Mme Claudie Haigneré.
(source http://www.minefi.gouv.fr, le 7 mai 2003)
Monsieur le Ministre,
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Mesdames, Messieurs,
Aujourd'hui s'est ouverte à Rennes la 5ème rencontre régionale du Débat National sur les Energies, initié par le gouvernement et dont le Premier Ministre m'a confié la charge. Je remercie ma collègue Roselyne Bachelot de sa présence, de ce qu'elle vous a dit ce matin et de son implication dans ce débat.
Les quatre premières rencontres ont clairement mis en lumière les enjeux : la croissance continue de notre consommation d'énergie n'est pas durable. Pour des raisons environnementales évidentes et fondamentales :
- aujourd'hui ce sont les catastrophes écologiques dues au transport de pétrole et qui ont si durement frappé les belles côtes de cette région. Elles doivent être absolument maîtrisées. C'est la raison pour laquelle le gouvernement a veillé dans ce domaine à accélérer au niveau européen le contrôle des navires à risques
- déjà ce sont les émissions à effet de serre qui augmentent dans des proportions vertigineuses et dont les conséquences sur le changement climatique et le réchauffement de la planète sont un désastre programmé si nous ne faisons rien.
- mais aussi pour des raisons économiques, le constat est là : les réserves d'hydrocarbures s'épuisent, la demande des pays en voie de développement va croissant.
Il semble donc qu'un premier consensus apparaisse d'ores et déjà à l'issue des premières rencontres. La prise de conscience qu'il nous faut décupler nos efforts ainsi que notre créativité pour maîtriser nos consommations d'énergie. C'est pour explorer toutes les voies possibles que nous nous trouvons à Rennes aujourd'hui. Pourquoi Rennes, pourquoi la Bretagne sous la double thématique choisie pour ces deux journées : les énergies renouvelables, l'énergie nucléaire ?
En premier lieu, parce que la Bretagne symbolise la dynamique nouvelle qui s'est créée autour des énergies renouvelables depuis quelques temps en France. En attestent les cinq parcs éoliens qui fonctionnent déjà notamment les sites Goulien et de Plouarzel et les cinquante projets qui sont actuellement en cours de réalisation. J'en veux également pour preuve le développement des chaufferies au bois, nombreuses dans cette région, ainsi que les trois projets de valorisation des déchets agricoles. Enfin nous n'oublions pas le potentiel formidable que les côtes bretonnes offrent pour un développement futur de l'éolien offshore et éventuellement, même si ces technologies sont encore futuristes, l'exploitation de la force des courants marins.
Demain, vous allez traiter de l'énergie nucléaire. La question est délicate, sensible particulièrement dans cette Bretagne où le choix de Plogoff avait été proposé il y a quelques années, quelques mois après l'Amoco Cadiz, suscitant de nombreuses réactions de la population locale. C'est parce que la question est difficile qu'elle doit être débattue sans tabou, avec toute la sérénité nécessaire, c'est-à-dire de manière pluraliste. C'est ainsi que j'ai tenu à ce que toutes les sensibilités sur le sujet puissent s'exprimer tant dans les tables rondes que bien évidemment dans la salle. J'ajouterai que traiter ces deux thèmes à Rennes n'est pas un pari, ni même un défi. Energies renouvelables et énergie nucléaire sont trop souvent opposées alors qu'elles ont un point commun non négligeable : ces énergies sont complémentaires pour lutter contre l'effet de serre, phénomène dont on ne connaissait pas l'existence en 1980 et qu'il nous faut aujourd'hui intégrer dans notre réflexion et dans nos propositions.
Pour revenir au thème qui nous retient aujourd'hui, je dirai que la France a bien compris les avantages des énergies renouvelables. A cet égard, elle n'a d'ailleurs pas à rougir de son rang : notre pays est aujourd'hui, avec 20% de la production européenne, le premier producteur d'énergies renouvelables. Certes, cette place est principalement due à nos barrages et à l'usine marémotrice de la Rance. Mais il est vrai aussi que nous sommes en retard sur d'autres pays, comme l'Allemagne ou l'Espagne, s'agissant des capteurs solaires ou de l'éolien, ou la Suède s'agissant des pompes à chaleur géothermales.
