Texte intégral
Notre conception de la diversité culturelle est indissociable de l'idée que nous nous faisons de la mondialisation. C'est seulement en soutenant les Etats et les peuples dans leurs expressions culturelles, artistiques et linguistiques que nous parviendrons à maîtriser et à humaniser la mondialisation. Il ne saurait y avoir ni dignité humaine, ni démocratie, ni développement sans enracinement dans une culture et une histoire.
L'expérience de la Coopération internationale et de la Francophonie nous montre en effet qu'un pays ne peut espérer favoriser son développement en se coupant de sa propre culture ou en la laissant se réduire à du folklore. Courir ce risque expose, au mieux, au déracinement, au pire, à des réactions violentes de rejet.
Ce qui vaut pour le développement durable vaut aussi pour la culture : nous avons une responsabilité vis à vis des générations futures. Il est donc légitime que la communauté internationale se mobilise pour protéger la diversité des cultures et des langues, conserver le patrimoine et faire en sorte que l'expression culturelle contemporaine ait les moyens d'exister sans inféoder cette exigence à la richesse ou à la puissance des économies dominantes du moment.
Notre politique s'articule autour de trois orientations :
- promouvoir le développement culturel des pays du Sud ;
- conserver à notre langue son rang et son statut ;
- militer pour l'adoption d'une convention internationale sur la diversité culturelle.
1ère orientation : Promouvoir le développement culturel des pays du sud :
Je ne m'étendrai pas sur le rôle déterminant que joue notre réseau culturel pour faire connaître nos artistes et notre patrimoine à l'étranger. Il est largement connu de vous. Je ne minimise pas sa portée. Comment le pourrais-je tant notre budget est, de ce point de vue, éloquent ? Je voudrais plutôt profiter de l'occasion qui m'est donnée pour attirer votre attention sur un sujet moins connu : les concours que nous apportons plus particulièrement aux pays du Sud, pour les aider à promouvoir leurs uvres et leurs créateurs.
Nos actions de coopération favorisent l'émergence d'une économie de la culture, facteur de développement économique et d'intégration sociale. Cet objectif rejoint d'ailleurs l'ambition du NEPAD qui a pris cette dimension en considération dans sa démarche.
D'une manière générale, tous nos postes diplomatiques, aussi bien que l'Association française d'action artistique et l'administration centrale, ont pour mission de développer les programmes de coopération et d'échanges culturels.
L'AFAA est l'opérateur du ministère des Affaires étrangères et du ministère de la Culture pour les saisons culturelles qui permettent à un pays de présenter les différentes facettes de sa culture. "Djazaïr, l'année de l'Algérie en France" bat actuellement son plein avec plus de deux mille manifestations organisées partout en France. La Chine, la Pologne, le Brésil et la Russie seront à l'honneur ces prochaines années.
Certains outils, mis en place par la Direction de la coopération internationale et du développement sont exclusivement consacrés aux pays du Sud. Ainsi, le Fonds de solidarité prioritaire (FSP) a permis de mettre en place des actions "sur mesure" adaptées aux attentes de nos partenaires.
Neuf projets "FSP-pays" de développement culturel, essentiellement dans des pays africains, sont en cours, trois ont fait l'objet de l'approbation du comité d'examen et quatre sont en préfiguration. Le montant des 12 projets en cours ou en instruction s'élève à 14,9 millions d'euros sur 4 ans.
A compter de juin 2003 un projet "FSP-mobilisateur" de 5,9 millions d'euros renforcera l'action engagée dans le domaine du développement culturel. Il se fixe comme objectif de promouvoir la création contemporaine en appuyant les projets des artistes et des entrepreneurs culturels, tout en structurant leur environnement professionnel dans une perspective de gestion plus autonome et durable. Ce projet renforcera par ailleurs les partenariats régionaux et créera des passerelles avec les pays anglophones, lusophones et hispanophones.
Le programme "Afrique en créations" confié à l'AFAA et financé sur le FSP (2,286 millions d'euros) a permis de mobiliser des fonds très significatifs (1,790 millions d'euros supplémentaires représentant 78,3 % de l'apport français initial sur FSP) auprès de nos partenaires bilatéraux, des ministères africains de la Culture et de trois fondations privées situées aux Etats-Unis et aux Pays-Bas.
