Texte intégral
Monsieur le Directeur de Cabinet du Ministre chargé de l'Agriculture et de la Pêche,
Monsieur le Vice-Président
Madame la Directrice générale,
Monsieur le Président directeur général,
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,
C'est avec un grand plaisir que j'accueille aujourd'hui, ici au ministère délégué à la recherche et aux nouvelles technologies, les représentants des partenaires qui vont porter ensemble sur les fonds baptismaux, dans quelques minutes, le Groupement d'Intérêt Scientifique "Institut de la génomique marine".
Je voudrais saluer les nombreux invités présents ici qui ont contribué, par leur engagement, à l'émergence de cette heureuse initiative de coordination et aidé à sa mise en place officielle, avec l'accord formel de tous les acteurs concernés.
Le projet de ce GIS était bien avancé il y a un an déjà.
Mais, avant de me prononcer sur cette proposition intéressante en soi, j'ai tenu à ce qu'une réflexion de fond soit menée quant à l'intérêt d'impliquer le ministère chargé de la recherche dans de telles structures de coordination.
Depuis plus d'un an, le ministère ne s'est engagé dans aucune nouvelle convention de GIS, dans l'attente des conclusions de cette réflexion.
Cette réflexion sur la coordination en sciences du vivant va, vous le savez, bien au-delà de la question des GIS. C'est, pour partie, le sens de la mission confiée au Professeur Griscelli qui devrait prochainement me remettre, ainsi qu'à Jean-François Mattei et Luc Ferry, une première version de son rapport.
Nous avons en effet vu ces dernières années se multiplier les structures de coordination, de natures juridiques variées : GIS, GIP, GIE, société civile, sans que leur efficacité soit avérée. Il faut d'ailleurs un certain investissement personnel pour ne pas se perdre dans les méandres juridico-scientifiques de cette biodiversité bien particulière, qui démontre la capacité d'imagination des biologistes !
Ma conviction aujourd'hui est que cet empilement de structures doit absolument être rectifié.
Ces instruments de coopération scientifique visaient à compenser, devant l'urgence, les imperfections de notre dispositif de recherche, fondé sur l'organisation de notre potentiel en grands établissements publics de recherche et d'enseignement supérieur dont les missions se recouvraient partiellement.
Une réflexion de fond doit être poursuivie pour trouver les voies d'évolution de ce système, afin de le rationaliser et de pouvoir prendre en charge, avec la réactivité voulue, des champs jugés prioritaires ou nécessitant l'intervention de multiples disciplines dispersées dans différents établissements.
Le Premier ministre a réaffirmé avec force lors d'un discours de politique générale devant le Parlement, la nécessité de retrouver une logique de projets scientifiques, au lieu de pérenniser des structures que l'on contraindrait pour être en mesure de répondre aux objectifs scientifiques de notre temps.
Dans le champ de la recherche biomédicale, un travail important d'élaboration de propositions, confié au Professeur Claude Griscelli, est sur le point d'aboutir. Mais notre ambition doit aller au-delà du champ biomédical, au-delà même des sciences du vivant et englober à terme l'ensemble de la recherche.
Je compte lancer d'ici l'automne une large consultation sur l'avenir de la recherche française. Un des questionnements essentiels visera à identifier les instruments les plus adaptés à une science dynamique et compétitive, largement ouverte sur l'Europe.
Bien que déterminée à ce que cette initiative aboutisse, si nécessaire, à une évolution radicale de notre dispositif de recherche, je suis parfaitement consciente du calendrier qu'implique une telle ambition.
Aussi, après m'être interrogée sur l'utilité de mettre en place un nouvel instrument de coopération scientifique spécifiquement consacré à la génomique marine, j'ai finalement accepté cette proposition dans ce cas très particulier.
Tout d'abord parce qu'un GIS est une structure conventionnelle légère. Ensuite, parce que les porteurs de cette initiative ont su me convaincre qu'il existe un argument d'opportunité auquel je suis particulièrement sensible : la construction de l'Europe de la recherche.
Le GIS "Institut de la génomique marine" va ainsi compléter de grands programmes consacrés à des secteurs de la génomique représentant un enjeu particulier, d'ordre à la fois scientifique et socio-économique, tels que Génoplante ou Agenae/Génanimal, qui bénéficient actuellement du soutien conjoint du Fonds national de la science et du Fonds de la recherche technologique.
Génoplante, le plus ancien, est entré dans une phase active de collaboration européenne. Ces instruments thématiques me semblent adaptés à cet objectif et je souhaite donc que le GIS "Institut de la génomique marine", en même temps qu'il facilite les coopérations au sein de la communauté nationale de la biologie marine, apporte une réelle plus-value au niveau européen
Notre recherche nationale en biologie marine est de grande qualité, probablement la plus développée de l'Union Européenne.
La communauté des biologistes marins a toutefois pu par le passé apparaître comme dispersée, du point de vue de son affiliation à des établissements et de ses sites de recherche, et manquant de coordination dans ses programmes.
