Texte intégral
Mesdames et messieurs,
La tradition des vux nous rassemble. Elle constitue l'un de ces rares instants où nous pouvons nous souhaiter le meilleur de ce que la vie peut apporter : le bonheur, l'affection, la santé Je vous souhaite toutes ces choses essentielles de l'existence vers lesquelles le drame qui a balayé l'Asie nous renvoie.
Ces derniers jours, j'ai éprouvé, tout comme vous je l'imagine, plusieurs sentiments.
Celui de la vulnérabilité de l'être humain. Une vulnérabilité qui ne rime pas avec la fatalité, mais qui appelle à l'humilité et à la responsabilité collective. Nous sommes les maillons d'une longue et fragile chaîne humaine. L'éducation, la culture scientifique, ne sont pas dissociables de cette haute responsabilité qui distingue les peuples généreux et éclairés.
Le sentiment aussi de l'unicité humaine. Face à une telle épreuve, les barrières nationales s'abaissent et la conscience de l'universalité s'élève. La globalisation des enjeux humains exige une mondialisation plus équitable et mieux ordonnée. Citoyen français et d'Europe, citoyen du monde, le combat est désormais, pour partie, le même.
Le référendum sur la constitution européenne devra, selon moi, être l'occasion d'une prise de conscience sur le sort convergent et interdépendant des nations. Face au camp du " non ", il faudra élever le débat au niveau des véritables enjeux internationaux qui sont lancés à chacun de nos États. Si les arguments se limitent à stigmatiser les opposants au traité en les qualifiant de "rétrogrades" ou de "pyromanes", alors je crains les mauvaises surprises
À l'occasion de ce rendez-vous électoral, je m'engagerai avec force en faveur de ce projet institutionnel qui met un peu plus de politique dans les rouages trop technocratiques de l'Union européenne. J'ai combattu à l'époque le traité de Maastricht parce que l'on plaçait, selon, moi la monnaie avant les institutions. Aujourd'hui, on nous propose - enfin ! - des institutions. Je les défendrai, convaincu que leurs quelques lacunes sont moins significatives que celles qui entravent l'organisation européenne depuis plus de 10 ans.
Il y a enfin, face à la tragédie asiatique, le sentiment de fraternité. En France, comme partout ailleurs, c'est un même élan de générosité qui s'est enclenché. Cette catastrophe révèle, peut-être, les vertus d'une civilisation moderne qui n'est pas nécessairement prédestinée aux déchirements. La réponse est, comme toujours, dans le cur et la raison hésitante des hommes. Là encore, nous sommes renvoyés à une certaine idée de ce que doit être la mission de notre système éducatif. Face à la violence, face à la haine ou à l'indifférence de l'autre, la transmission des valeurs humanistes et républicaines est bien une nécessité vitale.
Vous le savez, face à la détresse des enfants isolés d'Asie, j'ai tenu à engager le ministère de l'éducation nationale dans un processus d'aide à la rescolarisation. Cette action s'inscrit dans la phase d'urgence humanitaire, mais devra se poursuivre sur le moyen terme dans le cadre d'une stratégie de reconstruction. J'ai pris attache avec tous mes collègues européens pour organiser, à Paris, le plus rapidement possible, une réunion de travail afin de coordonner et cibler nos initiatives.
Cette catastrophe aura occulté, en quelques instants, la joie procurée par la libération de vos confrères, Christian Chesnot et Georges Malbrunot. Cette libération couronne la détermination ferme et tranquille de notre pays, qui, dans le respect de ses différences, notamment religieuses, croit en l'égalité républicaine, et plus particulièrement à l'École. Désormais, chacun sait que la loi en faveur de la laïcité n'est pas négociable.
Aujourd'hui, c'est malheureusement une autre de vos confrères, Florence Aubenas, dont on est sans nouvelle. Nos pensées et nos efforts diplomatiques sont tournés vers elle. Le devoir d'informer fait l'honneur de votre profession et de notre démocratie. La situation anarchique qui prévaut en Irak impose cependant une extrême prudence.