Ce dispositif porte ses fruits : une économie de la culture génératrice d'emplois se met en place. La création contemporaine des pays du Sud se renforce : de "La passerelle des Arts" à Paris qui a réuni plus d'un million de visiteurs autour des sculptures d'Ousmane Sow, aux biennales de Tananarive (danse), de Bamako (photo), de Cotonou et de Yaoundé (musiques urbaines), de Dakar ou de Johannesburg (arts plastiques). La présence des artistes africains s'affirme dans les grands rendez-vous internationaux, à la "Documenta" de Kassel, dont le commissaire général était pour la première fois cette année d'origine africaine, comme à la Biennale de Venise. Les musiciens africains sont fêtés en Europe et aux Etats-Unis.
Les rencontres Nord-Sud "Territoires de la création" tenues à Lille en septembre 2000, celles des opérateurs culturels "Opérateurs culturels en réseau-OCRE" tenues à Bamako en octobre 2001, puis à Durban en septembre 2002, montrent toutefois qu'une action et une aide volontaristes demeurent une nécessité, dans des contextes économiques encore fragiles.
Au total, on peut estimer à 4 715 000 euros par an la contribution de la France pour des actions de développement culturel mises en uvre à travers le FSP.
La France est par ailleurs le principal mécène du cinéma africain grâce à des mécanismes comme le Fonds sud ou l'aide directe à la production. Le soutien au cinéma africain a représenté en moyenne 3 millions d'euros annuels entre 1990 et 2001. Il est à cet égard encourageant de constater que l'Agence intergouvernementale de la Francophonie (AIF) et l'Union européenne nous ont rejoints dans cette entreprise.
Il s'agit aujourd'hui d'aller plus loin. C'est l'objectif du Plan images sud qui verra prochainement le jour et que j'ai annoncé le 23 février dernier au Festival panafricain de cinéma de Ouagadougou (FESPACO). Son ambition est de doter le continent africain d'une véritable industrie cinématographique mais également d'une industrie de production audiovisuelle capable de créer des programmes de télévision en nombre et en qualité.
A côté des instruments bilatéraux, nous disposons également d'instruments multilatéraux. Nous pouvons compter avec les appuis de l'Union européenne, à travers les Accords de Cotonou, qui intègrent la dimension culturelle.
L'Agence intergouvernementale de la Francophonie que nous finançons à 60 % met en uvre des programmes d'appui à la création et à la diffusion culturelle des pays en développement. Elle consacre stricto sensu 16 millions d'euros de son action aux programmes culturels et 27,5 millions d'euros si l'on y ajoute ses programmes en faveur de l'éducation et de la culture, soit, au total, 60 % de sa programmation, dont la France finance à elle seule 60 %.
A ce titre elle soutient, entre autres, le Marché des Arts du Spectacle africain d'Abidjan (MASA), le cinéma et des produits culturels.
2ème orientation : Conserver à notre langue son rang et son statut :
Nous ne saurions renoncer évidemment à notre ambition linguistique. Bien au contraire, elle est partie intégrante de notre combat en faveur de la diversité culturelle.
La politique de promotion du français dans le monde menée par le ministère des Affaires étrangères vise à conforter l'apprentissage du français et son statut comme langue de communication internationale. Les actions menées dans ce cadre se manifestent dans plusieurs domaines :
- le développement du plurilinguisme, notamment en Europe. C'est en effet sur notre continent que se joue en grande part l'avenir de la Francophonie. Cela passe en particulier par un encouragement systématique à l'apprentissage de deux langues vivantes obligatoires dans les systèmes éducatifs nationaux et le soutien aux enseignements bilingues francophones, lesquels concernent aujourd'hui 120 000 élèves dans plus de 30 pays, essentiellement au Moyen-Orient, en Asie du Sud-est et en Europe centrale et méridionale ;
- la promotion du français dans les organisations internationales, et en particulier au sein des institutions européennes à l'heure de l'élargissement, en contribuant à un plan pluriannuel de formation au français qui a touché, en 2002, près de 2 000 agents travaillant dans les institutions européennes et hauts fonctionnaires des pays candidats à l'adhésion. Il nous appartient de concentrer tous nos efforts, tant à titre bilatéral que multilatéral, via l'Organisation internationale de la Francophonie notamment, pour accompagner la mutation profonde des institutions européennes. Nous devrons également être particulièrement vigilant sur le statut du français dans l'Europe élargie ;
- la valorisation du français, comme outil d'aide au développement, par le soutien aux systèmes éducatifs locaux des pays de la Zone de solidarité prioritaire où le français est langue d'enseignement, à titre bilatéral (19 projets FSP en cours en 2002) ou en partenariat avec les instances multilatérales de la Francophonie ;
- l'élargissement et la modernisation de la gamme des outils d'apprentissage de notre langue, par le développement de produits audiovisuels éducatifs innovants adaptés aux publics locaux et l'usage des nouvelles technologies de la communication ;
- le renforcement et la diversification des partenariats avec les associations et institutions uvrant en faveur de la promotion du français, en particulier avec la Fédération internationale des professeurs de français, qui regroupe 180 associations de professeurs de français, soit 90 000 enseignants étrangers de français, dans 113 pays .
