Discours de M. François Hollande, premier secrétaire du PS, sur les candidats PS aux élections européennes et sur le projet d'Europe sociale de la liste socialiste, à Rézé le 11 juin 2004.

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Circonstance : Meeting à Rézé dans le cadre de la campagne pour les élections européennes 2004

Texte intégral

Chers amis, chers camarades,
C'est en effet notre dernière réunion de campagne pour ces élections européennes. J'étais venu, c'est vrai, à Rezé, pour les élections régionales avant le premier tour. Là, je vous le dis : je ne reviens pas la semaine prochaine, car, je le sais bien, il n'y a qu'un tour.
Depuis plusieurs semaines, nous, les socialistes, nous faisons campagne, inlassablement campagne, parce que c'est notre conception de la politique, c'est le sens que nous donnons au suffrage universel, c'est le respect que nous accordons aux citoyens.
Nous faisons campagne non pas pour arracher des places, non pas pour conquérir des honneurs, non pas pour nous attirer des lauriers. Nous faisons campagne parce que nous avons un mandat, parce que nous avons une mission, une quête : celle d'obtenir la confiance des Français, et là, mieux encore, la confiance des Européens.
Nous ne faisons pas campagne seuls, mais avec tous nos amis européens qui nous ont fait l'honneur de participer avec nous, semaine après semaine, à ces réunions publiques. Poul Rasmussen, le président de notre parti, de votre parti, le parti des socialistes européens, José Luis Zapatero, hier, à Toulouse avec Kader. Et Kader sera bientôt aussi connu de José Luis Zapatero parce qu'il participe à la même campagne, la campagne des socialistes européennes. Et aujourd'hui, Angelika, nous sommes fiers d'accueillir une socialiste allemande, parce que c'est bien plus que la réconciliation. Nous portons aujourd'hui le même idéal de l'Europe et c'est ce qui fait la force de notre campagne. Merci d'être là.
Nous faisons campagne avec les militants, oui, les militants du Parti socialiste, pas tous, d'ailleurs, membres du Parti socialiste. Parce qu'il y a beaucoup de militants, d'amis du Parti socialiste qui sont présents dans nos campagnes, même s'ils n'ont jamais pensé prendre une carte. Mais pour être socialiste, il ne suffit pas d'avoir une carte. Il faut d'abord être là, dans les campagnes, dans les grands moments, dans les grandes histoires du mouvement socialiste. Et c'est ce que nous faisons encore ce soir. Merci d'être là, merci, jeunes socialistes, de montrer une nouvelle fois l'exemple, merci à vous tous, comme toujours, d'être au rendez-vous.
Et pour être dans une campagne, il faut aussi avoir des candidats. Et j'ai voulu, ce soir, pour cette dernière réunion, vous présenter, non pas nos candidats, mais l'équipe qui siègera au Parlement européen en votre nom. D'abord, Bernard Poignant, que j'ai découvert dans un nouveau rôle.
Le Moïse du socialisme qui vient montrer les Tables de la loi, dix commandements, rien que ça ! Je t'en donne un de plus : " De ton humour, Bernard, jamais tu ne te départiras ", parce que l'humour, c'est l'arme absolue contre la bêtise. Et nous avons besoin de cette arme qui ne fait de mal à personne, sauf à ceux qui parfois peuvent se reconnaître dans la bêtise, et il y en a.
Oui, il y a ici aussi Michel Rocard que j'ai vu dans cette campagne plein d'enthousiasme, plein de force, plein de vie. Je suis fier et heureux que tu nous aies conduit dans cette campagne dans le Sud-est à une victoire qui sera pour toi comme une reconnaissance. Certains disent même une nouvelle naissance. Nous verrons bien. Mais bravo à toi, Michel !
Pervenche, notre présidente de délégation qui, c'est vrai, a su travailler, et avec quelle autorité, ils peuvent en témoigner, pour que Jacques Floch fasse un rapport témoignant de la présence Vous connaissez le scrupule de Jacques, il n'aurait pas voulu être partisan. Et donc, il a reconnu que la délégation socialiste avait bien travaillé, et c'est le travail, justement, de Pervenche.