Mesdames et messieurs,
2004 aura été, pour ce ministère, l'année des grands débats. L'avenir de l'École et celui de la recherche auront mobilisé de très nombreux Français. Ces débats et confrontations intellectuelles n'auront pas été vains. Ils ont permis d'établir un diagnostic partagé sur les forces et faiblesses de nos systèmes éducatif et scientifique. Ils auront permis de dégager des orientations globalement convergentes.
Sur l'École - ce dossier que l'on disait " explosif " et sur lequel 60 millions d'avis se disputent - nous avons, je crois, saisi le fil de l'intérêt général.
Entre ceux qui ne veulent rien changer et ceux qui escomptent tout bouleverser, j'ai fixé un cap pragmatique qui changera progressivement mais profondément le visage de l'École. En recadrant ses priorités, en instaurant un socle de connaissances et de compétences fondamentales, en instituant une pédagogie personnalisée pour les élèves en difficulté, nous plaçons notre système éducatif dans l'obligation et en situation d'atteindre des objectifs précis.
Les critiques éparses et contradictoires qu'a suscitées notre projet semblent plus tacticiennes que structurelles. Le 20 janvier, les organisations syndicales appellent, vous le savez, à manifester, et parmi les multiples revendications, l'une d'entre elles réclame le retrait de notre projet Je respecte les convictions de chacun de ceux qui choisiront de " battre le pavé ", mais je veux leur dire que le statu quo est contraire aux intérêts d'une École plus juste et plus efficace.
Prétendre que les efforts financiers consacrés à l'éducation par nos concitoyens à travers l'État depuis plusieurs décennies sont insuffisants alors même que ces moyens nous placent au premier rang des pays de l'OCDE, c'est esquiver notre défi commun : celui de moderniser le grand service public de l'éducation auquel nous sommes tous attachés.
Cette modernisation, nous la devons aux 150 000 élèves qui sortent chaque année de l'École sans qualification, aux 80 000 enfants qui entrent en 6è sans véritablement savoir lire, écrire et compter, aux 10 millions de jeunes Français qui, dans la maîtrise des langues étrangères, sont situés en bas du tableau européen, aux générations futures qui dans dix ans devront, de façon croissante, posséder un diplôme d'études supérieures pour s'imposer dans la compétition internationale. Loin des grandes envolées lyriques et des théories compliquées, loin de la seule question des moyens, voilà la nature des problèmes éducatifs qui sont sous nos yeux et que je veux résoudre.
Sur la recherche, il est peu de dire que les mentalités ont évolué en quelques années. Il y a dix ans, la communauté scientifique était retranchée derrière des positions rigides. Après la crise de l'année dernière, la voici exigeant le mouvement, réclamant plus de souplesse, une meilleure évaluation, plus d'internationalisation, plus de coopération avec les acteurs extérieurs, dont celui du privé.
Je salue cet esprit de responsabilité et d'innovation qui anime la communauté scientifique. Avec elle, le gouvernement souhaite pouvoir, en 2005, nouer un pacte clair et précis entre la nation et sa recherche. Sur ce dossier complexe, je note que les analyses divergent encore parfois, je mesure combien il reste difficile et délicat de transcender les habitudes et les chapelles, je sais que la question des engagements financiers reste prégnante, mais je suis certain qu'il existe un chemin pour avancer ensemble.
Déjouant le jugement frileux des professionnels de l'immobilisme et le verdict grincheux des adeptes de la table rase, tous les débats et les évolutions qui traversent le monde de l'éducation et de la recherche, démontrent que notre société s'interroge, mute, cherche les voies d'une rénovation organisée et non précipitée de notre pays.
À travers les réformes que je propose, je m'efforce d'épouser ce rythme en l'orientant sur des objectifs concrets et efficaces. Je cherche à moderniser le modèle français et non à le déraciner.
C'est ainsi, les nations ont une histoire !
