Déclaration de Mme Christine Lagarde, ministre délégué au commerce extérieur, sur la position de la France lors des négociations internationales sur l'agriculture, Paris le 18 juillet 2005.

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Média : La Tribune

Texte intégral

Q - Quels sont, à votre sens, les acquis et conséquences de Dalian ?
R - Au niveau européen, le "débriefing" officiel aura lieu aujourd'hui. Mais ce que l'on pressent à Paris, c'est que le travail de Dalian, surtout axé sur l'agriculture, n'est pas satisfaisant. L'Union européenne et la France ont des priorités offensives et défensives dans les négociations de Doha. Or on s'aperçoit qu'en matière d'accès aux marchés industriels et de services il y a eu peu d'avancées. Pendant ce temps, Tim Groser, chef des négociations agricoles à l'OMC, pousse les feux et donc ce dossier avance. Ce qui paraîtrait souhaitable au gouvernement français, dans l'intérêt de tous, c'est que les discussions progressent dans les cinq domaines clefs de Doha (agriculture, services, industrie, facilitation des échanges et développement), pas que sur l'agriculture. Ce n'est pas dans l'intérêt de nos positions.
Q - Craignez-vous que l'Union européenne doive à nouveau réformer sa Politique agricole commune ?
R - La position de la France à cet égard est claire : la PAC, toute la PAC, rien que la PAC. Sa réforme fut déjà en soi un grand effort consenti par l'Union européenne. Il n'y a donc pas besoin d'aller plus loin.
Q - Que pensez-vous du consensus de Dalian sur les droits de douane agricoles ?
R - Il faut bien examiner ce dont il s'agit. Pour l'instant, un alignement quelconque sur les conclusions de cette réunion me laisse très sceptique. Le fait que tout le monde ait envie de progrès me paraît très positif. Mais en attendant de connaître dans le détail la proposition du G20 et la position qu'a prise le commissaire au Commerce (Peter Mandelson), nous sommes tout à fait réservés.
Q - Les commissaires au Commerce et à l'Agriculture ont pourtant jugé que la proposition du G20 constituait une bonne base de négociation...
R - Affirmer que c'est une base de travail, c'est bien. L'essentiel est de savoir si les intérêts de l'Union européenne ont été défendus et si l'intégrité de la PAC a été préservée.
Q - Le volet agricole freine-t-il l'agenda de Doha ?
R - Ce que je constate, c'est que la stratégie de négociation qui a consisté à se concentrer sur l'agriculture, car c'est le dossier sur lequel il y a le plus de résistances, nous amène à être très en retrait sur le reste. Cela dit, l'importance accordée à l'agriculture reflète le fait que la négociation ne porte pas que sur l'agriculture de base mais aussi sur l'industrie agroalimentaire, donc sur le contrôle de la chaîne alimentaire. Il n'est pas anodin de constater que les Etats-Unis adoptent une attitude très conservatrice, consistant à valoriser ce pouvoir vert et à protéger leurs positions dans le grand jeu mondial de l'accès à l'alimentation.
Q - La conclusion du cycle de Doha peut-elle à nouveau être retardée ?
R - Le cycle est désormais censé s'achever en 2006. Un nouveau directeur général (Pascal Lamy), qui a la réputation d'être un homme organisé, technicien et propre à mener à bien des négociations, arrive le 1er septembre. Les périodes de changement d'équipe sont propices au démarrage de nouvelles dynamiques. C'est un facteur important. Il faut espérer que le cycle sera conclu en 2006, ce qui ne veut pas dire qu'il faudra le bâcler.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 18 juillet 2005)