Pierre Moscovici, qui a eu cette grande responsabilité d'être ministre des Affaires européennes de Lionel Jospin, alors oui, il fallait qu'il soit aussi au Parlement européen pour les années qui viennent.
Harlem Désir : quelle chance d'avoir un nom qui donne envie et un prénom qu'il a su rendre familier. Harlem, devenu un véritable quartier d'Europe depuis que tu sièges au Parlement européen.
Catherine Guy Quint, l'Auvergnate, elle est dans ma circonscription et donc je vous annonce ici, ce soir, que je voterai pour la liste de Catherine le 13 juin.
Henri weber qui a de multiples talents, et notamment celui de faire des livres qui expliquent le socialisme à nos enfants. Henri, il faudra l'expliquer aussi aux Européens. Parce que nous avons là encore du travail.
Et puis, il y a Kader Arif, l'homme de Toulouse, l'homme de la grande région Sud-ouest, qui veut toujours apparaître comme une valeur-refuge alors que tu es simplement une valeur d'exemple de notre diversité et de la qualité de notre parti.
Et puis, c'est vrai, message de l'outre-mer, parce que l'Europe c'est aussi l'outre-mer, et l'outre-mer a besoin de l'Europe. Et l'Europe fait beaucoup pour l'outre-mer. Et il faut aussi que, dans ces régions ultramarines, l'Europe soit une source de rayonnement, non pas pour elle-même. Nous ne sommes pas Européens simplement pour nous-mêmes. Nous sommes Européens pour changer le monde. Ce qui fait la dignité, l'identité de l'Union européenne que nous construisons, c'est que nous ne voulons pas nous protéger nous-mêmes. Nous devons porter un message universel, des valeurs d'humanité au reste du monde.
Nous sommes fiers d'être une Europe de paix. Mais, quand il y a autant de guerres autour de nous, pouvons-nous nous-mêmes considérer que notre tâche serait terminée parce que nous serions nous-mêmes en paix ? Si nous voulons faire l'Europe, c'est pour porter ce message de paix, c'est pour l'imposer au monde et c'est pour faire en sorte qu'il n'y ait pas qu'une seule puissance ici qui règne, et que l'Europe a vocation non pas à être elle-même une puissance, seulement une puissance, mais à donner à l'organisation des Nations Unies sa force, justement. Être Européen, c'est être pour l'organisation des Nations Unies, comme Aristide Briand était pour l'Europe de la paix et pour la Société des Nations.
Je veux dire d'ailleurs à Bernard qu'Aristide Briand n'a pas simplement été député de la Loire-Atlantique. Il a aussi été député de la Loire, et donc je reconnais qu'il peut être porté par plusieurs circonscriptions ici ce soir. C'est comme Georges Clémenceau qu'on oublie trop souvent.
Nous avons fait campagne, non pas pour l'Europe, parce que je considère que ce combat-là, le combat pour l'Europe est déjà gagné. Et lorsque l'on voit la difficulté dans ce moment que nous traversons pour ce que l'on appelle les souverainistes, à faire croire qu'il serait possible de quitter l'Europe, de sortir de l'Europe, on se rend bien compte que nous avons franchi la première étape. L'Europe, on y entre, on n'en sort pas, non pas parce qu'on ne pourrait pas en sortir. Libre à chacun de se désolidariser du pacte. Mais parce que les peuples ne veulent pas en sortir. Ils veulent même y entrer. Et les souverainistes, et je veux ici avoir une pensée pour le hobereau populiste De Villiers, le souverainisme n'est en fait qu'un extrémisme. Et, il n'y a jamais loin entre l'extrémisme de De Villiers et l'extrémisme de Le Pen, jamais loin, si ce n'est une différence de degré, pas de nature. Certes, l'un est xénophobe, Le Pen, mais l'autre défend des valeurs, et Jacques Auxiette le sait, qui sont loin de la République.
Alors, dans cette campagne, nous ne devons pas simplement défendre l'Europe, nous devons porter un projet, donner un sens, affirmer une volonté, fixer la direction, et nous l'avons donnée : c'est l'Europe sociale. C'est l'enjeu de ce scrutin. Parce que l'Histoire qui se fait maintenant en Europe, c'est l'Histoire qui s'est déroulée tout au long du XIXè et du XXè siècle en France. C'est l'histoire de conquêtes sociales, des avancées, du progrès, des réformes, étape par étape, que nous les socialistes, mais pas simplement nous, avons progressivement arrachés au monde économique. Et si nous sommes conscients des acquis sociaux qu'il faut préserver en France, nous savons aussi que si nous voulons les garantir, si nous voulons les élargir, si nous voulons les amplifier, c'est dans l'Europe sociale qu'il faudra maintenant les discuter.