Je travaille avec cette histoire et non en théorisant des ruptures qui, sans aucun doute, feraient la une de vos journaux, mais feraient, tout aussi certainement, perdre du temps à la France. Le monde éducatif, comme celui de la recherche, a besoin de changement, non d'un chambardement.
En charge de ce grand ministère depuis dix mois, après avoir assumé celui des affaires sociales et du travail, nous avons, mesdames et messieurs, eu l'occasion de mieux nous connaître. J'ai la réputation - cela m'est parfois reproché ! - d'établir une certaine distance vis à vis de la communication. Dans un monde surinformé, j'essaie, à ma façon, de ne pas disperser mon action, qui n'est rien d'autre que celle de l'État. Son intensité doit être jugée sur le fond et non sur la forme. Au cours de ces trois années, j'ai eu le privilège de conduire plus de dix projets de loi. Vous connaissez à présent mon style. Je n'agis pas dans l'empressement, je m'efforce d'écouter les avis des uns et des autres, je cherche à définir, sans dogmatisme partisan, l'intérêt général, puis je décide et ne recule pas. Ce qui compte c'est l'avenir, c'est la France, cette puissance que je ne puis qualifier de " moyenne ".
Mesdames et messieurs,
Si 2004 fut l'année des grands débats, 2005 sera celle des choix stratégiques. Ils détermineront l'avenir de l'Éole et de la recherche tout au long des prochaines années.
Ce matin même, je viens de présenter en conseil des ministres la loi d'orientation sur l'École. Le Parlement sera appelé à en débattre en févier.
Conformément aux vux du Président de la République et du Premier ministre, cette loi entrera pour partie en vigueur dès l'année 2005-2006.
- le Haut conseil de l'éducation qui donnera notamment un avis sur le contenu du socle sera instauré ;
- les contrats individuels de réussite éducative commenceront à être proposés ;
- l'enseignement de découverte professionnelle en classe de troisième sera mis en place ;
- le plan ambitieux en faveur de l'apprentissage des langues étrangères commencera à entrer dans les faits, avec notamment la généralisation de la première langue vivante en CE2, avant qu'elle ne soit déclinée au niveau du CE1 ;
- la nouvelle organisation du brevet sera installée pour la session 2006 ;
- la note de vie scolaire sera mise en place ;
- le brevet informatique et internet ( B2i ) sera généralisé ;
- la modernisation du bac sera arrêtée pour être mise en application à la session 2007 ;
- les baccalauréats professionnels en trois ans seront développés ;
- la montée en puissance des classes et ateliers relais qui accueillent les élèves perturbateurs et en grandes difficultés sera enclenchée ;
- dans chaque collège et lycée un conseil pédagogique sera créé ;
- chaque projet d'établissement précisera les conditions d'accueil et d'information des parents ;
- le dispositif de remplacement des enseignants absents pour une courte durée sera lancé ;
- le cahier des charges national de la formation des maîtres sera défini et la préparation du transfert des premiers IUFM aux universités sera engagée.
Voilà, mesdames et messieurs, la feuille de route pour 2005. Elle est bien remplie. Nous nous imposons un pas rapide car je veux que d'ici deux ans l'ensemble de cette loi pour l'École soit intégralement sur les rails.
Sur le dossier de la recherche, nous mettons en forme, avec François d'Aubert, le projet de loi d'orientation et de programmation. Il s'inspirera pour une large part des recommandations du CIP, elles-mêmes issues des états généraux.
Avec, la création d'un Haut Conseil de la recherche, la mise en place des pôles de recherche et d'enseignement supérieur, l'instauration des instituts de recherche partenariale, l'établissement de l'Agence nationale de la recherche, l'organisation d'une évaluation plus homogène et plus conforme aux standards internationaux, notre objectif est de mieux coordonner les efforts de notre recherche publique et privée.
Le temps des cloisonnements est révolu. En 2005, la recherche devra s'affirmer comme une grande affaire nationale autour de laquelle tous les acteurs doivent se rassembler. Face à la rudesse de la concurrence internationale du savoir, cette synergie est - je n'hésite pas à le dire - une question de survie.
