Déclaration de M. François d'Aubert, ministre délégué à la recherche, sur les recherches concernant l'impact des facteurs environnementaux, y compris au travail, sur la santé humaine, Paris le 31 mars 2005.

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Circonstance : Séminaire "Santé-environnement et santé-travail, nouvelles perspectives de recherche" à Paris les 31 mars et 1er avril 2005

Texte intégral

Monsieur le Ministre,
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,
Je suis particulièrement heureux d'être présent parmi vous ce matin, et d'ouvrir ce séminaire de prospective scientifique consacré aux thèmes Santé-Environnement et Santé au Travail. C'est pour moi l'occasion de contribuer à ce travail de réflexion qui doit nous amener à définir, ensemble, un vaste programme de recherche visant à renforcer les connaissances scientifiques sur l'impact des facteurs environnementaux, y compris l'environnement de travail, sur la santé humaine.
Je tiens également à marquer, par ma présence, mon soutien aux préoccupations légitimes de nos concitoyens face à l'accroissement des rejets polluants et des toxiques environnementaux qui sont causes d'allergies ou d'infections et ma totale adhésion à la Charte de l'Environnement qui a été récemment introduite dans notre Constitution. Comme l'a déclaré récemment le Président de la République, le Protocole de Kyoto ne représente " qu'un premier pas ", " nous devrons aller beaucoup plus loin ...", sur le plan national comme sur le plan international.
Au cours de ces douze derniers mois, le Gouvernement a clairement démontré sa volonté de s'attaquer avec force au problème de la prévention des risques majeurs, en particulier des risques sanitaires liés à notre environnement, depuis l'effet des champs électromagnétiques jusqu'à l'émergence de nouvelles maladies infectieuses (grippe aviaire, SRAS). L'action gouvernementale se décline en deux plans d'actions qui s'inscrivent sur les cinq prochaines années.
En premier lieu, je pense au Plan National Santé Environnement (PNSE), voulu par le Président de la République et adopté par le Premier Ministre en juin 2004, qui vise à garantir un air et une eau de qualité, à prévenir les pathologies d'origine environnementale, à améliorer l'information du public et la protection des populations sensibles.
Je pense également au Plan Santé au Travail (PST), lancé le 13 avril 2004 par Jean-Louis BORLOO et Gérard LARCHER, qui engage toute une série d'actions visant à améliorer la prévention des risques professionnels. Je laisserai bien évidemment à Gérard LARCHER le soin d'en présenter les principaux aspects.
Permettez-moi tout d'abord de saluer la démarche ambitieuse, originale dans sa méthode, qui a permis l'émergence de ces deux plans d'action au travers d'un important travail de synthèse réalisé en association avec des experts scientifiques et des partenaires sociaux. Mon ministère a été étroitement associé à cette démarche. En tant que Ministre délégué à la recherche, c'est naturellement avant tout le rôle de la recherche dans l'évaluation de l'impact environnemental sur la santé que je veux souligner. Je veux insister d'entrée sur la nécessité absolue que se mette en place une mobilisation de l'ensemble des instituts et organismes de recherche et d'enseignement supérieur associés à cette réflexion : CEA, CEE, CNRS, INED, INRA, INSERM, Institut Pasteur, IRD et Universités, cette liste n'étant évidemment pas exhaustive.
La recherche scientifique, fondamentale et finalisée, est indispensable à l'amélioration des connaissances et à l'élaboration de solutions, tant dans le domaine diagnostique que prophylactique. La prise en compte des facteurs environnementaux et la connaissance de leur mode d'interaction avec les autres déterminants de la santé, qu'ils soient génétiques, sociaux ou comportementaux, constituent un vaste champ d'investigation et un défi scientifique majeur.
Face à la complexité du sujet, à la multiplicité des domaines de recherche et des disciplines concernés, le ministère de la recherche a mis en place une procédure originale de définition du champ et des priorités du volet recherche, fondée sur une réflexion prospective à laquelle ont été associés l'ensemble des acteurs de la recherche française. Près de 150 scientifiques de toutes disciplines (sciences biologiques et médicales, sciences physique et chimique, sciences de la terre et de l'univers, sciences humaines et sociales), que je tiens à remercier tout particulièrement ici, ont préparé un document d'orientation réunissant 37 notes de synthèses thématiques qui vous sont présentées aujourd'hui.
Ces deux journées d'échange et de discussions seront donc pour vous toutes et tous, l'occasion de favoriser la confrontation entre les différents domaines de recherche et les différentes disciplines, de faire émerger les perspectives de collaboration interdisciplinaires, et de dégager les thématiques prioritaires.
Je serai donc particulièrement attentif aux propositions qui sortiront de vos échanges et de vos réflexions, et je les attends avec le plus grand intérêt.
Comment le ministère chargé de la recherche compte-t-il soutenir ces actions et favoriser l'émergence de projets transversaux ?