C'est la raison pour laquelle le cours que nous engageons de notre propre Histoire en Europe, c'est l'Europe qui doit ouvrir des droits, qui doit donner un salaire minimum, qui bien sûr sera Nation par Nation, puis convergera ensuite vers le haut.
C'est donner un espace de négociation aux syndicats européens avec un patronat européen. Nous n'avons rien à perdre avec le MEDEF que de prendre un patronat européen à sa place. Et il nous faudra aussi avoir, dans cette Europe, la volonté de donner davantage de droits, de garantir notre solidarité, notre Sécurité Sociale, même si elle restera de compétence nationale.
Face à notre volonté d'Europe sociale, nous entendons les mêmes rengaines, d'un archaïsme libéral, rituel, qui nous dit : " N'allez pas plus loin. Le social, c'est trop dur, vous n'y arriverez pas. Il y a la mondialisation, il y a le capitalisme, il y a les lois économiques, il y a les Nations qui résistent, il y a les États-Unis d'Amérique, il y a les pays d'Asie. Vous ne pouvez pas faire l'Europe sociale ". Et nous répondons : Si ! Nous en avons la volonté et ce n'est pas plus dur de faire l'Europe sociale que ce n'était difficile pour le prolétariat organisé au XIXe siècle d'arracher les droits, et pas plus difficile au XXe siècle de conquérir la Sécurité Sociale, les congés payés et les droits à la retraite. C'est le même processus que nous engageons à l'échelle de l'Europe. Et l'on nous dirait que c'est trop difficile, qu'il faudrait y renoncer ? ! Jamais ! C'est notre devoir de socialistes.
On nous dit : " C'est trop risqué, n'allez pas plus loin. Les lois de l'économie sont trop rudes, la compétition économique trop féroce, les délocalisations trop rapides. Vous allez désorganiser l'économie ". Mais c'est exactement ce que disaient déjà les Libéraux et les conservateurs au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, quand on posait les règles du droit du travail, du droit social et même de la fiscalité redistributive. Quand, au début du XXe siècle, déjà des radicaux, des socialistes se battaient pour l'impôt sur le revenu, on leur opposait les mêmes difficultés, les mêmes impossibilités, et plus tard pour l'impôt sur la fortune, les mêmes arguments nous étaient opposés.
Ce n'est pas trop risqué que de faire la justice. L'égalité est à ce prix. Elle n'est jamais une crainte pour la liberté. Et ceux qui opposent liberté et égalité ne sont ni pour la liberté, ni pour l'égalité.
On nous dit : " Vous êtes trop incantatoires, vous les socialistes Français, trop utopiques. Vous n'arriverez pas, même à convaincre les autres socialistes ". Mais c'est notre travail, c'est notre tâche. Et si nous sommes au sein du Parti des Socialistes Européens, ce n'est pas pour imposer notre point de vue, c'est pour convaincre. Et nous l'avons fait ces dernières semaines, nous l'avons fait dans notre parti, le parti des socialistes européens. Beaucoup aujourd'hui font campagne, en Allemagne, au Portugal, en Espagne, en Italie sur le thème de l'Europe sociale. Il faudra encore aller plus loin. Mais nous avons, nous, cette force de conviction qu'on ne nous enlèvera pas. Nous sommes socialistes, non pas socialistes Français, mais socialistes Européens, et les thèmes que nous portons ne sont pas pour nous, simplement pour nous protéger nous-mêmes, mais pour, là encore, élargir, comme l'Europe, les ambitions que nous portons ici, en France.
