Déclaration de M. François Fillon, Premier ministre, en réponse à une question sur l'aggravation de la crise financière en Europe et sur la stratégie du gouvernement pour un soutien au système bancaire, à l'Assemblée nationale le 7 octobre 2008.

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Texte intégral

Monsieur le président,
Mesdames et Messieurs les députés,
Monsieur le président du groupe socialiste,
Vous avez raison de souligner que depuis une semaine, la crise s'est aggravée en Europe. Nous avons connu depuis notre dernière réunion, mardi dernier, une crise sérieuse en Irlande où six établissements bancaires étaient menacés de faillite et qui ont conduit l'Irlande à prendre les mesures que l'on sait. Nous avons connu une nouvelle difficulté dans la plus grande banque allemande finançant l'immobilier, et on peut le dire, dans la plus grande banque européenne finançant l'immobilier. Nous avons connu des difficultés dans le système bancaire islandais, qui a entraîné des conséquences sur le Danemark, et qui a conduit le Danemark à prendre des décisions. Nous avons enregistré de nouvelles difficultés dans le système bancaire britannique, avec en particulier la perte brutale de valeur de la Bank of Scotland. Et enfin, nous avons connu dans le Benelux les deux difficultés de Fortis et de Dexia.
Dans ce contexte, la stratégie que le président de la République et le Gouvernement ont décidé d'adopter est une stratégie simple et efficace : nous avons décidé de garantir complètement la continuité du système bancaire français. J'entends qu'il y a un débat sur la question de savoir à quel niveau il faut porter la garantie des déposants. Et d'ailleurs, le Conseil des ministres des Finances de l'Union européenne, qui était réuni ce matin, a décidé d'élever ce niveau de garantie et de l'harmoniser dans toute l'Europe. Mais nous, nous disons que la garantie elle est à 100 %, puisque nous prenons l'engagement solennel qu'il n'y aura pas de faillite d'établissement bancaire en France, parce que l'Etat fera son devoir, si une banque est mise en difficulté.
Cette solution, elle consistera, au cas où une banque serait en difficulté, à en prendre le contrôle, à démettre les dirigeants qui n'ont pas réussi, à les remplacer par des dirigeants qui auraient toute la confiance du Gouvernement à redresser cet établissement bancaire et à remettre les participations de l'Etat sur le marché lorsque les circonstances le permettront. Cette solution est bien préférable à celle d'une garantie générale des déposants, parce qu'elle ne conduit pas à garantir les pertes des banques, mais elle conduit au contraire à empêcher la faillite d'établissements bancaires qui entraînerait la faillite par dominos interposés de l'ensemble de notre dispositif.
Cet engagement, mesdames et messieurs les députés, ce ne sont pas des mots puisque nous avons commencé à le mettre en oeuvre lorsque nous avons décidé de prendre une participation avec une minorité de blocage dans Dexia. Pourquoi avons-nous décidé de monter dans le capital de Dexia et de prendre une majorité de blocage ? Parce que c'était la seule façon d'obtenir un changement des dirigeants de cette banque, qui a été obtenu cette nuit et, comme vous le savez, c'est désormais un Français, Pierre Mariani, qui dirigera Dexia et qui, avec le Gouvernement français et le Gouvernement belge, conduira le redressement de cet établissement bancaire.
Voilà, mesdames et messieurs, quelle est la stratégie que le Gouvernement français a décidé de suivre. Pourquoi nous n'avons pas défendu l'idée d'un fonds européen ? Simplement, parce que nous avons pu mesurer à quel point il était nécessaire de réagir immédiatement à tout risque de défaillance bancaire. Lorsqu'il s'est agi de sauver Dexia, la décision a été prise entre 4h50 et 7h30 le matin. Croyez-vous qu'avec un fonds européen, à 27, on pourrait prendre des décisions dans ces conditions ?
Alors, monsieur Ayrault, le président de la République et moi-même, nous écoutons tous les conseils qui nous sont donnés. Cette crise est une crise grave et tous les avis, d'où qu'ils viennent, sont bons à prendre. Ce que je demande, une nouvelle fois, c'est que notre pays fasse preuve d'unité, parce que les déposants français, les entreprises françaises ont besoin de retrouver la confiance dans le système bancaire français, et il n'y a pas de meilleur moyen d'assurer cette confiance que celle qui consiste à montrer que tous les responsables politiques soutiennent la stratégie que nous avons mise en oeuvre.
Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 8 octobre 2008