Texte intégral
Mesdames, Messieurs les Ministres, Chers Collègues,
Monsieur le Directeur général de l'UNESCO,
Mesdames, Messieurs les Ambassadeurs,
Monsieur le Directeur exécutif de la Fondation Asie-Europe,
Mesdames, Messieurs,
Chers Amis,
Je suis très heureux de vous souhaiter la bienvenue à tous à Paris. Je tiens à remercier très chaleureusement nos collègues d'Asie, d'être venus ici aussi nombreux en Europe, pour participer à cette deuxième réunion des ministres de la culture des pays de l'ASEM.
Je tiens également à saluer le Directeur général de l'Unesco, M. Koïchiro Matsuura, qui prendra la parole dans un instant. Votre présence, Monsieur le Directeur général, témoigne de l'importance de cette réunion sur " la diversité culturelle : opportunités et défis - le plan d'action à long terme de l'ASEM ".
Je veux également remercier les pays co-parrains, qui, aux côtés de la France, ont rendu possible la tenue de ces rencontres et aidé à leur préparation. Il s'agit de l'Allemagne, de la Chine, de l'Espagne, de l'Indonésie, de la Malaisie, de la Pologne et de Singapour. Je remercie enfin deux pays, le Luxembourg, qui assure ce semestre la présidence de l'Union européenne, et la Malaisie, qui ont accueilli les rencontres préparatoires de cette réunion. Sans eux, cette conférence n'aurait pu se tenir aujourd'hui ici même, à Paris.
Notre temps est marqué par le terrorisme et la violence, la propagation du racisme et des haines ethniques ou religieuses, et la tentation du repli sur soi. Le dialogue des cultures est d'autant plus nécessaire au développement des échanges entre les grandes régions du monde, au même titre que le dialogue politique ou la coopération économique.
Les pays de l'ASEM représentent 40% de la population mondiale, 50% du PNB, et 55% du commerce mondial. L'impact économique de la culture dans nos deux continents est considérable : en Europe, 4,2 millions de personnes occupent un emploi culturel, soit 2,5 % de la population active totale de l'Europe des 25 ; parmi elles, 2,3 millions de personnes sont employées dans les industries culturelles ; l'Asie, quant à elle, représente déjà, par exemple, 20% du marché mondial des ventes de CD et de DVD. Ces chiffres sont éloquents.
Mais plus encore que cet impact croissant de la culture sur l'économie et le développement, nos pays, par leur histoire, et leur volonté de découverte et de connaissance réciproques, sont à même, aujourd'hui, d'apporter le plus harmonieux démenti à tous les tenants du " choc des civilisations ", et de montrer l'exemple du dialogue sur la base du respect mutuel et de la réciprocité.
C'est pourquoi, lors du sommet de Copenhague en 2002, la décision des Chefs d'État et de Gouvernement de promouvoir le volet culturel et éducatif, comme troisième pilier de l'ASEM est essentielle. Pour mieux se comprendre, nos peuples doivent mieux se connaître, et la connaissance de l'autre passe par le rayonnement de sa propre culture.
La première conférence des ministres de la culture, tenue à Pékin, en novembre 2003, a permis un premier échange sur les enjeux de la diversité culturelle, le projet de convention à l'UNESCO et la promotion des politiques culturelles en Asie. Le dernier sommet euro-asiatique, organisé à Hanoi, les 8 et 9 octobre derniers, a marqué une nouvelle étape, en insistant, dans sa déclaration finale, sur la diversité culturelle et le dialogue des cultures, à l'âge des technologies de l'information.
Au-delà même du dialogue interculturel, la mondialisation des échanges et de la culture conduit les deux continents, européen et asiatique, porteurs de grandes et riches cultures millénaires qui ont façonné le monde dans lequel nous vivons aujourd'hui, à prendre conscience de leur intérêt commun et de leur convergence croissante, pour protéger et promouvoir la diversité culturelle, et éviter ainsi l'uniformisation du monde.
Cette uniformisation n'est pas un fantasme, mais une menace bien réelle. Ainsi, selon les chiffres de l'UNESCO datant de 2002, 85% du produit des billets de places de cinéma en salles dans le monde correspondent à des films provenant d'Hollywood. Face à cette uniformisation en marche, face aux risques d'appauvrissement culturel qui en découlent, les États ont le devoir de réagir. Oui, les États doivent avoir le droit de protéger et de promouvoir une offre culturelle étendue. Il s'agit non seulement de la sauvegarde des cultures et des patrimoines traditionnels, mais également de tous les secteurs de la création artistique et culturelle contemporaine. La diversité culturelle ne peut en effet être pleinement crédible que si elle permet à tous les pays, quel que soit leur niveau de développement, d'exprimer leur propre identité et leur génie national ; et cela non pas uniquement dans la préservation et la protection de leur patrimoine matériel ou immatériel, mais aussi dans leur capacité à participer au champ des productions et des échanges d'oeuvres contemporaines, dans tous les domaines de la création, culturelle et audiovisuelle.
