Texte intégral
P. Lapousterle Quelques mots sur le duel qui était attendu entre P. Séguin et B. Delanoë : étincelant ou un peu laborieux ?
- "Ni l'un ni l'autre."
J'avais choisi exprès les deux extrêmes.
- "C'était exagéré. Supériorité quand même nette de P. Séguin qui a plus de charisme, plus de présence, plus de puissance et qui est quand même plus représentatif pour être maire d'une grande ville que Delanoë qui paraît fragile."
Pour être maire d'une grande ville, il faut être représentatif ou il faut régler les problèmes des habitants de la ville ?
- "Je suis convaincu que P. Séguin est tout à fait capable de cela, il l'a prouvé à Epinal. Delanoë ne l'a jamais démontré. Au contraire, il est dans une opposition stérile depuis de très longues années. Là, il avait appris par coeur quelques phrases. M. Vaillant d'ailleurs avait vendu la mèche en disant que M. Delanoë avait été très soigneusement préparé pour cette émission. On n'a pas besoin de quelqu'un de préparé, on a besoin de quelqu'un qui a de la classe. De ce point de vue-là, M. Delanoë a plutôt les épaules étroites."
A propos de préparation, M. Séguin lisait ses notes.
- "Oui, parce qu'il y a des chiffres. C'est plutôt honnête de dire qu'on ne sait pas les chiffres par coeur et qu'ils sont posés sur papier."
Ce duel était annoncé comme le grand moment de la campagne avant le premier tour. Est-ce que son résultat - le résultat que vous y voyez - est de nature à inverser la tendance indiquée par les sondages, qui donne pour le moment B. Delanoë vainqueur ?
- "Je ne crois pas beaucoup à l'extrême des sondages. Je ne crois pas que la situation soit si désespérée qu'on nous le lancine, comme une véritable campagne de découragement d'ailleurs qui est faite, et dont finalement les sondages sont un élément. J'ai d'ailleurs remarqué qu'ils ont commencé à corriger le tir. Le sondage est un commerce. Il faut qu'il soit spectaculaire, il est spectaculaire dans la catastrophe. Mais je remarque que plus on arrive près de l'échéance, plus les sondages deviennent optimistes. Je remarque que tous les soirs d'élections, on dit " il y a une chose sur laquelle tout le monde est d'accord : les sondages se sont bien trompés." Et puis trois heures, après on recommence à y croire. Je ne suis pas aussi jobard que ça."
Franchement, vous pensez que P. Séguin peut gagner la bataille de Paris. ?
- "Je ne sais pas. La situation est effectivement difficile du fait du maintien et de l'acharnement de J. Tiberi qui tire contre son camp à boulets rouges. C'est naturellement une situation difficile pour P. Séguin. Mais en même temps, il a la carrure de l'emploi. Dans cette émission, on a vu qu'il avait de la classe. Il avait su tenir tête à F. Mitterrand. Il n'a fait qu'une bouchée de Delanoë."
P. Séguin, candidat de votre parti, avait un peu de mal quand même à parler comme un candidat de rupture. C'était un moment difficile pour lui ?
- "Bien sûr. Il vient du RPR, il est au RPR comme le maire sortant. C'est une petite difficulté."
Les électeurs ont peut-être du mal à l'admettre ?
- "En même temps, nous avons choisi un autre candidat parce que nous considérions que J. Tiberi n'avait pas la capacité de convaincre, de mobiliser autour de lui. Finalement, Tiberi-Delanoë, c'était un combat du même niveau. Nous avons voulu avoir un challenger qui soit au niveau supérieur, c'était Séguin."
N'est-ce pas un gros échec pour votre parti, le RPR, de n'avoir pas réussi à convaincre M. Tiberi de s'effacer ? Je vous rappelle que M. Alliot-Marie l'avait promis.
- "On a essayé. On ne peut pas obliger quelqu'un à faire ce qu'il ne veut pas faire. On a peut-être eu tort de croire J. Tiberi qui avait dit qu'il ne ferait pas perdre son camp. On voit qu'il fait tout ce qu'il peut pour le faire perdre. Il est un petit peu dans l'esprit : "Après moi le déluge. Puisque vous ne voulez pas de moi, je vais vous entraîner dans ma chute." Tel est son état d'esprit et évidemment, c'est très difficile à remonter."