Mais une dynamique est en train de naître comme l'illustraient les exemples que je citais à l'instant sur la Bretagne. Cette dynamique est le résultat d'une prise de conscience générale et d'un engagement sans équivoque du gouvernement.
Nous avons en effet veillé à achever la mise en place qui avait été initiée, de l'ensemble des instruments nécessaires au développement des ENR :
- premier instrument : la fixation d'objectifs ambitieux. Notre pays s'est engagé au niveau européen à porter la part des ENR dans la production d'électricité de 15 à 21% en 2010 ; nous tiendrons cet engagement.
- Ainsi en est-il de la programmation pluriannuelle des investissements que j'ai récemment décidée. Celle-ci fixe à titre provisoire et à l'horizon 2007 des objectifs de développement par filière et notamment un objectif moyen de 4000 Mega Watts pour l'éolien ;
- le mécanisme d'obligation d'achat de l'électricité produite par les énergies renouvelables a été conforté par la loi du 3 janvier 2003 ;
- le gouvernement a par ailleurs initié la procédure nécessaire pour le lancement de deux appels d'offre afin de développer les filières biomasse - biogaz et éoliennes offshore ;
- nous avons également conforté le dispositif fiscal d'aide aux biocarburants en le mettant en conformité avec la législation européenne ;
- enfin le gouvernement a procédé à la clarification du cadre administratif encadrant le développement de l'éolien et de la petite hydraulique.
A l'issue de ce grand débat national, la loi d'orientation sur l'énergie, que je soumettrai au Parlement cet automne, me donnera par ailleurs l'occasion de transposer en droit français l'obligation d'instituer un système de garantie nationale d'origine de l'électricité produite.
Enfin, ce panorama ne serait pas complet sans parler de l'importance de la recherche et de l'innovation. L'amélioration des technologies utilisées par les ENR est en effet indispensable pour assurer à terme leur rentabilité économique.
Si certaines filières, comme l'éolien, sont ainsi proches de leur maturité technologique, d'autres filières comme le photovoltaïque nécessitent encore des sauts technologiques importants.
Conscients de l'enjeu stratégique que représente la maîtrise des nouvelles technologies de l'énergie, nous avons donc, Francis Mer et moi-même, avec Roselyne Bachelot et Claudie Haigneré, mis en place une mission rassemblant industriels et organismes de recherche pour identifier des objectifs et des axes de recherche et d'innovation précis, et nous faire à l'automne des propositions opérationnelles pour y parvenir.
L'engagement résolu du gouvernement à développer les ENR et le dispositif existant n'épuisent pas pour autant le débat. Au contraire. Toutes les questions essentielles ont été ou seront abordées dans les tables rondes de cette journée.
1- Quelle place pour les ENR dans notre bouquet énergétique : complément ou alternative ?
2- Quelle filière aider en priorité ?
3- Quels moyens au delà du dispositif actuel ?
4- Comment améliorer l'acceptation des ENR comme l'éolien ou l'hydraulique par les populations concernées ?
5- Comment le développement des ENR peut-il contribuer au développement local et à l'aménagement du territoire ?
Les ENR ont suscité parfois de vives polémiques qui ont handicapé leur développement. Je souhaite que ce débat d'aujourd'hui soit l'occasion de sortir des oppositions stériles. Il nous faut leur donner toute leur place au sein du bouquet énergétique français. Car il s'agit bien de respecter nos engagements et d'inscrire notre politique énergétique dans la perspective cohérente et responsable du développement durable.
Je souhaite que les travaux de ces deux journées soient à la mesure des enjeux d'avenir. Rappelons nous ce que disait Saint-Exupéry : " Nous n'héritons pas la terre de nos parents. Nous l'empruntons à nos enfants ".
(source http://www.minefi.gouv.fr, le 6 mai 2003)
Ouverture de la 6ème rencontre du Débat national sur les énergies
Discours de Mme Nicole FONTAINE
Rennes, le 6 mai 2003
Madame la ministre, (Claudie Haigneré)
Mesdames et Messieurs les parlementaires,
Mesdames, Messieurs
Les participants de la journée d'hier ont pu apprécier qu'elle ait été largement inspirée par un esprit créatif et prospectif. Nous abordons la deuxième journée de notre rencontre régionale concernant le Débat national sur les énergies, consacrée plus particulièrement à l'énergie nucléaire.
