Texte intégral
Bonjour, F. Bayrou.
Bonjour J.-P. Elkabbach.
Q- Comment dans les Pyrénées-Atlantiques on comprend et on interprète les propos du Premier ministre : « l'Etat est en faillite, l'Etat est dans une situation critique qui n'est plus supportable » ?
R- Je pense avec un sentiment de choc puisque, vous le savez bien, on a vécu une campagne électorale pendant laquelle certains, j'en étais, ont dit : attention ! On est devant une situation de déséquilibre des finances publiques telle que cela menace et la France d'aujourd'hui et encore davantage la France de demain, qu'il n'est pas acceptable que nous accumulions ainsi sur ceux qui travaillent l'obligation de rembourser déficits et dettes, et en ajoutons, ne faites pas de promesses électorales abusives parce que ces promesses électorales-là c'est de la fausse monnaie...
Q- ...donc, vous estimez qu'il a eu raison...
R- ...et au contraire, elles vont, ces promesses, enfoncer la France dans la situation insupportable qu'est la sienne.
Q- Est-ce que vous lui donnez raison d'avoir dit la vérité ? Est-ce que le temps est venu de dire la vérité et d'appeler un chat un chat ?
R- Ah, j'aurais voulu que cette vérité on la dise pendant la campagne électorale et j'aurais voulu encore davantage qu'on ne passe pas les quatre mois qui viennent de s'écouler à faire des dépenses abusives, des cadeaux fiscaux, en particulier, à ceux qui étaient déjà les plus à l'aise dans la société française, qu'on ne raconte pas que c'est ainsi qu'on avait trouvé la clé de la croissance parce que cela va se payer évidemment de manière très lourde lorsqu'il va s'agir de demander des sacrifices à tout le monde, ce qui est, vous le voyez bien avec la préparation psychologique à laquelle se livre le Gouvernement depuis quelques jours, cette préparation psychologique elle débouche sur un plan, appelez-le comme vous voulez, mais il sera de rigueur de toute façon, c'est-à-dire le contraire de ce qu'on avait promis.
Q- Vous pensez que nous allons vers des décisions de gestion plus rigoureuses et plus strictes ?
R- Ah, mais je pense qu'il n'y a aucun moyen, étant donné la situation qui a été aggravée depuis quatre mois, il n'y aucun moyen d'y échapper et vous savez bien que tous les partenaires européens de la France l'ont dit sur tous les tons depuis dès semaines et des mois, vous savez bien que les économistes, enfin tous les observateurs, tout le monde a dit et a averti qu'on a fait comme si de rien n'était pour accorder des avantages à ce qu'il faut bien appeler la clientèle électorale privilégiée du Gouvernement et du président de la République.
Q- Vous avez écouté, hier, F. Bayrou, J.-C. Trichet qui disait hier soir : « les finances publiques sont en très grande difficulté », ce qui le rend inquiet et pour les engagements européens de la France. Est-ce que vous partagez cette inquiétude et quelle serait la recette Bayrou ?
R- Oh, la recette Bayrou elle aurait été d'abord de ne pas aggraver la situation par les décisions qui ont été prises depuis quatre mois.
Q- Oui, mais ça fait 33 ans que ça dure !
R- Les 15 milliards...
Q- ... 33 ans, ce n'est pas nouveau.
R- Oui, ne disons pas ça, ne disons pas ça sous cette forme parce que pour une fois on avait, je crois, un sentiment de prise de conscience... enfin, une prise de conscience et un sentiment de gravité de la part des Français. Pour une fois, ils étaient prêts. Et, au lieu de réfléchir avec eux aux mesures très importantes qu'il fallait prendre, au lieu de cela on leur a raconté pendant quatre mois que, au fond, on avait trouvé une clé qui n'avait jamais été trouvée, qui était qu'on allait donner de l'argent aux plus favorisés, que ça allait entraîner une croissance formidable, tout ça ferait des rentrées dans les caisses de l'Etat. Et naïvement, beaucoup l'ont cru, y compris, j'en témoigne, parmi les membres du Gouvernement.