Les établissements de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) financés par le ministère des Affaires étrangères à hauteur de 340 millions d'euros en 2003 contribuent très directement à notre coopération d'influence. Ce budget en augmentation de 7,7 % permet d'entretenir 266 établissements, dont 67 en gestion directe et 199 conventionnés avec l'Agence, implantés dans 132 pays. Ces établissements ont scolarisé en 2001/2002 plus de 158 000 élèves, dont 57 % d'étrangers.
Symétriquement à notre effort de présence à l'étranger, on peut se réjouir de la reprise de l'accueil d'étudiants étrangers en France. L'assouplissement des règles de délivrance des visas, l'internationalisation des établissements et le renforcement du dispositif des bourses a permis un net redressement de la situation. 196 400 étudiants ont pu être accueillis en 2002, soit une progression de plus de 30 % en trois ans.
Enfin, la promotion internationale du français passe aussi les nouvelles technologies. A cet égard, le ministère des Affaires étrangères a abondé de 1million d'euros le plan francophone des inforoutes géré par l'Agence de la Francophonie.
On ne saurait non plus oublier les ondes et les écrans. Le projet de chaîne internationale d'information, actuellement à l'étude, est destiné à renforcer la place du français dans l'univers médiatique international où il existe plusieurs opérateurs francophones, TV5, RFI et CFI, pour ne citer que les principaux. Sans préjuger les résultats des concertations en cours sur la chaîne internationale (mission d'information présidée par M. Rochebloine, rapport Baudillon, comité de pilotage paritaire directeurs de cabinet/professionnels de l'audiovisuel mis en place par Matignon à la demande de l'Elysée), le ministère des Affaires étrangères finance d'ores et déjà l'audiovisuel extérieur français à hauteur de 165 millions d'euros par an.
Enfin 3ème orientation : militer pour l'adoption d'une convention internationale sur la diversité culturelle :
Cette convention qui devra être négociée à l'UNESCO donnera aux Etats et aux gouvernements, comme l'a déclaré le président de la République le 2 février dernier, la faculté légitime d'élaborer eux-mêmes des politiques de soutien et de promotion en matière culturelle, c'est-à-dire de choisir leur culture et les moyens qui y concourent. Elle permettra ainsi de faire clairement sortir les biens culturels de la seule logique du commerce international qui inspire l'OMC.
Nous ne partons pas de rien. Le Réseau international sur les politiques culturelles (RIPC) et la Francophonie ont produit des documents de référence importants qui nourriront la négociation qui doit maintenant s'engager à l'UNESCO. Un groupe de travail interministériel a été mis en place à l'initiative du ministère des Affaires étrangères qui réfléchit au contenu de ce document. Le calendrier est toutefois serré car une course de vitesse s'engage avec l'OMC et il convient que nous adoptions cette convention en 2005 au plus tard. C'est ce qu'a annoncé le président Chirac.
Au mois de février dernier, les rencontres sur la diversité culturelle organisées au Carrousel du Louvre par les professionnels de la culture ont été un succès. On peut s'en réjouir car cette opération était exemplaire a plus d'un titre :
- elle réunissait pays du Nord et pays du Sud autour d'un même enjeu ;
- elle était organisée à l'initiative des acteurs de la culture ;
- le ministère de la Culture et le ministère des Affaires étrangères avaient apporté un soutien déterminant ;
- les médias en ont rendu compte dans des termes très positifs.