Pour l'entre-deux tours, en entend des discours assez différents dans votre propre parti sur la conduite qu'il faudrait tenir. Faut-il faire des listes d'union dans toute la droite à Paris avec les partisans de M. Tiberi ou bien prendre le risque de la division, risque dont vous venez de souligner la difficulté ?
- "Je pense qu'il est vraiment trop tôt pour faire des pronostics là-dessus, pour la simple raison que le deuxième tour se passe, si j'ose dire, entre les survivants. Il va y avoir un grand nombre de gens qui vont être mis au tapis par le corps électoral et le débat aura lieu entre les survivants. Aujourd'hui, vouloir supputer ce qu'on fera avec des gens qui sans doute ne seront plus là pour l'essentiel..."
Tous ensemble pour essayer de gagner ?
- "On verra qui sera survivant, parce que je crois au vote utile. Bien entendu, aujourd'hui les Parisiens dispersent un peu leurs voix, en particulier dans l'opposition où ils ne se mobilisent pas parce qu'on leur a expliqué qu'on vivait un psychodrame terrible. Ils ont plutôt envie de rester à la maison. Mais plus on approche du scrutin, plus ils se mobilisent et plus ils ont le sentiment qu'il faut voter utile. S'ils votent utile, ils voteront pour Séguin quand ils sont dans l'opposition. Dès lors, il n'y aura peut-être pas tant de gens que ça entre les deux tours pour pouvoir discuter du deuxième."
Si Paris votait à gauche et plus encore Lyon, que doit faire l'opposition le lendemain matin vis-à-vis de ses électeurs ?
- "Elle doit engager les deux choses que son électorat attend d'elle. Premièrement, une union crédible et non pas une union de façade avec simplement des sigles qui ne changent rien à la structure."
Une union du genre fusion ?
- "Une union profonde, peu importe les modalités - je ne vais pas entrer dans une querelle métaphysique là-dessus. Deuxièmement, une rénovation importante de son personnel - ce qui est assez difficile car il faut des gens expérimentés et de qualité- et de son discours pour que son discours soit crédible."
Quel programme ! C'est long !
- "Pas nécessairement. Nous avons déjà tout cela, mais nous n'avons pas su sans doute le mettre le scène. Nous avons des tas d'idées que nous avons mises en oeuvre et fait sortir dans plusieurs réunions, dans plusieurs colloques. Seulement, nous n'avons pas su les présenter parce que nous n'étions pas capables de tenir un discours d'ensemble, un discours cohérent."
Vous pensez que c'est possible dans un mois ?
- "Je l'espère. Mais si nous avions une défaite, elle créerait naturellement un choc. Encore qu'il ne faudra pas toujours être obnubilé par Paris. Il faut regarder les choses à l'échelon de la France. Bien entendu, psychologiquement, si Tiberi nous faisait perdre Paris - mais je compte sur Séguin pour essayer de lutter contre cela -, cela aurait mauvais effet. Mais sur le reste du pays, nous pouvons avoir de très bons résultats."
Une dernière question sur l'emploi et le chômage. Toute la presse titre ce matin "1 million de chômeurs en moins depuis l'arrivée de L. Jospin." Franchement, ce n'est pas une mauvaise nouvelle ?
- "A part Les Echos, cette presse est bien peu professionnelle, parce que ce chiffre ne vaut qu'à titre de comparaison avec les autres pays de l'Union européenne. Or, dans la zone euro, nous sommes avant l'avant-dernier. Il n'y a que l'Italie et l'Espagne qui fassent plus mal que nous : nous sommes tout juste dans la moyenne européenne. Ce n'est pas un exploit. La croissance a été bonne pour toute l'Europe, pour tout le monde développé."
J'en connais qui on eu des bilans moins bons...
- "Le bilan mondial était aussi moins bon. Nous avions les années de vaches maigres, eux ont les années de vaches grasses. C'est évidemment facile d'avoir de bons résultats dans de telles conditions. Par contre, la conjoncture est en train de se retourner aujourd'hui - on le voit aux Etats-Unis. J'ai peur, parce qu'elle n'a pas pris les précautions pour cela, parce qu'elle a fait la cigale, que la France soit fort désarmée devant les coups qui nous menacent désormais."
