Déclaration de Mme Claudie Haigneré, ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies, sur les perspectives offertes par l'hydrogène comme source d'énergie, Grenoble, le 5 septembre 2003.

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Circonstance : 1ère Conférence européenne de l'hydrogène énergie, Grenoble du 2 au 5 septembre 2003

Texte intégral


Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
Mesdames et Messieurs,
Je me réjouis de pouvoir aujourd'hui participer à cette session de clôture de la 1ère Conférence Européenne de l'Energie organisée, sous les auspices de l'Association Européenne de l'Hydrogène, par l'Association Française de l'Hydrogène.
Alors que vient de s'achever le débat national sur les énergies, à l'heure où nous venons, cet été, de mesurer l'acuité des questions énergétiques et des enjeux climatiques, il paraît plus que jamais nécessaire d'inscrire notre politique énergétique dans une vision prospective.
Je salue donc cette initiative qui vient, à point nommé, braquer un coup de projecteur sur ce qu'on appelle "l'hydrogène énergie" ou encore "l'hydrogène vecteur énergétique" : permettant de "stocker" l'énergie, l'hydrogène pourrait s'intégrer dans nombres de nos usages.
Vous le savez, la politique énergétique de la France s'appuie sur trois axes : fournir une énergie durable, économique et sûre.
Le Premier Ministre l'a rappelé ; si nous voulons, d'ici 2050, diviser par quatre les émissions de gaz à effet de serre pour faire face au défi que représente le réchauffement climatique, il nous faudra porter nos efforts dans deux directions, la maîtrise de la consommation, d'une part, la diversification du bouquet énergétique, d'autre part.
Au sein de ces énergies, l'hydrogène occupe une place à part.
Parce qu'elle semble apporter des réponses au rêve d'une énergie qui serait à la fois inépuisable, propre et d'un coût acceptable.
Si je parle de rêve, ce n'est d'ailleurs pas tout à fait par hasard : n'est-ce pas Jules Verne qui, prospectiviste avant l'heure, échafaudait, dès 1874, dans L'île Mystérieuse, un scénario faisant de l'hydrogène la source d'énergie du futur ?
"Oui, mes amis, dit Cyrus Smith, je crois que l'eau sera un jour employée comme combustible, que l'hydrogène et l'oxygène, qui la constituent, utilisés isolément ou simultanément, fourniront une source de chaleur et de lumière inépuisables...".
Mais quittons Jules Verne pour constater que l'idée d'utiliser les promesses de l'hydrogène a fait son chemin - la tenue de cette conférence est la meilleure preuve que ce vecteur est maintenant à l'aube de permettre une réalisation concrète.
De grands espoirs sont fondés sur l'hydrogène, qui, associé à la pile à combustible, pourrait fournir de l'énergie pour les transports, les applications stationnaires dans le bâtiment, l'industrie sans émission de CO2. Certaines controverses existent : les débats lors de la conférence de juin à Bruxelles ont montré qu'il s'agissait de valider à la fois le bilan énergétique du "cycle de l'hydrogène" (de la production à l'utilisation), et l'ensemble des questions techniques que pose le passage à une économie de l'hydrogène comme annoncé par les Etats Unis.
Des options sont encore très ouvertes qui nécessitent des efforts de recherche : comment passer à l'étape de production de masse efficace, et l'associer au bouquet énergétique. On voit que la France, qui a peu d'énergie fossile est dans une situation très différente des Etats Unis, qui envisagent dans une première étape, d'utiliser les produits "moins nobles" du pétrole ou du charbon. Il faut également s'attaquer aux questions de stockage, aux questions de transport et de distribution.
Ces différents aspects renvoient à la nécessité de définition de standards, des questions de sécurité des installations, à des réseaux de distribution transeuropéens
La définition d'un scénario européen en matière d'hydrogène énergie rendue possible, entre autres, par la mise en place d'un groupe de haut niveau sur l'hydrogène et les piles à combustible - et par la création d'une plate-forme européenne sur les technologies de l'hydrogène - constitue à cet égard une étape capitale.
C'est dans cette perspective que je souhaite rappeler brièvement les grands axes de la politique de recherche que nous menons autour de l'hydrogène, avec le réseau de recherche technologique sur la pile à combustible (PaCo) qui rassemble acteurs industriels et recherche publique, mais également avec le Centre National de Recherche Technologique "pile à combustible et interface pour les transports" qui se met en place à Belfort.
De plus, mon ministère travaille avec les organismes et les industriels afin que nous définissions un plan qui unisse nos actions et coordonne les différentes recherches, que ce soit sur la production, le transport et l'utilisation de l'hydrogène ou encore sur la pile à combustible..
Mais il nous faut en être bien conscients : comme je l'ai mentionné l'hydrogène soulève autant de questions et de choix majeurs qu'il suscite d'espoirs. Pour y répondre et faire en sorte que l'Europe, dans les vingt prochaines années, puisse jouer un rôle majeur dans ce domaine, il est indispensable de coordonner au mieux la recherche européenne.
C'est à cette condition seulement que pourra émerger une stratégie globale de Recherche Développement européenne, seule à même de répondre aux défis technologiques de ce qui sera, à n'en pas douter, la révolution énergétique du troisième millénaire.
Mesdames, Messieurs,
Je sais à quel point les débats de cette semaine ont été riches d'éclairages variés et complémentaires.
Je sais qu'ils ont permis des échanges fructueux portant aussi bien sur les différentes politiques nationales, que sur celles menées dans les régions, mais également entre industriels et chercheurs.
Cette collaboration sera, je l'espère, riche. Je m'en réjouis profondément et je forme le vu qu'elle nous permette de franchir une nouvelle étape dans la préparation de notre avenir énergétique.
Je vous remercie de votre attention.
(Source http://www.recherche.gouv.fr, le 8 septembre 2003)