Nous pouvons en effet d'autant mieux échanger et enrichir nos propres cultures que nous sommes porteurs de cultures différentes et d'une volonté réelle d'ouverture aux cultures des autres. Pour reprendre le mot d'Octavio Paz " toute culture naît du mélange, de la rencontre, des chocs. A l'inverse, c'est de l'isolement que meurent les civilisations. "
Mais pour prendre tout son sens, notre préoccupation commune en faveur du dialogue et de la diversité des cultures du monde se doit d'avoir des prolongements très concrets. Ceux-ci doivent concerner tant la promotion des échanges culturels entre nos deux continents et le soutien à la mobilité des créateurs et des oeuvres de l'art et de l'esprit, que l'action concertée, internationale et multilatérale, afin de faire aboutir le cadre juridique multilatéral qui reconnaîtra la spécificité des biens et services culturels et des expressions artistiques, ainsi que le droit des États à protéger et promouvoir leurs propres cultures. Je veux parler en particulier du projet de convention en discussion actuellement à l'UNESCO.
L'ensemble des initiatives déjà réalisées, aussi bien au niveau bilatéral que multilatéral, doit nous conduire à poser les jalons d' un plan d'action à long terme, suivant en cela les recommandations du sommet des Chefs d'État réunis à Hanoï en octobre dernier.
Pour sa mise en oeuvre, l'ASEM dispose d'un outil précieux avec la Fondation Europe-Asie (ASEF), basée à Singapour, dont je souligne ici le rôle fondamental pour la promotion concrète et effective du dialogue entre les civilisations.
Je souhaite en effet rendre hommage à cette organisation, qui, jour après jour, depuis 1997, oeuvre pour des projets concrets, sur la base des contributions volontaires des Etats. Parmi ses multiples activités, deux secteurs me paraissent dignes de retenir notre attention ce matin, afin d'approfondir notre action et d'intensifier nos échanges, celui des musées et celui du cinéma.
S'agissant des musées, le réseau ASEMUS témoigne du potentiel considérable de la coopération culturelle euro-asiatique : il a développé, en seulement trois ans et grâce à la très forte implication de ses 70 membres européens et asiatiques, plusieurs projets. Je citerai notamment les missions éducatives des musées, les techniques de préservation et de restauration, les expositions communes, ou encore, les portails réunissant sur Internet des chefs d'oeuvre des collections.
En matière de cinéma, nous devons nous appuyer sur la coopération lancée à la suite de la rencontre de Manille de 2002, qui a lancé le réseau SEA-images afin d'encourager les échanges entre professionnels et la promotion du cinéma indépendant. Au-delà de l'idée d'organiser un grand festival du cinéma asiatique en Europe, il importe aussi de réfléchir plus profondément aux moyens et aux outils nécessaires pour encourager la distribution du cinéma asiatique en Europe et du cinéma européen en Asie.
Il s'agit d'encourager plus généralement la production et la distribution de toutes les formes d'art, de toutes les créations culturelles. Car les oeuvres de l'esprit ne sont pas des marchandises, en ce sens qu'elles affectent directement la vie, l'identité et l'intégrité des individus ; elles ne peuvent donc être traitées de manière indifférenciée par les règles du commerce international, et abandonnées au jeu aveugle du marché.
Indispensable à la société humaine, comme la diversité biologique l'est à la biosphère, la diversité culturelle est l'un des piliers du développement durable, comme l'a reconnu le sommet de Johannesburg de 2002, afin que les générations de demain puissent accepter, vivre et faire vivre leurs différences et les richesses de leurs créations dans un monde commun.
Je me réjouis que cette conférence se saisisse de ce sujet essentiel. Les thèmes de vos ateliers relatifs à la culture comme facteur de développement économique, ou encore au tourisme culturel ou aux industries culturelles et créatives, soulignent combien l'économie et la culture ont partie liée. La culture peut être un facteur décisif d'emploi, de croissance et de développement économiques, aussi bien dans les domaines de l'attractivité et de la mise en valeur d'un pays, que dans celui des industries culturelles. Mais cette valeur ajoutée ne porte ses fruits que si nous savons conserver à nos cultures ce qui leur donne leur irréductible spécificité. En nous résignant à la standardisation et à l'uniformisation de nos cultures, nous nous appauvririons. En protégeant et en promouvant leur diversité, nous nous donnons les moyens de les mettre en valeur au service du développement économique durable.