Ces rencontres qui témoignaient du soutien des milieux culturels rejoignent notre effort diplomatique. Nous atteindrons notre objectif seulement si nous parvenons à y rallier la société civile et l'ensemble des pays et des groupes linguistiques, arabophones, hispanophones, lusophones, russophones qui sont attachés à la diversité culturelle et linguistique.
A cet égard, la Francophonie peut jouer un rôle décisif dans cette mobilisation. Elle a fait de la diversité culturelle son cheval de bataille et le principal champ de sa programmation. Il faut dire que la Francophonie dispose, sur ce thème, d'une antériorité dont aucune autre organisation ne peut se prévaloir. Au Sommet de Maurice, en 1993, les Francophones ont adopté la première résolution sur la diversité culturelle qui traduisait, pour eux, une préoccupation déjà ancienne. En 2001, la Conférence des ministres de la Culture francophones de Cotonou a nourri la Déclaration universelle sur la diversité culturelle de l'UNESCO. L'automne dernier, le Sommet de Beyrouth, consacré au dialogue entre les cultures, a marqué de nouvelles avancées. La Francophonie s'est, depuis, rangée en ordre de bataille.
Cette action de sensibilisation doit maintenant se poursuivre et sortir des cercles qui l'ont portée pour rallier de nouveaux suffrages à sa cause. Nous nous y employons à l'occasion de nos rencontres bilatérales mais aussi au sein de l'Union européenne et du Conseil de l'Europe comme dans les autres organisations régionales, qu'elles soient africaines, américaines ou asiatiques.
Enfin, je terminerai en soulignant la responsabilité des Français eux-mêmes. dans la défense et l'illustration de leur langue et de leur culture. Celle-ci va bien au-delà de l'action des pouvoirs publics, elle engage chacun d'entre nous. Nous célébrerons le 20 mars prochain la fête de la Francophonie. C'est l'occasion pour chacun d'entre nous de marquer son attachement à ce formidable trésor dont nous sommes les dépositaires et vis-à-vis duquel nous faisons trop souvent preuve de désinvolture. Il en va de la crédibilité de notre action internationale en faveur de la diversité culturelle.
Je vous remercie.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 17 mars 2003)
L'expérience de la Coopération internationale et de la Francophonie nous montre en effet qu'un pays ne peut espérer favoriser son développement en se coupant de sa propre culture ou en la laissant se réduire à du folklore. Courir ce risque expose, au mieux, au déracinement, au pire, à des réactions violentes de rejet.
Ce qui vaut pour le développement durable vaut aussi pour la culture : nous avons une responsabilité vis à vis des générations futures. Il est donc légitime que la communauté internationale se mobilise pour protéger la diversité des cultures et des langues, conserver le patrimoine et faire en sorte que l'expression culturelle contemporaine ait les moyens d'exister sans inféoder cette exigence à la richesse ou à la puissance des économies dominantes du moment.
Notre politique s'articule autour de trois orientations :
- promouvoir le développement culturel des pays du Sud ;
- conserver à notre langue son rang et son statut ;
- militer pour l'adoption d'une convention internationale sur la diversité culturelle.
1ère orientation : Promouvoir le développement culturel des pays du sud :
Je ne m'étendrai pas sur le rôle déterminant que joue notre réseau culturel pour faire connaître nos artistes et notre patrimoine à l'étranger. Il est largement connu de vous. Je ne minimise pas sa portée. Comment le pourrais-je tant notre budget est, de ce point de vue, éloquent ? Je voudrais plutôt profiter de l'occasion qui m'est donnée pour attirer votre attention sur un sujet moins connu : les concours que nous apportons plus particulièrement aux pays du Sud, pour les aider à promouvoir leurs uvres et leurs créateurs.
Nos actions de coopération favorisent l'émergence d'une économie de la culture, facteur de développement économique et d'intégration sociale. Cet objectif rejoint d'ailleurs l'ambition du NEPAD qui a pris cette dimension en considération dans sa démarche.
D'une manière générale, tous nos postes diplomatiques, aussi bien que l'Association française d'action artistique et l'administration centrale, ont pour mission de développer les programmes de coopération et d'échanges culturels.
