Interview de Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire générale de l'UDF, à RTL le 4 avril 2001, sur la modification du calendrier électoral, sa position sur le mouvement d'union de la droite, Alternance 2002, les candidatures à l'élection présidentielle et sur les mouvements sociaux.

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Média : Emission L'Invité de RTL - RTL

Texte intégral

R. Arzt Hier soir, l'Assemblée nationale s'est prononcée une deuxième et avant dernière fois sur le calendrier électoral de 2002 - on rappelle qu'il s'agit de reporter de 3 mois les législatives l'an prochain afin qu'elles aient lieu après la présidentielle. Ont voté avec les socialistes 27 députés de l'UDF, soit deux de plus qu'en décembre dernier.
- "L'important ce n'est pas ces comptes d'apothicaire mais la logique des institutions. Si le Président de la République est élu au suffrage universel de tous les Français depuis 1962, ce n'est pas pour qu'il serve de troisième tour ou de voiture balai aux législatives. Tout le monde sait - on l'apprend en cours d'instruction civique - que les députés sont élus pour 5 ans. Eh bien nous avons été élus en juin et les élections auront lieu en juin. C'est maintenant chose faite."
Ce débat est moins passionnel qu'il y a trois mois. A l'époque, on sentait que le RPR menaçait de représailles les députés UDF pour leur vote, c'est fini ?
- "Je n'ai pas entendu parler de choses pareilles. Les municipales sont passées, nous avons gagné beaucoup de villes et c'est tant mieux."
Cela apaise ?
- "Sans doute."
Le RPR estime que c'est le Conseil constitutionnel qui bloquera ce changement de calendrier.
- "C'est sans doute la raison pour laquelle il y avait si peu de députés contre lors de la séance d'hier soir. Je crois que le Conseil constitutionnel, comme beaucoup de constitutionnalistes, jugera que l'esprit de la Vème République est celui qui a été voté hier. Bien entendu, c'est à lui qu'appartiendra le dernier mot puisqu'un certain nombre de députés de l'opposition jugeront bon de le saisir."
Vous ne serez pas à la convention constitutive d'Alternance 2002 aujourd'hui ?
- "Non, je ne pense pas y aller. D'ailleurs, je ne pense pas qu'il y ait lieu d'en faire tout un plat. S'il s'agissait de réparer les morceaux de la droite en ruines - comme on nous l'avait dit -, elle n'est pas en ruines, elle a gagné les municipales. S'il s'agit de dire que les députés sortants veulent être réélus, ce n'est pas la peine de faire une grande convention, on peut faire un communiqué. Moi, j'ai une autre ambition qui est qu'on ait davantage de députés que de sortants parce que sinon cela voudrait dire qu'on aurait encore perdu - comme en 1997 - et les revenants qu'on voit arriver ne sont pas forcément les plus attractifs... Autre chose : j'ai l'impression que cette opération "Alternance 2002" - qui va d'ailleurs changer une nouvelle fois de nom - est le club des personnes qui, très légitimement, pensent que J. Chirac est le meilleur candidat à l'élection présidentielle au premier tour."
Ce qui n'est pas votre cas ?
- "Il faut qu'il y ait une ouverture, un renouvellement, un choix. Nous sommes des libéraux, il n'y a pas de monopole de candidature. C'est d'ailleurs l'avis des amis de J. Chirac eux-mêmes. Je crois donc qu'il y a autre chose derrière cette opération, à savoir le soutien à J. Chirac au premier tour. Pourquoi pas, c'est légitime. Pour ma part, je crois que le second tour permettra à celui que sera arrivé en tête de faire le meilleur choix."
L. Jospin indique dans un entretien donné à un groupe de quotidiens de presse régionale qu'il n'est pas décidé à être candidat à la présidentielle, qu'il peut ne pas l'être. Pour F. Bayrou, c'est différent : il a décidé d'être candidat à la présidentielle.
- "F. Bayrou n'a pas fait acte de candidature. Notre congrès d'Angers a adopté une résolution qui, indépendamment de l'affaire du calendrier dont nous venons de parler, émettait le souhait qu'un candidat puisse porter les idées libérales, sociales, européennes, décentralisatrices de l'UDF."