Ce débat arrive à un moment crucial, puisque la négociation à l'UNESCO est entrée dans sa toute dernière phase. L'ASEM a joué un rôle remarquable dans ce processus. J'ai déjà cité la première réunion des ministres de la culture à Pékin, en novembre 2002, ainsi que le sommet de Hanoï en octobre dernier. Le séminaire Europe-Asie sur la diversité culturelle dans le cadre de la mondialisation, promu par le Vietnam et la Belgique, a permis également d'approfondir notre réflexion commune.
La France souhaite, pour sa part, en accord avec la position européenne unanime et commune, que les principes suivants puissent être réaffirmés avec force :
- la reconnaissance de la spécificité des biens, services et activités culturels, qui sont à la fois des vecteurs de la diffusion des oeuvres de l'esprit, et des objets de commerce ;
- le droit des États à adopter ou maintenir des mesures qu'ils jugent appropriées à la préservation de leur patrimoine culturel et au développement de leurs expressions culturelles et linguistiques ;
- le renforcement de la coopération et de la solidarité en faveur des pays en développement, afin de contribuer à rééquilibrer les échanges de biens et services culturels et de favoriser le pluralisme des expressions culturelles ;
- la non-subordination de la convention aux autres traités, et notamment aux accords commerciaux, et au règlement des contentieux dans le cadre d'un mécanisme contraignant.
Mesdames, Messieurs les Ministres, Monsieur le Directeur général, je voudrais conclure en vous disant combien nous attachons la plus haute importance à la réunion de ce jour et aux thèmes que nous allons explorer. Les enjeux du dialogue des cultures et de la sauvegarde de la diversité culturelle dépassent largement la seule sphère artistique et culturelle. Il s'agit de maîtriser et d'humaniser la mondialisation. C'est parce que nous sommes attachés à la paix et au développement, que nous prônons le dialogue des cultures. C'est parce que nous sommes conscients de la complexité du monde que nous défendons la diversité, source de richesse et de progrès.
Je vous remercie.
(Source http://www.culture.gouv.fr, le 8 juin 2005)
Monsieur le Directeur général de l'UNESCO,
Mesdames, Messieurs les Ambassadeurs,
Monsieur le Directeur exécutif de la Fondation Asie-Europe,
Mesdames, Messieurs,
Chers Amis,
Je suis très heureux de vous souhaiter la bienvenue à tous à Paris. Je tiens à remercier très chaleureusement nos collègues d'Asie, d'être venus ici aussi nombreux en Europe, pour participer à cette deuxième réunion des ministres de la culture des pays de l'ASEM.
Je tiens également à saluer le Directeur général de l'Unesco, M. Koïchiro Matsuura, qui prendra la parole dans un instant. Votre présence, Monsieur le Directeur général, témoigne de l'importance de cette réunion sur " la diversité culturelle : opportunités et défis - le plan d'action à long terme de l'ASEM ".
Je veux également remercier les pays co-parrains, qui, aux côtés de la France, ont rendu possible la tenue de ces rencontres et aidé à leur préparation. Il s'agit de l'Allemagne, de la Chine, de l'Espagne, de l'Indonésie, de la Malaisie, de la Pologne et de Singapour. Je remercie enfin deux pays, le Luxembourg, qui assure ce semestre la présidence de l'Union européenne, et la Malaisie, qui ont accueilli les rencontres préparatoires de cette réunion. Sans eux, cette conférence n'aurait pu se tenir aujourd'hui ici même, à Paris.
Notre temps est marqué par le terrorisme et la violence, la propagation du racisme et des haines ethniques ou religieuses, et la tentation du repli sur soi. Le dialogue des cultures est d'autant plus nécessaire au développement des échanges entre les grandes régions du monde, au même titre que le dialogue politique ou la coopération économique.
Les pays de l'ASEM représentent 40% de la population mondiale, 50% du PNB, et 55% du commerce mondial. L'impact économique de la culture dans nos deux continents est considérable : en Europe, 4,2 millions de personnes occupent un emploi culturel, soit 2,5 % de la population active totale de l'Europe des 25 ; parmi elles, 2,3 millions de personnes sont employées dans les industries culturelles ; l'Asie, quant à elle, représente déjà, par exemple, 20% du marché mondial des ventes de CD et de DVD. Ces chiffres sont éloquents.