Je remercie ma collègue Claudie Haigneré de sa présence, de ce qu'elle vous dira dans quelques instants et de son implication dans ce débat.
Les cinq premières rencontres ont clairement mis en évidence les enjeux : la croissance continue de notre consommation d'énergie n'est pas durable.
Pour des raisons environnementales évidentes et fondamentales :
- aujourd'hui ce sont les catastrophes écologiques dues au transport de pétrole et qui ont si durement frappé les belles côtes de cette région. Elles doivent être absolument maîtrisées. C'est la raison pour laquelle le gouvernement a veillé dans ce domaine à accélérer au niveau européen le contrôle des navires à risque ;
- Déjà, ce sont les émissions de gaz à effet de serre qui augmentent dans des proportions vertigineuses et dont les conséquences sur le changement climatique et le réchauffement de la planète sont un désastre programmé si nous ne faisons rien.
Mais aussi pour des raisons économiques, le constat est là : les réserves d'hydrocarbures s'épuisent, la demande des pays en voie de développement va croissant.
Il semble donc qu'un premier consensus apparaisse d'ores et déjà à l'issue des premières rencontres : la prise de conscience qu'il nous faut décupler nos efforts ainsi que notre créativité pour maîtriser nos consommations d'énergie.
J'ai eu l'occasion de dire hier pourquoi nous avions choisi Rennes pour cette double thématique : celle des énergies renouvelables et celle du nucléaire.
En premier lieu, parce que la Bretagne symbolise la dynamique nouvelle qui s'est créée autour des énergies renouvelables depuis quelques temps en France.
En attestent les cinq parcs éoliens qui fonctionnent déjà sur les sites de Gouliens et de Plouarzel.
J'en veux également pour preuve le développement des chaufferies au bois, nombreuses dans cette région, ainsi que les trois projets de valorisation des déchets agricoles.
Enfin, nous n'oublions pas le potentiel formidable que les Côtes Bretonnes offrent pour un développement futur de l'éolien offshore et, éventuellement même si ces technologies sont encore futuristes, l'exploitation de la force des courants marins.
En second lieu, parce que la question du nucléaire est délicate, sensible, particulièrement dans cette Bretagne où le choix de Plogoff avait été proposé il y a quelques années, quelques mois après l'Amoco Cadiz, suscitant de nombreuses réactions dans la population locale.
C'est parce que la question est difficile qu'elle doit être débattue sans tabou, avec toute la sérénité nécessaire, c'est-à-dire de manière pluraliste. C'est ainsi que j'ai tenu à ce que toutes les sensibilités sur le sujet puissent s'exprimer tant dans les tables rondes que bien évidemment dans la salle.
J'ajouterai que traiter de ces deux thèmes à Rennes n'est pas un pari, ni même un défi.
Energies renouvelables et énergie nucléaire sont trop souvent opposées alors qu'elles ont un point commun non négligeable : ces énergies sont complémentaires pour lutter contre l'effet de serre, phénomène dont on ne connaissait pas l'existence en 1980 et qu'il nous faut aujourd'hui intégrer dans notre réflexion et dans nos propositions.
Pour nous concentrer sur le thème qui nous retient aujourd'hui, celui de l'énergie nucléaire, est-elle une " énergie d'avenir ou une fausse solution ? " Cette interrogation, un tantinet provocatrice du libellé de cette rencontre, est nécessaire à trois titres :
Tout d'abord, la France ne peut rester campée sur ses certitudes sans s'interroger de bonne foi sur les évolutions que l'on constate à l'étranger à l'égard du nucléaire. Où en sommes- nous ?
D'un côté, certains pays européens comme l'Allemagne, la Belgique ou la Suède ont fait le choix d'en sortir progressivement. De l'autre, des pays comme les Etats-Unis, la Finlande, la Chine ou la Corée du Sud investissent massivement dans le développement de cette filière.