L'Europe sociale est indispensable à la réussite de notre projet ici. Nous reviendrons aux responsabilités, je l'espère, en 2007. Et nous ne pourrons réussir de nouveau aux responsabilités que s'il y a une Europe sociale. Parce que si nous voulons transformer notre pays, assurer le plein emploi, avoir une fiscalité redistributive, garantir les services publics, protéger l'environnement, élargir les droits sociaux, nous ne pourrons y parvenir que si l'Europe est à l'unisson de notre propre mouvement, et qu'elle ne nous impose pas des règles, des normes, des lois européennes qui iraient contre notre propre ambition. Vouloir l'Europe sociale, c'est servir déjà, maintenant, le projet qui sera le nôtre en 2007. C'est préparer l'alternance, c'est préparer la durée de la transformation qui sera la nôtre lorsque nous serons de nouveau au pouvoir.
Jamais le clivage gauche / droite n'aura paru aussi clair que dans cette élection. Oui, c'est un choix européen entre un parti de droite qui s'appelle le PPE, parti pas populaire et peu européen, et puis l'autre parti qui ne représente pas toute la gauche, le Parti Socialiste Européen. Entre ces deux partis, il n'y a pas de différences de degrés, il y a des différences de nature profondes.
Que propose la droite européenne ? La libéralisation des services publics. Nous, nous voulons une loi sur les services publics en Europe garantissant leur pérennité et l'égalité de tous pour y accéder. Ils nous proposent d'allonger la durée maximale du travail en Europe, la droite européenne, quand nous proposons, nous, de réduire le temps de travail parce que c'est la perspective que nous devons chaque fois ouvrir, ils nous disent qu'il ne faut pas de contraintes environnementales à la production, et nous les socialistes, nous posons le principe pollueur payeur. Ils nous demandent de faire référence à Dieu dans la Constitution européenne, et nous, nous disons que la constitution européenne doit être laïque parce que l'Europe n'appartient à aucune religion. Ils nous disent qu'il n'est pas possible d'augmenter le budget européen, qu'il faut même le baisser, et nous, nous disons l'inverse : il faut l'augmenter si on veut donner priorité à la recherche, à l'éducation, à la culture, à l'aménagement du territoire.
Cette droite au Parlement européen n'a pas sanctionné Berlusconi lorsqu'il a insulté un député socialiste allemand. Cette droite européenne n'a pas condamné l'alliance entre la droite et l'extrême droite en Autriche. Cette droite européenne admet en son sein le parti conservateur britannique qui veut sortir son pays, l'Angleterre, de l'Union. Et il n'y aurait pas de différences entre la gauche et la droite en Europe ? Mais, là aussi, quelle rengaine. Chaque fois que la droite est en difficulté, elle feint de gommer les clivages et les différences. Et cela peut parfois, on s'en souvient, abuser les électeurs.
Face à cette droite européenne, face à cette gauche européenne qui veut elle-même se rassembler, parce que de la même manière que nous voulons rassembler la gauche en France, il faudra rassembler la gauche en Europe. La gauche en Europe, ce n'est pas simplement les socialistes, c'est aussi les verts, les communistes à l'échelle de l'Europe, à condition, là encore, qu'ils portent la même ambition pour leur propre continent.
Droite et gauche à l'échelle européenne, droite et gauche à l'échelle nationale, c'est le même clivage, c'est le même vote. Et à cet égard, nous devons voter pour assurer une majorité de gauche au Parlement européen et en même temps envoyer le plus de députés socialistes Français dans le groupe socialiste au Parlement de Strasbourg. Voilà l'utilité du vote.
Jean-Marc disait qu'il n'y a plus de différence entre la politique intérieure et la politique extérieure. C'est vrai. Politique intérieure et politique extérieure se confondent. On ne peut pas à la fois penser qu'il faille intervenir en Irak de la manière américaine et en même temps ne pas proposer un système de sécurité collective en Europe.
Nous avons nous-mêmes à faire des choix, des choix qui seront difficiles. Nous sommes pour une Europe de la défense, nous sommes pour partager nos ressources, mais aussi nos engagements militaires pour l'Europe. Nous voulons une Europe puissance pour qu'elle pèse sur le destin du monde.