Mais plus encore que cet impact croissant de la culture sur l'économie et le développement, nos pays, par leur histoire, et leur volonté de découverte et de connaissance réciproques, sont à même, aujourd'hui, d'apporter le plus harmonieux démenti à tous les tenants du " choc des civilisations ", et de montrer l'exemple du dialogue sur la base du respect mutuel et de la réciprocité.
C'est pourquoi, lors du sommet de Copenhague en 2002, la décision des Chefs d'État et de Gouvernement de promouvoir le volet culturel et éducatif, comme troisième pilier de l'ASEM est essentielle. Pour mieux se comprendre, nos peuples doivent mieux se connaître, et la connaissance de l'autre passe par le rayonnement de sa propre culture.
La première conférence des ministres de la culture, tenue à Pékin, en novembre 2003, a permis un premier échange sur les enjeux de la diversité culturelle, le projet de convention à l'UNESCO et la promotion des politiques culturelles en Asie. Le dernier sommet euro-asiatique, organisé à Hanoi, les 8 et 9 octobre derniers, a marqué une nouvelle étape, en insistant, dans sa déclaration finale, sur la diversité culturelle et le dialogue des cultures, à l'âge des technologies de l'information.
Au-delà même du dialogue interculturel, la mondialisation des échanges et de la culture conduit les deux continents, européen et asiatique, porteurs de grandes et riches cultures millénaires qui ont façonné le monde dans lequel nous vivons aujourd'hui, à prendre conscience de leur intérêt commun et de leur convergence croissante, pour protéger et promouvoir la diversité culturelle, et éviter ainsi l'uniformisation du monde.
Cette uniformisation n'est pas un fantasme, mais une menace bien réelle. Ainsi, selon les chiffres de l'UNESCO datant de 2002, 85% du produit des billets de places de cinéma en salles dans le monde correspondent à des films provenant d'Hollywood. Face à cette uniformisation en marche, face aux risques d'appauvrissement culturel qui en découlent, les États ont le devoir de réagir. Oui, les États doivent avoir le droit de protéger et de promouvoir une offre culturelle étendue. Il s'agit non seulement de la sauvegarde des cultures et des patrimoines traditionnels, mais également de tous les secteurs de la création artistique et culturelle contemporaine. La diversité culturelle ne peut en effet être pleinement crédible que si elle permet à tous les pays, quel que soit leur niveau de développement, d'exprimer leur propre identité et leur génie national ; et cela non pas uniquement dans la préservation et la protection de leur patrimoine matériel ou immatériel, mais aussi dans leur capacité à participer au champ des productions et des échanges d'oeuvres contemporaines, dans tous les domaines de la création, culturelle et audiovisuelle.
Nous pouvons en effet d'autant mieux échanger et enrichir nos propres cultures que nous sommes porteurs de cultures différentes et d'une volonté réelle d'ouverture aux cultures des autres. Pour reprendre le mot d'Octavio Paz " toute culture naît du mélange, de la rencontre, des chocs. A l'inverse, c'est de l'isolement que meurent les civilisations. "
Mais pour prendre tout son sens, notre préoccupation commune en faveur du dialogue et de la diversité des cultures du monde se doit d'avoir des prolongements très concrets. Ceux-ci doivent concerner tant la promotion des échanges culturels entre nos deux continents et le soutien à la mobilité des créateurs et des oeuvres de l'art et de l'esprit, que l'action concertée, internationale et multilatérale, afin de faire aboutir le cadre juridique multilatéral qui reconnaîtra la spécificité des biens et services culturels et des expressions artistiques, ainsi que le droit des États à protéger et promouvoir leurs propres cultures. Je veux parler en particulier du projet de convention en discussion actuellement à l'UNESCO.
L'ensemble des initiatives déjà réalisées, aussi bien au niveau bilatéral que multilatéral, doit nous conduire à poser les jalons d' un plan d'action à long terme, suivant en cela les recommandations du sommet des Chefs d'État réunis à Hanoï en octobre dernier.
Pour sa mise en oeuvre, l'ASEM dispose d'un outil précieux avec la Fondation Europe-Asie (ASEF), basée à Singapour, dont je souligne ici le rôle fondamental pour la promotion concrète et effective du dialogue entre les civilisations.
Je souhaite en effet rendre hommage à cette organisation, qui, jour après jour, depuis 1997, oeuvre pour des projets concrets, sur la base des contributions volontaires des Etats. Parmi ses multiples activités, deux secteurs me paraissent dignes de retenir notre attention ce matin, afin d'approfondir notre action et d'intensifier nos échanges, celui des musées et celui du cinéma.