Comme l'a voulu le Président de la République, le budget de la recherche augmentera de 6 milliards d'euros entre 2005 et 2007. C'est un effort important qui est consenti par la communauté nationale et qu'il convient de répartir en fonction de nos grandes priorités. Dès cette année, l'Agence Nationale de la Recherche nouvellement créée pourra engager des actions pour environ 700 millions d'euros. D'importants moyens seront consacrés à des actions sur les axes santé-travail et santé-environnement.
A l'issue de ce séminaire, et en fonction des priorités qui se dégageront de vos travaux, l'Agence procèdera donc au lancement d'un appel à propositions qui sera adressé aux différentes équipes vers la fin du mois d'avril. Grâce au financement de projets d'excellence interdisciplinaires, cet appel à propositions contribuera a la structuration de la communauté, en permettant la mise en réseaux d'équipes, des plate-formes techniques communes. Un conseil scientifique composé de personnalités de renom international, sera mis en place et aura pour mission d'élaborer une stratégie scientifique et d'assurer l'évaluation des projets de recherche pendant toute la durée du PNSE et du PST. Ce conseil s'appuiera sur des activités de veille scientifique et de prospective conduites au sein des organismes publics de recherche et d'enseignement supérieur, et prendra en compte les besoins de recherche formulés par les pouvoirs publics, les agences de sécurité sanitaires, ainsi que les acteurs économiques et sociaux.
Afin de dynamiser et de structurer le potentiel de recherche dans le domaine santé et travail, des réseaux scientifiques pluridisciplinaires regroupant des équipes universitaires, des organismes de recherche et des Grandes écoles, pourront être mis en place. Pour préparer la constitution de ces réseaux, le ministère délégué à la recherche demandera à une dizaine de chercheurs de disciplines différentes de préparer un état des lieux de la recherche, des équipes -déjà mobilisées ou qui pourraient l'être-, des thèmes abordés et des perspectives.
Au niveau européen, la France proposera que les thèmes santé-travail et santé-environnement fassent partie des priorités thématiques du 7ème PCRD (programme cadre européen de recherche et développement).
A l'instar des réseaux internationaux multidisciplinaires qui ont permis de faire progresser la connaissance du fonctionnement climatique de notre planète, il nous paraît aujourd'hui essentiel d'obtenir une large mobilisation internationale pour explorer les liens entre la santé humaine et les différents facteurs environnementaux. Des initiatives sont d'ailleurs en discussion dans le cadre du programme Diversitas, un programme international sur la biodiversité qui a entrepris une réflexion sur les liens entre les changements globaux à l'échelle de la planète (modifications du climat, de l'utilisation des terres, de la biodiversité,...) et la santé humaine.
Ce travail de structuration de la recherche fondamentale devra s'accompagner d'une amélioration de l'articulation entre recherche publique et privée.
Des actions spécifiques de soutien à la recherche technologique, du type " Réseaux de Recherche et d'Innovation Technologique " (RRIT) ou d'autres actions de soutien des organismes dédiés, pourront être lancées à partir de 2006 après identification des besoins (développement de procédés ou de pratiques plus favorables à la santé et à l'environnement).
Que ce soit par le biais de fondations dédiées, dans lesquelles l'État a décidé de mettre des moyens significatifs en 2004, ou par le biais de nouvelles sociétés d'interface, une meilleure articulation public/privé apparaît indispensable.
Enfin, trois types de mesures incitatives seront prises pour attirer des jeunes chercheurs vers les thèmes santé-travail et santé-environnement :
- soutien à la création de parcours licence-master-doctorat (LMD) sur les thèmes concernés par la santé et l'environnement ;
- fléchage annuel de 20 allocations de recherche et de 20 CDD pour des post-doctorants sur la durée du PNSE et du PST ; incitation des industriels à mobiliser les contrats CIFRE sur les thèmes concernés ;
- attribution d'une trentaine de postes de chercheurs et d'enseignants chercheurs (y compris hospitalo-universitaire) sur les différents domaines et disciplines concernés.
La question de l'attractivité de la carrière des chercheurs, et en particulier du statut des jeunes chercheurs, est comme vous le savez au coeur de la loi pour la recherche qui est cours d'élaboration et à laquelle je suis extrêmement attaché.
Mesdames et Messieurs, la recherche est reconnue aujourd'hui comme un investissement d'avenir que le Gouvernement auquel j'appartiens entend bien privilégier.
Mon ambition est d'augmenter rapidement l'ampleur du soutien financier aux projets d'excellence qui auront été sélectionnés, en renforçant les actions d'interface et en favorisant les approches associant l'ensemble des disciplines scientifiques : sciences biologiques et médicales, sciences de l'ingénieur, sciences chimiques, sciences de la terre et de l'univers, sciences humaines et sociales, afin de renouveler les méthodes et les outils d'analyse.
Grâce à votre travail, les perspectives de développement des recherches dans les domaines santé-environnement et santé-travail sont bien tracées, et je souhaite que ces deux journées de réflexion, d'échange et de prospective, soient le moteur d'une véritable mobilisation de l'ensemble de la communauté scientifique.
Je vous remercie de votre attention.
(Source http://www.recherche.gouv.fr, le 5 avril 2005)