Il reviendra à la troisième table ronde de nous éclairer sur ces expériences étrangères et leurs conséquences en termes de politique énergétique et de respect des engagements de Kyoto. Je tiens à cet égard à remercier très vivement les orateurs allemands, finlandais et coréens qui ont accepté de venir éclairer nos débats.
Ce débat est ensuite nécessaire pour sortir le nucléaire du cercle d'experts, d'initiés ou de partisans au sein duquel il a été trop longtemps enfermé. J'en veux pour preuve les idées reçues et la relative méconnaissance des Français sur ces sujets. L'enquête que nous avons fait effectuer en décembre dernier a par exemple fait apparaître que 2/3 de nos concitoyens pensent que l'énergie nucléaire émet des gaz à effet de serre.
Pour qu'une politique énergétique soit durable, il faut que les Français y adhèrent, et parce qu'il n'est pas d'adhésion sans connaissance ou compréhension des enjeux et des faits, il était urgent que l'Etat renoue le dialogue sur ce sujet des énergies et notamment du nucléaire. En toute hypothèse, une chose est sûre pour le gouvernement : aucun projet ne peut voir le jour sans une transparence absolue à l'égard des citoyens et leur association aux processus de décision.
Ce débat est donc d'une particulière actualité car le temps des choix est venu.
Que l'on choisisse en effet de sortir du nucléaire ou de continuer, ce n'est pas en 2020, c'est à dire à la veille du renouvellement du parc, qu'il faudra se poser la question. En quelque sorte, pour le nucléaire, comme pour toutes les grandes questions qui conditionnent l'avenir, il nous faut préparer les réponses très en amont.
Au cours de cette journée, je vous invite donc, sans tabou, à débattre de deux questions essentielles :
- la France peut-elle envisager de sortir progressivement du nucléaire comme le fait l'Allemagne ou au contraire poursuivre résolument dans cette voie comme la Finlande ?
- si la France poursuit dans le nucléaire, quelle devra en être le poids dans le bouquet énergétique de 2020 et de 2050 ? Et pour préparer cet avenir, est-il souhaitable que nos industriels nationaux, EDF et AREVA, construisent un réacteur EPR dès maintenant ou bien dans 5 ans ? Ou au contraire est-il préférable de consacrer l'ensemble de nos efforts sur la génération suivante de réacteurs ?
La réponse à la première question nécessite que l'on compare les avantages et les inconvénients du nucléaire aujourd'hui et demain.
Les avantages sont connus :
- la compétitivité de l'électricité produite en France. Elle permet à notre pays d'exporter 15% de sa production à l'étranger, et aux industriels et aux ménages de disposer d'une énergie bon marché ;
- une indépendance énergétique accrue, passée de 26 % en 1973 à 50 % aujourd'hui. Elle nous rend moins vulnérables à la forte volatilité des prix du pétrole ou du gaz.
- enfin, à la différence du gaz ou du charbon, l'absence d'émissions de gaz à effet de serre. La France évite ainsi l'émission dans l'atmosphère d'environ 30 millions de tonnes de carbone par an, soit 30 % de nos émissions liées à l'énergie.
Les interrogations que soulève le nucléaire sont tout aussi connues : risques d'accidents et de prolifération des matières radioactives, question du traitement des déchets nucléaires à longue durée de vie. Certes, des catastrophes comme celle de Tchernobyl ont eu lieu dans des contextes de technicité et de normes de sécurité très différents des nôtres. Il n'empêche qu'elles restent présentes à l'esprit de tous, tant elles nous rappellent le prix humain de tout incident. La sécurité doit être, dans le nucléaire, une préoccupation de tous les instants.
Il reviendra aux deux tables rondes de ce matin d'examiner ces différentes questions et de voir les réponses qui y sont apportées aujourd'hui et les voies d'amélioration possibles pour l'avenir. En particulier :
Quel contenu devra-t-on donner à la loi sur la transparence nucléaire pour aller encore plus loin en matière de sûreté nucléaire en France et d'information du public ? Quelles sont les améliorations que pourraient apporter à cet égard les futurs réacteurs nucléaires ? Comment l'Agence Internationale de l'Energie Atomique peut-elle lutter plus efficacement contre la prolifération des matières nucléaires ?
