Déclaration de M. Roger-Gérard Schwartzenberg, ministre de la recherche, sur l'innovation en matière de biotechnologies, notamment la génomique et le lancement d'un réseau Genhomme, Paris le 11 juillet 2000.

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Circonstance : Lancement du fonds d'amorçage "Bioam" dédié aux sciences du vivant à Paris le 11 juillet 2000

Texte intégral

Mesdames, messieurs,
J'ai le plaisir, en compagnie de Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie, de vous présenter le lancement du fonds d'amorçage "Bioam" dédié aux sciences du vivant. Ce lancement est doublement important à mes yeux. D'abord par ce qu'il signifie en matière de potentiel de création d'entreprise, et donc d'emplois, ensuite par ce qu'il est un des éléments clés du dispositif pour faire de la France un acteur majeur dans les biotechnologies, et donc préparer aujourd'hui notre avenir.
La mise en place de ce fonds reflète la volonté du gouvernement de jouer un rôle moteur dans la création d'entreprises permettant de valoriser l'innovation en matière de biotechnologies, ou peut-être devrais-je dire, de bio-ingénierie. Il s'agit de résultats généralement issus des laboratoires publics de recherche. Les principaux organismes de recherche présents dans les sciences du vivant participent à ce fonds: le CNRS, l'INSERM et l'INRA sont partie prenante de ce fonds à hauteur de 2 MF chacun. D'autre part, l'Etat a décidé de s'engager à hauteur de 33 MF sous forme d'avance remboursable. En outre, la Caisse des dépôts et consignations, qui a été associée dès l'origine à ce projet, va investir 39 MF. La participation de l'Etat et de ses établissements est donc importante, démontrant ainsi son rôle d'incitation qui est nécessaire. Cette action publique volontariste a déclenché un effet de mobilisation d'investisseurs privés, dont Axa et la Caisse d'Epargne Rhône Alpes Lyon, que rejoindront bientôt d'autres partenaires, illustrant ainsi le mécanisme de levier d'un tel dispositif.
Les actions lancées par le gouvernement depuis les assises de l'innovation de juin 1998 ont permis de favoriser l'éclosion des entreprises technologiques en France. Permettez moi de vous rappelez les principales :
La loi sur l'innovation et la recherche, du 12 juillet 1999. Cette loi permet, notamment, aux chercheurs et enseignants-chercheurs d'apporter leur concours scientifique à une entreprise qui valorise leurs recherches, de prendre une participation minoritaire dans son capital, voire d'en devenir un dirigeant.
La création des incubateurs : 29 incubateurs ont été validés par le gouvernement parmi lesquels 8 Bio-incubateurs. Chaque région continentale française dispose d'au moins un incubateur dont la majorité sont susceptibles de recevoir des entreprises biotechnologiques. 152 millions de francs ont été consacrés à cette action qui devrait permettre la création d'environ 300 à 400 entreprises sur 3 ans. Un réseau de bio-incubateurs devrait, en outre, prochainement se mettre en place qui favorisera les échanges d'informations et renforcera la position française au niveau européen.
En matière de financement d'entreprises innovantes, le 2ème concours national de création d'entreprises, doté de 200 millions de francs, est un succès. Sur les 1805 dossiers reçus, 296 feront l'objet d'une dotation dont 60 en biotechnologie soit plus de 20% des lauréats. Parmi eux, 32 dossiers sont en émergence alors que 28 sont au stade de la création développement de leur entreprise.
Au même titre que pour le fonds BioAm, l'Etat apporte des avances remboursables aux filiales d'universités ou d'organismes qui participent à des fonds d'amorçage. Deux nouveaux fonds nationaux viennent d'être retenus et seront lancés prochainement, dans le domaine du multimédia et des télécommunications, ainsi qu'un nouveau fonds régional et multi-sectoriels en Franche Comté.
