Déclaration de Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense, sur le démantèlement de l'ex-porte-avions Clémenceau, à Brest le 12 mai 2006.

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Circonstance : Réunion de la Commission locale d'information et de concertation (CLIC), à Brest (Finistère) le 12 mai 2006

Texte intégral

Je tiens à vous dire ma satisfaction de présider aujourd'hui à Brest cette deuxième séance de la Commission Locale d'information et de concertation.
Dans la perspective de la prochaine arrivée à Brest de l'ex-porte-avions Clemenceau, cette réunion est pour moi l'opportunité de faire un point sur les décisions à prendre rapidement, et, à plus long terme, sur les pistes que nous explorons pour la gestion des navires en fin de vie.
Etre responsable, c'est savoir gérer le quotidien tout en préparant l'avenir. Ces deux actions sont indispensables et interdépendantes. L'action politique ne doit pas se contenter de répondre aux urgences du présent, mais s'inscrire dans l'ambition collective de l'avenir de la France. De la même manière, la préparation de l'avenir ne doit pas nous faire oublier les exigences du présent.
C'est ce qui guide mon action pour l'ex-Clemenceau.
La nécessité d'une filière de démantèlement des navires en fin de vie est clairement apparue aux yeux de tous. C'est un sujet d'envergure mondiale. Je suis donc toujours aussi décidée à créer cette filière, même si cela prend nécessairement du temps.
Pour autant, l'enjeu de l'ex-Clemenceau est immédiat. Il exige une réponse rapide.
Des pistes ont donc été explorées, et des décisions ont été prises pour son retour et la durée de son stationnement à Brest, mais aussi pour son démantèlement. C'est ce dont je veux vous faire part aujourd'hui.
Le retour de la coque Q790 et son stationnement à Brest
J'ai tenu à venir moi-même vous informer des mesures qui sont prises pour l'arrivée de la coque à Brest.
Actuellement au large de Gibraltar, la coque arrivera probablement le 17 mai, sauf aléa météo.
J'ai demandé que, dès son entrée dans le port, des dispositions soient prises pour garantir la sûreté d'une coque qui a parcouru plus de 18000 kilomètres depuis son appareillage de Toulon, le 31 décembre.
Il importe d'abord de vérifier la bonne étanchéité de la coque, et d'en retirer les eaux de ruissellement, qu'elle a probablement emmagasinées au cours de son périple.
Pour que l'accès à bord soit possible, des vérifications de l'atmosphère seront entreprises dans de nombreux locaux d'un navire qui en comporte quelques 1200. Lorsqu'un éclairage aura été disposé, et si ces contrôles s'avèrent positifs, un circuit de visite sera alors autorisé. Ces opérations dureront environ 15 jours, à la fin desquels des experts pourront se rendre à bord. Par la suite, les membres de cette commission qui le souhaitent pourront également effectuer une visite.

Après la phase de mise en sécurité, la phase d'expertise de la coque pourra débuter. Un appel d'offres a été lancé par le service de soutien de la flotte le 22 mars pour un marché d'expertise. Elle devra répondre à 2 objectifs :

  • En premier lieu, confirmer l'absence de risque pour l'environnement engendré par la coque ;
  • Ensuite, recenser, conformément aux recommandations de l'organisation maritime internationale, les produits dangereux qui seraient encore contenus dans la coque.

Compte tenu des délais nécessaires pour formaliser le marché, la première étape débutera mi-juillet. Pour la seconde, nous souhaitons des résultats au début du mois d'octobre.
Le recensement des matériaux à bord est essentiel, car il permettra de déterminer l'ampleur des travaux à mener pour le démantèlement.

Le démantèlement
Le Clemenceau n'est pas un cas isolé. Plus de 700 navires de commerce sont démantelés chaque année. Pour l'instant, quasiment tous le sont en dehors des règles de sécurité des travailleurs ou de protection de l'environnement.
Les marines militaires européennes sont bien sûr elles aussi concernées par cette problématique. Il faut donc, pour la France et pour l'Europe, mettre en place une filière de démantèlement à la fois viable sur le plan économique et respectueuse des règles nationales, communautaires et internationales relatives à la sécurité des travailleurs et à l'environnement.
Les derniers chantiers de démantèlement sont en Chine, en Inde et au Bangladesh, parce que la main d'oeuvre y est moins chère et parce qu'ils disposent de débouchés pour l'acier recyclé.
J'ai déjà évoqué la problématique des navires militaires avec mes homologues de l'Union européenne à Innsbruck le 7 mars dernier. La présidence autrichienne a repris l'idée d'un groupe de travail. Dès lundi prochain, à Bruxelles, je proposerai que la première réunion se tienne à Paris sous l'égide de l'Amiral Oudot de Dainville, chef d'état-major de la marine, le 24 mai. Elle sera l'occasion de faire un bilan concret de ce que fait chaque nation maritime européenne, et de réfléchir à l'économie d'une filière commune.
Quelle que soit notre ferme volonté d'aboutir, ces démarches seront nécessairement longues.
Trop longues pour l'ex-Clemenceau, pour lequel le ministère de la défense a toujours cherché à agir, bannissant l'attentisme trop facile et s'efforçant de traiter le problème de manière exemplaire.
Il ne saurait être question de laisser le navire en attente à Brest jusqu'à l'aboutissement des discussions entre l'Organisation maritime internationale, l'Organisation internationale du travail et la convention de Bâle qui est - au mieux - prévu en 2008 voire 2009.
C'est pourquoi, dès le début de l'automne, le Service de Soutien de la Flotte, qui a constitué une équipe de projet, lancera une procédure de marché public pour le démantèlement du Clemenceau. Elle devrait conduire à la fin de l'année à un recueil des candidatures, puis à une remise des offres au premier trimestre 2007. A partir de là, une notification du marché en décembre 2007 sera possible.
L'ex-Clemenceau sera démantelé. Comme je m'y suis engagée, la coque ne viendra pas perturber la fête que sera « Brest 2008 ».

Dans ce dossier, je peux vous affirmer que nous satisferons au mieux nos deux objectifs :

  • traiter, comme nous l'avons toujours fait, le Clemenceau avec détermination, avec la volonté de trouver une solution de démantèlement ;
  • faire progresser la mise en place d'une filière pour nos bâtiments militaires et plus largement pour tous les navires.

source http://www.defense.gouv.fr, le 15 mai 2006