J'attends également que la table ronde sur les déchets nucléaires permette de dresser un état objectif et dépassionné de cette question. Que nous poursuivions ou non dans la voie du nucléaire, la question des déchets est posée et un choix devra être fait en 2006 entre les différentes solutions qui existent. Je remercie à cet égard vivement Mme ENEGSTRÖM qui nous présentera le cas de la Suède, un exemple très intéressant puisque ce pays a à la fois décidé de sortir du nucléaire et de recourir au stockage géologique pour résoudre la question des déchets nucléaires.
Il conviendra ensuite d'aborder notre deuxième interrogation : faut-il continuer le nucléaire et si oui comment ?
Je le sais : chacun attend le Gouvernement sur ce sujet de société, ce sujet qui n'a été abordé jusqu'à présent -quand il l'a été- que de manière passionnée, révoltée ou convaincue.
Et bien, le Gouvernement, par ce débat, répond présent. Oui, nous allons en parler. Oui, nous examinerons à Rennes, dans cette salle, toutes les hypothèses, sans tabou, ouvertement, avec tous les citoyens. C'est ainsi que nous concevons le dialogue démocratique : chacun doit pouvoir s'exprimer, librement, et sera entendu. Car c'est de notre avenir qu'il s'agit, un avenir que nous inscrivons dans une démarche de développement durable.
La conviction du Gouvernement sur ces sujets n'est pas faite et doit encore mûrir, en s'appuyant sur les éléments qui émergeront du débat et notamment de la quatrième table ronde.
Quels constats pouvons-nous d'ores et déjà dresser ?
En premier lieu : la moitié des centrales nucléaires sera probablement arrêtée entre 2020 et 2025. C'est donc à cette échéance qu'il conviendra d'être prêts, s'il y a lieu, à renouveler le parc.
En second lieu : notre volonté de réduire par quatre nos émissions de gaz à effet de serre doit être le principal déterminant de nos choix. Il nous faudra en effet trouver les moyens de produire au moins 300 TéraWhattsheures électriques sans émettre de CO2.
Troisièmement, à la différence des années 1970, les choix énergétiques de demain seront réalisés dans un marché européen intégré et ouvert. Cela veut dire aussi que les nouveaux moyens de production seront financés par les industriels et non par les consommateurs qui pourront choisir leur électricité au meilleur prix.
La réflexion devra également intégrer les dimensions sociales et d'indépendance nationale et, en particulier, l'atout que représente pour notre pays le savoir-faire des 40 000 employés qui se consacrent au nucléaire au sein d'EDF, d'AREVA et de tous leurs sous-traitants.
Enfin, ce panorama ne serait pas complet sans parler de la recherche et de l'innovation. Qu'il s'agisse des énergies renouvelables, ou du traitement des déchets nucléaires.
Conclusion
Le nucléaire est une des inventions les plus ambivalentes du XXème siècle. Utilisée à des fins civiles, la fission de l'atome, par ses applications à la médecine, par la formidable source d'énergie qu'elle représente, constitue en effet une avancée scientifique et technologique majeure.
Utilisé à des fins militaires, son pouvoir destructeur est à l'aune de l'énergie libérée. Par son entrée tragique dans l'histoire, et par les risques de prolifération qu'elle peut aujourd'hui susciter, l'énergie nucléaire inquiète et interroge fondamentalement chacun de nous, au plus profond de nos consciences, sur une question simple : celle de l'avenir de notre planète.
Ces questionnements, qui nous renvoient tous à nos responsabilités, et aux conséquences de nos décisions, sont primordiaux. Ils participent à la marche de l'humanité dans sa quête de progrès, lorsqu'elle bâtit son avenir par ses interrogations et ses espoirs.
C'est avec l'éclairage du Débat, qu'avant la fin de l'année, le Gouvernement prendra ses décisions dans le cadre de la loi d'orientation sur les énergies que je soumettrai au Parlement. C'est pourquoi j'attache beaucoup d'intérêt et d'importance à la richesse et à la contribution de vos échanges.
Je vous remercie, et je laisse maintenant la parole à Mme Claudie Haigneré.
(source http://www.minefi.gouv.fr, le 7 mai 2003)