S'agissant des musées, le réseau ASEMUS témoigne du potentiel considérable de la coopération culturelle euro-asiatique : il a développé, en seulement trois ans et grâce à la très forte implication de ses 70 membres européens et asiatiques, plusieurs projets. Je citerai notamment les missions éducatives des musées, les techniques de préservation et de restauration, les expositions communes, ou encore, les portails réunissant sur Internet des chefs d'oeuvre des collections.
En matière de cinéma, nous devons nous appuyer sur la coopération lancée à la suite de la rencontre de Manille de 2002, qui a lancé le réseau SEA-images afin d'encourager les échanges entre professionnels et la promotion du cinéma indépendant. Au-delà de l'idée d'organiser un grand festival du cinéma asiatique en Europe, il importe aussi de réfléchir plus profondément aux moyens et aux outils nécessaires pour encourager la distribution du cinéma asiatique en Europe et du cinéma européen en Asie.
Il s'agit d'encourager plus généralement la production et la distribution de toutes les formes d'art, de toutes les créations culturelles. Car les oeuvres de l'esprit ne sont pas des marchandises, en ce sens qu'elles affectent directement la vie, l'identité et l'intégrité des individus ; elles ne peuvent donc être traitées de manière indifférenciée par les règles du commerce international, et abandonnées au jeu aveugle du marché.
Indispensable à la société humaine, comme la diversité biologique l'est à la biosphère, la diversité culturelle est l'un des piliers du développement durable, comme l'a reconnu le sommet de Johannesburg de 2002, afin que les générations de demain puissent accepter, vivre et faire vivre leurs différences et les richesses de leurs créations dans un monde commun.
Je me réjouis que cette conférence se saisisse de ce sujet essentiel. Les thèmes de vos ateliers relatifs à la culture comme facteur de développement économique, ou encore au tourisme culturel ou aux industries culturelles et créatives, soulignent combien l'économie et la culture ont partie liée. La culture peut être un facteur décisif d'emploi, de croissance et de développement économiques, aussi bien dans les domaines de l'attractivité et de la mise en valeur d'un pays, que dans celui des industries culturelles. Mais cette valeur ajoutée ne porte ses fruits que si nous savons conserver à nos cultures ce qui leur donne leur irréductible spécificité. En nous résignant à la standardisation et à l'uniformisation de nos cultures, nous nous appauvririons. En protégeant et en promouvant leur diversité, nous nous donnons les moyens de les mettre en valeur au service du développement économique durable.
Ce débat arrive à un moment crucial, puisque la négociation à l'UNESCO est entrée dans sa toute dernière phase. L'ASEM a joué un rôle remarquable dans ce processus. J'ai déjà cité la première réunion des ministres de la culture à Pékin, en novembre 2002, ainsi que le sommet de Hanoï en octobre dernier. Le séminaire Europe-Asie sur la diversité culturelle dans le cadre de la mondialisation, promu par le Vietnam et la Belgique, a permis également d'approfondir notre réflexion commune.
La France souhaite, pour sa part, en accord avec la position européenne unanime et commune, que les principes suivants puissent être réaffirmés avec force :
- la reconnaissance de la spécificité des biens, services et activités culturels, qui sont à la fois des vecteurs de la diffusion des oeuvres de l'esprit, et des objets de commerce ;
- le droit des États à adopter ou maintenir des mesures qu'ils jugent appropriées à la préservation de leur patrimoine culturel et au développement de leurs expressions culturelles et linguistiques ;
- le renforcement de la coopération et de la solidarité en faveur des pays en développement, afin de contribuer à rééquilibrer les échanges de biens et services culturels et de favoriser le pluralisme des expressions culturelles ;
- la non-subordination de la convention aux autres traités, et notamment aux accords commerciaux, et au règlement des contentieux dans le cadre d'un mécanisme contraignant.
Mesdames, Messieurs les Ministres, Monsieur le Directeur général, je voudrais conclure en vous disant combien nous attachons la plus haute importance à la réunion de ce jour et aux thèmes que nous allons explorer. Les enjeux du dialogue des cultures et de la sauvegarde de la diversité culturelle dépassent largement la seule sphère artistique et culturelle. Il s'agit de maîtriser et d'humaniser la mondialisation. C'est parce que nous sommes attachés à la paix et au développement, que nous prônons le dialogue des cultures. C'est parce que nous sommes conscients de la complexité du monde que nous défendons la diversité, source de richesse et de progrès.
Je vous remercie.
(Source http://www.culture.gouv.fr, le 8 juin 2005)