Q- Donc, maintenant, il faut voir l'avenir. Ce matin, l'euro continue de monter par rapport au dollar, il établit un nouveau record. Est-ce que vous demandez à la BCE de J.-C. Trichet de s'occuper en plus de la stabilité des prix, de la croissance, de l'emploi et de la protection sociale ?
R- Mais croissance, emploi, protection sociale, évidemment ça doit être l'objet du dialogue qu'on a avec la Banque centrale, mais je ne comprends pas la polémique qui est développée sur ce sujet par N. Sarkozy et son entourage depuis longtemps. Un : ce n'est pas l'euro qui monte, c'est le dollar qui s'effondre et le dollar s'effondre pour des raisons très graves de déséquilibre des finances publiques et du commerce des Etats-Unis face à toutes les monnaies, l'euro bien sûr, mais la livre aussi et tout cela crée une situation préoccupante. C'est une situation préoccupante aux Etats-Unis. Deuxièmement : lorsque vous êtes un pays qui exporte un tiers à peu près de son commerce extérieur mais qui importe au moins autant et même un peu plus puisqu'on a un déséquilibre de notre balance commerciale, lorsque vous êtes un pays qui importe, à ce moment-là, le fait d'avoir une monnaie forte vous aide beaucoup et le coût de la vie pour un très grand nombre de Français en est amélioré. Qui va arbitrer entre l'un et l'autre ? Troisièmement, exemple : le pétrole évidemment. Si nous n'avions pas l'euro au niveau où il est, nous paierions douloureusement à la pompe, chacun des Français paierait douloureusement à la pompe le pétrole que nous achetons.
Q- Donc, c'est un hymne...
R- Troisièmement...
R- Quatrièmement !
R- Troisièmement : le but de la gestion d'une monnaie quel est-il à mon sens, et je le pense depuis longtemps ? C'est d'avoir, comme R. Barre le pensait, je pense que le but de la gestion d'une monnaie est d'avoir une monnaie assez solide pour que les taux d'intérêt, quand vous avez besoin d'investir dans le long terme, soient le plus bas possible. Or, nous avons aujourd'hui des taux d'intérêt de long terme qui sont des taux d'intérêt bas parce que nous avons une monnaie crédible aux yeux du monde entier.
Q- Bon, donc c'est une sorte...
R- ... et donc, je ne comprends pas la polémique.
Q- C'est une sorte d'hommage à l'euro, à la BCE indépendante et à l'Europe. Je reviens à la France, H. Morin, qui est un de vos proches, fâché avec vous, aujourd'hui dissident, a créé un autre parti, un autre Centre. Il exclut, et il le répète beaucoup, un retour à F. Bayrou. Pourquoi ? Vous en vouliez-vous ?
R- Un : il y a des retours qui dans les circonstances actuelles ne sont pas réellement souhaitables. Mais ça n'est pas le sujet. Le sujet pour moi - je crois qu'H. Morin, l'a dit dans cette interview à laquelle vous faites allusion, exactement les choses, il a dit - : « F. Bayrou prépare une alternative franche et claire à N. Sarkozy et c'est ce que nous ne pouvons pas accepter », ajoute-t-il, « parce que nous nous avons choisi N. Sarkozy ». Eh bien, je crois que tout est dit. En effet, je pense que la responsabilité qui est la mienne c'est de proposer aux Français de préparer, de bâtir une alternative, un autre choix qui sera fondé sur la vérité.
Q- D'accord, mais ça on l'a entendu il y a quelques mois et puis on a un peu le temps. H. Morin est ministre de la Défense. Au moment où la France allait vendre des avions Rafale au Maroc, il a reproché la sophistication et le coût des Rafale. Est-ce que c'est bien de dire la vérité, si c'est la vérité, est-ce que c'est juste ou est-ce que c'est une gaffe de plus ?
