Texte intégral
Jean-Michel Aphatie .- Bonjour Nelly Olin.
Nelly Olin .- "Bonjour."
RTL s'interroge sur un éventuel repli communautaire dans les cités des grandes villes françaises. Dimanche dernier, lors du scrutin européen, la liste "Euro Palestine", uniquement présente en Ile-de-France, et sur laquelle figurait le comédien Dieudonné, a réalisé dans certaines villes et dans certains quartiers des scores étonnants, et c'est le cas notamment à Garges-lès-Gonesses, une ville du Val d'Oise dont vous étiez le maire, N. Olin, jusqu'à votre entrée dans le Gouvernement. Vous êtes rentrée au début du mois d'avril dans le Gouvernement et vous avez quitté la mairie de Garges-lès-Gonesses. Dans un contexte de forte abstention dans cette ville, N. Olin, la liste Euro-Palestine a réalisé 10,75 % des suffrages. Ça vous a surpris ?
"Ça m'inquiète. Profondément !"
Surprise ou pas ?
"Ça m'a surpris, mais ça m'inquiète surtout !"
Cela vous inquiète, pourquoi ? vous pouvez expliquer ?
"Parce que dans cette ville, nous avons 64 ethnies et lorsqu'il y a malheureusement des conflits tels qu'en Palestine et en Israël et dans le Proche-Orient, nous avons sur cette ville et dans d'autres villes également de grandes tensions. Nous avons chaque jour à travailler avec les communautés pour essayer de maintenir l'équilibre, très fragile, et je pense, et je suis convaincue que ce genre de liste et ce genre de personnages en tout cas, sont là pour attiser la haine et n'apportent en tout cas aucune solution aux problèmes des banlieues."
Est-ce que ce vote, ce résultat constaté dans les urnes, est d'une certaine façon aussi le signe d'un échec du travail qui a été le vôtre, c'est-à-dire de cette tentative d'insérer ces gens de la communauté arabo-musulmane dans le pacte Républicain ?
"Non, non. Alors là je dis non Les résultats des élections municipales en 2001 ont fait que j'ai gagné au premier tour dans cette ville avec plus de 63 % des voix. Je crois que quand il s'agit d'élections locales, on reconnaît le travail. Quand il s'agit d'élections autres, les gens s'expriment comme ils l'entendent. "
Ils s'expriment comme ils l'entendent, mais ils ont aussi envie de faire passer un message... Et ce message-là, vous, comment vous l'analysez ce matin ?
"Je vous l'ai dit : pour moi, c'est une grosse inquiétude qui naît sur cette ville, où j'avais pensé en tout cas que toutes les tensions étaient apaisées ; je condamne en tout cas les gens qui viennent porter des messages qui ne sont pas des messages d'espoir, contrairement à ce qu'on a pu dire, mais des messages de haine. Ce sont des gens dangereux, qui n'ont pas d'ailleurs en tout cas le sens du travail sur le terrain, et qui veulent se faire une image alors qu'ils ont autre chose à faire."
On condamne les gens qui portent le message. Mais on ne peut pas condamner les gens qui votent.
"Non, mais je ne condamne pas les gens qui votent, parce qu'à ces gens-là, on a voulu faire passer un message qui n'en est pas un en fait. "
Mais ils ont voté librement, et en leur âme et conscience.
"Je suis d'accord, mais ceux qui ont fait cette liste n'apportent aucune solution aux problèmes des banlieues, ni aucun message constructif, ni aucune solution pour régler les problèmes que nous avons à régler au quotidien."
Restons sur les votants, N. Olin : qui sont-ils d'après vous ? Des jeunes, des gens qui n'ont pas l'habitude de voter, des gens qui se sentent exclus du Pacte républicain et qui profitent de cette occasion pour dire quelque chose ?
"Je ne sais pas qui ils sont, parce que je n'ai pas le pouvoir de le savoir. Je pense que c'est effectivement un repli communautarisme."
Pensez-vous, constatez-vous, parallèlement à ce repli communautariste puisque vous employez l'expression, une montée de l'intégrisme religieux dans votre ville ?
"Oui, tout à fait. Je ne suis pas la seule qui constate ça depuis quelques années. C'est assez difficile et c'est pour ça que nous devons, nous, élus sur le terrain, essayer de faire en sorte de traiter les communautés sur un pied d'égalité, et surtout s'attacher à ce qu'ils participent à tout ce qui se fait dans la ville. Aujourd'hui, nous avions réussi cela, je continuerai, même si je ne suis plus le maire je suis le premier adjoint, avec l'équipe et le maire qui la dirigent, je continuerai à faire en sorte que nous respections l'équilibre, tout en respectant chacun dans sa religion, dans ses confessions, dans le sens de la famille qu'il a probablement d'une manière différente de la nôtre. Mais en tout cas, nous avons ce devoir d'équilibre, et je crois qu'en tout cas le président de la République, lorsqu'il est intervenu devant les préfets, a condamné toutes les discriminations, et nous continuerons à les condamner. Nous voulons l'égalité, nous voulons l'égalité des chances, nous voulons l'égalité pour tous. Et je crois que c'est le travail que nous avons encore à faire. Et c'est une preuve que nous avons encore plus à travailler au jour d'aujourd'hui."