Ce qui a eu pour conséquence une lisibilité insuffisante de nos recherches fondamentales sur les modèles et écosystèmes marins, au plan national sans doute plus qu'au niveau international, puisque les scientifiques spécialisés des autres pays reconnaissent volontiers la qualité de l'apport scientifique français à la biologie marine.
A travers le GIS que nous mettons en place aujourd'hui, cette communauté se fédère autour des approches génomiques et post-génomiques de la biologie des organismes marins, avec l'appui de notre solide dispositif de recherche en génomique.
La communauté de la biologie marine s'approprie ainsi les outils les plus neufs de la recherche en sciences du vivant, ce qu'il est convenu d'appeler la "biologie à haut débit". Trop longtemps, spécialistes fondamentaux de la génomique et biologistes marins ont insuffisamment dialogué.
La maturation du GIS "Institut de la génomique marine", dont le programme "Génomer" fut une étape concrète, a mis fin, je le pense, à cette méconnaissance réciproque, et a montré à chacun quelle pouvait être la richesse d'une convergence des efforts.
Vos ambitions et les attentes de mon ministère à votre égard sont d'une grande exigence. De vastes perspectives s'ouvrent à vous :
Des progrès dans l'exploration de la biodiversité marine, grâce à la génomique comparative ;
Des progrès dans notre compréhension et dans nos actions de préservation et de protection des écosystèmes marins, littoraux ou benthiques [vivants sur le fonds des mers], grâce à la génomique environnementale ;
Une approche plus scientifique de la gestion des ressources naturelles et des stocks d'espèces halieutiques, mais aussi de l'amélioration et de la diversification des espèces aquacoles grâce à la génomique fonctionnelle ;
Enfin, la découverte de nouveaux modèles et de nouveaux outils d'investigation, enrichissant les approches les plus fondamentales de la biologie. A titre d'exemple, 6 Prix Nobel de Médecine ont été obtenus pour des travaux conduits sur des modèles marins.
Nous attendons aussi de vous une contribution active à la construction de l'espace européen de la recherche, mais je crois savoir que vous avez pris sur ce volet une certaine avance...
La communauté scientifique européenne spécialisée en biologie marine attendait clairement une initiative française, reconnaissant le rôle moteur que devait jouer notre pays dans ce domaine. Appuyés sur la forte organisation de notre dispositif de recherche en génomique, vous avez su répondre à cette sollicitation et je vous en félicite.
Le projet de Réseau d'Excellence en Génomique Marine qui en a résulté, regroupant 43 instituts et établissements dans 15 pays, vient de recevoir un avis scientifique très élogieux. Je me réjouis très sincèrement de ce premier succès.
En tant que porteurs de ce projet, vous confortez la prééminence de notre pays dans un domaine de recherche essentiel, réellement stratégique pour notre avenir.
Je souhaite remercier tous ceux qui ont contribué à l'élaboration et à la présentation de ce projet, tout au long d'un processus très interactif d'échanges scientifiques et méthodologiques : le Ministère de l'Agriculture, de l'Alimentation, de la Pêche et des Affaires Rurales, le CNRS, l'IFREMER, l'Université Pierre et Marie Curie et ses trois stations marines, les Universités de Bretagne et la Région Bretagne elle-même, dont l'appui éclairé par une compréhension de l'enjeu et une volonté d'aider à organiser l'excellence scientifique nationale ne vous a jamais fait défaut.
Merci à tous les partenaires, que d'autres devraient rejoindre, attirés par le dynamisme des fondateurs.
Merci enfin à Bernard Kloareg, cheville ouvrière du projet, dont l'enthousiasme, la conviction communicative et sans doute aussi la ténacité ont permis à cette belle entreprise de prendre un essor prometteur. Je crois que ce rôle reconnu par tous le désigne naturellement pour assurer la direction du GIS "Institut de la génomique marine".
La mer, source de la vie, ressource essentielle pour l'humanité, dominant la surface de notre planète bleue, qu'elle soit contemplée depuis ses rivages ou de l'Espace, renferme en son sein une confondante diversité biologique, depuis les plateaux continentaux jusqu'aux sédiments les plus profonds.
Pratiquement tous les groupes d'êtres vivants contribuent à ses communautés biologiques, beaucoup lui sont exclusifs, bien d'autres restent à y découvrir.
La contribution de ses écosystèmes aux grands équilibres géochimiques a été déterminante pour le devenir de la Terre et le reste pour son avenir.
Des fonctions biologiques encore inconnues s'y exercent.
Leur découverte est importante pour le progrès des connaissances mais aussi pour les usages biotechnologiques nouveaux, encore insoupçonnés, qui en résulteront. Le champ qui s'offre à vous est donc un des plus vastes qui soit.
Si vous me pardonnez cette métaphore quelque peu "terrienne", je vous souhaite donc de fructueuses moissons, et pourquoi pas, quelques pêches miraculeuses
Je vous remercie de votre attention.
Je passe maintenant la parole à Jean-Yves Perrot, directeur de cabinet, qui représente Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, empêché de se joindre à nous et qui le regrette vivement en raison de son intérêt pour ces sujets.
(Source http://www.recherche.gouv.fr, le 10 juillet 2003)