R- En tout cas, ça va rendre extrêmement difficile à l'avenir la vente de ces avions français à qui voudra les acheter. Quand vous avez le ministre de la Défense lui-même qui prend fait et cause ou qui relaie les critiques qui sont celles des principaux concurrents, qui sont politiquement puissamment aidés... moi, je ne souhaite pas être naïf dans cette affaire. Vous savez bien que la vente de ces avions de combat pour les armées elle est puissamment dépendante du soutien que les autorités politiques de leur pays accordent aux constructeurs. Elle dépend en grande partie de cela. Et, pour être dans un département, vous le savez, où il y a une puissante industrie aéronautique et en particulier l'entreprise qui fabrique les Rafale, alors je dis que, bon, on aurait dû, me semble-t-il attendre du gouvernement français qu'il appuie et soutienne les efforts des industriels français.
Q- Oui, mais le Gouvernement français appuie et soutient, c'est le ministre de la Défense qui a peut-être eu un mot malheureux ou un mot juste.
R- Franchement, au sein du Gouvernement, pour vendre des avions aux armées étrangères, le ministre de la Défense a un rôle clé, c'est le moins que l'on puisse dire.
Q- Alors, F. Bayrou, deux questions encore, une politique : vous avez un prochain rendez-vous avec le n° 1 du Parti socialiste, F. Hollande.
R- Oui, ça sera cette semaine.
Q- Oui, qu'est-ce que vous allez vous dire ?
R- ... ça sera même probablement mercredi.
Q- Lui il encourage les socialistes à vous battre aux municipales à Pau.
R- Oui ! C'est la preuve, une fois de plus qu'en effet il n'y a pas de connivence. Ce n'est pas ça pour moi le sujet. Je pense que le Parti socialiste, nous-mêmes, l'UMP, les forces démocratiques principales qu'on a vu émerger au moment des élections présidentielles en France, ont une responsabilité partagée. Les uns sont au pouvoir, les autres n'y sont pas. Mais nous avons une responsabilité qui est de réfléchir et si nous le pouvons de construire ensemble quelque chose de positif pour l'avenir du pays. Or, on sait très bien que nos institutions sont un handicap pour la France, le fait que nous n'ayons pas une loi électorale juste en particulier, qui fait que les grands courants soient représentés comme ils devraient l'être à l'Assemblée nationale, c'est quelque chose qui pénalise le pays parce que ça empêche d'avoir un Parlement qui joue son rôle.
Q- Donc, F. Bayrou, on peut imaginer des actions communes et des interprétations communes avec le Parti socialiste.
R- En tout cas, je vais rencontrer F. Hollande, comme je rencontrerai volontiers les autres forces, pour dire que nous devons imposer des changements sérieux qui fassent que le Parlement en particulier, en France, la démocratie en France fonctionne mieux qu'elle ne le fait et qu'on ne se trouve pas comme aujourd'hui dans tout le pouvoir à un seul homme et entourage.
Q- D'accord, mais là vous allez être d'accord avec N. Sarkozy puisqu'il a créé le Comité Balladur justement pour donner plus de force au Parlement. Hein ?
R- Eh bien, j'ai été, en effet, auditionné par le Comité Balladur, les autres responsables politiques vont l'être. Je souhaite que le Comité Balladur puisse faire des propositions utiles. Mais au bout du compte, ça n'est pas les comités quels qu'ils soient qui décident, c'est le Parlement. Il se trouve qu'au Parlement, l'UMP n'a pas le nombre de voix suffisante pour faire passer une réforme si nous ne sommes pas dans un consensus plus large.
Q- D'accord !
R- Je souhaite que ce consensus plus large se bâtisse non pas sur des ambiguïtés mais sur des changements qui seront des changements positifs et clairs.
C'était F. Bayrou, ce lundi matin. Bonne journée, bonne semaine.Source:Premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 24 septembre 2007
Bonjour J.-P. Elkabbach.
