Interview de M. Jean-François Mattéi, président du groupe Démocratie libérale à l'Assemblée nationale, à France 2 le 28 mars 2001, sur le bilan des élections municipales pour la droite, la nécessité de l'optimisme en politique et le projet d'union de la droite avec Alternance 2002.

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Média : France 2 - Télévision

Texte intégral

G. Morin Avant de parler de l'état de la droite après les municipales, d'abord un commentaire sur l'information du jour : Le Parisien d'aujourd'hui annonce que le juge Halphen a convoqué J. Chirac pour l'entendre comme "simple témoin" dans l'affaire des HLM de Paris. L'Elysée a dit avoir reçu cette convocation mais que le Président de la République n'ira pas.
- "Je n'ai pas de commentaire à faire sur une affaire de justice en cours d'instruction et sur laquelle le Président de la République a dit ce qu'il avait à dire directement aux Français il y a quelques mois. Je n'ai donc rien à rajouter."
Il se dit qu'il y a séparation des pouvoirs, que le politique et le judiciaire sont séparés ?
- "Il s'est exprimé avec beaucoup de sincérité à ce moment-là et je pense qu'il n'y a rien à rajouter, l'affaire suit son cours et puis nous verrons bien."
Le fait que cela sorte aux lendemains des municipales, maintenant que la page municipale est tournée, que la mairie de Paris a changé, a-t-il un sens particulier ?
- "Je ne veux pas, là non plus, faire de commentaire parce que si c'était avant, on aurait dit que cela était mal intentionné... Ce n'est pas la peine. Laissons les choses suivre leur cours et je crois que la justice doit aller."
Cela rendrait le climat mauvais ?
- "Les Français en ont peut-être assez que cela soit constamment mis en avant, qu'on ne parle que de cela. Ce n'est pas bon. Les Français ont plutôt envie qu'on les prenne à bras le corps et qu'on réponde à leurs attentes. Ils se sont manifestés de manière étonnante au cours de deux dimanches sur des municipales, ils ont fait savoir ce qu'ils voulaient, quel était leur goût de vie, leur appétit de prise en charge de leur vie quotidienne dans la proximité par des responsables auxquels ils faisaient confiance, et on les tire en permanence vers le bas ! Ils ont d'ailleurs rappelé aux médias qu'ils ne se comportaient pas toujours de la façon qu'on prévoyait ou dont on annonçait qu'ils allaient le faire."
Vous faites allusion aux sondages ? Ce ne sont pas les médias qui les écrivent...
- "Je fais allusion aux sondages, à quelques prises de position, à quelques articles ou commentaires. Ce que je trouve assez extraordinaire, c'est que je constate qu'en politique comme en médecine, le moral du patient est en définitive essentiel. Quelles que soient les rumeurs de couloir, quels que soient les bruits, celui qui a un bon moral, qui s'exprime, qui reste ouvert, guérit. Celui qui se laisse abattre à la moindre mauvaise nouvelle - aujourd'hui, la température est montée... - ne va pas. Je suis plutôt quelqu'un qui a envie d'accompagner le bon moral."
Vous faites partie de ceux qui ont la pêche, qui n'ont pas d'états d'âme. Que voulez-vous faire ? L'union des partis, une confédération, un bout de chemin ensemble ?
- "Je fais effectivement partie de ceux qui pensent qu'une page se tourne et que nous sommes devant une sorte de défi, contrairement à ce que l'on pouvait attendre - et je dois le dire, moi le premier - avant ces élections. Il y a véritablement un peuple de la France profonde qui s'est exprimé, qui a voté en majorité à droite. En disant cela, je ne veux pas être polémique et partisan mais il est clair que nous avons eu des succès totalement inattendus. Il y a donc un message très fort..."
Et des revers que vous regrettez ?
- "Oui, il y a quelques revers éminemment symboliques, mais qui étaient prévus. Sans vouloir les méconnaître, je les mets un peu de côté, car ce sont des cas particuliers ; vous parlez essentiellement de Paris et Lyon ?"
Il est vrai que votre parti, Démocratie libérale, est peut-être celui qui à le moins souffert.
- "Nous avons donné l'exemple à Marseille : avec Gaudin, Muselier, toute l'équipe, nous avons marché et je crois que les Marseillais ont été conquis. Dans notre région - nous n'allons recommenté l'ensemble les résultats -, le message qui nous est remonté de la France profonde, de la base est le suivant : lorsque vous êtes unis, on vous fait confiance et de toute façon, les consignes peuvent venir d'en haut, quand elles sont cohérentes et intelligentes, ça va, sinon, on fait ce qu'on veut."
Comment cela va-t-il se passer concrètement ? Il y a ce projet d'Alternance 2002 avec une rencontre de parlementaires aujourd'hui' ; il y aura une convention la semaine prochaine. Est-ce que les appareils de partis vont fusionner ? Que vont-ils faire ensemble pour montrer cette union, parce qu'elle n'est pas évidente à voir ?
- "Je serais tenté de paraphraser le titre d'un film : "les partis font de la résistance" - les papys font de la résistance. Il est vrai que les partis politiques sont indispensables à la vie politique d'un pays, nous sommes tous issus de formations politiques et sur le terrain, ce sont les militants politiques qui font les campagnes. Il n'en demeure pas moins que cette permanente course à l'échalotte - qui donne quelquefois davantage le sentiment d'accompagner des carrières personnelles, des ambitions -, ne correspond pas à ce que nous voulons. Par ailleurs, la France est le seul pays à avoir plusieurs formations pour représenter la droite libérale. Je préside un groupe à l'Assemblée et je vois mes collègues des autres groupes. Il y a, dans les trois groupes des libéraux, des conservateurs et des centristes. Mais qu'est-ce qu'on attend pour mettre tout le monde ensemble, pour travailler ensemble avec des courants organisés ? Parce que nos familles ont besoin de s'exprimer, elles ont leur sensibilité, des messages particuliers à faire passer. Il faut que ça aille dans ce sens, et d'ailleurs je suis persuadé que la base le dira."
Si cette union se fait, pensez-vous que cela permettra de gagner les élections législatives, quel que soit le calendrier ?
- "Il faut déconnecter la présidentielle et les législatives. La présidentielle est une aventure personnelle, c'est un défi individuel ; les législatives, c'est une victoire collective de l'ensemble des partis qui défendent une vision commune de la société. Il faut donc essayer de déconnecter cela. En revanche, autant vous me voyez heureux du résultat des municipales, autant je ne veux pas faire de triomphalisme. Il faut être modeste : est-ce que les recettes que nous avons pu appliquer localement, sur le terrain, au plus près de la vie des gens, nous allons pouvoir les transférer et gagner au niveau national ? C'est autre affaire et c'est tout le souci qui est le nôtre aujourd'hui."
(Source http://sig.premier-ministre.gouv.fr, le 28 mars 2001)