Déclarations de M. Alain Richard, ministre de la défense, sur le bilan d'un an de coopération militaire entre l'OTAN et la Russie et sur l'évolution des crises en Bosnie et au Kosovo, Bruxelles le 12 juin 1998.

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Circonstance : Réunion du Conseil conjoint permanent OTAN-Russie à Bruxelles (Belgique) le 12 juin 1998

Texte intégral

Monsieur le Secrétaire général, Mon cher Collègue,
Messieurs les Ministres,
Un an après la signature de l'Acte fondateur, le bilan du nouveau partenariat entre l'OTAN et la Russie dans le domaine de la Défense, dont nous allons maintenant discuter, nous apparaît, dans l'ensemble, très satisfaisant.
1) Les réunions du Conseil permanent conjoint dans ses différentes formations des ministres et ambassadeurs, comme les travaux de nos des chefs d'Etat-major ou des représentants militaires, fournissent une base institutionnelle solide pour construire la coopération de Défense entre l'OTAN et la Russie.
Vous m'avez parfois dit, cher collègue, Maréchal Sergueïev, que la Russie souhaitait que ces instances ne se contentent pas de faire de la figuration. Nous partageons entièrement ce sentiment.
Nos représentants, diplomates et militaires, font de leurs rencontres un instrument efficace au service de la sécurité en Europe. Pour compléter la mise en oeuvre de l'Acte fondateur sur le plan institutionnel, il importe désormais de mettre en place à Moscou une mission militaire de liaison de l'OTAN. Les discussions sont bien engagées, elles doivent aboutir car cette présence militaire au quartier général de l'OTAN et à Moscou offrira un signe visible supplémentaire de notre attachement mutuel au respect des principes de réciprocité et de transparence. Cette présence devrait aussi faire progresser efficacement notre coopération militaire.
2) L'actualité nous a donné, bien sûr, l'occasion de nous consulter régulièrement sur l'évolution des crises affectant notre continent. En Bosnie, comme nous l'avons vu, nous coopérons efficacement sur le terrain ; la concertation en amont, au niveau politique et sur les travaux de planification, s'est développée. Notre Conseil offre également un cadre pour des échanges sur la crise du Kossovo, ce qui vient fructueusement d'avoir lieu.
Au-delà, la mise en oeuvre de notre ambitieux programme de travail a permis de lancer des travaux approfondis sur des sujets importants d'intérêt mutuel : les questions nucléaires, les infrastructures militaires, le maintien de la paix, la prolifération des armes de destruction massive, les plans civils d'urgence.
En ce qui concerne la prolifération, je voudrais souligner, à la lumière de la récente déclaration commune OTAN-Russie relative aux essais nucléaires indiens et pakistanais, la proximité de nos positions et notre volonté partagée de promouvoir la non-prolifération au moyen des traités internationaux. Les réunions spécifiques dans ce domaine doivent être l'occasion de réels échanges.
Par ailleurs, le groupe de travail que nous avons créé pour approfondir ensemble la notion de maintien de la paix témoigne que nous pouvons donner une réelle substance à l'Acte fondateur, comme nous l'espérions en le signant. La France, comme d'autres, a contribué activement aux débats qui, nous l'espérons, permettront de déboucher sur la définition de modalités pratiques dans la perspective d'opérations conjointes nouvelles, là où elles seraient nécessaires.
A cet égard, vous savez aussi que l'OTAN a mis au point le concept GFIM pour adapter nos moyens de commandement à la nature imprévisible des crises et aux besoins de flexibilité quant à la participation des nations à leur règlement. Il nous a paru important d'en faire ici une présentation, afin de réfléchir aux modalités d'une association entre l'OTAN et la Russie dans ce domaine.
Pour résumer, cette première année de coopération militaire a réellement instauré le début d'un dialogue stratégique entre la Russie et l'OTAN. Nous sommes conscients que, sur beaucoup de sujets, nous ne sommes qu'au début de nos échanges et nous devons encore les améliorer. La concertation s'est développée. Les mécanismes entrent en application. Des pistes sont tracées. Nous avons ainsi posé les premières pierres d'un nouveau partenariat en matière de Défense. Il doit nous permettre de bâtir, selon un processus progressif, basé sur la confiance et la réciprocité, une sécurité commune et globale dans la région euro-atlantique./.

Monsieur le Secrétaire général,
Cher Collègue et Ami de la Fédération de Russie,
Messieurs les Ministres,
La France est heureuse d'assurer aujourd'hui, un peu plus d'un an après la signature à Paris de l'Acte fondateur, la co-présidence du Conseil permanent conjoint OTAN-Russie.
Je voudrais souligner l'importance de la relation qui s'est développée jusqu'à présent entre l'Alliance et la Russie sur la question des Balkans. Nous parlerons tout à l'heure plus précisément du bilan de nos coopérations. Il m'apparaît que la situation en Bosnie, et plus généralement les problèmes de cette région ont constitué un bon exemple d'application des mécanismes de coopération voulus par nos dix-sept chefs d'Etat et de gouvernement.
1) En ce qui concerne la Bosnie, nous avons décidé, après consultation avec vous, la prolongation, au-delà de juin, de la mission de la SFOR, en particulier pour contribuer à conforter la mise en oeuvre du volet civil du plan de paix et poursuivre la stabilisation entreprise depuis les accords signés à Paris.
Ces thèmes ont été fréquemment évoqués entre nos ambassadeurs et nos dix-sept représentants militaires.
Notre analyse commune est que nous ne pouvons pas relâcher nos efforts : - l'évolution politique favorable en Republika Srpska, doit être consolidée car persistent des courants hostiles aux accords de paix ;
- les élections de septembre et le changement espéré d'une partie de la classe politique est un enjeu majeur, elles doivent contribuer à renforcer la démocratie ;
- le retour des réfugiés, nécessaire à une paix durable dans une Bosnie pluri-ethnique, est un objectif prioritaire pour 1998 ;
- l'arrestation des accusés de crimes de guerre, enfin, constitue à nos yeux un préalable à la réconciliation entre les communautés.
La présence internationale est encore nécessaire, tout en veillant à éviter de développer un "syndrome de dépendance" des gouvernements des deux entités ; ceux-ci doivent assumer toutes leurs responsabilités.
Dans ce contexte, nous avons approuvé hier l'activation du plan opérationnel pour la poursuite de la mission de la SFOR après juin 1998. L'engagement confirmé de la Russie apparaît à la fois comme une composante majeure de la mise en oeuvre des accords de paix et la marque d'une coopération confiante et approfondie entre nous.
2) C'est l'histoire de cette crise de la Bosnie-Herzégovine que nous avons à l'esprit quand nous abordons les événements qui se déroulent au Kossovo. Non que ces crises soient identiques. Mais nous devons savoir tirer, ensemble, les enseignements du passé récent pour tendre à la prévention et la maîtrise de ce type de conflit./.

(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 11 septembre 2001)