Q- Comment dans les Pyrénées-Atlantiques on comprend et on interprète les propos du Premier ministre : « l'Etat est en faillite, l'Etat est dans une situation critique qui n'est plus supportable » ?
R- Je pense avec un sentiment de choc puisque, vous le savez bien, on a vécu une campagne électorale pendant laquelle certains, j'en étais, ont dit : attention ! On est devant une situation de déséquilibre des finances publiques telle que cela menace et la France d'aujourd'hui et encore davantage la France de demain, qu'il n'est pas acceptable que nous accumulions ainsi sur ceux qui travaillent l'obligation de rembourser déficits et dettes, et en ajoutons, ne faites pas de promesses électorales abusives parce que ces promesses électorales-là c'est de la fausse monnaie...
Q- ...donc, vous estimez qu'il a eu raison...
R- ...et au contraire, elles vont, ces promesses, enfoncer la France dans la situation insupportable qu'est la sienne.
Q- Est-ce que vous lui donnez raison d'avoir dit la vérité ? Est-ce que le temps est venu de dire la vérité et d'appeler un chat un chat ?
R- Ah, j'aurais voulu que cette vérité on la dise pendant la campagne électorale et j'aurais voulu encore davantage qu'on ne passe pas les quatre mois qui viennent de s'écouler à faire des dépenses abusives, des cadeaux fiscaux, en particulier, à ceux qui étaient déjà les plus à l'aise dans la société française, qu'on ne raconte pas que c'est ainsi qu'on avait trouvé la clé de la croissance parce que cela va se payer évidemment de manière très lourde lorsqu'il va s'agir de demander des sacrifices à tout le monde, ce qui est, vous le voyez bien avec la préparation psychologique à laquelle se livre le Gouvernement depuis quelques jours, cette préparation psychologique elle débouche sur un plan, appelez-le comme vous voulez, mais il sera de rigueur de toute façon, c'est-à-dire le contraire de ce qu'on avait promis.
Q- Vous pensez que nous allons vers des décisions de gestion plus rigoureuses et plus strictes ?
R- Ah, mais je pense qu'il n'y a aucun moyen, étant donné la situation qui a été aggravée depuis quatre mois, il n'y aucun moyen d'y échapper et vous savez bien que tous les partenaires européens de la France l'ont dit sur tous les tons depuis dès semaines et des mois, vous savez bien que les économistes, enfin tous les observateurs, tout le monde a dit et a averti qu'on a fait comme si de rien n'était pour accorder des avantages à ce qu'il faut bien appeler la clientèle électorale privilégiée du Gouvernement et du président de la République.
Q- Vous avez écouté, hier, F. Bayrou, J.-C. Trichet qui disait hier soir : « les finances publiques sont en très grande difficulté », ce qui le rend inquiet et pour les engagements européens de la France. Est-ce que vous partagez cette inquiétude et quelle serait la recette Bayrou ?
R- Oh, la recette Bayrou elle aurait été d'abord de ne pas aggraver la situation par les décisions qui ont été prises depuis quatre mois.
Q- Oui, mais ça fait 33 ans que ça dure !
R- Les 15 milliards...
Q- ... 33 ans, ce n'est pas nouveau.
R- Oui, ne disons pas ça, ne disons pas ça sous cette forme parce que pour une fois on avait, je crois, un sentiment de prise de conscience... enfin, une prise de conscience et un sentiment de gravité de la part des Français. Pour une fois, ils étaient prêts. Et, au lieu de réfléchir avec eux aux mesures très importantes qu'il fallait prendre, au lieu de cela on leur a raconté pendant quatre mois que, au fond, on avait trouvé une clé qui n'avait jamais été trouvée, qui était qu'on allait donner de l'argent aux plus favorisés, que ça allait entraîner une croissance formidable, tout ça ferait des rentrées dans les caisses de l'Etat. Et naïvement, beaucoup l'ont cru, y compris, j'en témoigne, parmi les membres du Gouvernement.