(Source http://sig.premier-ministre.gouv.fr, le 1 mars 2001)
- "Ni l'un ni l'autre."
J'avais choisi exprès les deux extrêmes.
- "C'était exagéré. Supériorité quand même nette de P. Séguin qui a plus de charisme, plus de présence, plus de puissance et qui est quand même plus représentatif pour être maire d'une grande ville que Delanoë qui paraît fragile."
Pour être maire d'une grande ville, il faut être représentatif ou il faut régler les problèmes des habitants de la ville ?
- "Je suis convaincu que P. Séguin est tout à fait capable de cela, il l'a prouvé à Epinal. Delanoë ne l'a jamais démontré. Au contraire, il est dans une opposition stérile depuis de très longues années. Là, il avait appris par coeur quelques phrases. M. Vaillant d'ailleurs avait vendu la mèche en disant que M. Delanoë avait été très soigneusement préparé pour cette émission. On n'a pas besoin de quelqu'un de préparé, on a besoin de quelqu'un qui a de la classe. De ce point de vue-là, M. Delanoë a plutôt les épaules étroites."
A propos de préparation, M. Séguin lisait ses notes.
- "Oui, parce qu'il y a des chiffres. C'est plutôt honnête de dire qu'on ne sait pas les chiffres par coeur et qu'ils sont posés sur papier."
Ce duel était annoncé comme le grand moment de la campagne avant le premier tour. Est-ce que son résultat - le résultat que vous y voyez - est de nature à inverser la tendance indiquée par les sondages, qui donne pour le moment B. Delanoë vainqueur ?
- "Je ne crois pas beaucoup à l'extrême des sondages. Je ne crois pas que la situation soit si désespérée qu'on nous le lancine, comme une véritable campagne de découragement d'ailleurs qui est faite, et dont finalement les sondages sont un élément. J'ai d'ailleurs remarqué qu'ils ont commencé à corriger le tir. Le sondage est un commerce. Il faut qu'il soit spectaculaire, il est spectaculaire dans la catastrophe. Mais je remarque que plus on arrive près de l'échéance, plus les sondages deviennent optimistes. Je remarque que tous les soirs d'élections, on dit " il y a une chose sur laquelle tout le monde est d'accord : les sondages se sont bien trompés." Et puis trois heures, après on recommence à y croire. Je ne suis pas aussi jobard que ça."
Franchement, vous pensez que P. Séguin peut gagner la bataille de Paris. ?
- "Je ne sais pas. La situation est effectivement difficile du fait du maintien et de l'acharnement de J. Tiberi qui tire contre son camp à boulets rouges. C'est naturellement une situation difficile pour P. Séguin. Mais en même temps, il a la carrure de l'emploi. Dans cette émission, on a vu qu'il avait de la classe. Il avait su tenir tête à F. Mitterrand. Il n'a fait qu'une bouchée de Delanoë."
P. Séguin, candidat de votre parti, avait un peu de mal quand même à parler comme un candidat de rupture. C'était un moment difficile pour lui ?
- "Bien sûr. Il vient du RPR, il est au RPR comme le maire sortant. C'est une petite difficulté."
Les électeurs ont peut-être du mal à l'admettre ?
- "En même temps, nous avons choisi un autre candidat parce que nous considérions que J. Tiberi n'avait pas la capacité de convaincre, de mobiliser autour de lui. Finalement, Tiberi-Delanoë, c'était un combat du même niveau. Nous avons voulu avoir un challenger qui soit au niveau supérieur, c'était Séguin."
N'est-ce pas un gros échec pour votre parti, le RPR, de n'avoir pas réussi à convaincre M. Tiberi de s'effacer ? Je vous rappelle que M. Alliot-Marie l'avait promis.
- "On a essayé. On ne peut pas obliger quelqu'un à faire ce qu'il ne veut pas faire. On a peut-être eu tort de croire J. Tiberi qui avait dit qu'il ne ferait pas perdre son camp. On voit qu'il fait tout ce qu'il peut pour le faire perdre. Il est un petit peu dans l'esprit : "Après moi le déluge. Puisque vous ne voulez pas de moi, je vais vous entraîner dans ma chute." Tel est son état d'esprit et évidemment, c'est très difficile à remonter."