Il n'y a pas que la condamnation N. Olin des discriminations. Le président de la République venait d'être élu. Il fait son premier discours à Troyes, c'est le 14 octobre 2002, il dit ceci : "le refus des communautarismes ne se conçoit pas sans une lutte contre les discriminations".
"Mais tout à fait..."
Mais de lutte contre les discriminations, on n'en voit pas beaucoup...
"Moi, c'est un mot que je n'aime pas, la discrimination. Moi je pense qu'à Garges, il n'y a pas de discrimination, et dans beaucoup de villes il n'y a pas de discrimination. Nous traitons tout le monde de la même manière."
Mais est-ce que c'est la solution ? On a vu, c'était l'automne dernier - c'est un débat qu'on a un peu oublié - mais un ministre de la République dire qu'il fallait nommer un préfet, justement en opérant une discrimination. Ce n'est pas la bonne solution, N. Olin ?
"Je ne sais pas si c'est la bonne solution. Moi, je m'attache à ce que j'ai fait et je ne suis pas forcément un exemple. Beaucoup de maires de villes difficiles font la même chose. C'est-à-dire que nous n'avons pas de discrimination à faire, nous devons traiter tout le monde sur un pied d'égalité et nous devons faire en sorte surtout que tout le monde ait sa place dans nos villes et sa place dans la société."
Ce communautarisme, il se remarque aussi dans les écoles de votre ville par exemple ? On voit des lycéens, des jeunes filles, de jeunes garçons manifester ce type d'appartenance ?
"Non, très peu, très peu et je pense que dans nos collèges et dans nos lycées, nous avons même de très bons résultats, et je crois que tout le monde vit bien. Et moi je sais que lorsque je fais la cérémonie de récompenses pour les jeunes diplômés gargeois, vous avez effectivement tous ces jeunes issus de toutes les communautés, ça se passe très bien. Pour eux, c'est un honneur. Et je crois que ça c'est pour nous quand même un peu un espoir."
Dans votre activité ministérielle, vous luttez contre l'exclusion...
"Et la réinsertion..."
Et la réinsertion, vous animerez à ce sujet une conférence nationale, le 6 juillet à Paris. Et puis il y aura ensuite un conseil interministériel la même journée. Là aussi, on a l'impression qu'il y a beaucoup de discours et pas beaucoup d'actes. Peut-être parce que c'est difficile et parce qu'il n'y a pas beaucoup de moyens financiers ?
"Ah non, je ne crois pas que vous puissiez dire ça ! Nous avons beaucoup travaillé pour cette conférence par des forums qui se sont réunis dans beaucoup de villes de France avec - ce qui est chose exceptionnelle et tout à fait innovante - la participation des usagers, c'est-à-dire des exclus de la société. Nous sommes convaincus qu'en tout cas nous ne pourrons rien faire sans maintenant les associer d'une manière très claire à tous nos débats. Ensuite, se sont tenus des groupes de travail au niveau de la Commission nationale de lutte contre l'exclusion, qui alimente cette conférence. Je crois qu'on va y traiter - enfin je suis sûre - qu'on va y traiter de problèmes concrets. Il y aura le logement, il y aura la façon effectivement de changer le regard sur l'exclusion puisque, aujourd'hui, on s'aperçoit qu'il y a un rejet du RMI et du regard du RMI. Nous devons tendre la main en tout cas à tous ceux qui sont sur le chemin."
Et donc le 6 juillet, et on aura peut-être là des décisions concrètes.
"Et on annoncera des choses fortes."
Vous êtes membre de l'UMP, N. Olin, alors puisque c'est la journée des paris, vous parieriez vous aussi que N. Sarkozy sera candidat à la présidence de l'UMP ?
"Moi, je ne parie rien !"
Vous ne pariez rien. Mais ne parierai pas non plus sur sa victoire alors ?
"Écoutez."
Non. On ne parie pas ce matin...
"N. Sarkozy est un grand ministre. Je crois que ça nous pouvons tous le dire !"
Vous ne vous mouillez pas beaucoup, N. Olin. Vous étiez l'invitée d'RTL ce matin. Bonne journée.
"Merci à vous."