L'AFAA est l'opérateur du ministère des Affaires étrangères et du ministère de la Culture pour les saisons culturelles qui permettent à un pays de présenter les différentes facettes de sa culture. "Djazaïr, l'année de l'Algérie en France" bat actuellement son plein avec plus de deux mille manifestations organisées partout en France. La Chine, la Pologne, le Brésil et la Russie seront à l'honneur ces prochaines années.
Certains outils, mis en place par la Direction de la coopération internationale et du développement sont exclusivement consacrés aux pays du Sud. Ainsi, le Fonds de solidarité prioritaire (FSP) a permis de mettre en place des actions "sur mesure" adaptées aux attentes de nos partenaires.
Neuf projets "FSP-pays" de développement culturel, essentiellement dans des pays africains, sont en cours, trois ont fait l'objet de l'approbation du comité d'examen et quatre sont en préfiguration. Le montant des 12 projets en cours ou en instruction s'élève à 14,9 millions d'euros sur 4 ans.
A compter de juin 2003 un projet "FSP-mobilisateur" de 5,9 millions d'euros renforcera l'action engagée dans le domaine du développement culturel. Il se fixe comme objectif de promouvoir la création contemporaine en appuyant les projets des artistes et des entrepreneurs culturels, tout en structurant leur environnement professionnel dans une perspective de gestion plus autonome et durable. Ce projet renforcera par ailleurs les partenariats régionaux et créera des passerelles avec les pays anglophones, lusophones et hispanophones.
Le programme "Afrique en créations" confié à l'AFAA et financé sur le FSP (2,286 millions d'euros) a permis de mobiliser des fonds très significatifs (1,790 millions d'euros supplémentaires représentant 78,3 % de l'apport français initial sur FSP) auprès de nos partenaires bilatéraux, des ministères africains de la Culture et de trois fondations privées situées aux Etats-Unis et aux Pays-Bas.
Ce dispositif porte ses fruits : une économie de la culture génératrice d'emplois se met en place. La création contemporaine des pays du Sud se renforce : de "La passerelle des Arts" à Paris qui a réuni plus d'un million de visiteurs autour des sculptures d'Ousmane Sow, aux biennales de Tananarive (danse), de Bamako (photo), de Cotonou et de Yaoundé (musiques urbaines), de Dakar ou de Johannesburg (arts plastiques). La présence des artistes africains s'affirme dans les grands rendez-vous internationaux, à la "Documenta" de Kassel, dont le commissaire général était pour la première fois cette année d'origine africaine, comme à la Biennale de Venise. Les musiciens africains sont fêtés en Europe et aux Etats-Unis.
Les rencontres Nord-Sud "Territoires de la création" tenues à Lille en septembre 2000, celles des opérateurs culturels "Opérateurs culturels en réseau-OCRE" tenues à Bamako en octobre 2001, puis à Durban en septembre 2002, montrent toutefois qu'une action et une aide volontaristes demeurent une nécessité, dans des contextes économiques encore fragiles.
Au total, on peut estimer à 4 715 000 euros par an la contribution de la France pour des actions de développement culturel mises en uvre à travers le FSP.
La France est par ailleurs le principal mécène du cinéma africain grâce à des mécanismes comme le Fonds sud ou l'aide directe à la production. Le soutien au cinéma africain a représenté en moyenne 3 millions d'euros annuels entre 1990 et 2001. Il est à cet égard encourageant de constater que l'Agence intergouvernementale de la Francophonie (AIF) et l'Union européenne nous ont rejoints dans cette entreprise.
Il s'agit aujourd'hui d'aller plus loin. C'est l'objectif du Plan images sud qui verra prochainement le jour et que j'ai annoncé le 23 février dernier au Festival panafricain de cinéma de Ouagadougou (FESPACO). Son ambition est de doter le continent africain d'une véritable industrie cinématographique mais également d'une industrie de production audiovisuelle capable de créer des programmes de télévision en nombre et en qualité.
A côté des instruments bilatéraux, nous disposons également d'instruments multilatéraux. Nous pouvons compter avec les appuis de l'Union européenne, à travers les Accords de Cotonou, qui intègrent la dimension culturelle.