Alors, dans ce contexte, nous devons politiser cette élection dans le meilleur sens du terme, parce que la droite, depuis les élections régionales, a la peur du vote, a peur du scrutin. Elle fait donc le pari de la torpeur estivale, de l'oubli même de l'élection. L'abstention est sa meilleure alliée. Elle fait même le choix d'une abstention forte pour les élections du 13 juin. Le Premier ministre n'a pas voulu inscrire cette élection européenne du 13 juin dans son calendrier, comme si les lycéens qui devaient passer le bac aujourd'hui avaient déclaré à leurs examinateurs que, désolé, ils n'avaient pas eux-mêmes inscrit le bac dans leur propre calendrier. Mais la démocratie, c'est le jugement du peuple, c'est la confrontation avec le suffrage, c'est d'être évalué sur ses résultats. Ce n'est pas si simple pour Jean-Pierre Raffarin, dont on sait aujourd'hui que sa politique a produit plus de chômage, plus d'inégalités, plus de déficit, plus de dettes, et qu'il y a donc une sanction nécessaire, juste, légitime qui doit les frapper. Les ministres, d'ailleurs, ont compris qu'ils ne voulaient pas, eux aussi, être touchés par la vague qui monte. On ne les voit pas dans cette campagne. Ils battaient les estrades, il y a plusieurs mois ; ils se cachent aujourd'hui. Je le dis souvent : la droite n'est pas en campagne, elle est en fuite. Et même son héros, celui qui se pose en sauveur - et pas simplement en sauveur parce qu'i y en a un qui est en péril un peu plus haut et ce n'est pas Dieu - et donc le ministre d'État, lui non plus, ne bat plus les estrades. Il est allé, je crois, à Clermont-Ferrand soutenir son protégé. Rien de plus. Il revient d'un voyage en Algérie. À ma connaissance, ce n'est pas encore l'Europe. Et ce Ministre me paraît plus préoccupé par une autre campagne qui est de savoir qui sera le prochain président de l'UMP. Et ça, c'est la question qui les obsède. Rendez-vous compte la haute idée qu'ils se font du suffrage universel, des grandes affaires du monde, du destin de l'Europe. Savoir qui sera le successeur d'Alain Juppé. Cette question ne nous intéresse pas, pas plus qu'elle ne passionne les Français. Laissons-leur la présidence de l'UMP. On s'occupera des affaires de l'État le moment venu.
Mais il voudrait nous faire croire que le scrutin du 13 juin serait une élection pour rien, qu'elle ne changerait rien, une consultation virtuelle sans enjeu, sans intérêt, sans conséquence. Circulez, citoyens, il n'y a plus rien à voter ! Que vous veniez ou que vous ne veniez pas, votre vote compte pour rien. Quelle erreur ! C'est penser que le résultat d'une élection n'est pas lui-même un acte politique. Je peux vous dire que, selon le résultat du 13 juin, une situation politique nouvelle sera créée, qu'il y aura des conséquences pour le gouvernement, pour la majorité politique en place. Et faut-il encore que le résultat soit clair et lisible. Et c'est tout l'enjeu de l'élection.
Ce que je vous donne comme perspective, c'est finalement de porter le Parti socialiste en tête le soir du 13 juin. Voilà la mission qui nous est confiée, qui vous est confiée. Il faut être, le 13 juin le premier parti de France, et ça ne suffira pas. Il faut faire le plus grand écart, quitte à nous déchirer, le plus grand écart entre le parti socialiste et l'UMP. Plus loin sera l'UMP derrière nous, plus grande sera la chance de redonner un espoir à notre peuple et une obligation au Président de la République de tirer toutes les conclusions du scrutin.
Oui, nous ne mettons pas en cause la légitimité du Président de la République élu dans les conditions que l'on sait en mai 2002. Nous ne mettons pas en cause la majorité au Parlement, à l'Assemblée nationale et au Sénat, élue dans les conditions que l'on sait -notamment pour l'Assemblée nationale. Non ! Nous disons simplement que selon les résultats du 13 juin, la politique en France sera changée au-delà des hommes qui auraient d'ailleurs dû être déjà changés au lendemain des élections régionales.
C'est la crédibilité, c'est l'autorité, c'est la capacité même de poursuivre leur politique qui sera en cause le 13 juin, selon que l'on arrivera en tête, selon que l'UMP sera loin de nous, selon que la gauche l'aura emporté à ces élections. Je veux le dire aux Français qui doutent encore. À ce moment-là, ils ne pourront pas aller plus loin sur le démantèlement de la Sécurité Sociale, sur la privatisation d'EDF et sur le transfert de charges indues aux collectivités locales. Voilà le sens du scrutin du 13 juin.