Q- Donc, maintenant, il faut voir l'avenir. Ce matin, l'euro continue de monter par rapport au dollar, il établit un nouveau record. Est-ce que vous demandez à la BCE de J.-C. Trichet de s'occuper en plus de la stabilité des prix, de la croissance, de l'emploi et de la protection sociale ?
R- Mais croissance, emploi, protection sociale, évidemment ça doit être l'objet du dialogue qu'on a avec la Banque centrale, mais je ne comprends pas la polémique qui est développée sur ce sujet par N. Sarkozy et son entourage depuis longtemps. Un : ce n'est pas l'euro qui monte, c'est le dollar qui s'effondre et le dollar s'effondre pour des raisons très graves de déséquilibre des finances publiques et du commerce des Etats-Unis face à toutes les monnaies, l'euro bien sûr, mais la livre aussi et tout cela crée une situation préoccupante. C'est une situation préoccupante aux Etats-Unis. Deuxièmement : lorsque vous êtes un pays qui exporte un tiers à peu près de son commerce extérieur mais qui importe au moins autant et même un peu plus puisqu'on a un déséquilibre de notre balance commerciale, lorsque vous êtes un pays qui importe, à ce moment-là, le fait d'avoir une monnaie forte vous aide beaucoup et le coût de la vie pour un très grand nombre de Français en est amélioré. Qui va arbitrer entre l'un et l'autre ? Troisièmement, exemple : le pétrole évidemment. Si nous n'avions pas l'euro au niveau où il est, nous paierions douloureusement à la pompe, chacun des Français paierait douloureusement à la pompe le pétrole que nous achetons.
Q- Donc, c'est un hymne...
R- Troisièmement...
R- Quatrièmement !
R- Troisièmement : le but de la gestion d'une monnaie quel est-il à mon sens, et je le pense depuis longtemps ? C'est d'avoir, comme R. Barre le pensait, je pense que le but de la gestion d'une monnaie est d'avoir une monnaie assez solide pour que les taux d'intérêt, quand vous avez besoin d'investir dans le long terme, soient le plus bas possible. Or, nous avons aujourd'hui des taux d'intérêt de long terme qui sont des taux d'intérêt bas parce que nous avons une monnaie crédible aux yeux du monde entier.
Q- Bon, donc c'est une sorte...
R- ... et donc, je ne comprends pas la polémique.
Q- C'est une sorte d'hommage à l'euro, à la BCE indépendante et à l'Europe. Je reviens à la France, H. Morin, qui est un de vos proches, fâché avec vous, aujourd'hui dissident, a créé un autre parti, un autre Centre. Il exclut, et il le répète beaucoup, un retour à F. Bayrou. Pourquoi ? Vous en vouliez-vous ?
R- Un : il y a des retours qui dans les circonstances actuelles ne sont pas réellement souhaitables. Mais ça n'est pas le sujet. Le sujet pour moi - je crois qu'H. Morin, l'a dit dans cette interview à laquelle vous faites allusion, exactement les choses, il a dit - : « F. Bayrou prépare une alternative franche et claire à N. Sarkozy et c'est ce que nous ne pouvons pas accepter », ajoute-t-il, « parce que nous nous avons choisi N. Sarkozy ». Eh bien, je crois que tout est dit. En effet, je pense que la responsabilité qui est la mienne c'est de proposer aux Français de préparer, de bâtir une alternative, un autre choix qui sera fondé sur la vérité.
Q- D'accord, mais ça on l'a entendu il y a quelques mois et puis on a un peu le temps. H. Morin est ministre de la Défense. Au moment où la France allait vendre des avions Rafale au Maroc, il a reproché la sophistication et le coût des Rafale. Est-ce que c'est bien de dire la vérité, si c'est la vérité, est-ce que c'est juste ou est-ce que c'est une gaffe de plus ?
