Texte intégral
Q - Est-ce que vous pouvez nous dire justement dans quel état d'esprit M. Kostunica est venu aujourd'hui à Paris ?
R - Le président Kostunica est venu à Paris à l'occasion d'une exposition qui retrace la façon dont se sont déroulés les événements qui ont conduit à sa victoire et à l'éviction de Milosevic.
Je crois qu'il a voulu venir, non pas en France, parce qu'il est déjà venu rapidement à Biarritz lors du Conseil européen, mais à Paris pour montrer l'appréciation qu'il porte sur ce qu'a été le rôle de la Présidence française dans ce renversement légal et démocratique de Milosevic et après, vous savez que la Présidence française a pris l'initiative de convaincre les autres Européens que la meilleure chance pour l'avenir de la Yougoslavie, pour la démocratie en Yougoslavie, pour la région, c'était de tout faire pour aider M. Kostunica à se consolider. Il est président fédéral, mais il n'a pas le pouvoir réel pour le moment, cela se passe en Serbie et cela se passera lors des élections qui auront lieu le 23. Elles sont donc un enjeu considérable pour tous ceux qui ont à cur de voir le processus démocratique se poursuivre complètement.
Q - Est-ce que vous avez le sentiment après cet entretien que M. Kostunica, dans un avenir plus ou moins proche, souhaite collaborer finalement avec le TPI ; on sait que la Yougoslavie a signé hier sous la pression de la Cour pénale internationale. Est-ce que, pour ce qui est des poursuites, pour pouvoir juger M. Milosevic, vous avez l'impression que les choses évoluent de ce côté là ?
R - Je pense que les choses évoluent en effet et que M. Kostunica est sur un terrain miné, extrêmement difficile, que c'est un vrai démocrate et qu'il est extrêmement respectueux des lois, de la Constitution, et qu'il veut faire évoluer l'opinion yougoslave sur cette question des crimes commis au cours des guerres des dernières années, et qu'il veut le faire selon certaines règles, à son rythme, en fonction de ses pouvoirs réels.
Donc, la question préalable est bien celle des élections du 23 décembre, il faut espérer qu'il aura les moyens de gouverner en Serbie, qu'il y aura un nouveau gouvernement, parce que le nerf de l'exécutif est là en fait, et qu'après il pourra aller plus loin.
Alors dans les signes positifs, je relève plusieurs choses : les signatures à New York par la Yougoslavie du statut de la Cour pénale internationale, l'ouverture en principe à Belgrade d'un bureau du Tribunal pénal comme celui qui existe à La Haye sur ces questions de Yougoslavie à partir du mois de janvier. M. Kostunica continue à dire à la fois que le jugement de M. Milosevic n'est pas la priorité parce qu'ils ont plein de choses plus urgentes, plus importantes pour la population et l'enracinement de la démocratie en Yougoslavie à accomplir, mais il ne dit jamais que la Yougoslavie ne tiendra pas ses engagements.
Alors je crois qu'il avance pas à pas. Il m'a donné un certain nombre d'éléments d'information sur un projet de commission vérité-réconciliation qui devrait être animé par des personnalités intègres et au-dessus de tout soupçon.
Q - Sur le modèle de ce qui a pu se faire en Afrique du Sud ?
R - Par exemple, à l'initiative de Mandela et de Desmond Tutu. C'est un moyen qui peut être extrêmement important pour faire découvrir des réalités, faire apprendre des choses aux opinions qui n'ont pas su, qui ne sont pas conscientes ou qui refusent certaines choses, et pour préparer d'autres étapes. Evidemment cela ne peut se substituer à la justice proprement dite, mais il faut prendre les choses comme elles sont, et de façon telle que l'ensemble puisse avancer.
Donc, il me paraît bien orienté par rapport à la destination générale, mais avec un sens aigu des obstacles qu'il a à surmonter.
Q - Est-ce que justement les Européens doivent tenir compte de cela et peut-être lui laisser un peu plus de temps que ce que l'on avait imaginé au début ?
R - C'est la stratégie que les Européens ont adoptée sur proposition de la Présidence française.
Pour résumer le débat, on a dit : est-ce que notre intérêt, est-ce que l'intérêt de la Yougoslavie, de la région, de la démocratie, c'est de le renforcer ou de lui poser des conditions péremptoires tout de suite ? Et tout le monde a répondu : notre intérêt c'est de le renforcer, pour renforcer la démocratie.
Donc, au fur et à mesure que les étapes pourront être franchies, et qu'il aura de plus en plus de pouvoir, il faudra que d'une façon ou d'une autre, la Yougoslavie nouvelle, moderne, démocratique, conquière sa légitimité entière et réponde aux attentes de la communauté internationale.