Ce sera lui !
- "Ce sera lui. Aujourd'hui, il n'a pas déclaré sa candidature qui se fera au moment où il l'aura décidé et devant tous les Français."
A quel rythme ? On le saura très vite ?
- "Notre prochaine étape est un conseil national que nous réunissons le 28 avril et au cours duquel nous parlerons par exemple de politique agricole commune ; il faut en effectivement sortir de la politique de l'autruche et avancer vers une modernisation de la PAC sans attendre 2006. Nous parlerons d'environnement et également de vieillissement et de la santé. Nous progressons donc sur les sujets qui intéressent véritablement les gens."
Vous avez été secrétaire d'Etat aux Transports dans les gouvernements Juppé. La grève de la SNCF n'en finit pas, même quand les syndicats traditionnels ne la préconisent pas. Au point où on en est, la solution est d'accorder des hausses de salaire, de procéder à des embauches de personnels.
- "J'ai été très choquée par la manière dont le Gouvernement répond à l'exaspération des usagers des transports en commun. Ce sont toujours les mêmes qui trinquent. En Ile-de-France, en particulier - je suis députée d'Ile-de-France et mon secteur est desservi par la gare Saint-Lazare ou par la ligne C du RER - c'est vraiment effrayant pour les gens ! Ils sont pris en otages de manière incertaine. Et pourquoi ? parce que dans les assemblées générales, la veille au soir, quelques personnes à la main levée décident ou pas de reconduire."
En quoi le Gouvernement est-il critiquable là dedans ?
- "Parce qu'il dit que tout va bien, on l'a entendu texto hier après-midi à l'Assemblée nationale. Il donne comme signal qu'il faut des embauches, davantage de moyens pour la SNCF."
Vous n'êtes pas d'accord ?
- "Je crois que ce n'est pas un bon signal dans l'équilibre entre le respect du service public et le droit de grève et le respect du droit des gens à aller et venir et à aller travailler."
Que serait le bon signal ? La fermeté ?
- "Le bon signal serait de rappeler sur la question du service minimum ou du service essentiel, ce que Gouvernement se refuse absolument à faire comme on l'a entendu réitérer hier après-midi dans nos questions à l'Assemblée nationale."
Quels commentaires fait-on à l'UDF sur les licenciements chez Danone ou Marks Spencer ?
- "Je ferais d'abord remarquer pour Marks Spencer que c'est largement le résultat de ce que la Grande-Bretagne n'est pas dans l'euro ; ceci peut faire réfléchir. Il y a bien entendu les questions des procédures à respecter mais je dois dire que je suis un peu étonnée quand j'entends dire que certaines municipalités de gauche - certainement pour aider les salariés de Danone - envisagent de ne plus acheter de yaourts pour les cantines de leurs communes."
Vous n'êtes pas pour le boycott des produits Danone ?
- "Cela ne me parait être le meilleur moyen d'assurer des situations financières qui permettent à ce type d'entreprise de maintenir l'emploi."
C'est une forme de solidarité avec les personnels - c'est comme cela que c'est présenté.
- "C'est comme cela que c'est présenté, mais ça me parait largement être à côté de la plaque, à côté de la réalité, même si cela peut peut-être apporter un élan médiatique aux promoteurs de ce genre de choses. Sérieusement, ce n'est pas en se mettant en dehors des circuits de l'économie que l'on peut résoudre ce genre de choses. Deuxième élément européen qui me frappe et qui concerne certaines de ces entreprises, c'est que même s'il faut se réjouir de voir enfin émerger ce qu'on appelle un "statut de la société européenne", qu'on attendait depuis 10 ans et qui vient de progresser récemment, manifestement, il n'est pas encore tout à fait au point pour ce qui concerne les procédures sociales et le respect des règles d'information des salariés."
(Source http://sig.premier-ministre.gouv.fr, le 4 avril 2001)