Texte intégral
Le « Tonnerre », que nous venons de visiter, est exemplaire des avancées concrètes et du redressement des capacités que permet la LPM votée en 2003.
Aux côtés du « Mistral » déjà livré, ce Bâtiment de projection et de commandement permettra à la Marine nationale d'affronter les défis de demain.
Ces navires renforcent significativement nos capacités de projection de forces et de transport stratégique.
A la fois porte-hélicoptères, transporteurs de troupes et de matériels, grands hôpitaux embarqués, postes de commandement flottants permettant de déployer l'état major européen ou international d'une opération de grande ampleur, leur polyvalence répond idéalement aux besoins des forces armées.
Les BPC sont aussi des outils parfaitement adaptés aux nouveaux engagements, de plus en plus interarmées et européens.
Le « Tonnerre » est enfin un projet original qui, grâce à un savant mariage entre industries militaires et civiles, permet de disposer des meilleures solutions techniques au meilleur coût.
Disposer de ces capacités navales modernes et adaptées est d'autant plus essentiel, que le domaine maritime est un enjeu dont l'importance ne se dément pas.
La maîtrise de la mer, c'est avant tout pour la France un moyen de projeter sa puissance et d'acheminer ses forces sur les nombreux théâtres d'opérations où elle est engagée.
Les moyens maritimes sont parfois seuls en mesure de répondre à leurs besoins logistiques.
Le porte-avions Charles de Gaulle, c'est la capacité de délivrer à plus de 600 km, pendant une durée de plusieurs mois, une quarantaine d'aéronefs, des milliers d'hommes et des missiles de croisière.
La force navale est aussi un vecteur majeur de notre dissuasion nucléaire.
Le domaine maritime est plus que jamais un enjeu de sécurité et de défense.
Il est donc aujourd'hui primordial de maintenir et développer nos capacités navales pour peser dans les affaires internationales.
Les mers et océans présentent un intérêt stratégique indéniable.
Le domaine maritime est de plus en plus le théâtre de menaces qui mettent en cause notre sécurité.
Les nouvelles formes de terrorisme ciblent particulièrement les transports.
Le narco-trafic, les trafics d'armement, les flux d'immigration illégale, utilisent de plus en plus la voie maritime.
Des actes de piraterie se développent encore en de nombreux points du globe, notamment dans la corne de l'Afrique.
Les mers et océans, ce sont aussi des voies de communication vitales à sécuriser.
Aujourd'hui, 80 % du commerce mondial transite par voie maritime.
Par le seul détroit de Malacca passe le tiers du trafic mondial.
Le milieu maritime présente enfin un enjeu énergétique important pour l'avenir.
Avec la diminution des réserves mondiales connues et l'augmentation du coût du pétrole, il sera bientôt nécessaire de rechercher de nouvelles réserves d'hydrocarbures dans les espaces maritimes.
Il est significatif de constater que des gisements identifiés sont déjà l'objet de rivalités, par exemple en mer de Chine.
La France doit impérativement disposer des moyens lui permettant de jouer un rôle de premier plan dans le secteur maritime. Elle doit mobiliser ses partenaires pour apporter des réponses européennes.
La composante maritime de la défense française est primordiale.
Les missions « traditionnelles » que mène la Défense en mer sont multiples et bien connues : dissuasion, projection de puissance et de forces, renseignement, surveillance des approches maritimes, lutte contre la prolifération des armements.
A titre indicatif, la Marine déploie actuellement à cette fin 40 bâtiments de combats et 35 aéronefs, servis par 7000 hommes.
Au-delà, la Marine nationale consacre plus du quart de ses missions à la « sauvegarde maritime », afin de faire face à tous les types de menaces susceptibles de venir de la mer : le trafic de stupéfiants, la pollution maritime, l'immigration clandestine et la pêche illicite.
Cette action est coordonnée avec les douanes, les affaires maritimes, la gendarmerie, ce qui renforce la cohérence du dispositif de surveillance et améliore notre réactivité.
Notre réponse au défi de la mer doit s'inscrire dans une démarche résolument européenne.
La consolidation de l'industrie navale française, bien avancée grâce à la transformation profonde de DCN, ouvre la voie à des rapprochements futurs entre Européens.
La France favorise la coopération européenne en matière de programmes navals : c'est le cas du programme FREMM avec nos partenaires italiens, et qui a été notifié hier par l'OCCAR aux industriels français et italiens, et du programme de porte-avions n°2 avec nos partenaires britanniques.
Je pense que cette coopération dans le domaine des programmes doit exister de la même façon dans le domaine humain.
L'avenir repose sur une coopération croissante de nos armées en matière de formation.
C'est dans cet esprit que nous réfléchissons actuellement à la mise en oeuvre d'un bateau-école européen.
Nous devrons à l'avenir progresser vers une protection plus coordonnée et donc plus efficace de nos espaces maritimes.
L'Agence européenne de défense vient d'engager une réflexion sur la surveillance maritime. C'est aussi l'ambition du futur livre vert sur la politique maritime au niveau européen.
Les fortes capacités navales militaires ne sont plus l'apanage de quelques marines occidentales.
De nombreuses puissances en devenir prennent aujourd'hui conscience de l'importance des enjeux que sont les océans.
La Chine s'est lancée dans un vaste programme d'accroissement et de modernisation de sa flotte.
La marine japonaise est aujourd'hui plus importante en tonnage que la marine française. L'Inde développe elle aussi de solides capacités d'action en haute mer.
La France, comme l'Europe, ne peuvent rester à l'écart de ce défi majeur du 21ème siècle.
Il est illusoire et irresponsable de croire que nous pourrons le relever sans poursuivre un effort significatif au profit de notre outil de défense.
Il est tout aussi illusoire de croire que nous pourrons entraîner nos voisins européens dans la construction de la défense européenne sans la crédibilité que nous confère un budget de défense à la hauteur de nos ambitions.
Saisissons pleinement la mesure de l'enjeu !
Il en va de la sécurité de nos pays, de nos ressortissants, de notre compétitivité technologique et industrielle, de notre place dans le monde.
Source http://www.defense.gouv.fr, le 16 mai 2006