Texte intégral
Q - Que pensez-vous du nouveau gouvernement ?
R - Jacques Chirac est à nouveau passé à côté du sujet. A un immense cri de détresse sur l'Europe et sur la vie quotidienne, il a répondu par un simple bricolage institutionnel. Après la victoire du non, il nous a annoncé un gouvernement du oui. On prend les mêmes et on recommence.
Q - Vous ne portez pas beaucoup de crédit à l'association entre M. de Villepin et M. Sarkozy ?
R - Le talent de l'un et de l'autre n'est pas en cause. Ce qui rend mal à l'aise dans cette alchimie improbable, c'est un mélange d'inédits et de retours sur promesses imprévisibles. Chacun a en tête l'image forte de Jacques Chirac disant de Nicolas Sarkozy, le 14 juillet 2004 : "C'est ou l'UMP ou le gouvernement." Et chacun se souvient de la réponse du ministre de l'intérieur : "Après mûre réflexion, je fais don de ma personne à l'UMP." Aujourd'hui, Nicolas Sarkozy revient à la case départ et Jacques Chirac sur son commandement péremptoire.
Q - Jugez-vous incompatibles les fonctions de ministre de l'intérieur et de président d'un parti ?
R - Il serait gênant pour la démocratie que le chef d'un parti politique, candidat à l'élection présidentielle, soit en même temps le chef du renseignement politique, le coordinateur de toutes les polices et le contrôleur des élections.
Q - Espériez-vous qu'on vous appelle au gouvernement ?
R - Certains ont évoqué l'idée d'un gouvernement très large avec la double expression du oui et du non. Mais nous ne sommes pas devant un problème de cuisine ou d'épicerie, nous sommes devant un choix politique au sommet de l'Etat : y a-t-il un destin pour la France ? Y a-t-il un avenir pour l'Europe quand les peuples européens les uns après les autres décrochent ? Or, quelles sont les réponses qui circulent depuis trois jours dans les milieux politiques ? Des alliages de caractères et d'ambitions personnelles. Un non ne pourrait entrer au gouvernement que pour faire la politique du non. Or, il est clair que le nouveau gouvernement Chirac-Villepin-Sarkozy ne poursuit qu'un seul idéal : tirer des bords dans le gros temps sans perdre de matelots à bord pour deux années de simple cabotage difficile.
Q - Demandez-vous la proportionnelle aux élections législatives ?
R - L'introduction de la proportionnelle pourrait apporter une correction à la marge. Mais elle n'est qu'une petite réponse technique à un problème plus général qui est l'inaptitude et le refus des élites à comprendre ce qui est au coeur du malaise des Français : le triple sentiment de dépossession par la mondialisation qui attire nos forces vives, par l'Europe de Bruxelles qui mutile nos libertés et par l'immigration qui affaiblit notre identité.
Q - Ferez-vous voter la confiance à vos élus au Parlement ?
R - Non. Comment voulez-vous qu'un des principaux leaders du non qui a bataillé pendant des mois avec son coeur et toute son ardeur pour un tournant historique de la France et de l'Europe, puisse soutenir un gouvernement du oui composé par le oui pour faire la politique du oui ?
Q - Vous ne faites donc plus partie de la majorité ?
R - Pendant toute la campagne référendaire, j'ai eu l'honneur de porter l'espoir de millions de Français. Comment pourrais-je les trahir ? Jusqu'au 29 mai, je m'étais assigné un but : faire gagner le non. Désormais, mon but est de faire respecter la victoire du non. Je ne transigerai pas là-dessus.
Q - Serez-vous candidat à l'élection présidentielle ?
R - L'échéance est lointaine. Si le oui l'avait emporté, la toile de fond de la présidentielle eût été d'un grand classicisme. Une sorte de redite de 1995 et 2002 : plus d'impôt, moins d'impôt ; plus de fonctionnaires, moins de fonctionnaires ; plus d'immigrés, moins d'immigrés. Avec la victoire du non tout est chamboulé. Le débat s'est déplacé et a périmé beaucoup de clivages. Le débat c'est : que fait-on de la France et que fait-on avec l'Europe ? Le non aura une place centrale dans le débat.