Face à cette question, l'État, doit jouer un rôle stratégique. Il l'assumera, notamment en terme d'efforts financiers, avec 1 milliard d'euros supplémentaire chaque année en faveur de la recherche. Il devra également l'assumer en offrant aux jeunes chercheurs un plan pluriannuel de l'emploi scientifique et un parcours de réussite.
Mesdames et messieurs,
Depuis bientôt trois ans, sous l'impulsion du Président de la République et du Premier ministre, notre majorité agit pour la France.
Le renforcement de la sécurité, la revalorisation de la valeur du travail, la réforme des retraites et de l'assurance maladie, celles à venir de l'École et de la recherche, forment un tout cohérent. Nous avons imprimé du mouvement à la société française, ce qui n'est jamais aisé, ni très populaire, comme les dernières élections régionales en témoignèrent.
L'heure n'est cependant nullement au satisfecit. Beaucoup reste à faire. Je sais ce qui se dit et se pense dans le pays. La versatilité de notre système politique, qui depuis vingt ans, à chaque élection, a vu la majorité en place être défaite, suppose de ne rien considérer comme acquis. La majorité a un devoir d'explication permanent sur qu'elle a fait, sur ce qu'elle veut faire, mais aussi sur ce qu'elle n'a pas réussi pleinement encore à faire. En la matière, les illusions sur soi-même comme la langue de bois, sont à proscrire. Pour nous, l'avenir avec les Français commence tous les jours.
Dans cet esprit, l'UMP a une responsabilité particulièrement aiguë. J'entends contribuer au dynamisme de ses idées. Face aux surenchères de l'opposition - qui est encore loin d'avoir assumer sa mutation vers une sociale-démocratie moderne ! - nous avons le devoir d'imaginer la France de demain.
Je forme, mesdames et messieurs, le vu que cette nouvelle année soit pour vous, comme pour notre pays, riche en initiatives, projets et débats stimulants. La France, par son histoire et avec ses atouts, mérite de voir ses idéaux se redresser.
(Source http://www.culture.gouv.fr, le 13 janvier 2005)
La tradition des vux nous rassemble. Elle constitue l'un de ces rares instants où nous pouvons nous souhaiter le meilleur de ce que la vie peut apporter : le bonheur, l'affection, la santé Je vous souhaite toutes ces choses essentielles de l'existence vers lesquelles le drame qui a balayé l'Asie nous renvoie.
Ces derniers jours, j'ai éprouvé, tout comme vous je l'imagine, plusieurs sentiments.
Celui de la vulnérabilité de l'être humain. Une vulnérabilité qui ne rime pas avec la fatalité, mais qui appelle à l'humilité et à la responsabilité collective. Nous sommes les maillons d'une longue et fragile chaîne humaine. L'éducation, la culture scientifique, ne sont pas dissociables de cette haute responsabilité qui distingue les peuples généreux et éclairés.
Le sentiment aussi de l'unicité humaine. Face à une telle épreuve, les barrières nationales s'abaissent et la conscience de l'universalité s'élève. La globalisation des enjeux humains exige une mondialisation plus équitable et mieux ordonnée. Citoyen français et d'Europe, citoyen du monde, le combat est désormais, pour partie, le même.
Le référendum sur la constitution européenne devra, selon moi, être l'occasion d'une prise de conscience sur le sort convergent et interdépendant des nations. Face au camp du " non ", il faudra élever le débat au niveau des véritables enjeux internationaux qui sont lancés à chacun de nos États. Si les arguments se limitent à stigmatiser les opposants au traité en les qualifiant de "rétrogrades" ou de "pyromanes", alors je crains les mauvaises surprises
À l'occasion de ce rendez-vous électoral, je m'engagerai avec force en faveur de ce projet institutionnel qui met un peu plus de politique dans les rouages trop technocratiques de l'Union européenne. J'ai combattu à l'époque le traité de Maastricht parce que l'on plaçait, selon, moi la monnaie avant les institutions. Aujourd'hui, on nous propose - enfin ! - des institutions. Je les défendrai, convaincu que leurs quelques lacunes sont moins significatives que celles qui entravent l'organisation européenne depuis plus de 10 ans.