L'Agence intergouvernementale de la Francophonie que nous finançons à 60 % met en uvre des programmes d'appui à la création et à la diffusion culturelle des pays en développement. Elle consacre stricto sensu 16 millions d'euros de son action aux programmes culturels et 27,5 millions d'euros si l'on y ajoute ses programmes en faveur de l'éducation et de la culture, soit, au total, 60 % de sa programmation, dont la France finance à elle seule 60 %.
A ce titre elle soutient, entre autres, le Marché des Arts du Spectacle africain d'Abidjan (MASA), le cinéma et des produits culturels.
2ème orientation : Conserver à notre langue son rang et son statut :
Nous ne saurions renoncer évidemment à notre ambition linguistique. Bien au contraire, elle est partie intégrante de notre combat en faveur de la diversité culturelle.
La politique de promotion du français dans le monde menée par le ministère des Affaires étrangères vise à conforter l'apprentissage du français et son statut comme langue de communication internationale. Les actions menées dans ce cadre se manifestent dans plusieurs domaines :
- le développement du plurilinguisme, notamment en Europe. C'est en effet sur notre continent que se joue en grande part l'avenir de la Francophonie. Cela passe en particulier par un encouragement systématique à l'apprentissage de deux langues vivantes obligatoires dans les systèmes éducatifs nationaux et le soutien aux enseignements bilingues francophones, lesquels concernent aujourd'hui 120 000 élèves dans plus de 30 pays, essentiellement au Moyen-Orient, en Asie du Sud-est et en Europe centrale et méridionale ;
- la promotion du français dans les organisations internationales, et en particulier au sein des institutions européennes à l'heure de l'élargissement, en contribuant à un plan pluriannuel de formation au français qui a touché, en 2002, près de 2 000 agents travaillant dans les institutions européennes et hauts fonctionnaires des pays candidats à l'adhésion. Il nous appartient de concentrer tous nos efforts, tant à titre bilatéral que multilatéral, via l'Organisation internationale de la Francophonie notamment, pour accompagner la mutation profonde des institutions européennes. Nous devrons également être particulièrement vigilant sur le statut du français dans l'Europe élargie ;
- la valorisation du français, comme outil d'aide au développement, par le soutien aux systèmes éducatifs locaux des pays de la Zone de solidarité prioritaire où le français est langue d'enseignement, à titre bilatéral (19 projets FSP en cours en 2002) ou en partenariat avec les instances multilatérales de la Francophonie ;
- l'élargissement et la modernisation de la gamme des outils d'apprentissage de notre langue, par le développement de produits audiovisuels éducatifs innovants adaptés aux publics locaux et l'usage des nouvelles technologies de la communication ;
- le renforcement et la diversification des partenariats avec les associations et institutions uvrant en faveur de la promotion du français, en particulier avec la Fédération internationale des professeurs de français, qui regroupe 180 associations de professeurs de français, soit 90 000 enseignants étrangers de français, dans 113 pays .
Les établissements de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) financés par le ministère des Affaires étrangères à hauteur de 340 millions d'euros en 2003 contribuent très directement à notre coopération d'influence. Ce budget en augmentation de 7,7 % permet d'entretenir 266 établissements, dont 67 en gestion directe et 199 conventionnés avec l'Agence, implantés dans 132 pays. Ces établissements ont scolarisé en 2001/2002 plus de 158 000 élèves, dont 57 % d'étrangers.
Symétriquement à notre effort de présence à l'étranger, on peut se réjouir de la reprise de l'accueil d'étudiants étrangers en France. L'assouplissement des règles de délivrance des visas, l'internationalisation des établissements et le renforcement du dispositif des bourses a permis un net redressement de la situation. 196 400 étudiants ont pu être accueillis en 2002, soit une progression de plus de 30 % en trois ans.
Enfin, la promotion internationale du français passe aussi les nouvelles technologies. A cet égard, le ministère des Affaires étrangères a abondé de 1million d'euros le plan francophone des inforoutes géré par l'Agence de la Francophonie.