(Source : www.premier-ministre.gouv.fr, Service d'information du gouvernement, le 16 juin 2004)
Nelly Olin .- "Bonjour."
RTL s'interroge sur un éventuel repli communautaire dans les cités des grandes villes françaises. Dimanche dernier, lors du scrutin européen, la liste "Euro Palestine", uniquement présente en Ile-de-France, et sur laquelle figurait le comédien Dieudonné, a réalisé dans certaines villes et dans certains quartiers des scores étonnants, et c'est le cas notamment à Garges-lès-Gonesses, une ville du Val d'Oise dont vous étiez le maire, N. Olin, jusqu'à votre entrée dans le Gouvernement. Vous êtes rentrée au début du mois d'avril dans le Gouvernement et vous avez quitté la mairie de Garges-lès-Gonesses. Dans un contexte de forte abstention dans cette ville, N. Olin, la liste Euro-Palestine a réalisé 10,75 % des suffrages. Ça vous a surpris ?
"Ça m'inquiète. Profondément !"
Surprise ou pas ?
"Ça m'a surpris, mais ça m'inquiète surtout !"
Cela vous inquiète, pourquoi ? vous pouvez expliquer ?
"Parce que dans cette ville, nous avons 64 ethnies et lorsqu'il y a malheureusement des conflits tels qu'en Palestine et en Israël et dans le Proche-Orient, nous avons sur cette ville et dans d'autres villes également de grandes tensions. Nous avons chaque jour à travailler avec les communautés pour essayer de maintenir l'équilibre, très fragile, et je pense, et je suis convaincue que ce genre de liste et ce genre de personnages en tout cas, sont là pour attiser la haine et n'apportent en tout cas aucune solution aux problèmes des banlieues."
Est-ce que ce vote, ce résultat constaté dans les urnes, est d'une certaine façon aussi le signe d'un échec du travail qui a été le vôtre, c'est-à-dire de cette tentative d'insérer ces gens de la communauté arabo-musulmane dans le pacte Républicain ?
"Non, non. Alors là je dis non Les résultats des élections municipales en 2001 ont fait que j'ai gagné au premier tour dans cette ville avec plus de 63 % des voix. Je crois que quand il s'agit d'élections locales, on reconnaît le travail. Quand il s'agit d'élections autres, les gens s'expriment comme ils l'entendent. "
Ils s'expriment comme ils l'entendent, mais ils ont aussi envie de faire passer un message... Et ce message-là, vous, comment vous l'analysez ce matin ?
"Je vous l'ai dit : pour moi, c'est une grosse inquiétude qui naît sur cette ville, où j'avais pensé en tout cas que toutes les tensions étaient apaisées ; je condamne en tout cas les gens qui viennent porter des messages qui ne sont pas des messages d'espoir, contrairement à ce qu'on a pu dire, mais des messages de haine. Ce sont des gens dangereux, qui n'ont pas d'ailleurs en tout cas le sens du travail sur le terrain, et qui veulent se faire une image alors qu'ils ont autre chose à faire."
On condamne les gens qui portent le message. Mais on ne peut pas condamner les gens qui votent.
"Non, mais je ne condamne pas les gens qui votent, parce qu'à ces gens-là, on a voulu faire passer un message qui n'en est pas un en fait. "
Mais ils ont voté librement, et en leur âme et conscience.
"Je suis d'accord, mais ceux qui ont fait cette liste n'apportent aucune solution aux problèmes des banlieues, ni aucun message constructif, ni aucune solution pour régler les problèmes que nous avons à régler au quotidien."
Restons sur les votants, N. Olin : qui sont-ils d'après vous ? Des jeunes, des gens qui n'ont pas l'habitude de voter, des gens qui se sentent exclus du Pacte républicain et qui profitent de cette occasion pour dire quelque chose ?
"Je ne sais pas qui ils sont, parce que je n'ai pas le pouvoir de le savoir. Je pense que c'est effectivement un repli communautarisme."
Pensez-vous, constatez-vous, parallèlement à ce repli communautariste puisque vous employez l'expression, une montée de l'intégrisme religieux dans votre ville ?
"Oui, tout à fait. Je ne suis pas la seule qui constate ça depuis quelques années. C'est assez difficile et c'est pour ça que nous devons, nous, élus sur le terrain, essayer de faire en sorte de traiter les communautés sur un pied d'égalité, et surtout s'attacher à ce qu'ils participent à tout ce qui se fait dans la ville. Aujourd'hui, nous avions réussi cela, je continuerai, même si je ne suis plus le maire je suis le premier adjoint, avec l'équipe et le maire qui la dirigent, je continuerai à faire en sorte que nous respections l'équilibre, tout en respectant chacun dans sa religion, dans ses confessions, dans le sens de la famille qu'il a probablement d'une manière différente de la nôtre. Mais en tout cas, nous avons ce devoir d'équilibre, et je crois qu'en tout cas le président de la République, lorsqu'il est intervenu devant les préfets, a condamné toutes les discriminations, et nous continuerons à les condamner. Nous voulons l'égalité, nous voulons l'égalité des chances, nous voulons l'égalité pour tous. Et je crois que c'est le travail que nous avons encore à faire. Et c'est une preuve que nous avons encore plus à travailler au jour d'aujourd'hui."