Il y a enfin, face à la tragédie asiatique, le sentiment de fraternité. En France, comme partout ailleurs, c'est un même élan de générosité qui s'est enclenché. Cette catastrophe révèle, peut-être, les vertus d'une civilisation moderne qui n'est pas nécessairement prédestinée aux déchirements. La réponse est, comme toujours, dans le cur et la raison hésitante des hommes. Là encore, nous sommes renvoyés à une certaine idée de ce que doit être la mission de notre système éducatif. Face à la violence, face à la haine ou à l'indifférence de l'autre, la transmission des valeurs humanistes et républicaines est bien une nécessité vitale.
Vous le savez, face à la détresse des enfants isolés d'Asie, j'ai tenu à engager le ministère de l'éducation nationale dans un processus d'aide à la rescolarisation. Cette action s'inscrit dans la phase d'urgence humanitaire, mais devra se poursuivre sur le moyen terme dans le cadre d'une stratégie de reconstruction. J'ai pris attache avec tous mes collègues européens pour organiser, à Paris, le plus rapidement possible, une réunion de travail afin de coordonner et cibler nos initiatives.
Cette catastrophe aura occulté, en quelques instants, la joie procurée par la libération de vos confrères, Christian Chesnot et Georges Malbrunot. Cette libération couronne la détermination ferme et tranquille de notre pays, qui, dans le respect de ses différences, notamment religieuses, croit en l'égalité républicaine, et plus particulièrement à l'École. Désormais, chacun sait que la loi en faveur de la laïcité n'est pas négociable.
Aujourd'hui, c'est malheureusement une autre de vos confrères, Florence Aubenas, dont on est sans nouvelle. Nos pensées et nos efforts diplomatiques sont tournés vers elle. Le devoir d'informer fait l'honneur de votre profession et de notre démocratie. La situation anarchique qui prévaut en Irak impose cependant une extrême prudence.
Mesdames et messieurs,
2004 aura été, pour ce ministère, l'année des grands débats. L'avenir de l'École et celui de la recherche auront mobilisé de très nombreux Français. Ces débats et confrontations intellectuelles n'auront pas été vains. Ils ont permis d'établir un diagnostic partagé sur les forces et faiblesses de nos systèmes éducatif et scientifique. Ils auront permis de dégager des orientations globalement convergentes.
Sur l'École - ce dossier que l'on disait " explosif " et sur lequel 60 millions d'avis se disputent - nous avons, je crois, saisi le fil de l'intérêt général.
Entre ceux qui ne veulent rien changer et ceux qui escomptent tout bouleverser, j'ai fixé un cap pragmatique qui changera progressivement mais profondément le visage de l'École. En recadrant ses priorités, en instaurant un socle de connaissances et de compétences fondamentales, en instituant une pédagogie personnalisée pour les élèves en difficulté, nous plaçons notre système éducatif dans l'obligation et en situation d'atteindre des objectifs précis.
Les critiques éparses et contradictoires qu'a suscitées notre projet semblent plus tacticiennes que structurelles. Le 20 janvier, les organisations syndicales appellent, vous le savez, à manifester, et parmi les multiples revendications, l'une d'entre elles réclame le retrait de notre projet Je respecte les convictions de chacun de ceux qui choisiront de " battre le pavé ", mais je veux leur dire que le statu quo est contraire aux intérêts d'une École plus juste et plus efficace.
Prétendre que les efforts financiers consacrés à l'éducation par nos concitoyens à travers l'État depuis plusieurs décennies sont insuffisants alors même que ces moyens nous placent au premier rang des pays de l'OCDE, c'est esquiver notre défi commun : celui de moderniser le grand service public de l'éducation auquel nous sommes tous attachés.