On ne saurait non plus oublier les ondes et les écrans. Le projet de chaîne internationale d'information, actuellement à l'étude, est destiné à renforcer la place du français dans l'univers médiatique international où il existe plusieurs opérateurs francophones, TV5, RFI et CFI, pour ne citer que les principaux. Sans préjuger les résultats des concertations en cours sur la chaîne internationale (mission d'information présidée par M. Rochebloine, rapport Baudillon, comité de pilotage paritaire directeurs de cabinet/professionnels de l'audiovisuel mis en place par Matignon à la demande de l'Elysée), le ministère des Affaires étrangères finance d'ores et déjà l'audiovisuel extérieur français à hauteur de 165 millions d'euros par an.
Enfin 3ème orientation : militer pour l'adoption d'une convention internationale sur la diversité culturelle :
Cette convention qui devra être négociée à l'UNESCO donnera aux Etats et aux gouvernements, comme l'a déclaré le président de la République le 2 février dernier, la faculté légitime d'élaborer eux-mêmes des politiques de soutien et de promotion en matière culturelle, c'est-à-dire de choisir leur culture et les moyens qui y concourent. Elle permettra ainsi de faire clairement sortir les biens culturels de la seule logique du commerce international qui inspire l'OMC.
Nous ne partons pas de rien. Le Réseau international sur les politiques culturelles (RIPC) et la Francophonie ont produit des documents de référence importants qui nourriront la négociation qui doit maintenant s'engager à l'UNESCO. Un groupe de travail interministériel a été mis en place à l'initiative du ministère des Affaires étrangères qui réfléchit au contenu de ce document. Le calendrier est toutefois serré car une course de vitesse s'engage avec l'OMC et il convient que nous adoptions cette convention en 2005 au plus tard. C'est ce qu'a annoncé le président Chirac.
Au mois de février dernier, les rencontres sur la diversité culturelle organisées au Carrousel du Louvre par les professionnels de la culture ont été un succès. On peut s'en réjouir car cette opération était exemplaire a plus d'un titre :
- elle réunissait pays du Nord et pays du Sud autour d'un même enjeu ;
- elle était organisée à l'initiative des acteurs de la culture ;
- le ministère de la Culture et le ministère des Affaires étrangères avaient apporté un soutien déterminant ;
- les médias en ont rendu compte dans des termes très positifs.
Ces rencontres qui témoignaient du soutien des milieux culturels rejoignent notre effort diplomatique. Nous atteindrons notre objectif seulement si nous parvenons à y rallier la société civile et l'ensemble des pays et des groupes linguistiques, arabophones, hispanophones, lusophones, russophones qui sont attachés à la diversité culturelle et linguistique.
A cet égard, la Francophonie peut jouer un rôle décisif dans cette mobilisation. Elle a fait de la diversité culturelle son cheval de bataille et le principal champ de sa programmation. Il faut dire que la Francophonie dispose, sur ce thème, d'une antériorité dont aucune autre organisation ne peut se prévaloir. Au Sommet de Maurice, en 1993, les Francophones ont adopté la première résolution sur la diversité culturelle qui traduisait, pour eux, une préoccupation déjà ancienne. En 2001, la Conférence des ministres de la Culture francophones de Cotonou a nourri la Déclaration universelle sur la diversité culturelle de l'UNESCO. L'automne dernier, le Sommet de Beyrouth, consacré au dialogue entre les cultures, a marqué de nouvelles avancées. La Francophonie s'est, depuis, rangée en ordre de bataille.
Cette action de sensibilisation doit maintenant se poursuivre et sortir des cercles qui l'ont portée pour rallier de nouveaux suffrages à sa cause. Nous nous y employons à l'occasion de nos rencontres bilatérales mais aussi au sein de l'Union européenne et du Conseil de l'Europe comme dans les autres organisations régionales, qu'elles soient africaines, américaines ou asiatiques.
Enfin, je terminerai en soulignant la responsabilité des Français eux-mêmes. dans la défense et l'illustration de leur langue et de leur culture. Celle-ci va bien au-delà de l'action des pouvoirs publics, elle engage chacun d'entre nous. Nous célébrerons le 20 mars prochain la fête de la Francophonie. C'est l'occasion pour chacun d'entre nous de marquer son attachement à ce formidable trésor dont nous sommes les dépositaires et vis-à-vis duquel nous faisons trop souvent preuve de désinvolture. Il en va de la crédibilité de notre action internationale en faveur de la diversité culturelle.
Je vous remercie.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 17 mars 2003)