Il faut croire à l'utilité du vote, car si les Français n'avaient pas voté comme ils ont voté, les 21 et 28 mars, les recalculés de l'Unedic chercheraient encore leurs droits, les intermittents du spectacle leurs interlocuteurs, les chercheurs leurs crédits et la Sécurité sociale serait déjà passée par ordonnance. Voilà pourquoi il faut voter, voilà pourquoi il faut voter socialiste. Voilà pourquoi il faut porter le parti socialiste en tête dans ces élections européennes.
Tout a une fin. Nous achevons ainsi une belle campagne, celle que nous avons menée pour les élections européennes. Une campagne trop courte, j'en conviens ; trop ignorée, c'est possible ; trop éclatée géographiquement, c'est certain ; trop chaude, je ne le conteste pas ! Mais nous avons été portés par un courant de sympathie qui doit devenir -au lendemain du 13 juin- un mouvement d'espoir.
Parce qu'il nous reste tant à faire ensemble : gagner les élections européennes le 13 juin, mais ça ne suffira pas ! Nous avons à accomplir une victoire maintenant sur nous-mêmes, sur nous-mêmes, les socialistes et la gauche.
Nous avons à préparer l'alternance pour 2007. Nous avons à faire un travail collectif qui sera exigeant, qui appellera des propositions nouvelles, qui supposera d'accueillir toutes les idées et de rencontrer toutes les forces vives de notre pays. Nous avons à accomplir cette belle victoire démocratique, de respecter la conviction de tous les Français et en même temps de leur dire la vérité sur la situation de notre pays et de leur montrer la volonté que nous avons à changer la société dans laquelle ils vivent. Nous avons à respecter scrupuleusement d'ailleurs, parce que nous sommes des démocrates, les calendriers et les échéances et en même temps à être prêts à saisir toutes les occasions qui nous serraient données de donner justement place à nos idées. Nous avons à le faire dans l'unité, l'unité des socialistes à laquelle, moi, je me porte ici caution et garant.
Les socialistes resteront unis. Ils l'ont été dans la défaite, après la défaite, et ce fut leur honneur. Ils le seront après la victoire si la victoire nous est donnée. Ils le seront dans la préparation de leur projet, ils le seront le moment venu dans le choix de leurs candidats. Unis, les socialistes parviendront non seulement à donner la meilleure image d'eux-mêmes mais à rassembler toute la gauche, aujourd'hui éparpillée, qui doute d'elle-même et que nous devons ramener à l'idée majeure de l'Union, car il n'y a pas de victoire sans union et nous en savons quelque chose.
Il faut un Parti socialiste fort ; c'est la condition nécessaire à la victoire mais, il ne faut pas un parti socialiste seul. Il a ce devoir, l'obligation, l'exigence de rassembler toute la gauche autour de lui et dans le respect même de ses partenaires, à la condition que ses partenaires et ses alliés acceptent l'idée de gouverner ensemble, d'être loyaux ensemble, disciplinés ensemble et de se présenter -le moment venu- à certaines élections ensemble aussi, parce que c'est la force qui nous est là demandée par nos électeurs.
J'ai confiance dans la force de nos idées. J'ai confiance dans la vitalité du socialisme en France et en Europe. J'ai confiance dans ce parti des socialistes européens que nous bâtissons aujourd'hui. J'ai confiance en l'Europe de demain, celle que nous organisons, que nous décidons aujourd'hui, l'Europe sociale. Il nous reste à obtenir le plus difficile, pas simplement le vote des Français, leur confiance, leur adhésion.
Faites qu'ils nous entendent ; faites qu'ils sachent que les socialistes sont là ! Ils étaient là pour les élections régionales, ils sont encore présents ici pour les élections européennes pour redonner espoir. C'est l'appel de Rezé. Le 13 juin, il n'y a qu'un vote à faire, c'est le vote social, le vote social pour faire avancer l'Europe sociale, le vote social pour garantir le pacte social en France, le vote social pour sanctionner les reculs sociaux du gouvernement Raffarin.
Et le vote social c'est le vote socialiste.


(source http://www.europesocialiste.org, le 14 juin 2004)