Cette modernisation, nous la devons aux 150 000 élèves qui sortent chaque année de l'École sans qualification, aux 80 000 enfants qui entrent en 6è sans véritablement savoir lire, écrire et compter, aux 10 millions de jeunes Français qui, dans la maîtrise des langues étrangères, sont situés en bas du tableau européen, aux générations futures qui dans dix ans devront, de façon croissante, posséder un diplôme d'études supérieures pour s'imposer dans la compétition internationale. Loin des grandes envolées lyriques et des théories compliquées, loin de la seule question des moyens, voilà la nature des problèmes éducatifs qui sont sous nos yeux et que je veux résoudre.
Sur la recherche, il est peu de dire que les mentalités ont évolué en quelques années. Il y a dix ans, la communauté scientifique était retranchée derrière des positions rigides. Après la crise de l'année dernière, la voici exigeant le mouvement, réclamant plus de souplesse, une meilleure évaluation, plus d'internationalisation, plus de coopération avec les acteurs extérieurs, dont celui du privé.
Je salue cet esprit de responsabilité et d'innovation qui anime la communauté scientifique. Avec elle, le gouvernement souhaite pouvoir, en 2005, nouer un pacte clair et précis entre la nation et sa recherche. Sur ce dossier complexe, je note que les analyses divergent encore parfois, je mesure combien il reste difficile et délicat de transcender les habitudes et les chapelles, je sais que la question des engagements financiers reste prégnante, mais je suis certain qu'il existe un chemin pour avancer ensemble.
Déjouant le jugement frileux des professionnels de l'immobilisme et le verdict grincheux des adeptes de la table rase, tous les débats et les évolutions qui traversent le monde de l'éducation et de la recherche, démontrent que notre société s'interroge, mute, cherche les voies d'une rénovation organisée et non précipitée de notre pays.
À travers les réformes que je propose, je m'efforce d'épouser ce rythme en l'orientant sur des objectifs concrets et efficaces. Je cherche à moderniser le modèle français et non à le déraciner.
C'est ainsi, les nations ont une histoire !
Je travaille avec cette histoire et non en théorisant des ruptures qui, sans aucun doute, feraient la une de vos journaux, mais feraient, tout aussi certainement, perdre du temps à la France. Le monde éducatif, comme celui de la recherche, a besoin de changement, non d'un chambardement.
En charge de ce grand ministère depuis dix mois, après avoir assumé celui des affaires sociales et du travail, nous avons, mesdames et messieurs, eu l'occasion de mieux nous connaître. J'ai la réputation - cela m'est parfois reproché ! - d'établir une certaine distance vis à vis de la communication. Dans un monde surinformé, j'essaie, à ma façon, de ne pas disperser mon action, qui n'est rien d'autre que celle de l'État. Son intensité doit être jugée sur le fond et non sur la forme. Au cours de ces trois années, j'ai eu le privilège de conduire plus de dix projets de loi. Vous connaissez à présent mon style. Je n'agis pas dans l'empressement, je m'efforce d'écouter les avis des uns et des autres, je cherche à définir, sans dogmatisme partisan, l'intérêt général, puis je décide et ne recule pas. Ce qui compte c'est l'avenir, c'est la France, cette puissance que je ne puis qualifier de " moyenne ".
Mesdames et messieurs,
Si 2004 fut l'année des grands débats, 2005 sera celle des choix stratégiques. Ils détermineront l'avenir de l'Éole et de la recherche tout au long des prochaines années.
Ce matin même, je viens de présenter en conseil des ministres la loi d'orientation sur l'École. Le Parlement sera appelé à en débattre en févier.
Conformément aux vux du Président de la République et du Premier ministre, cette loi entrera pour partie en vigueur dès l'année 2005-2006.