R- En tout cas, ça va rendre extrêmement difficile à l'avenir la vente de ces avions français à qui voudra les acheter. Quand vous avez le ministre de la Défense lui-même qui prend fait et cause ou qui relaie les critiques qui sont celles des principaux concurrents, qui sont politiquement puissamment aidés... moi, je ne souhaite pas être naïf dans cette affaire. Vous savez bien que la vente de ces avions de combat pour les armées elle est puissamment dépendante du soutien que les autorités politiques de leur pays accordent aux constructeurs. Elle dépend en grande partie de cela. Et, pour être dans un département, vous le savez, où il y a une puissante industrie aéronautique et en particulier l'entreprise qui fabrique les Rafale, alors je dis que, bon, on aurait dû, me semble-t-il attendre du gouvernement français qu'il appuie et soutienne les efforts des industriels français.
Q- Oui, mais le Gouvernement français appuie et soutient, c'est le ministre de la Défense qui a peut-être eu un mot malheureux ou un mot juste.
R- Franchement, au sein du Gouvernement, pour vendre des avions aux armées étrangères, le ministre de la Défense a un rôle clé, c'est le moins que l'on puisse dire.
Q- Alors, F. Bayrou, deux questions encore, une politique : vous avez un prochain rendez-vous avec le n° 1 du Parti socialiste, F. Hollande.
R- Oui, ça sera cette semaine.
Q- Oui, qu'est-ce que vous allez vous dire ?
R- ... ça sera même probablement mercredi.
Q- Lui il encourage les socialistes à vous battre aux municipales à Pau.
R- Oui ! C'est la preuve, une fois de plus qu'en effet il n'y a pas de connivence. Ce n'est pas ça pour moi le sujet. Je pense que le Parti socialiste, nous-mêmes, l'UMP, les forces démocratiques principales qu'on a vu émerger au moment des élections présidentielles en France, ont une responsabilité partagée. Les uns sont au pouvoir, les autres n'y sont pas. Mais nous avons une responsabilité qui est de réfléchir et si nous le pouvons de construire ensemble quelque chose de positif pour l'avenir du pays. Or, on sait très bien que nos institutions sont un handicap pour la France, le fait que nous n'ayons pas une loi électorale juste en particulier, qui fait que les grands courants soient représentés comme ils devraient l'être à l'Assemblée nationale, c'est quelque chose qui pénalise le pays parce que ça empêche d'avoir un Parlement qui joue son rôle.
Q- Donc, F. Bayrou, on peut imaginer des actions communes et des interprétations communes avec le Parti socialiste.
R- En tout cas, je vais rencontrer F. Hollande, comme je rencontrerai volontiers les autres forces, pour dire que nous devons imposer des changements sérieux qui fassent que le Parlement en particulier, en France, la démocratie en France fonctionne mieux qu'elle ne le fait et qu'on ne se trouve pas comme aujourd'hui dans tout le pouvoir à un seul homme et entourage.
Q- D'accord, mais là vous allez être d'accord avec N. Sarkozy puisqu'il a créé le Comité Balladur justement pour donner plus de force au Parlement. Hein ?
R- Eh bien, j'ai été, en effet, auditionné par le Comité Balladur, les autres responsables politiques vont l'être. Je souhaite que le Comité Balladur puisse faire des propositions utiles. Mais au bout du compte, ça n'est pas les comités quels qu'ils soient qui décident, c'est le Parlement. Il se trouve qu'au Parlement, l'UMP n'a pas le nombre de voix suffisante pour faire passer une réforme si nous ne sommes pas dans un consensus plus large.
Q- D'accord !
R- Je souhaite que ce consensus plus large se bâtisse non pas sur des ambiguïtés mais sur des changements qui seront des changements positifs et clairs.
C'était F. Bayrou, ce lundi matin. Bonne journée, bonne semaine.Source:Premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 24 septembre 2007