Pour l'entre-deux tours, en entend des discours assez différents dans votre propre parti sur la conduite qu'il faudrait tenir. Faut-il faire des listes d'union dans toute la droite à Paris avec les partisans de M. Tiberi ou bien prendre le risque de la division, risque dont vous venez de souligner la difficulté ?
- "Je pense qu'il est vraiment trop tôt pour faire des pronostics là-dessus, pour la simple raison que le deuxième tour se passe, si j'ose dire, entre les survivants. Il va y avoir un grand nombre de gens qui vont être mis au tapis par le corps électoral et le débat aura lieu entre les survivants. Aujourd'hui, vouloir supputer ce qu'on fera avec des gens qui sans doute ne seront plus là pour l'essentiel..."
Tous ensemble pour essayer de gagner ?
- "On verra qui sera survivant, parce que je crois au vote utile. Bien entendu, aujourd'hui les Parisiens dispersent un peu leurs voix, en particulier dans l'opposition où ils ne se mobilisent pas parce qu'on leur a expliqué qu'on vivait un psychodrame terrible. Ils ont plutôt envie de rester à la maison. Mais plus on approche du scrutin, plus ils se mobilisent et plus ils ont le sentiment qu'il faut voter utile. S'ils votent utile, ils voteront pour Séguin quand ils sont dans l'opposition. Dès lors, il n'y aura peut-être pas tant de gens que ça entre les deux tours pour pouvoir discuter du deuxième."
Si Paris votait à gauche et plus encore Lyon, que doit faire l'opposition le lendemain matin vis-à-vis de ses électeurs ?
- "Elle doit engager les deux choses que son électorat attend d'elle. Premièrement, une union crédible et non pas une union de façade avec simplement des sigles qui ne changent rien à la structure."
Une union du genre fusion ?
- "Une union profonde, peu importe les modalités - je ne vais pas entrer dans une querelle métaphysique là-dessus. Deuxièmement, une rénovation importante de son personnel - ce qui est assez difficile car il faut des gens expérimentés et de qualité- et de son discours pour que son discours soit crédible."
Quel programme ! C'est long !
- "Pas nécessairement. Nous avons déjà tout cela, mais nous n'avons pas su sans doute le mettre le scène. Nous avons des tas d'idées que nous avons mises en oeuvre et fait sortir dans plusieurs réunions, dans plusieurs colloques. Seulement, nous n'avons pas su les présenter parce que nous n'étions pas capables de tenir un discours d'ensemble, un discours cohérent."
Vous pensez que c'est possible dans un mois ?
- "Je l'espère. Mais si nous avions une défaite, elle créerait naturellement un choc. Encore qu'il ne faudra pas toujours être obnubilé par Paris. Il faut regarder les choses à l'échelon de la France. Bien entendu, psychologiquement, si Tiberi nous faisait perdre Paris - mais je compte sur Séguin pour essayer de lutter contre cela -, cela aurait mauvais effet. Mais sur le reste du pays, nous pouvons avoir de très bons résultats."
Une dernière question sur l'emploi et le chômage. Toute la presse titre ce matin "1 million de chômeurs en moins depuis l'arrivée de L. Jospin." Franchement, ce n'est pas une mauvaise nouvelle ?
- "A part Les Echos, cette presse est bien peu professionnelle, parce que ce chiffre ne vaut qu'à titre de comparaison avec les autres pays de l'Union européenne. Or, dans la zone euro, nous sommes avant l'avant-dernier. Il n'y a que l'Italie et l'Espagne qui fassent plus mal que nous : nous sommes tout juste dans la moyenne européenne. Ce n'est pas un exploit. La croissance a été bonne pour toute l'Europe, pour tout le monde développé."
J'en connais qui on eu des bilans moins bons...
- "Le bilan mondial était aussi moins bon. Nous avions les années de vaches maigres, eux ont les années de vaches grasses. C'est évidemment facile d'avoir de bons résultats dans de telles conditions. Par contre, la conjoncture est en train de se retourner aujourd'hui - on le voit aux Etats-Unis. J'ai peur, parce qu'elle n'a pas pris les précautions pour cela, parce qu'elle a fait la cigale, que la France soit fort désarmée devant les coups qui nous menacent désormais."
(Source http://sig.premier-ministre.gouv.fr, le 1 mars 2001)