- le Haut conseil de l'éducation qui donnera notamment un avis sur le contenu du socle sera instauré ;
- les contrats individuels de réussite éducative commenceront à être proposés ;
- l'enseignement de découverte professionnelle en classe de troisième sera mis en place ;
- le plan ambitieux en faveur de l'apprentissage des langues étrangères commencera à entrer dans les faits, avec notamment la généralisation de la première langue vivante en CE2, avant qu'elle ne soit déclinée au niveau du CE1 ;
- la nouvelle organisation du brevet sera installée pour la session 2006 ;
- la note de vie scolaire sera mise en place ;
- le brevet informatique et internet ( B2i ) sera généralisé ;
- la modernisation du bac sera arrêtée pour être mise en application à la session 2007 ;
- les baccalauréats professionnels en trois ans seront développés ;
- la montée en puissance des classes et ateliers relais qui accueillent les élèves perturbateurs et en grandes difficultés sera enclenchée ;
- dans chaque collège et lycée un conseil pédagogique sera créé ;
- chaque projet d'établissement précisera les conditions d'accueil et d'information des parents ;
- le dispositif de remplacement des enseignants absents pour une courte durée sera lancé ;
- le cahier des charges national de la formation des maîtres sera défini et la préparation du transfert des premiers IUFM aux universités sera engagée.
Voilà, mesdames et messieurs, la feuille de route pour 2005. Elle est bien remplie. Nous nous imposons un pas rapide car je veux que d'ici deux ans l'ensemble de cette loi pour l'École soit intégralement sur les rails.
Sur le dossier de la recherche, nous mettons en forme, avec François d'Aubert, le projet de loi d'orientation et de programmation. Il s'inspirera pour une large part des recommandations du CIP, elles-mêmes issues des états généraux.
Avec, la création d'un Haut Conseil de la recherche, la mise en place des pôles de recherche et d'enseignement supérieur, l'instauration des instituts de recherche partenariale, l'établissement de l'Agence nationale de la recherche, l'organisation d'une évaluation plus homogène et plus conforme aux standards internationaux, notre objectif est de mieux coordonner les efforts de notre recherche publique et privée.
Le temps des cloisonnements est révolu. En 2005, la recherche devra s'affirmer comme une grande affaire nationale autour de laquelle tous les acteurs doivent se rassembler. Face à la rudesse de la concurrence internationale du savoir, cette synergie est - je n'hésite pas à le dire - une question de survie.
Face à cette question, l'État, doit jouer un rôle stratégique. Il l'assumera, notamment en terme d'efforts financiers, avec 1 milliard d'euros supplémentaire chaque année en faveur de la recherche. Il devra également l'assumer en offrant aux jeunes chercheurs un plan pluriannuel de l'emploi scientifique et un parcours de réussite.
Mesdames et messieurs,
Depuis bientôt trois ans, sous l'impulsion du Président de la République et du Premier ministre, notre majorité agit pour la France.
Le renforcement de la sécurité, la revalorisation de la valeur du travail, la réforme des retraites et de l'assurance maladie, celles à venir de l'École et de la recherche, forment un tout cohérent. Nous avons imprimé du mouvement à la société française, ce qui n'est jamais aisé, ni très populaire, comme les dernières élections régionales en témoignèrent.
L'heure n'est cependant nullement au satisfecit. Beaucoup reste à faire. Je sais ce qui se dit et se pense dans le pays. La versatilité de notre système politique, qui depuis vingt ans, à chaque élection, a vu la majorité en place être défaite, suppose de ne rien considérer comme acquis. La majorité a un devoir d'explication permanent sur qu'elle a fait, sur ce qu'elle veut faire, mais aussi sur ce qu'elle n'a pas réussi pleinement encore à faire. En la matière, les illusions sur soi-même comme la langue de bois, sont à proscrire. Pour nous, l'avenir avec les Français commence tous les jours.
Dans cet esprit, l'UMP a une responsabilité particulièrement aiguë. J'entends contribuer au dynamisme de ses idées. Face aux surenchères de l'opposition - qui est encore loin d'avoir assumer sa mutation vers une sociale-démocratie moderne ! - nous avons le devoir d'imaginer la France de demain.
Je forme, mesdames et messieurs, le vu que cette nouvelle année soit pour vous, comme pour notre pays, riche en initiatives, projets et débats stimulants. La France, par son histoire et avec ses atouts, mérite de voir ses idéaux se redresser.
(Source http://www.culture.gouv.fr, le 13 janvier 2005)