Il n'y a pas que la condamnation N. Olin des discriminations. Le président de la République venait d'être élu. Il fait son premier discours à Troyes, c'est le 14 octobre 2002, il dit ceci : "le refus des communautarismes ne se conçoit pas sans une lutte contre les discriminations".
"Mais tout à fait..."
Mais de lutte contre les discriminations, on n'en voit pas beaucoup...
"Moi, c'est un mot que je n'aime pas, la discrimination. Moi je pense qu'à Garges, il n'y a pas de discrimination, et dans beaucoup de villes il n'y a pas de discrimination. Nous traitons tout le monde de la même manière."
Mais est-ce que c'est la solution ? On a vu, c'était l'automne dernier - c'est un débat qu'on a un peu oublié - mais un ministre de la République dire qu'il fallait nommer un préfet, justement en opérant une discrimination. Ce n'est pas la bonne solution, N. Olin ?
"Je ne sais pas si c'est la bonne solution. Moi, je m'attache à ce que j'ai fait et je ne suis pas forcément un exemple. Beaucoup de maires de villes difficiles font la même chose. C'est-à-dire que nous n'avons pas de discrimination à faire, nous devons traiter tout le monde sur un pied d'égalité et nous devons faire en sorte surtout que tout le monde ait sa place dans nos villes et sa place dans la société."
Ce communautarisme, il se remarque aussi dans les écoles de votre ville par exemple ? On voit des lycéens, des jeunes filles, de jeunes garçons manifester ce type d'appartenance ?
"Non, très peu, très peu et je pense que dans nos collèges et dans nos lycées, nous avons même de très bons résultats, et je crois que tout le monde vit bien. Et moi je sais que lorsque je fais la cérémonie de récompenses pour les jeunes diplômés gargeois, vous avez effectivement tous ces jeunes issus de toutes les communautés, ça se passe très bien. Pour eux, c'est un honneur. Et je crois que ça c'est pour nous quand même un peu un espoir."
Dans votre activité ministérielle, vous luttez contre l'exclusion...
"Et la réinsertion..."
Et la réinsertion, vous animerez à ce sujet une conférence nationale, le 6 juillet à Paris. Et puis il y aura ensuite un conseil interministériel la même journée. Là aussi, on a l'impression qu'il y a beaucoup de discours et pas beaucoup d'actes. Peut-être parce que c'est difficile et parce qu'il n'y a pas beaucoup de moyens financiers ?
"Ah non, je ne crois pas que vous puissiez dire ça ! Nous avons beaucoup travaillé pour cette conférence par des forums qui se sont réunis dans beaucoup de villes de France avec - ce qui est chose exceptionnelle et tout à fait innovante - la participation des usagers, c'est-à-dire des exclus de la société. Nous sommes convaincus qu'en tout cas nous ne pourrons rien faire sans maintenant les associer d'une manière très claire à tous nos débats. Ensuite, se sont tenus des groupes de travail au niveau de la Commission nationale de lutte contre l'exclusion, qui alimente cette conférence. Je crois qu'on va y traiter - enfin je suis sûre - qu'on va y traiter de problèmes concrets. Il y aura le logement, il y aura la façon effectivement de changer le regard sur l'exclusion puisque, aujourd'hui, on s'aperçoit qu'il y a un rejet du RMI et du regard du RMI. Nous devons tendre la main en tout cas à tous ceux qui sont sur le chemin."
Et donc le 6 juillet, et on aura peut-être là des décisions concrètes.
"Et on annoncera des choses fortes."
Vous êtes membre de l'UMP, N. Olin, alors puisque c'est la journée des paris, vous parieriez vous aussi que N. Sarkozy sera candidat à la présidence de l'UMP ?
"Moi, je ne parie rien !"
Vous ne pariez rien. Mais ne parierai pas non plus sur sa victoire alors ?
"Écoutez."
Non. On ne parie pas ce matin...
"N. Sarkozy est un grand ministre. Je crois que ça nous pouvons tous le dire !"
Vous ne vous mouillez pas beaucoup, N. Olin. Vous étiez l'invitée d'RTL ce matin. Bonne journée.
"Merci à vous."
(Source : www.premier-ministre.gouv.fr, Service d'information du gouvernement, le 16 juin 2004)