Ma conviction c'est que les choses finiront par se rejoindre entre le désir de la Yougoslavie d'être à nouveau un pays à part entière dans l'Europe moderne, démocratique et les attentes internationales. Donc, nous devons plutôt l'aider pour le franchissement de chacun des obstacles./.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 28 décembre 2000)
R - Le président Kostunica est venu à Paris à l'occasion d'une exposition qui retrace la façon dont se sont déroulés les événements qui ont conduit à sa victoire et à l'éviction de Milosevic.
Je crois qu'il a voulu venir, non pas en France, parce qu'il est déjà venu rapidement à Biarritz lors du Conseil européen, mais à Paris pour montrer l'appréciation qu'il porte sur ce qu'a été le rôle de la Présidence française dans ce renversement légal et démocratique de Milosevic et après, vous savez que la Présidence française a pris l'initiative de convaincre les autres Européens que la meilleure chance pour l'avenir de la Yougoslavie, pour la démocratie en Yougoslavie, pour la région, c'était de tout faire pour aider M. Kostunica à se consolider. Il est président fédéral, mais il n'a pas le pouvoir réel pour le moment, cela se passe en Serbie et cela se passera lors des élections qui auront lieu le 23. Elles sont donc un enjeu considérable pour tous ceux qui ont à cur de voir le processus démocratique se poursuivre complètement.
Q - Est-ce que vous avez le sentiment après cet entretien que M. Kostunica, dans un avenir plus ou moins proche, souhaite collaborer finalement avec le TPI ; on sait que la Yougoslavie a signé hier sous la pression de la Cour pénale internationale. Est-ce que, pour ce qui est des poursuites, pour pouvoir juger M. Milosevic, vous avez l'impression que les choses évoluent de ce côté là ?
R - Je pense que les choses évoluent en effet et que M. Kostunica est sur un terrain miné, extrêmement difficile, que c'est un vrai démocrate et qu'il est extrêmement respectueux des lois, de la Constitution, et qu'il veut faire évoluer l'opinion yougoslave sur cette question des crimes commis au cours des guerres des dernières années, et qu'il veut le faire selon certaines règles, à son rythme, en fonction de ses pouvoirs réels.
Donc, la question préalable est bien celle des élections du 23 décembre, il faut espérer qu'il aura les moyens de gouverner en Serbie, qu'il y aura un nouveau gouvernement, parce que le nerf de l'exécutif est là en fait, et qu'après il pourra aller plus loin.
Alors dans les signes positifs, je relève plusieurs choses : les signatures à New York par la Yougoslavie du statut de la Cour pénale internationale, l'ouverture en principe à Belgrade d'un bureau du Tribunal pénal comme celui qui existe à La Haye sur ces questions de Yougoslavie à partir du mois de janvier. M. Kostunica continue à dire à la fois que le jugement de M. Milosevic n'est pas la priorité parce qu'ils ont plein de choses plus urgentes, plus importantes pour la population et l'enracinement de la démocratie en Yougoslavie à accomplir, mais il ne dit jamais que la Yougoslavie ne tiendra pas ses engagements.
Alors je crois qu'il avance pas à pas. Il m'a donné un certain nombre d'éléments d'information sur un projet de commission vérité-réconciliation qui devrait être animé par des personnalités intègres et au-dessus de tout soupçon.
Q - Sur le modèle de ce qui a pu se faire en Afrique du Sud ?
R - Par exemple, à l'initiative de Mandela et de Desmond Tutu. C'est un moyen qui peut être extrêmement important pour faire découvrir des réalités, faire apprendre des choses aux opinions qui n'ont pas su, qui ne sont pas conscientes ou qui refusent certaines choses, et pour préparer d'autres étapes. Evidemment cela ne peut se substituer à la justice proprement dite, mais il faut prendre les choses comme elles sont, et de façon telle que l'ensemble puisse avancer.
Donc, il me paraît bien orienté par rapport à la destination générale, mais avec un sens aigu des obstacles qu'il a à surmonter.
Q - Est-ce que justement les Européens doivent tenir compte de cela et peut-être lui laisser un peu plus de temps que ce que l'on avait imaginé au début ?
R - C'est la stratégie que les Européens ont adoptée sur proposition de la Présidence française.
Pour résumer le débat, on a dit : est-ce que notre intérêt, est-ce que l'intérêt de la Yougoslavie, de la région, de la démocratie, c'est de le renforcer ou de lui poser des conditions péremptoires tout de suite ? Et tout le monde a répondu : notre intérêt c'est de le renforcer, pour renforcer la démocratie.
Donc, au fur et à mesure que les étapes pourront être franchies, et qu'il aura de plus en plus de pouvoir, il faudra que d'une façon ou d'une autre, la Yougoslavie nouvelle, moderne, démocratique, conquière sa légitimité entière et réponde aux attentes de la communauté internationale.
Ma conviction c'est que les choses finiront par se rejoindre entre le désir de la Yougoslavie d'être à nouveau un pays à part entière dans l'Europe moderne, démocratique et les attentes internationales. Donc, nous devons plutôt l'aider pour le franchissement de chacun des obstacles./.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 28 décembre 2000)