(Source http://www.mpf-villiers.com, le 4 juillet 2005)
R - Jacques Chirac est à nouveau passé à côté du sujet. A un immense cri de détresse sur l'Europe et sur la vie quotidienne, il a répondu par un simple bricolage institutionnel. Après la victoire du non, il nous a annoncé un gouvernement du oui. On prend les mêmes et on recommence.
Q - Vous ne portez pas beaucoup de crédit à l'association entre M. de Villepin et M. Sarkozy ?
R - Le talent de l'un et de l'autre n'est pas en cause. Ce qui rend mal à l'aise dans cette alchimie improbable, c'est un mélange d'inédits et de retours sur promesses imprévisibles. Chacun a en tête l'image forte de Jacques Chirac disant de Nicolas Sarkozy, le 14 juillet 2004 : "C'est ou l'UMP ou le gouvernement." Et chacun se souvient de la réponse du ministre de l'intérieur : "Après mûre réflexion, je fais don de ma personne à l'UMP." Aujourd'hui, Nicolas Sarkozy revient à la case départ et Jacques Chirac sur son commandement péremptoire.
Q - Jugez-vous incompatibles les fonctions de ministre de l'intérieur et de président d'un parti ?
R - Il serait gênant pour la démocratie que le chef d'un parti politique, candidat à l'élection présidentielle, soit en même temps le chef du renseignement politique, le coordinateur de toutes les polices et le contrôleur des élections.
Q - Espériez-vous qu'on vous appelle au gouvernement ?
R - Certains ont évoqué l'idée d'un gouvernement très large avec la double expression du oui et du non. Mais nous ne sommes pas devant un problème de cuisine ou d'épicerie, nous sommes devant un choix politique au sommet de l'Etat : y a-t-il un destin pour la France ? Y a-t-il un avenir pour l'Europe quand les peuples européens les uns après les autres décrochent ? Or, quelles sont les réponses qui circulent depuis trois jours dans les milieux politiques ? Des alliages de caractères et d'ambitions personnelles. Un non ne pourrait entrer au gouvernement que pour faire la politique du non. Or, il est clair que le nouveau gouvernement Chirac-Villepin-Sarkozy ne poursuit qu'un seul idéal : tirer des bords dans le gros temps sans perdre de matelots à bord pour deux années de simple cabotage difficile.
Q - Demandez-vous la proportionnelle aux élections législatives ?
R - L'introduction de la proportionnelle pourrait apporter une correction à la marge. Mais elle n'est qu'une petite réponse technique à un problème plus général qui est l'inaptitude et le refus des élites à comprendre ce qui est au coeur du malaise des Français : le triple sentiment de dépossession par la mondialisation qui attire nos forces vives, par l'Europe de Bruxelles qui mutile nos libertés et par l'immigration qui affaiblit notre identité.
Q - Ferez-vous voter la confiance à vos élus au Parlement ?
R - Non. Comment voulez-vous qu'un des principaux leaders du non qui a bataillé pendant des mois avec son coeur et toute son ardeur pour un tournant historique de la France et de l'Europe, puisse soutenir un gouvernement du oui composé par le oui pour faire la politique du oui ?
Q - Vous ne faites donc plus partie de la majorité ?
R - Pendant toute la campagne référendaire, j'ai eu l'honneur de porter l'espoir de millions de Français. Comment pourrais-je les trahir ? Jusqu'au 29 mai, je m'étais assigné un but : faire gagner le non. Désormais, mon but est de faire respecter la victoire du non. Je ne transigerai pas là-dessus.
Q - Serez-vous candidat à l'élection présidentielle ?
R - L'échéance est lointaine. Si le oui l'avait emporté, la toile de fond de la présidentielle eût été d'un grand classicisme. Une sorte de redite de 1995 et 2002 : plus d'impôt, moins d'impôt ; plus de fonctionnaires, moins de fonctionnaires ; plus d'immigrés, moins d'immigrés. Avec la victoire du non tout est chamboulé. Le débat s'est déplacé et a périmé beaucoup de clivages. Le débat c'est : que fait-on de la France et que fait-on avec l'Europe ? Le non aura une place centrale dans le débat.
(Source http://www.mpf-villiers.com, le 4 juillet 2005)