Interview de M. Alain Marleix, secrétaire d'Etat aux anciens combattants, dans "Cols bleus" du 8 septembre 2007, sur la Marine nationale.

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Média : Cols bleus

Texte intégral

Q - Quel est l'objectif de cette visite dans les forces de la marine à Toulon ?
R - Le Président de la République m'a confié une responsabilité gouvernementale importante en me nommant secrétaire d'Etat à la Défense chargé des Anciens combattants. Nouveauté par rapport aux fonctions de mes prédécesseurs, le secrétaire d'Etat est désormais responsable du dossier de la réserve et du lien Armées/ Nation. Les marins en connaissent l'importance, vitale pourrai-je ajouter, pour nos Armées et plus encore pour la Marine en raison de sa taille et de son implantation géographique particulière.
Sur de tels sujets, je ne souhaite pas engager d'actions sans prendre au préalable connaissance de leurs multiples implications pour nos forces. Je suis un homme de terrain et je le resterai. Il me semble indispensable de rencontrer directement les marins afin d'écouter, comprendre, confronter les analyses avant de prendre une décision. Plus trivialement, je veux sentir les choses. Pour faire un parallèle osé, je dirai qu'il est difficile d'exercer son "sens marin" uniquement depuis la rue de Bellechasse même si un travail important y est réalisé.
Alors pourquoi Toulon ? Toulon est le premier port militaire de la Méditerranée. Toulon accueille 70 % de la flotte française, c'est le port de projection de nos Forces. La Base navale est le premier site industriel et le premier employeur du Var. Ce sont des arguments qui parlent d'eux mêmes pour une première rencontre. Mais j'ai aussi l'intention d'aller partager le quotidien des marins dans d'autres lieux et notamment en Bretagne, dans le Cotentin, en métropole et Outre mer, à terre, en mer ou dans les airs.
Q - Comment voyez-vous l'avenir de la Marine ?
R - Le Président de la République a demandé à une commission d'experts de rédiger un livre blanc. Cette réflexion permettra de dégager de grandes orientations pour les années à venir.
Vous comprendrez que je ne peux me prononcer à priori mais, à titre personnel, je vous livre mon sentiment.
La France dispose d'une audience forte dans le concert des Nations. Sa voix est, sinon toujours écoutée, du moins souvent espérée. Son histoire, sa géographie et sa culture la portent naturellement vers les cinq continents dont elle est riveraine. Son rang international, sa zone économique exclusive, la deuxième au monde, lui confèrent certes des avantages mais, et nous l'oublions trop souvent, des obligations.
Le rôle de la marine est de contribuer à la grandeur de la France, de prolonger, soutenir et défendre son action politique, diplomatique, économique et si nécessaire militaire. Une marine puissante est indispensable à la vocation internationale de notre pays.
Par ailleurs, la mer reste un des derniers espace de liberté. Mais cela ne peut et ne doit autoriser d'atteintes à la dignité humaine ou au milieu environnemental. Il convient de demeurer vigilant, de faciliter et préserver le commerce et les échanges mais d'interdire les dérives, les trafics et comportements honteux. En mer, dans ses zones d'opérations, la marine constitue à la fois les yeux, les oreilles et les poings de l'Etat. Les atouts de la Marine sont et demeureront la force de la France. Je ne fais en disant cela qu'émettre un avis tiré des leçons de notre histoire.
Q - Quel regard portez-vous sur la Marine et ses marins ?
R - Depuis le 17ème siècle, la "Royale" est une composante essentielle tant de l'action internationale de la France que de sa stratégie de défense au travers de ses quatre composantes de son action que sont aujourd'hui la dissuasion, la prévention, la projection et la sauvegarde maritime.
Ces dernières années, nos forces navales ont directement contribué aux opérations militaires internationales que ce soit au Kosovo, en Afghanistan ou au Liban.
Dans ces régions où la paix demeure fragile, et dans un contexte géopolitique où de nouvelles lignes de fracture sont apparues, où les menaces présentent désormais un visage transnationale, ce fameux "retournement du monde" selon l'expression consacrée, je sais que notre marine est garante de la protection de nos intérêts vitaux, et de la stabilité internationale.
Aussi, c'est avant tout un message empreint d'admiration, de remerciement et de solidarité que j'ai exprimé lors de ma visite sur le Charles de Gaulle à TOULON et qui s'adresse, vous l'aurez compris, à l'ensemble des personnels de la Marine nationale dont l'engagement sert à la fois la grandeur de la France et assure sa permanence.
Je veux pouvoir dire que les Français peuvent compter sur leur Marine, et qu'ils peuvent en être fiers.
Q - Un message aux Anciens marins
R - Comme je vous le disais, tous, ils peuvent être fiers de ce qu'ils ont fait au service de la France.
Leur rigueur, leur engagement, leur professionnalisme sont reconnus de tous, et en premier de nos partenaires sur les différents théâtres d'opération.
Ceux qui ont combattu doivent savoir qu'ils ont évidemment toute leur place dans le monde des Anciens Combattants.
C'est d'ailleurs un défi, et non des moindres, que doit relever mon ministère dans les prochaines années.
En effet, eux qui font partie de la 4ème génération du feu doivent s'approprier cette culture du monde combattant d'autant plus que leur expérience est encore différente puisqu'ils ont été amenés à intervenir à l'étranger.
Q - Comment percevez-vous la place des réservistes au sein de la marine ?
R - Je suis content que vous me posiez cette question, car, en parfait avec accord avec Hervé MORIN, le ministre de la Défense, le Président de la République a souhaité que la réserve soit intégrée dans mon champ de compétence, et je sais combien la Marine attache une extrême importance à ses réservistes.
Comme vous le savez, la réserve fait partie intégrante des forces armées et le recours aux réservistes en temps de paix doit permettre de réduire les tensions temporaires sur les effectifs et d'assumer des tâches spécialisées.
Aujourd'hui, la réserve compte plus de 16 000 hommes et femmes dans la Marine (6 100 au titre de la réserve citoyenne et plus de 10 500 au titre de la réserve opérationnelle).
Leur rôle, depuis la suspension du service national obligatoire, est essentielle dans la mesure où les uns viennent renforcer le personnel des états-majors et des forces, permettant de faire vivre de manière flexible et continue cette fonction hautement régalienne de l'Etat quand les autres diffusent la culture de la Défense parmi nos compatriotes, en renforçant ce lien Armée-Nation.
A ce titre, ainsi que je le signalais à l'Amiral Alain OUDOT DE DAINVILLE, je tiens à saluer leur dynamisme, leur motivation et leur disponibilité.
Avec le Conseil Supérieur de la Réserve, nous devons construire l'avenir de la réserve en répondant à ces questions essentielles que sont la question du recrutement, le partenariat avec le monde du travail.
La réserve citoyenne méritera quant à elle une réflexion qui laisse envisager les voies de son renouveau... Je suis particulièrement attaché à la diffusion et à l'entretien de cet esprit de la Défense parmi nos concitoyens...il faut créer ce lien organique.
Si la France sait qu'ils sont prêts à risquer leur vie pour elle, qu'ils sachent qu'ils peuvent compter sur moi !

source http://www.defense.gouv.fr, le 22 novembre 2007