Le budget total consacré à ces avances est de 150 MF. Ainsi, le capital d'amorçage, hier encore délaissé, par les capitaux-risqueurs parce que trop difficile à appréhender, devrait rapidement se développer en France. Il permettra aux jeunes entreprises de trouver les fonds nécessaires à leur première phase de croissance, à une période où la rentabilité n'apparaît pas encore.
Nous considérons que le secteur des biotechnologies est un domaine industriel parmi les plus porteurs et nous souhaitons encourager fortement pour cela nos créateurs d'entreprise. La majorité des inventions en biotechnologie se font soit directement dans les laboratoires publics, soit dans les entreprises qui en découlent - et ici encore, dans la plupart des cas, en relation avec la recherche publique. La création de ce fonds devrait permettre à un plus grand nombre d'entre elles de trouver le financement nécessaire aussi bien pour finaliser leur recherche que pour mettre sur le marché le fruit de leur invention, c'est-à-dire, par exemple, de nouveaux médicaments ou de nouvelles techniques de soins.
Pour montrer la richesse de ce secteur en matière de potentialité industrielle, je citerai un domaine qui me tient particulièrement à cur : la génomique.
J'ai récemment, comme vous le savez, présenté avec plusieurs de mes collègues, le fruit du travail du consortium public sur le génome humain. Celui-ci accélérera considérablement l'identification des gènes responsables de maladies monogéniques, multigéniques et des maladies orphelines. Il devrait permettre la création de nombreuses entreprises dans les domaines aussi variés que le diagnostic, les vaccins, les thérapies géniques et cellulaires ou les nouveaux médicaments. Comme je l'ai déjà indiqué, trouver de nouveaux traitements, soigner des maladies aujourd'hui incurables, est aussi un enjeu éthique majeur.
Pour favoriser la recherche et la création d'entreprise dans le secteur de la post-génomique, j'ai engagé plusieurs actions qui se renforcent mutuellement :
un apport supplémentaire à la recherche fondamentale, avec l'Action Concertée Incitative "Biologie Intégrative",
l'intégration de toutes les composantes de la recherche, du fondamental à la finalisation, avec le réseau des génopoles, qui comprend notamment les génopoles d'Evry, de Strasbourg-Nancy, de Lille, de Toulouse, Montpellier,
Le lancement du réseau GenHomme qui associe les laboratoires de recherche publiques, aux industries et aux associations caritatives, pour valoriser les connaissances issues de la génomique humaine.
Quand on parle des biotechnologies, il ne faut pas oublier l'environnement et l'industrie agro-alimentaire qui se placent, rappelons-le, au premier rang des industries françaises par son CA de 800 milliards de francs. Le développement industriel se situe essentiellement au niveau de la qualité et de la sécurité de l'eau et des aliments. A ce stade, la maîtrise des biotechnologies est essentielle dans la conception, la fabrication et la sécurité des aliments de demain. Ces secteurs traditionnels, où la France excelle, peuvent aussi être source de création et d'innovation.
Rappelons que la bio-ingénierie associe également l'instrumentation biomédicale pour le diagnostic et le traitement des grandes maladies.
La biotechnologie est le domaine qui, avec les nouvelles technologies de l'information crée le plus d'entreprises. C'est aussi un secteur difficile, avec des espérances de gains et de rentabilité souvent éloignées. Mais c'est une activité stratégique pour le pays et porteuse de croissance à long terme. L'Etat y a toute légitimité pour accompagner le secteur privé sans se substituer à lui. C'est l'esprit de nos mesures en faveur de la création d'entreprises ; c'est la signification de notre mode d'intervention, l'avance remboursable. L'Etat valorise les fruits de la recherche publique et incite à la création de nouvelles richesses dans le domaine concurrentiel.
Mesdames, messieurs, je vous remercie pour votre attention et je souhaite avec vous bonne chance et bon vent au fonds "Bioam" ainsi qu'aux nombreuses sociétés à qui il permettra de prendre leur envol.
(source http://www. recherche.gouv.fr, le 12 juillet 2000)